Philippe Pujol : “On crée des situations de vulnérabilité et la conséquence c’est des morts”

Interview
le 28 Avr 2018
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Elles parlent à visage découverts, avec douleur mais aussi courage. Trois mères marseillaises racontent comme elles ont vu leurs fils sombrer dans les réseaux de trafics, parfois jusqu'à la mort, dans le documentaire Marseille : Ils ont tué mon fils. Philippe Pujol, qui co-signe la réalisation et l'écriture du documentaire, revient sur la situation de ces familles, et sur l'urgence à entendre leur parole.

Image tirée du film "Marseille : ils ont tué mon fils".
Image tirée du film "Marseille : ils ont tué mon fils".

Image tirée du film "Marseille : ils ont tué mon fils".

Il y en a eu 29 en 2016, 14 en 2017, une poignée déjà depuis le début de l’année. Nous avons pris l’habitude de matérialiser les règlements de compte à Marseille sous la forme de compteur numérique, que l’on guette comme un thermomètre, à la différence qu’on ne sait pas bien ce qu’il mesure.

La réalité des chiffres n’enlève pourtant rien à la réalité : des personnes, souvent jeunes, fauchées pour des enjeux dont les policiers peinent à chaque fois à démêler les fils. La réalité, ce sont aussi ceux qui restent, des dizaines de familles aujourd’hui, témoins de l’emprise, de la dégringolade et souvent victimes à leur tour des pressions, des regards, des menaces. Le tableau est sombre mais il dit le quotidien de familles marseillaises, prises en étau.

C’est précisément ces histoires personnelles que révèle le documentaire co-réalisé par Philippe Pujol et Édouard Bergeon diffusé le 1er mai sur France 2, Marseille : Ils ont tué mon fils. Un documentaire sans faux pas ni fioritures où se rencontrent les témoignages de trois mères. Comme une prolongation des livres de l’ancien journaliste de La Marseillaise couronné du Prix Albert LondresFrench deconnection  démarrés autour des trafics de stupéfiants dans les cités marseillaises, les “quartiers shit”, pour aboutir à une lecture plus globale de Marseille avec La Fabrique du Monstre. Dans ce nouveau documentaire, la réalité des trafics et des kalachnikovs se glisse dans les paroles de femmes, brisées par la perte, pour deux d’entre elles, de leur fils. Et chacune étouffée par le poids de la cité tenue par les réseaux.

(Pour voir un extrait du film, cliquer ici)

Au milieu de cette vie de plomb, leurs histoires, leurs mots sincères, décousus parfois mais aussi combatifs, résonnent. Il y a Souad, qui a perdu un fils et un mari et cherche à tâtons le chemin vers une vie normale. Baya, l’insurgée, décidée à tambouriner contre toutes les portes pour faire entendre sa colère, son désir de justice. Et Céline, qui, pied à pied est parvenue à extirper son fils de la nasse, non sans y laisser des plumes. De ces femmes, Philippe Pujol en parle en tant que documentariste, en tant qu’ami parfois, mais aussi en tant que militant. Militant, en l’occurrence, d’une cause singulière, celle du droit des familles à vivre leur deuil dans la dignité.

Comment les avez-vous amenées ces mères à parler ?

Témoigner comme ça leur permet une forme de résilience. Pouvoir raconter, structurer son histoire, et dire qu’elle n’est pas honteuse, contrairement à ce qu’elles peuvent parfois ressentir. Ces femmes ce sont trois profils avec différents niveaux d’instruction, de lucidité. L’une est plus politique, l’autre lucide, la troisième a une certaine intelligence de la situation.

La particularité de ce film, c’est de réussir à faire parler des femmes à visage découvert, parce que ce n’est pas sans risques pour elles. On ne dit jamais les noms de ceux qui ont tué leurs fils, même quand ils sont décédés. Sur le tournage j’ai dû parfois demander à l’une d’entre elles d’arrêter de donner des noms… On a tout fait pour qu’elles ne prennent pas de risque direct par rapport à ça. Mais elles en prennent davantage vis-à-vis du quartier, en s’exposant ainsi : la plupart des voisins seront touchés par cela, mais peut-être y aura-t-il une petite proportion qui pourrait vouloir profiter de leur vulnérabilité par exemple.

Elles étaient six au début du projet, on en a perdu trois. Pour de bonnes raisons bien sûr, parce que leurs maris craignaient que ça ne cause des ennuis, alors que leurs affaires n’étaient pas terminées. Les affaires des trois qui restent sont toutes bouclées, même s’il n’y a pas encore eu de procès.

