François Bernardini président d’Ouest Provence, la revanche du banni

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le 24 Mar 2016
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Le maire d'Istres, François Bernardini a été élu, président d'Ouest Provence. Condamné pour abus de confiance, mis au ban du parti socialiste après l'avoir dirigé d'une main de fer, il tient la sa revanche.

François Bernardini élu président, entre René Raimondi à sa droite et Frédéric Vigouroux à sa gauche.
François Bernardini élu président, entre René Raimondi à sa droite et Frédéric Vigouroux à sa gauche.

François Bernardini élu président, entre René Raimondi à sa droite et Frédéric Vigouroux à sa gauche.

“Vous m’avez fait boire le calice, jusqu’au bout, merci, les copains !” C’est dit à mi-voix, mais le maire de Fos-sur-Mer, René Raimondi n’a pas l’habitude des chuchotis. Il peste : “Vous dites rien, mais dans sa gestion, ça va être comme ça tout le temps.” Il a tenu le bouillant maire de Fos, tête baissée durant toute la séance. Mais, à la fin, il explose. Il y a quelques mois, lorsque le syndicat d’agglomération nouvelle Ouest Provence était encore la plus ancienne des intercommunalités des Bouches-du-Rhône, il occupait le siège que vient de lui ravir François Bernardini. Lui-même espérait poursuivre son combat contre la métropole en continuant de présider le conseil de territoire qui réunit les six communes les plus à l’ouest du département.

La soif de revanche du banni a été plus forte. L’ancien SAN Ouest Provence est la maison de François Bernardini. Son siège est situé dans la commune dont il est le maire par éclipse depuis le début des années 2000. Il en a été le directeur pendant plus de dix ans de 1979 à 2001 quand le syndicat d’agglomération nouvelle regroupait seulement Istres, Fos et Miramas, les trois communes qui ont grandi en même temps que la zone industrielle du golfe.

Mais l’ancien président du département, patron incontesté du PS13, qui a occupé quasiment tous les mandats électifs, a été rattrapé par les affaires. En 2002, il est définitivement condamné à 18 mois de prison avec sursis, 5 ans d’inéligibilité et 61 000 euros d’amende pour abus de confiance et abus de biens sociaux. Alors qu’il a déjà laissé la présidence du département à Jean-Noël Guérini, Bernardini est alors contraint de quitter la mairie d’Istres. Cela ne l’empêche pas de se faire réélire en 2008, une fois sa peine purgée puis en 2014.

“Au fond de la salle”

Mais, en 2008 puis 2014, sa position de maire d’Istres, désormais incontestable, ne lui permet pas de reconquérir sa maison du SAN. “Vous m’avez mis au fond de cette salle dans un geste de générosité démocratique à l’égard de le la population de la commune centre. Ensuite j’ai été élu 17e vice-président. 17e !”, jette-t-il à l’assemblée. Alors il a patiemment préparé sa revanche. Lui, le pro-métropolitain dans un territoire où les élus y sont opposés. Lui, le condamné réélu, désormais sans étiquette à la tête d’une majorité gauche et droite confondue.

Pendant des mois, François Bernardini a œuvré en coulisses pour reconquérir ce trône qui le hisse au premier rang des élus locaux. Il a travaillé aussi pour barrer la route de ses anciens camarades socialistes, René Raimondi qui espérait rempiler et Frédéric Vigouroux, le maire de Miramas.

44 voix sur 47

Mardi soir, les maires des six communes (Cornillon-Confoux, Fos-sur-Mer, Grans, Istres, Miramas et Port-Saint-Louis-du-Rhône) se sont mis d’accord pour ne pas faire obstacle à la candidature du maire d’Istres. Avant le vote, il a reçu le soutien appuyé du maire Les Républicains de Port-Saint-Louis, Martial Alvarez et du maire de Grans, proche de Jean-Noël Guérini, Yves Vidal. Fort des voix des élus de sa majorité plurielle istréenne, ajoutées à celles de ses soutiens, il est assuré d’une majorité que personne n’a pu lui contester. Il est donc le seul candidat à l’heure où les urnes passent de siège en siège dans la salle étriquée d’Ouest Provence. 44 conseillers de territoire ont écrit son nom à la main avant de le glisser dans l’urne. 44 sur 47, c’est un triomphe.

