À Noailles : piétonisation, rénovation et préemptions pour “rendre le quartier désirable”

Actualité
le 26 Oct 2022
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Quatre ans après le drame de la rue d'Aubagne, la Ville de Marseille esquisse ses ambitions pour le cœur de ville marseillais. Son objectif : faire de Noailles un quartier "où il fait bon vivre".

La rue Halle-Delacroix à Noailles fait partie des "îlôts" visés. (Photo LC)
La rue Halle-Delacroix à Noailles fait partie des "îlôts" visés. (Photo LC)

La rue Halle-Delacroix à Noailles fait partie des "îlôts" visés. (Photo LC)

“À Noailles, avec les habitantes et les habitants, il faut sortir d’une phase de deuil pour en faire un quartier désirable où il fait bon vivre”, pose en préambule Mathilde Chaboche. Ce mardi 25 octobre, l’adjointe à l’urbanisme de Benoît Payan, déroule conjointement avec la maire des 1er et 7e arrondissements, Sophie Camard, les ambitions à court ou plus long terme pour Noailles. A l’approche de la date anniversaire des dramatiques effondrements qui ont laissé ses rues et ses résidents meurtris, la Ville assure vouloir faire de Noailles “un quartier-pilote en termes de mixité sociale et de résilience climatique”, enchaîne Sophie Camard.

Pour ce faire, les élues esquissent plusieurs pistes qui s’inscrivent dans un projet partenarial d’aménagement (PPA). Ce plan initié en 2019 lie dans une gouvernance partagée la municipalité, la métropole et l’État pour mettre en œuvre la stratégie de requalification du cœur de ville marseillais. “Ce document est longtemps resté fantôme”, regrette Mathilde Chaboche. Il semble que le dialogue, souvent épineux entre la municipalité et la métropole, sache se nouer ici : “Politiquement c’est un sujet où cela fonctionne, confirme l’adjointe à l’urbanisme. L’inverse serait déplorable pour les habitants.” Quatre ans après le choc des effondrements, les élues promettent que le dossier entre dans le concret.

Piétonisation début 2023

À compter du début de l’année prochaine, une bonne partie de Noailles sera piétonnisée. “Cette demande, on en trouve la trace dans le résultat des concertations de 2014”, reprend la maire de secteur. Le sujet est revenu sur la table à partir 2018, alors que la Canebière et ses alentours se couvraient de pavés. Huit bornes rétractables viendront fermer une forme de triangle, délimité par les rues d’Aubagne, Chateauredon et le marché des Capucins. Cette transformation, Sophie Camard la décrit comme “très importante, en termes d’usages”. Elle devra donc être testée : “On va voir comment ça se passe avec les commerçants, le marché.” Dans une 2e phase, la Ville n’exclut pas la possibilité de pousser cette piétonisation au haut de la rue d’Aubagne, actuellement interdit aux voitures.

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Dans un second temps, la mairie va chercher à faire rimer piétonisation et végétalisation. Il s’agit de contrer les effets délétères du réchauffement climatique dans un cœur de ville particulièrement minéral. “Il y a deux leviers qu’on peut activer. D’abord le travail de sensibilisation et les démarches participatives d’implantation avec les habitants, ce que mène la mairie de secteur, embraye Mathilde Chaboche. Et puis il y a ce que la puissance publique peut conduire. Notamment dans les îlots sur lesquels la SPLA-IN [la société d’aménagement qui regroupe là encore État, Ville et métropole, ndlr] va se mobiliser pour désencombrer les cœurs d’ilots. Ils avaient un rôle de puits de fraîcheur et, petit à petit, ils ont été encombrés, construits et imperméabilisés.”

Expropriations et rénovations

Pour ce qui est du volet logement, les élues municipales rappellent que la SPLA-IN va principalement intervenir, au travers de concessions d’aménagements, sur l’îlot Halle-Delacroix et sur celui du haut de la rue d’Aubagne. Sur ce dernier tronçon, la quasi totalité des immeubles ont été rachetés, par vente amiable dans 80 % des cas ou expropriation. Seuls “un ou deux dossiers contentieux” bloquent encore, explique Sophie Camard. La Ville promet une requalification respectueuse du bâti existant. Pas question de tout raser : “Nous allons réhabiliter tout ce qui peut l’être”, indique Mathilde Chaboche. Elle tient aussi à évacuer la crainte, tenace, d’une gentrification rampante du quartier : “70 % des logements réhabilités seront à vocation sociale et une autre part sera vouée à l’accession sociale à la propriété.”

