Son modèle menacé par la justice, Ryanair ferme sa base à Marseille

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le 13 Oct 2010
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Son modèle menacé par la justice, Ryanair ferme sa base à Marseille
Son modèle menacé par la justice, Ryanair ferme sa base à Marseille

Son modèle menacé par la justice, Ryanair ferme sa base à Marseille

Il l’avait dit, il l’a fait. Le PDG de Ryanair Michael O’Leary a mis sa menace a exécution : la compagnie low cost fermera sa base marseillaise le 11 janvier 2011 et transférera ses employés en Espagne, Italie et Lituanie. Sur les 23 lignes opérées toute l’année, seules 10 seront conservées (voir la liste plus bas). Quant aux lignes saisonnières, c’est pour l’instant le flou : en fonction des nouvelles ouvertures de bases certaines pourraient être maintenues, comme Stockholm.

Pendant la conférence de presse qui avait lieu dans un hôtel de l’aéroport Marseille Provence, on a pu découvrir « l’effet Ryanair » dans la présentation de la compagnie : un passage de 1,7 millions prévus en 2010 à 700 000 passagers en 2011. Une manière de rappeler qu’avec ses 4 avions et 200 employés, elle était la locomotive de MP2, le terminal low cost de l’aéroport Marseille Provence.

Clash réglementaire

Mais voilà, « selon la réglementation européenne, nos salariés sont considérés comme des employés mobiles, donc ils sont déclarés en Irlande (siège de Ryanair, ndlr) et y paient leurs charges sociales. De même, les avions sont immatriculés en Irlande », a martelé le PDG. Sauf que la France, via un décret publié en 2007, impose le contraire, ce qui a amené Ryanair à aller devant la cour de justice de l’Union européenne.

Mais aussi à subir une mise en examen pour « travail dissimulé, prêt illicite de main d’œuvre, emploi illicite de personnel navigant, entrave au fonctionnement du comité d’entreprise, aux fonctions de délégué du personnel ainsi qu’à l’exercice du droit syndical et au fonctionnement du CHSCT ». Conclusion du boss irlandais :  »Nous ne pouvons pas nous permettre de risquer des amendes de plus en plus lourdes le temps que la procédure suive son cours, ce qui peut durer des années« . Tout en précisant que Ryanair rouvrirait sa base si jamais les choses rentraient dans l’ordre…

Serait-ce une forme de chantage à destination du gouvernement français ? « Si nous voulions faire cela, nous fermerions toutes nos lignes en France. Ce que nous voulons faire, c’est montrer que ce décret va coûter des emplois et des touristes à Marseille et à la France en général« , rétorque-t-il. La nuance est mince. Mais en même temps, « le décret est sorti un mois après que Ryanair ouvre sa base« , note l’air de rien Jean-François Bigay, président de l’aéroport. De l’eau au moulin de O’Leary, qui y voit une protection pour Air France/KLM, « qui ne peut pas nous concurrencer ». Idem pour Jean-Claude Gaudin, qui estime que le grand gagnant de l’affaire est « bel et bien le groupe Air France qui retrouve, ainsi, son monopole, en imposant aux Français des tarifs beaucoup plus élevés. » On ne le connaissait pas si dur avec la compagnie qu’il prend toutes les semaines pour aller au Sénat…

Modèle Ryanair

Mais n’aurait-il pas mieux valu se plier aux exigences françaises plutôt que de continuer d’opérer des lignes depuis Marseille avec des avions basés ailleurs, ce qui revient forcément plus cher ? « C’est moins cher d’être basé en Espagne ou en Lithuanie, car les taxes d’aéroport sont plus basses. Par contre ce serait plus cher au Royaume-Uni. Mais c’est avant tout une question de principe« , assure Michael O’Leary. « C’est un animal à sang froid. Il a un modèle économique et refuse d’éclater sa société en filiales nationales« , traduit un Jean-François Bigay compréhensif.

Il est vrai que le big boss de Ryanair déçoit presque avec son jeans veston baskets et son ton posé très loin des déclarations fantasques distillées avec un langage de charretier. Mais au détour d’une question, « l’animal » se dévoile : « nous ne pouvons pas nous permettre d’être dans une situation où nous avons quatre avions en France que nous voulons transférer ailleurs l’année suivante mais que la législation française nous dit « vous ne pouvez pas bouger les gens contre leur gré ». On ne peut pas gérer une compagnie aérienne comme cela ». Lui préfère les employés mobiles, qui suivent Ryanair au gré de ses implantations. « Les gens le savent quand ils nous rejoignent », ajoute-t-il.

Et de conclure que « Ryanair n’est pas un Etat fasciste : ceux qui veulent rester à Marseille le peuvent. Mais ils doivent savoir qu’ils ont leur emploi assuré dans les autres bases contrairement à ici ». Mais, code du travail irlandais aidant, qu’ils ne s’attendent pas à un golden parachute. Pratique aussi pour garder la pression sur les politiques et autres CCI, comme à Montpellier, Pau ou encore Valence.

Catastrophe pour l’aéroport ?

