Les autorités envisagent d’accueillir à Font-Vert les familles roms du squat de Cazemajou

Actualité
le 15 Sep 2021
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Les entrepôts occupés par des familles depuis plusieurs années rue Cazemajou doivent être prochainement évacués pour permettre les travaux du futur tramway. Pour les reloger l'État envisage d'installer un petit village d'habitat modulaire sur un terrain situé en contrebas de la cité du 14e arrondissement.

Le terrain envisagé se trouve entre deux voies ferrées, en contrebas de la cité Font-Vert. (Capture Google Maps)
Le terrain envisagé se trouve entre deux voies ferrées, en contrebas de la cité Font-Vert. (Capture Google Maps)

Le terrain envisagé se trouve entre deux voies ferrées, en contrebas de la cité Font-Vert. (Capture Google Maps)

“Autorités publiques cherchent un ou plusieurs terrains, proches toutes commodités, pour loger 200 personnes, libre de suite”. La petite annonce n’a pas été diffusée, mais dans l’esprit, c’est bien une recherche immobilière de ce type qui occupe actuellement les services de l’État, associés à ceux de la métropole et de la Ville de Marseille.

Occupés depuis plusieurs années par des familles roms, les entrepôts situés rue Cazemajou, dans le 15e arrondissement, doivent être démolis sous peu pour préparer le passage du tramway vers la station Gèze. En préalable à la démolition de ces bâtiments appartenant à l’Établissement public foncier PACA (EPF), des lieux de relogement doivent pouvoir être proposés aux occupants actuels qui seraient à peu près 200. En effet, depuis 2018, une instruction interministérielle encadre plus fermement qu’auparavant la nécessité d’accompagner les populations vivant en bidonvilles en cas d’évacuation pour éviter de remettre à la rue des familles qui créeront immanquablement de nouveaux squats.

Solution privilégiée à ce stade : la création d’un petit “village” d’habitat modulable sous forme de conteneurs aménagés, comme cela a déjà été créé pour les femmes victimes de violence début 2021, sous l’égide d’une association mandatée par la préfecture. “La situation du logement est tellement tendue niveau logement qu’on ne peut pas loger 300 personnes d’un coup, explique Caroline Godard, pour l’association Rencontres tsiganes. Il faut de l’habitat intermédiaire. Ce qui est proposé aujourd’hui est une solution plutôt décente si cela permet de continuer à accompagner les familles”. 

L’option d’un terrain à Font-Vert

Depuis plusieurs mois, les réunions en préfecture se multiplient pour faire aboutir ce grand déménagement. Sauf que les discussions butent depuis plusieurs semaines sur la question du terrain. “À ce sujet-là, nous ne sommes pas tenus au courant, reconnaît la militante qui suit les familles de Cazemajou depuis des années. Même si on se doute bien que ce sera dans les 13, 14 ou 15e, où il y a plus de terrains libres. Et on se doute qu’il y a des résistances du côté des élus locaux”. 

En effet, après des mois de préparation du projet dans la discrétion, de premières fuites ont eu lieu concernant un lieu d’implantation envisagé : un terrain situé entre la cité de Font-Vert et Saint-Barthélémy, dans le 14e arrondissement. Une parcelle appartenant à la SNCF où se situait auparavant un stade, entre deux voies ferrées. Un choix complètement inadapté aux yeux de Denis Rossi, vice-président du conseil de territoire chargé de la politique de la Ville et conseiller d’arrondissement de ce secteur, élu sur les listes de Martine Vassal (LR).

À Cazemajou les conditions sont immondes, mais les mettre entre Saint-Barthélémy et Font-Vert, ça va créer des drames.

Denis Rossi, élu métropolitain

“À Cazemajou les conditions sont immondes, mais les mettre entre Saint-Barthélémy et Font-Vert, ça va créer des drames. Cela me paraît être un gros risque tant pour les familles que pour les habitants actuels”, estime l’élu qui pointe le réseau de stupéfiants très actif dans la cité, la situation enclavée de la parcelle, mais aussi l’état des écoles du quartier. “On est dans un quartier où les habitants ont bloqué l’école à plusieurs reprises à cause de son état. Celle de Saint-Barthélémy est dans le même état. Et on va ajouter des familles ? L’existant est déjà surpeuplé avec des conditions infâmes”, pointe-t-il, avec un argument bien connu : “on ne va pas concentrer la misère”. 

La crainte des “levées de boucliers”

Sollicitées, la Ville de Marseille et la préfecture n’ont pas souhaité commenter un projet “en cours”. “On ne va pas alerter les populations alors que rien n’est arrêté”, glisse-t-on à Marsactu. “La métropole voudrait que ce soit fait le plus rapidement possible”, afin de pouvoir sécuriser les travaux du tram, confiait récemment une élue qui n’a pas souhaité commenter la question de l’implantation. Selon Denis Rossi qui a participé à une réunion à ce sujet au début de l’été, État et mairie seraient en tout cas favorables à l’installation à Font-Vert.

