Partie de campagne avec Nicolas Hulot dans les cités marseillaises

Si pour Nicolas Hulot la biodiversité de la forêt amazonienne est plus familière que celle des noms de cités marseillaises (les Lauriers, les Cèdres, les Iris…) sa visite vendredi n’était pas pour autant un rendez-vous en terre inconnue assure-t-il : « Depuis toutes ces années avec ma fondation, j’ai quand même déjà visité des quartiers populaires».  Il n’empêche, pour le grand public, ce n’est pas le milieu naturel du candidat aux primaires Europe Ecologie-Les Verts (EELV) pour la présidentielle.

Pour son étape dans la région de son tour de France, le thème du programme concocté par Karim Zeribi, patron de la RTM et conseiller municipal de Marseille était donc clair. « On a besoin de le voir dans d’autres postures, parler des quartiers populaires, d’emploi, d’entreprises, de solidarité. C’est quelque chose qui est attendu par beaucoup. De la même manière qu’Eva Joly (principale autre candidate, annoncée le 10 juin, ndlr) ne doit pas être enfermée dans le thème de l’éthique en politique », justifie-t-il.

Après un échange avec Nouredine Dahmani, président du club de foot local qui s’est plaint de la disparition des emplois aidés qui bénéficiaient « aux jeunes des quartiers dont on voyaient qu’ils étaient sérieux et à qui on confiait une équipe », place au débat avec la vingtaine d’habitants du secteur, pour beaucoup fraîchement encartés à EELV.

A gauche toute

En guise d’introduction, l’ancien télécologiste, à qui certains reprochent sa proximité passée avec Nicolas Sarkozy, déroule un discours que Jean-Luc Mélenchon n’aurait pas totalement renié : « Il faut taxer le capital, les impacts environnementaux, les prélèvements énergétiques et pas le travail, car ce n’est pas ça que l’on doit contraindre », lance-t-il. Plus tard, montrant son plâtre au bras droit, il s’amuse : « les gens ne savaient pas s’ils devaient me saluer à droite ou à gauche. Au moins maintenant c’est clair. » Face à un étudiant en sociologie qui l’interroge sur la « reproduction sociale » à l’école, il se dit choqué par « cette discrimination qui fait que suivant que vos parents gagnent un Smic ou font partie des classes aisées, certaines voies vous sont interdites. Cela créé de la révolte, de l’humiliation ».

Tendance gauche affirmée toujours lorsqu’il clame qu’« on ne peut pas toujours par des mesures ponctuelles traiter ici ou là les symptômes, généralement au détriment de quelqu’un ailleurs, il faut s’attaquer aux causes de ce modèle qui creuse les inégalités, où l’on s’entête avec un acharnement thérapeutique ». Face à la « sinistre loterie géographique » des quartiers sur laquelle on a « tendance à mettre un couvercle », il insiste sur la nécessité de mettre « des moyens. L’argent quand on en a besoin, on en trouve on en gaspille même. Je ne veux pas céder à la démagogie, mais un moment donné, quand il a fallu sauver les banques, on les a trouvés ».

Hotte vide pour « Saint Nicolas »

Mais sur les jeunes diplômés qui ne trouvent pas de boulot, les jeunes qui se retrouvent dans une impasse après un décrochage ou une formation qui ne leur correspond pas, pas de mesures précises. Le programme viendra après, lors de la vraie campagne, s’il est choisi pour défendre les couleurs d’EELV, fait-il comprendre. Et « si j’arrivais avec dans ma corbeille une recette miracle vous me suspecteriez . La première chose à laquelle je ne veux pas céder, c’est faire des promesses que je ne pourrais pas tenir », avait-il prévenu d’emblée. En guise de garantie, il répète à l’envi qu’il « était très bien là où [il] était avant », qu’il « ne cherche pas un job ».

Autour du snack, des ados s’amusent d’ailleurs de ce « Saint Nicolas » qui a « atterri en parachute »… « C’est un bon signe qu’il ait fait le déplacement. Il a l’air d’être quelqu’un d’authentique, il n’a pas l’air de promettre la lune », commente Joffrey Mendy, un des récents adhérents EELV. « On préfère cela qu’un dicsours prometteur mais où après il n’y a rien », appuie Adel Bourria, lui aussi nouveau venu. « C’était basique. Il n’a rien apporté que je ne connaisse déjà. Mais sur le discours général, cette politique de l’humain, on en a bien besoin… Le reste, des mesures, tous les partis politiques en ont. Avant les élections », glisse Kamel Bouakli, qui dirige une entreprise de mobilhomes.

Embouteillages

L’humain. Le mot est revenu souvent dans la bouche de l’ancien animateur. Et pour un novice en politique, où le serrage de pognes est une figure incontournable, il est « direct », « proche », se réjouit un membre de la caravane qui l’accompagne. Les rencontres d’Ushuaïa ?

Le rythme effréné de la visite de la Castellane, où Sébastien Barles (porte-parole marseillais d’EELV, qui a planifié pour clore la journée un passage sur un thème plus écolo au massif de la Nerthe) s’échine à lui faire presser le pas pour éviter de creuser un retard déjà prononcé, semble d’ailleurs l’agacer. « On ne fera pas tout le temps la campagne comme ça. Il y a des fois où on a envie de se poser deux heures quelque part », glisse-t-il, à moitié pour lui-même.

Au hameau de la Nerthe, où les habitants en guerre contre un projet de pôle conteneur et de décharge qui viendrait remplacer des carrières l’attendent depuis une heure, il ne s’interdit pas cette fois-ci pas une promesse :

Retour dans la Prius pour un dernier trajet, vers la brasserie de l’Alcazar où l’attend un débat public. Demi-finale de Top14 oblige, les routes sont saturées. La conseillère régionale Sophie Camard s’amuse : « au moins il a vu ce qu’étaient les transports ici ». Si parmi les promesses portées pendant la campagne, il pouvait glisser un paquet de millions pour des transports en commun à Marseille, personne ne lui en voudrait…

Hôte d’Hulot à Marseille, Karim Zeribi s’affiche en patron, sur Marsactu

En attendant les primaires, ce week-end c’est congrès pour EELV, après la venue à Marseille et les critiques de Dany Cohn-Bendit, et la réponse de Cécile Duflot