Au pupitre, il dira son “émotion intérieure” mais n’en laissera guère paraître, lui qui se dit “surpris” par les larmes de Gaudin, le jour de son élection à la présidence de la métropole. Son discours ressemble à une distribution de bons points à ceux qui ont soutenu sa candidature. Le maire (LR) de Cornillon-Confoux et vice-président de la métropole, Daniel Gagnon : “Il a compris que tout autre voie était une impasse.” Le maire (PS) de Miramas, Frédéric Vigouroux : “Il a demandé à sa délégation de voter pour moi alors qu’il aurait aimé être à la tribune à ma place”. De René Raimondi, il a noté “les applaudissements minimes et légers, pour ne pas dire absents” de celui “qui doit être très frustré de ne pas se succéder à lui-même”.

“Pas sur la bouche”

Il ne fera pas de bilan de la gestion passée et préfèrera évoquer l’avenir de ce territoire qui compte “trois projets économiques majeurs” sur les six de la métropole. “On nous traite de clientélistes parce qu’on a une dimension personnelle dans notre rapport aux administrés. Je reçois quatre fois par semaine des gens sans emplois dont le mythe, l’illusion est de vouloir entrer au SAN ou à la Ville. Ce n’est plus possible mais ces projets économiques nous donnent l’espoir de trouver des emplois dans la force du privé (sic). D’ailleurs, s’il doit couper le ruban du futur pôle aéronautique, de la plateforme industrielle Piicto ou des éoliennes flottantes, ce n’est pas pour sa gloire personnelle mais pour les populations. Pour cela, il est prêt à la paix des braves “même si on ne va s’embrasser sur la bouche”. La suite lui donnera raison.

En effet, la suite de la matinée est consacrée à l’élection des 14 vice-présidents du conseil de territoire. Les 13 premiers ne posent pas de problème. Ce sont souvent d’anciens élus à ces postes dont René Raimondi et Frédéric Vigouroux. Leur élection maintient l’équilibre entre les territoires et leurs indemnités. Avant l’élection du dernier, le président Bernardini prend la parole. Au nom de la gouvernance partagée, il propose Philippe Maurizot, un élu de droite très à droite, opposant fosséen de Raimondi “mais pris sur le contingent d’Istres”.

Le cas Maurizot

Mis devant le fait accompli, René Raimondi sort de ses gonds et présente aussitôt sa démission. Yves Vidal lui demande de surseoir et Jean Hetsch, premier adjoint de Fos, monte à la tribune pour un conciliabule. Pendant ce temps, un opposant LR istréen, Michel Leban se déclare candidat au grand dam de Bernardini qui maugrée. Raimondi se ravise et propose la candidature de son premier adjoint à ce 14e poste. L’élection a lieu et Philippe Maurizot est élu avec 24 voix contre 13 pour Hetsch, 6 blancs et 4 nuls. Le maire de Miramas a eu beau voler au secours de son camarade fosséen, cela ne suffit pas. Raimondi ne s’arrête plus de pester à plus ou moins mi-voix.

Bernardini tient sa majorité, elle est plurielle par “addition de toutes nos forces”. Elle est même “identitaire”. Le mot fait peur mais dans la bouche de François Bernardini, elle est censée incarner le territoire. Et pour parfaire la gouvernance partagée que le président est en train de réinventer là où Gaudin a échoué, il mettra en place un bureau exécutif où même l’ancien maire communiste port-saint-louisien Jean-Marc Charrier aura sa place.

Quant à Bernardini, nommé automatiquement vice-président de la métropole, il aura la sienne au côté des grands élus du territoire. Enfin de retour sur un air de revanche.

Ajout : le 24 mars à 18 heures, ajout de la liste des 14 vice-présidents d’Ouest Provence.