Et c’est un point que l’on remarque beaucoup dans le film, la difficulté à faire le deuil en l’absence de justice, de condamnation…

Sans justice, pas de deuil. Pour les règlements de comptes, la plupart du temps il n’y a pas de preuves et donc pas de procès, même si on sait presque toujours qui est l’auteur. Ce n’est pas une question de sanction, d’ailleurs la plupart des auteurs sont soit morts, soit en prison. Souad, qui a perdu et son fils et son mari, n’a pas de réponse de la justice. Elle a des enfants qui sont traumatisés, qui n’ont pas pu se construire parce qu’il n’y a pas eu de procès. Ça engendre des perturbations de tous ordres, sociales, scolaires…

On entend dans le documentaire une phrase bien connue et attribuée au maire de Marseille, “Tant qu’ils se tuent entre eux…”. Sauf qu’elle est prononcée par la mère d’une jeune tué dans un règlement de comptes, excédée. Au fond, est-ce seulement vrai ?

Ceux qui meurent sont souvent tués par des très proches, parce que c’est comme ça que fonctionnent les réseaux, entre amis d’enfance, voisins… et quand leurs destins se chevauchent, là ça pose problème. Ceux qui tuent sont ceux à qui on fait entrer dans la tête très tôt que la vie est une jungle.

Si c’est en partie vrai qu’ils se “tuent entre eux”, on ne peut pas s’en satisfaire. Si on est contre la peine de mort, on est pour que les gens soient jugés, condamnés. Et puis quand ils sont mineurs, on peut vraiment, grâce à l’ordonnance de 1945, les sortir de là, faire quelque chose. Ce sont des Marseillais, des gamins qui meurent pour rien. Oui, ils ont passé une courte partie de leur vie dans les trafics – et ça ne dure jamais longtemps – mais après, tout ça s’arrête là. On ne peut pas s’en féliciter.

C’est du devoir des politiques de regarder les causes sociales qui mènent à ça. Je ne pense pas que les règlements de compte soient le résultat d’autre chose que de la concurrence entre réseaux. Ce n’est pas parce qu’il y en a plus qu’il y a plus de trafic. Au contraire, quand les trafics vont bien, il y en a moins. Et l’action policière ne peut pas éviter un règlement de comptes, à part enquêter, après. Mais le travail social pourrait faire qu’on ait moins envie de se tuer.

Il faut faire en sorte que tout le monde ait les mêmes opportunités, pas seulement chercher dans les quartiers l’excellence, ou les talents… Le monde économique doit former les jeunes, les inclure dans des filières pour que dans dix ans ils soient là dans les secteurs qui en ont besoin, les croisiéristes, les restaurants, le cinéma même. Les zones franches urbaines (ZFU) ont été une escroquerie pure, ce sont des zones de défiscalisation. Ça n’a pas donné lieu à des créations d’emplois qualifiés, qui auraient pu en créer d’autres…

Une des trois mères se recueillant sur la tombe de son fils. (Image tirée du film “Marseille : ils ont tué mon fils”).

En juin 2013, des mères des quartiers Nord lançaient un cri d’alerte, manifestaient. Aujourd’hui, reste-t-il une possibilité de voir cette mobilisation renaître selon vous ?

Les militants se sont entre-bouffés les uns les autres… Dans les quartiers on pense trop avec les tripes, alors qu’il faut aussi réfléchir pour se fédérer. Il y a eu de la concurrence dans le leadership. Ce sont des gens qui ont de vraies choses à dire, mais qui n’arrivent pas à travailler ensemble…

Ce documentaire, à quels spectateurs s’adresse-t-il ? 

Je dirais qu’il s’adresse à trois types de spectateurs. À ces mères, tout d’abord, et aux gens concernés. Leur dire : vous n’êtes pas seuls, vous n’êtes pas de mauvaises personnes. C’est un système social, un déséquilibre qui fait cette violence sociale, et d’ailleurs, ça n’existe pas qu’à Marseille. Ensuite c’est pour tous ces gens qui se disent “ils se tuent entre eux”. Qu’ils voient qu’il est surtout question de personnes vulnérables. Et enfin, le film s’adresse aux politiques, nationaux notamment, leur dire qu’il faut une loi pour les parents qui ont perdu leurs proches. Il n’y a pas tellement de meurtres, ça ne serait pas si difficile. Il faut penser à tous les paramètres pour ces familles après le décès : le logement, l’école des enfants, l’emploi.

Si on reloge une famille après un règlement de comptes, c’est bien, mais si les enfants doivent retourner à l’école de la cité et être maltraités, ça ne sert à rien. Pareil pour l’emploi, si les mères restent la journée à la maison, enfermées, ça ne peut pas aller. Une femme comme Souad, elle a besoin de tout. Elle a trouvé dans le travail [on la voit dans le documentaire intégrer un chantier d’insertion, ndlr] quelque chose de valorisant, une vie sociale hors de la cité, qui lui permet d’être dans un univers où il n’y a pas que des embrouilles et ça lui donne envie de déménager, de vivre ailleurs. Il faut les accompagner vers le deuil et la résilience même quand la justice ne peut pas se faire.