MPT et Préemption du théâtre Mazenod

Une préemption est en cours de finalisation. Le théâtre Mazenod – ancienne église désacralisée, mise en vente aux enchères par son propriétaire, le diocèse de Marseille – va devenir propriété publique. “Nous y déploierons un programme d’équipement public”, souligne Mathilde Chaboche. Différentes options socio-culturelles ou sportives sont sur la table. Elles seront discutées “en association avec les habitants”, reprend l’adjointe qui y voit “la volonté de remettre du commun” et “de ramener du service public dans un quartier qui en a tant besoin”.

Autre équipement social public très attendu par les familles de Noailles, la maison pour tous (MPT). Avec une partie ado et une partie petite enfance, la structure s’étendra sur deux sites : le 44, rue d’Aubagne et le domaine Ventre. Un dossier ébauché depuis plus de six ans “d’une complexité un peu dingue”, selon Mathilde Chaboche, du fait de sa double localisation, de la multiplicité des acteurs impliqués et des recours engagés. “Un protocole d’accord est en cours de formalisation avec Marseille Habitat [le bailleur social de la Ville, en partie propriétaire du 44, ndlr]. On a de bons signaux, on va pouvoir lancer l’opérationnel”, indique l’élue sans toutefois dévoiler un calendrier précis.

Devenir du site des effondrements

L’espace des effondrements – en lieu et place des 63, 65 et 67 de la rue d’Aubagne – n’a pas encore repris vie. Le processus de réflexion est engagé, assurent les représentantes de l’équipe municipale, qui avait reposé les bases d’un dialogue il y a deux ans. Une modification du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) a permis de faire du site “un pré-emplacement réservé pour un équipement public”, rappelle Mathilde Chaboche. Reste à en imaginer le nouvel usage.

“À travers les concertations menées par la mairie de secteur ces derniers mois, plusieurs choses émergent : ne pas gommer les traces du passé, de ne pas effacer ce qui s’est passé, mais en même temps donner à la vie la possibilité de revenir”, reprend l’adjointe à l’urbanisme. Ces contributions citoyennes ont esquissé des “pistes”, dit l’élue: “L’idée d’un parc, d’un lieu de vie pour les enfants. Mais en tout cas, l’idée est de ne pas en faire un sanctuaire, une béance qui reste au milieu du quartier.”

Cette nouvelle vie du site, la municipalité la promet “pensée avec les habitants et les familles des victimes”. Sophie Camard en est convaincue, “il y a quelque chose de beau à inventer là”. Le 20 novembre, un atelier baptisé “Noailles autrement” sera mené par l’Agora de Noailles qui fédère depuis les effondrements plusieurs acteurs associatifs du quartier. Elle bénéficie déjà d’une aide de la Fondation de France pour essayer de transformer ce qui reste comme le stigmate persistant de la tragédie.

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Commentaires

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  1. Alceste. Alceste.

    Si ils y arrivent,bravo.
    Mais j’ai quand même un vieux doute,nous sommes à Marseille et souvent trop souvent cela se termine en biberine.

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  2. Mars, et yeah. Mars, et yeah.

    L’idée est bonne, mais elle n’aura de sens que si la Loi est appliquée en verbalisant les 2 roues motorisés qui vont de toutes manières continuer à y circuler. Et ça, on sait tous que cela n’arrivera jamais.

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      Les deux-roues motorisés sont partout chez eux : sur les trottoirs, dans les zones piétonnes, à contresens dans la rue, dans les rares parkings à vélos, sur les passages piétons… En moins d’une décennie, leur prolifération n’a épargné personne. Tout cela sous l’œil distrait de la police, qu’elle soit nationale ou municipale, qui ne voit ni n’entend rien. Créer une “zone piétonne” sans jamais réprimer les infractions commises par les conducteurs de ces véhicules n’a en effet aucun sens.

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  3. Patafanari Patafanari

    Toujours un train de retard. Ils veulent faire de Noailles le « Marais » marseillais.
    Tandis qu’à Paris le quartier du Marais est devenu aussi mal famé que notre Noailles-on-se-fait-casser-la-gueule-pour-pas-cher.