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Commentaires

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  1. EricAT13 EricAT13

    Notre république démocratique est généreuse avec les repris de justice en col blanc dans beaucoup de profession lorsque vous avez un casier vous n’êtes pas éligible, alors à quand un article de loi qui interdirait à des personnes condamner de ceux présenter et d’être élu, mais ils ne scieront pas la branche…..
    Bonne journée de mobilisation

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  2. Blaah Blaah

    J’ai moins envie de taper sur ce Monsieur que sur les Istréens qui l’ont élu malgré sa condamnation pour abus de confiance. Tant que la la hauteur de vue des électeurs provençaux ne s’élèvera pas au-dessus de celle d’un Neandertal devant un cuissot de mammouth, on n’aura pas le droit de pleurer sur la médiocrité de nos dirigeants.

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  3. JY D JY D

    Contribuables, gaffe à vos portefeuilles ! Monsieur “Les Grandes Poches” est de retour !

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  4. reuze reuze

    Je tremble à l’idée de la surcharge de travail qui guette les conseillers de territoire à partir de 2020.
    Comment feront les 10 conseillers métropolitains d’Ouest Provence pour élire, parmi eux, 1 président et 14 vice-présidents?

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  5. toine toine

    Quelle mascarade de voir ces bouffons s’arracher les postes de la Métropole alors qu’ils n’ont eut de cesse de combattre cette structure pendant ces 4 dernières années!
    Quelle bandes de magouilleurs & de guignols!

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  6. catherine catherine

    Je rejoins Eric…. Quand notre belle république va-t-elle enfin interdire l’accession aux postes d’élus à des repris de justice? Les Balkani, Bernardini, et consorts… Jamais sans doute, car les réseaux et la solidarité de caste sont extrêmement puissants. C’est à désespérer et le FN a de beaux jours devant lui… A moins que le clientélisme n’en prévienne encore un peu l’accession au pouvoir. Tout ceci est surtout triste. Le crash n’est pas loin.

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    • ALAIN B ALAIN B

      Vous idéalisez le FN; il a aussi des élus corrompus et si une personne vote pour cela il se trompe
      Une première solution c’est d’interdire le cumul des mandats et une personne ne peut se faire élire que 2 fois dans sa vie

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  7. LN LN

    Je rejoins totalement Blaah,
    Mais quelle tambouille…. Comment parler de démocratie avec tous ces discours, ces petites phrases et revirements ?
    Tout ca est incompréhensible et m’afflige. me décourage, me désespère.
    Et une fois que j’ai dit ca ?

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    • JL41 JL41

      Tout cela n’empêche pas les uns et les autres de commenter à l’infini, alors que les clés d’un changement ne paraissent pas avoir été trouvées.

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  8. Armelle Rioualen Chevassu Armelle Rioualen Chevassu

    Vivement une VIème république avec une constitution qui empêchera que des “élu-es” qui ont été un jour pris la main dans le sac ne puissent sévir à nouveau. Qu’un Bernardini puisse être ainsi réélu à la tête d’une institution en dit long sur l’affaissement démocratique de cette Ve république pourrissante.

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    • Trésorier Trésorier

      Ce n’est pas la 5ème républiquequiest pourrissante mais le niveau d’éthique, d’exigibilité morale des électeurs. Et une 6ème république idéalisée n’y changerait rien.

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    • Trésorier Trésorier

      Ce n’est pas la 5ème république qui est pourrissante mais le niveau d’éthique, d’exigibilité morale des électeurs. Et une 6ème république idéalisée n’y changerait rien.

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  9. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Au second tour des élections régionales, la liste FN a obtenu plus de 51 % des voix à Istres. Rien à voir, bien sûr, avec la déliquescence de la moralité de certains élus.

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  10. Trésorier Trésorier

    Electeur du 8eme,

    Sans doute. Mais il est inadmissible qu’on puisse postuler a une election avec un casier judiciaire rempli alors que pour etre fonctionnaire, il doit etre vierge (et c’est normal). Un elu gagne plus et a plus de respinsabilites, d’influence, de poids, qu’un salarie.

    Et par ailleurs, les istreens arrivent a voter pour un condamne.

    C’est avant tout un probleme d’ethique, d’exigibilite morale dans la population et les elus.

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