C’est une question morale et éthique, mais aussi pratique : sans ça on créé les conditions de la continuité de ces meurtres, en cascade. En prenant les problèmes dès le début, ça coûte beaucoup moins cher. C’est des jeunes qu’on perd, de l’emploi. Puisque je suis visible, je veux faire entendre ça au politique. Céline le dit dans le film : c’est l’État qui a un rôle à jouer. C’est important de le rappeler, que c’est pas juste des rebeus qui se lèvent un matin et ont décidé de faire des stups. Non, dire ça, c’est du racisme pur et dur. Ce qui est vrai c’est qu’on créé des situations de vulnérabilité pour ces populations, parqués pour être mieux exploités, et que la conséquence, c’est des morts.

Il y a cinq ans paraissait votre série d’articles Quartiers shit, qu’est-ce qui a évolué depuis dans les quartiers ? 

La situation des minots a empiré. Il sont plus nombreux, parce qu’il y a plus de misère, plus de vulnérabilité, et toujours plus de trafics. La ville ne perd pas d’habitants, mais elle le doit beaucoup au taux de natalité des quartiers populaires, qui sont pourtant laissés pour compte d’un point de vue culturel et éducatif… On le voit dans le cas de ces mères, qui ont été très attentives à leurs enfants, avec des papas présents pour la plupart, assez rigoureux même. Mais dans cet environnement compliqué, avec un niveau d’instruction, et un niveau culturel parfois insuffisants, c’est un gouffre pour les jeunes les plus vulnérables. Et c’est ceux-là qui dérapent. Les associations faisaient le boulot avant, mais n’ont plus les moyens de le faire vraiment.

Le tissu social est toujours très important dans le soutien, il faut le dire, mais avec toujours moins de moyens, mis en concurrence ce qui crée une guerre entre associations, comme il y a une guerre entre réseaux de stup, quand ce ne sont pas les trafiquants qui infiltrent les associations ! C’est un vrai marigot, mais quelques fois, les associations parviennent à sortir quelques jeunes de là. On annonce un nouveau plan Borloo pour les cités, ok, mais si c’est pour le distribuer pareil qu’aujourd’hui, ça ne sert à rien. Tout est à revoir.

On en arrive donc à des jeunes qui ont des raisonnements aussi simples que : si quelqu’un me gène, on le tue. Et puis on proposera à la famille de payer pour les funérailles. Et après, on pourra élargir le territoire du réseau. Ce sont des raisonnements très pragmatiques, cyniques, ultra-capitalistes au fond. Ils ne vont pas contester le système, ils vont essayer coûte-que-coûte d’y avoir leur place.

“Marseille : Ils ont tué mon fils”, d’Édouard Bergeon et Philippe Pujol, sera diffusé sur France 2, mardi 1er mai à 23h05.

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Commentaires

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  1. Dark Vador Dark Vador

    Les “quartiers nord”, litanie de décennies d’abandon, de mépris, d’oubli… Oeuvre de toutes les municipalités depuis la Libération. La Palice conseillerait “de transférer la population du nord au sud”… J’espère me tromper en pensant qu’il est peut être tard pour redresser la situation. Juste au sujet des ZFU, dans un article précédent, l’auteur soulignait “Les zones franches urbaines ont été une escroquerie pure, ce sont des zones de défiscalisation. Ça n’a pas donné lieu à des créations d’emplois qualifiés, qui auraient pu en créer d’autres”. Il a parfaitement raison, mon entreprise en a profité en son temps, deux ou trois emplois non qualifiés pris sur place justifient que tout le
    personnel existant de l’entreprise passe sous le nouveau régime : charges sociales et autres ultra minorées…
    “IIs se tuent entre eux”, non, ça ne peut pas continuer comme cela!

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  2. LeaSapolin LeaSapolin

    Je lis l’article seulement maintenant. Comment peut-on voir le documentaire? Y-aura-t-il des projections ?

