[Pris en flag] À Marseille, les cantines sans nitrites n’ont rien de nouveau

Décryptage
le 8 Sep 2023
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La Ville de Marseille vient de présenter son objectif "cantine sans nitrites" afin d'éloigner ces substances cancérogènes des assiettes des écoliers. Bonne nouvelle : cela se fait déjà depuis 2018.

[Pris en flag] À Marseille, les cantines sans nitrites n’ont rien de nouveau
[Pris en flag] À Marseille, les cantines sans nitrites n’ont rien de nouveau

[Pris en flag] À Marseille, les cantines sans nitrites n’ont rien de nouveau

C’était l’annonce de la rentrée pour le maire de Marseille Benoît Payan : “Les nitrites seront bannis des assiettes des écoliers”, a-t-il clamé le jour de la rentrée lors de la visite d’une classe de CM2 dans le 3ᵉ arrondissement.

Un avant-goût du lancement de l’opération qui avait lieu ce jeudi 7 septembre, portée par les adjoints EELV Sébastien Barles et Aïcha Sif. Lors du point presse organisé avant une visite de la cuisine centrale, l’adjoint à la ville du futur énonce le souhait que “Marseille devienne une ville pilote sans nitrites avec un engagement formel qui résonnera dans tout le pays”. Il va même jusqu’à parler d’un éventuel lancement “d’initiative citoyenne européenne” pour reconnaître la “catastrophe sanitaire en cours”.

Les scientifiques s’accordent pour dire que les nitrites provoquent des cancers colorectaux, et suspectent un lien avec les cancers de l’estomac voire des types sévères de diabètes. On estime entre 2000 et 8000 le nombre de décès par an liés à la consommation de ces substances et des recherches sont encore en cours. La recommandation est donc de limiter la consommation de charcuterie à 150 grammes par semaine.

Une clause dans le contrat de 2018

Une précaution que prenait déjà le contrat de la Ville avec son délégataire, la société Sodexo, signé en 2018 et qui court jusqu’en 2025. Il y est bien spécifié, qu’à la demande de la collectivité, le jambon sera “sans nitrites ajoutés et le pâté sans additif”. Lorsque Marsactu interroge Sébastien Barles sur l’ancienneté de l’interdiction des nitrites, il rétorque : “Oui, le jambon et le pâté sont déjà sans nitrites, mais il reste les saucisses”. Face au questionnement de Marsactu, Pierre Huguet, adjoint au maire délégué à l’éducation et aux cantines scolaires, répète que la nouveauté porte sur “l’élargissement du principe d’interdiction des nitrites” sans pouvoir lui non plus nous préciser l’aspect réellement inédit de l’annonce.

Seulement deux menus contenaient des saucisses avec nitrites au cours de l’année scolaire écoulée.

Selon les menus consultés par Marsactu, la charcuterie est en fait très peu présente dans l’assiette des petits Marseillais. Sur une année scolaire, on repère quatre fois du jambon et une fois du pâté. Quant aux saucisses encore nitritées, elles ne sont servies que dans deux des 144 menus proposés.

Une production industrielle

“Lutter contre les nitrites est une bonne chose, mais le vrai point noir, c’est l’accès à l’information dans la composition des assiettes. Les parents d’élèves demandent depuis trois ans à récupérer les fiches techniques des aliments”, commente Arnaud Dupleix, membre de l’association de parents d’élèves FCPE. Ces documents détaillent la liste des colorants, additifs et différents aliments contenus dans un plat. Ces derniers seraient bloqués dans un des services de la mairie a-t-on expliqué aux parents lors d’une réunion ce jeudi. “On ne sait pas ce qui se trouve dans l’assiette de nos enfants, c’est absurde”, s’agace-t-il.