En parlant d’emplois, quelles sont les conséquences prévues à Marseille ? « Entre les commerçants, les hôtels, les restaurants, les taxis nous allons perdre 700 à 800 emplois », déplore Jean-François Bigay. Sans nier l’effet Ryanair, l’aéroport a toutefois tenu à souligner que « si ces changements devraient induire une inflexion du trafic estimée autour de 30 000 passagers en janvier et 50 000 passagers en février et mars, aucune estimation ne peut être donnée pour les mois ultérieurs. » Outre l’arrivée ou le retour de nouvelles lignes Ryanair pendant l’été 2011, il mise sur l’arrivée de nouvelles compagnies, à l’image de la filiale low cost d’Air France – tiens tiens – Transavia, qui débarque à Marseille la semaine prochaine.

Surtout, n’en déplaise à Jean-Claude Gaudin, MP2 accueille aujourd’hui cinq autres compagnies. Dont l’autre grande du low cost, Easy Jet, qui a près une condamnation s’est pliée aux exigences françaises. Alors que Jacques Pfister, le président de la Chambre de commerce et d’industrie, propriétaire de la concession, y voit « un coup d’arrêt pour le développement de Marseille Provence », ce dernier assure que « [ses] atouts restent incontestables ». Ryanair ou pas, Marseille accueillera bien le Forum mondial de l’eau en 2012, la capitale européenne de la culture en 2013, l’Euro en 2016 et ni le soleil ni l’OM ne s’envoleront avec la compagnie irlandaise. Et comme la nature a horreur du vide…

Lignes supprimées : Agadir, Brest, Eindhoven, Lille, Marrakech, Nador, Nantes, Palerme, Paris, Tanger, Tenerife, Tours, Venise

Lignes conservées : Bruxelles, Düsseldorf, Fez, Londres, Madrid, Malte, Porto, Rome, Séville, Valence

Aéroport – MP2 – Marignanne
Marseille Provence Airport, 13700 Marignane, France

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Commentaires

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  1. bastien bastien

    et biarritz ??

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  2. ponpon ponpon

    Jean-François Bigay… et pas bigeay…

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  3. Laurent Laurent

    La Lituanie sera sans doute aussi heureuse de voir son nom correctement orthographié…
    Tous ceux qui répètent depuis des mois, vous y compris, qu’il s’agissait d’un chantage, en sont donc pour leurs frais. Difficile cependant d’en faire un reproche ciblé tant cette vision des choses (Marseille contre le reste du monde) apparaît comme un de ces atavismes marseillais qui plombent notre réflexion commune sur le développement de notre ville et de notre région, au profit de réflexions limitées et revanchardes.
    Personne ne dira, ici ou ailleurs, que le retrait de Ryanair est une catastrophe économique pour Marseille et sa région. C’est pourtant une réalité.
    Vou n’avez pas été les derniers à dénoncer les subventions des collectivités publiques à Ryanair. Pourtant, le calcul semblait si simple : 35 millions d’euros de subventions, à rapprocher des 500 millions d’euros (chiffre à mon avis sous estimé) de retombées économiques générées par la fréquentation touristique issue des lignes Ryanair.
    Le pompon dans cette histoire revient sans doute à la CCI de Marseille, qui aurait dû faire une campagne acharnée sur le maintien de la base Ryanair et qui a fait le service minimum.
    Les petits arrangements de Ryanair avec la législation sont sans doute critiquables. Mais ceux du port autonome ne le sont ils pas aussi avec les dockers ? Sur le port, salarié et dirigeant ont été d’accord, avec la complicité de l’Etat, pour réduire le temps de travail légal des dockers avec pour seul objectif de transformer les heures manquantes en “heures supp”, ce qui arrange tout le monde puisqu’elles sont moins fiscalisées (merci M. Sarkozy). Ca aussi, c’est un petit arrangement avec la législation, mais comme on ne parle là que d’intérêts marseillo- marseillais, sans irlandais au milieu, personne ne dit rien.

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  4. Maxfly Maxfly

    Je comprends pas…ils restaient à Marseille uniquement pour nous faire plaisir ou ils faisaient quand un petit peu des bénéfices?

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  5. RIBELLU RIBELLU

    …Aucune larme sur ce départ, quand on prend des subventions d’une région ou d’un état, qu’on yemploie un certain nombre de salariés, on respecte la loi de ce pays….Que Ryanair qui a voulu prendre le beurre, l’argent du beurre , la crémière voire la laiterie s’en aille !!!! Qui notamment acceperait de voir des commerçants s’installer dans une zone avec des salariés sous statut différent de celui de la France à côte de son entreprise et en concurrence avec la sienne

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  6. ymerej ymerej

    Merci RIBELLU … Parce que entre les réactions sur La Provence et les discours du maire, je commençais à me sentir bien seul !!

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  7. Fab Fab

    Et ce n’est que le début
    , plus personne ne va investir dans ce pays et encore moins dans cette ville.

    Merci les syndicats…

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  8. davides davides

    Pauvre france… elle est morte mais elle ne le sait pas encore !

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  9. céhère céhère

    Patron voyou, élus complices http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=2031

    Gaudin et pfister explosent en vol au bout de trente secondes face aux questions d’une journaliste qui a préparé un minimum son enquête (il est vrai qu’ils ont plus l’habitude du cirage de pompes avec la provence ou france 3).

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