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  3. Michel Samson Michel Samson

    Le film est vraiment réussi. Outre son intérêt documentaire, il est émouvant et beau. Ce qui, selon moi, est aussi rare qu’important

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  4. neplusetaire neplusetaire

    Bonjour,
    Que dire, après avoir vu un extrait on ne peut s’empêcher d’avoir les larmes coulées parce que cette réalité est difficile à supporter. Les quartiers perdus de la république ! pourquoi ? Parce qu’en fait tout a été abandonné depuis plus de 30 ans. Parce qu’on a parqué les familles entre-elles dans des endroits isolés. En théorie de belles paroles de nos politiciens mais en pratique rien. Quelques associations dans les années 70 jusqu’en 85 avec des éducateurs, des animateurs, du soutien scolaire etc…. à mes yeux rien d’ambitieux par la suite. On a oublié la bienveillance à leur endroit. Jadis, on demandait aux jeunes de s’investir bénévolement dans des actions mais rien en retour si ce n’est en compensation la gratuité du trajet et de l’ébergement pour les sorties et puis plus rien si on avait de la chance c’était la prise en charge du BAFA.
    Difficile de vivre pleinement son enfance et sa jeunesse quand on a rien pour s’enrichir, pas de médiatèque, ni de lieu culturel, quartiers fermés toujours faisant la une des journaux dès qu’il y a des faits graves. La police n’intervient pas non pas parce que les gens font la loi mais parce qu’on leur a interdit d’intervenir et cela depuis toujours….QU’ILS SE BOUFFENT ENTRE EUX!!!!!!!!!!!!!!!!!!! Cela a toujours été.
    Quant aux plaintes…….toujours classées sans suite..
    Ces jeunes n’ont que la souffrance comme héritage, les grands parents sont venus parce qu’ils fuyaient la guerre ou parce qu’ils étaient venus pour travailler.
    Les écoles de la républiques étouffent, les parents même s’ils n’ont pas les moyens inscrivent leur enfant au privé parce qu’ils veulent les voir réussir. On a formaté le cerveau des gens pour nous désigner comme les responsables presque de la destabilisation de la FRANCE !
    Le plan ANRU, oui on a investit des millions d’euros mais cet argent est loin d’avoir servi les quartiers, le projet n’a jamais été mis en pratique entièrement. on a démoli des cités, éclaté les familles et après qu’est ce qui a été fait ? on souffle le chaud et le froid, diviser pour mieux régner voilà la devise appliquée..Les familles n’ont jamais demandé à vivre du RSA mais préfèrent travailler et se sentir valorisées aux yeux de leur enfant plutôt qu’à passer leur temps à tourner en rond.
    J’ai rencontré les personnes formidables, des créatrices, des dessinateurs, des informaticiens…, des bénévoles en droit juridique qui donnent sans compter de leurs expériences mais qu’on a laissé sur le banc de touche au lieu de les aider à créer leur propre projet. Je rêve que ces personnes racontent leurs parcours parce qu’elles sont méritantes mais aucun projecteur ne les met en lumière.
    Alors que l’on parle d’idées lumineuses, depuis longtemps dans ces quartiers il y a eu :
    l’écovoiturage on prenait bénévolement les personnes qui allaient au même endroit sans avoir une application, il suffisant de se parler et d’entretenir un bon voisinage.
    Il y avait des ateliers de couture j’ai le souvenir d’une personne qui apportait des vêtements et les transformer, on peut voir qu’actuellement cette pratique est valorisée pour éviter le gaspillage et limiter “LA DEPENSE ENERGENIQUE ET ENVIRONNEMENTALE” etc… tout le blabla
    Il y a aussi le partage des plats cuisinés car au lieu de jeter à la poubelle, on préferait donner à son voisinage GRATUITEMENT alors qu’actuellement on passe par une application pour vendre.
    le scandale des EPAHD, dans la cité les personnes âgées étaient entourées par le voisinage, pour lui faire les courses, lui ramener les plats, etc mais le plus important c’était la chaleur humaine.
    Des associations sans subventions qui s’occupaient des jeunes dans la création de théâtre, de recherche de son identité culturelle, de préparation de spectacle, de dîner à thème mais cela n’a pas duré longtemps à mon grand regret. Enfermement totale de ces quartiers avec dégradations, familles éclatées etc…
    Ce commentaire a été fait le samedi avant de voir le reportage
    ‎samedi ‎28 ‎avril ‎2018, ‏‎10:23:53
    Après avoir vu le reportage en replay c’est vraiment la douche
    froide , vraiment merci pour ce reportage vraiment criant de vérité , de douleurs, j’en suis malade.
    Je connais ces femmes de vu et j’ai dû les croiser plus d’une fois. J’ai reconnu le clip de l’enlèvement sauf erreur de ma part il me semble que c’était au printemps 2012 tourné à la Cité des Créneaux vers les 16/17 H. Je sortais du bâtiment pour aller récupérer mon fils et effrayée devant la scène, je me suis mise à crier ils m’ont rassurer très gentiment en me disant que c’était de fausses armes et juste un tournage de clip.

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    • neplusetaire neplusetaire

      désolée pour les fautes d’orthographe. ils m’ont rassurés

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