Les associations craignent forcément de voir se rejouer les tensions survenues par le passé dans les quartiers Nord en 2009, puis en 2013 lors d’autres tentatives d’installations de familles roms par les collectivités. “Le projet n’est pas encore lancé qu’il y a déjà des levées de boucliers”, souffle Caroline Godard pour qui Font-Vert n’est pas forcément le lieu idéal. Elle rejoint cependant Denis Rossi sur un point : la meilleure option serait de répartir les habitants actuels sur plusieurs sites plutôt qu’un.

En attendant, les familles de Cazemajou vivent dans l’attente d’un déménagement dont elles ignorent tout. “Elles ne comprennent pas pourquoi ça prend autant de temps et beaucoup ont déjà quitté les lieux vers d’autres squats par peur d’une expulsion”, regrette la représentante associative. Certains auraient d’ailleurs repris la route d’un terrain à la Parette (10e) où un grand camp avait été évacué en 2014“La métropole avait voulu le récupérer pour un projet urgent, mais aujourd’hui il n’y a toujours rien. Ça pourrait pourtant être très adapté, il y a le tram à côté, le voisinage n’est pas un souci, il y a des écoles à proximité…”, liste Caroline Godard. Reste à savoir si l’optique de faire avancer les travaux du tramway vers le nord pourrait convaincre la métropole d’accueillir les Roms sur son terrain à la Parette.

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Commentaires

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  1. LN LN

    Si le tramway n’était pas destiné à passer là, se serait on inquiété du sort de ces familles qui vivent pourtant dans des conditions effroyables à 2 pas du chantier Euromed ?
    Il y d’immenses terrains disponibles de part et d’autre du B.U.S. Faudrait voir avec RoyerP 🤣

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    • BRASILIA8 BRASILIA8

      tous les terrains hors emprise du BUS ont été vendus depuis longtemps par Gaudin et sont bâtis
      et je serais for étonné que les habitants qui déjà refuse le BUS accepte l’installation d’un tel village surtout s’il faut couper les arbres de “leur” poumon vert

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    • LN LN

      Entre Florian et ste Marguerite il n’y a pas un arbre, c’est cramé.
      Je ne sais pas si les habitants des quartiers sont d’accord pour une énième implantation chez eux. La concentration de pauvreté est énorme. Je suis plutôt pour la dissemination dans toute la ville. La fracture Nord Sud a de beaux jours devant elle…

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  2. GENIA GENIA

    Nul n’ignore les effets néfastes de concentrations et regroupements de ces populations arrivées surtout après l’ouverture de l’Europe aux pays de l’est ! Comme si les quartiers Nord n’avaient déjà pas assez de nuisances et de problèmes à résoudre avec ses populations d’origine déjà en place !
    Pourquoi n’a t-on pas envisagé l’aide au retour au pays d’origine ?
    Il me semble que la CEE finance pourtant massivement sur place…

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  3. Neomarseillais Neomarseillais

    J’espère qu’ils sont réellement scolarisés… Cet été des enfants de la communauté rom faisaient la manche au carrefour de Frais Vallon sous la L2 mais ça ça ne gêne personne… Qui paie la facture ? Faudrait aussi leur demander de respecter ce qui va leur être confié… mais je sais que ce que j’écris est très choquant, j’en ai conscience et m’en excuse.

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  4. LOU GABIAN LOU GABIAN

    N’oubliez jamais qu’ avant les roms il y avait des entreprises qui ont été expulsés, avant d’offrir les locaux aux rom avec eau courante et électricité

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  5. Neomarseillais Neomarseillais

    Et pas d’internet ? C’est dégueulasse

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    • Fougère Fougère

      Bonjour, merci pour ce lien : je viens de lire cet article qui effectivement attire l’attention sur une situation à mon sens représentative de la fracture sociale française, laquelle est, géographiquement, fortement perceptible à Marseille. Je prendrais M. Rossi au mot : favorisons la mixité sociale en brisant cette fracture, autrement dit en proposant un relogement décent, non ghettoïsé, aux gens du Voyage. Bref, luttons contre une gentrification de Marseille qui risque d’accentuer cette fracture. Chiche, M. Rossi ! A tout le moins, le second espace de relogement dont parle l’article me paraît bien préférable au premier.

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  6. BRASILIA8 BRASILIA8

    à LN je pensais plutôt au secteur du Roy d’Espagne ou aux terrains que la Ville refuse de rétrocéder à la Métropole pour réaliser le BUS du coup Mr Payant aurait une bonne excuse pour les conserver et bloquer la construction de la voie

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