Pour de nombreuses organisations de parents d’élèves, l’enjeu est aussi de rompre avec le modèle industriel appliqué à Marseille. Les plus de 50 000 repas quotidiens des écoliers sont produits dans une seule cantine centrale. Le programme du Printemps marseillais promettait d’ailleurs d’étudier “la mise en place de cuisines centrales municipales par secteur, arrondissement, quartier ou école”. Lors de la concertation organisée ces derniers mois, cette ambition est apparue très incertaine pour l’échéance du contrat en 2025.

“Le fric contre la santé”

Mais ce jeudi, l’annonce de l’opération “cantines sans nitrites” déborde vite de l’assiette des écoliers marseillais. Le député du Modem Richard Ramos, élu dans le Loiret, est présent aux côtés des adjoints marseillais et partage son travail pour sensibiliser aux dangers des nitrites à l’Assemblée nationale. Avec lui, Sébastien Barles et Aïcha Sif annoncent entamer une bataille juridique avec les distributeurs de charcuterie en s’appuyant sur la notion de “principe de vigilance”. Les entreprises ont le devoir de minimiser les risques pour leurs consommateurs en termes sanitaires, argumentent-ils. Sébastien Barles dit même espérer trouver des fédérations de victimes des nitrites pour peser plus lourd juridiquement. En revanche, il est bien difficile de définir précisément la responsabilité de ces substances cancérogènes dans un décès.

Richard Ramos explique que les distributeurs font déjà des gammes sans nitrites et fragmentent leur production. “C’est simple : le jambon avec des nitrites est vendu aux personnes les plus pauvres. Celui sans nitrites est vendu bien plus cher aux personnes les plus riches pour assurer une large marge à l’entreprise. C’est le fric contre la santé” argumente-t-il. Une inégalité dans le caddie que la cantine permet d’effacer.

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Commentaires

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  1. Alceste. Alceste.

    L’art de parler pour ne rien dire et surtout pour ne rien faire. Malheureusement depuis trois années sommes habitués .

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  2. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Note pour la mairie : plutôt que des cantines sans nitrites (étant entendu que la charcuterie devrait rester exceptionnelle sur les plateaux-repas), je préférerais des trottoirs sans stationnement illicite.

    Mais je sais, “c’est compliqué” parce que ce n’est pas que de la com : il faudrait mettre la police municipale au boulot.

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  3. Patafanari Patafanari

    Fini le saucisson pinard depuis longtemps mais maintenant la Mairie supprime le revêtement ciment des cours de récréation. D’après « La Provence » à l’école Oddo les parents sont furieux : » Après avoir retrouvé leurs enfants couverts de poussière dès la sortie des classes lundi et constaté des crises chez leurs petits asthmatiques, les parents ont alerté la Ville pour qu’elle mette fin à ce revêtement test ». Ceci dit, ils râlent un peu vite, bientôt ils auront la boue.

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  4. Forza Forza

    Certes que de la com’ + des EELV toujours aussi efficaces en mode punitif et rien d’autre. Maintenant on arrête la blague et on regarde le vrai problème : la malbouffe dans la rue et surtout en livraison à la maison, qui touche toutes les classes sociales (bon ok, j’exclus ceux qui ont un(e) employé (e) à demeure pour faire les courses et la cuisine 😄).

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  5. S.J. S.J.

    Je ne comprend pas ce titre racoleur… marsactu, vous n’êtes pas obligé d’avoir des titres incendiaires à chaque fois que vous parlez des élus. Il n’y a rien qui justifie le désabusement (c’était déjà le cas depuis 2018) et le qualificatif “en flag” dans votre intitulé.
    L’action n’est pas que de la com’ puisque, effectivement, les derniers aliments nitrités (même s’ils étaient rares les années précédentes) sont maintenant totalement retirés des cantines.
    En tant que média indépendant, vous avez un rôle à jouer pour NE PAS décrédibiliser les politiques quand ce n’est pas nécessaire.
    J’ai de plus en plus de mal avec votre ligne éditoriale. Jeter de l’huile sur le feu en donnant l’impression que vous avez un scoop n’aide pas à être mieux informé.

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