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    • ruedelapaixmarcelpaul ruedelapaixmarcelpaul

      Faut un peu revenir dans le monde réel aussi

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  4. didier L didier L

    Paroles d’élus … sur le papier, au micro ils doivent élaborer projets et développement c’est leur job. Ensuite rdv dans cinq ans pour voir le résultat, car au stade actuel quid du marché au puce sauvage qui bloque la rue d’Aubagne et pénalise les quelques commerçants qui tente l’aventure ? quid des marchands à la sauvette, cigarettes de contrebande, voire plus ? On tolère ? On supprime ? quid du balais de scooters qui livrent ” toute sorte de choses” ? Quid d’une population plus que précaire qui occupe l’espace public ?
    Donner une nouvelle vie à ce quartier et maintenir la mixité sociale est un beau projet, mais c’est pas gagné entre ” gentrification et précarité” faut voir où mettre le curseur.

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  5. Lissia Lissia

    Pourquoi pas d’essayer de créer des choses nouvelles pour cette ville …! Cependant j’inviterais bien Mme Chaboche à faire un tour sur le boulevard Françoise Duparc/Sakakini : des arbres ont été plantés, en plus de ceux qui existent et tout autour ont été installées des petites barrières en bois qui forment une sorte d’enclos. Installées probablement pour empêcher les déjections des chiens qui brûlent bien les racines des plantes.
    Bref ! Ces petits enclos sont devenus des poubelles à ciel ouvert, remplies de canettes, de vieux pneus, de bouteilles, de tas de trucs extrêmement esthétiques. Donc une petite visite sur place lui permettrait de visualiser comment un projet mal pensé peut tourner au cauchemar d’incivilités. Déjà que le quartier n’est pas très reluisant, en plein centre ville, avec un hôtel 4 étoiles à proximité, ce serait dommage….

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    • fvielfau fvielfau

      Mathilde Chaboche est adjointe à l’Urbanisme de la Ville.

      la requalification du Jarret est de la responsabilité de la Métropole !

      voir donc : Philippe GINOUX; amire de Sénas et 4e conseiller de la Métropole délégué à la Voierie, aux Infrastructures, aux Parcs et aires de stationnement, aux Pistes cyclables, au Schéma de voirie

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  6. MSY MSY

    L’argument qui consiste à dire qu’il ne peut pas y avoir de phénomène de gentrification car il est question de logement social dans la rue d’Aubagne a tout d’un sophisme.

    Il faut savoir que la politique française de logement social est universaliste et n’est pas une politique sociale.

    Près des trois quarts de la population est éligible, et en vertu du principe de « mixité sociale », les bailleurs sociaux auront tendances à prioriser les classes moyennes et notamment les plus diplômés (cf. Less travaux de la politiste Marine Bourgeois).

    Avec ça plus la question de « l’accès à la propriété », qui suppose une visée de mobilité sociale ascendante, notamment pour les ménages populaires les plus stables, des effets de repeuplement sont plus que probables.

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  7. Alceste. Alceste.

    Je n’apprécie pas du tout Vassal et sa clique,mais alors pas du tout.
    En revanche ce que l’on ne peut pas lui reprocher c’est qu’une bonne partie des marseillais sont de véritables porcs et le cas du Jarret est exemplaire.
    Je suis impatient de voir la rénovation du parking des grossistes de Belsunce transformé en espace vert.

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  8. Alceste. Alceste.

    Soit et non pas sont,mais in fine le résultat est le même, cette ville est sale.

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    • Patafanari Patafanari

      Soient (en l’occurence l’indicatif était juste) ou soie (de porc).

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    • ruedelapaixmarcelpaul ruedelapaixmarcelpaul

      non, sont. C’est une affirmation, donc présent de l’indication.
      Le subjonctif est plutôt pour exprimer un fait qui n’existe pas, un souhait, une improbabilité, etc.

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    • Patafanari Patafanari

      Soit, mais notre ami en tordant la langue française par l’emploi du subjonctif, exprime sa réticence à affirmer que les gens sont sales et évite ainsi d’être taxé de racisme ( voir l’article sur les Verts (rififi chez les Purs )).

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  9. Alceste. Alceste.

    Patafanari, c’est la bonne partie qui est visée,et je parle de marseillais en général, si vous prenez la peine de me lire je critique autant les incivilités sises à l’Estaque gare, à Saint Henri,à Lord Duveen,au Roy d’Espagne ou encore à la pointe Rouge. Le lieu de résidence à Marseille n’est pas un gage de bonne éducation, contrairement aux idées reçues.
    Donc si vous avez des fantasmes faut les assumer mon gars.

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  10. MarsKaa MarsKaa

    Pour revenir au sujet de l’article…
    Il y a de l’ambition, des projets, une ouverture à plusieurs partenaires,
    cela donne de l’espoir.
    Mais cela reste assez flou… reste à suivre la réalisation.

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