Les premiers arbres de La Plaine tombent malgré la résistance

Actualité
le 17 Oct 2018
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Ce mardi, l'abattage de la centaine d'arbres de La Plaine appelés à être remplacés a commencé. Il devrait se poursuivre ce mercredi malgré la présence des opposants au projet qui ont tenté de déstabiliser l'opération.

Les premiers arbres de La Plaine tombent malgré la résistance
Les premiers arbres de La Plaine tombent malgré la résistance

Les premiers arbres de La Plaine tombent malgré la résistance

La pluie tombe, les arbres aussi et certains manifestants pleurent en voyant les premiers tilleuls chuter dans un grand crac sinistre. Ils hurlent aussi : “Collabos !”, “droit de retrait” en direction des ouvriers qui manient la tronçonneuse. Il est 9 heures et certains sont là depuis 5 heures en prévision des premières coupes que la rumeur du quartier prédisait pour ce mardi. Le vent avait vu juste. La bataille pour La Plaine connaît un nouveau rebondissement avec force CRS pour “sécuriser le chantier”.

Dans une grande page de publicité publiée la veille dans La Provence, la Soléam, société en charge du chantier, annonçait une “mise en sécurité des arbres”. La société publique d’aménagement se gardait bien alors de mentionner l’abattage. Son président LR, Gérard Chenoz mentionnait même “une transplantation des arbres qui doivent être remplacés”, se souvient Bruno Le Dantec, journaliste et membre actif de l’assemblée de La Plaine. Une déclaration du 4 juillet dernier que Marsactu a également entendue tomber de la bouche de l’élu. À voir la façon dont les élagueurs tronçonnent en plein milieu des troncs, la transplantation paraît être exclue du programme d’aménagement.

Selon certains opposants, ces arbres n’étaient pas destinés à être abattus.

La Soleam réaffirme pourtant sa position par voie de communiqué :

Ce jour, 46 arbres morts, abîmés ou blessés ont été coupés, car ils sont en amorce de
dépérissement, voire de mortalité ; ou parce qu’ils ne supporteraient pas leur transplantation. Dans les prochaines semaines, 43 arbres seront transplantés et conservés dans des conditions optimales, au sein de pépinières locales, pour assurer leur préservation. Pour assurer la meilleure transplantation qui soit, la SOLEAM doit tout d’abord déposer le mobilier urbain, le revêtement, et procéder à l’arrosage des mottes de terre.

“S‘ils avaient vraiment voulu faire ça, ils s’y seraient mis deux ans avant, croit savoir Nicolas Mémain autoproclamé “montreur d’ours urbain”, qui était présent dès potron minet. Il faut d’abord isoler les arbres pour qu’ils refassent des racines au plus près du tronc. C’est une opération très coûteuse et délicate.

Tronçonnage expéditif

Ce mardi, la délicatesse n’est pas de rigueur. À 9 heures, plusieurs dizaines de CRS sont présents pour permettre aux élagueurs de la société NGB d’opérer. Ils font barrage pour éloigner une cinquantaine de manifestants, venus tenter d’empêcher l’abattage. Au coin de la grande place, face au bar de La Plaine, un grand tilleul ploie sous les dents des tronçonneuses. Une jeune femme les mains jointes semble en prière. “Il est tellement fort mon arbre qu’il ne tombe pas”, se réjouit-elle. Effectivement cet arbre là est loin du dépérissement. L’élagueur a mal calculé son angle. L’équipe part chercher un petit bulldozer pour qu’il tombe du bon côté. Crac. Il est le troisième à tomber en quelques minutes.

Le chantier se déplace rapidement à l’autre coin de la place. La pluie redouble. Ce coin là est protégé d’une barrière métallique. Les CRS prennent place d’un côté, les manifestants de l’autre. Ils frappent la barrière en rythme et invectivent forces de l’ordre et ouvriers. “Un arbre, ça vit debout, s’il est couché, c’est qu’il est mort. C’est comme toi”, hurle un manifestant. Le petit groupe d’activistes croise les âges, les genres et les couches sociales. La colère durcit les regards, quelques poussées de gaz éloignent le groupe en colère.

“T’as fait tourner l’info ?”

Les contestataires suivent le chantier sans avoir vraiment les moyens, ni même la stratégie pour le bloquer. “Mais ils sont où ? T’as fait tourner l’info ?”, interroge à la cantonade une jeune femme, habillée de sombre. Le groupe du matin ne grossit guère au fil des heures.

La Zone à défendre de La Plaine est aussi un baroud d’honneur. “Aujourd’hui, c’est la honte, une honte collective”, s’exclame une dame. Les arbres tombent les uns après les autres. “Mais celui-ci n’était pas prévu à l’abattage”, s’exclame un homme venu en couple assister à “ce désastre”. Ces derniers mois, les activistes avaient marqué les arbres appelés à disparaître en fonction des plans du cahier des charges. Plus tard dans la journée, l’avocat de La Plaine sans frontières Benoît Candon annoncera vouloir porter plainte pour l’abattage non autorisé de “sept arbres de belle taille (…) sur le mail ouest-nord”. Ce mardi, le parquet n’avait pas enregistré sa plainte indique-t-il.

Régulièrement, la troupe entonne des chants créés en hommage à la résistance entreprise dès l’annonce du projet. Une frêle femme refuse d’obtempérer aux ordres des CRS qui lui demandent de reculer. “Je fais 1m58 et 50 kilos, ce n’est pas moi qui vais vous faire mal”. Patiemment, les hommes en noir l’éloignent des ouvriers.

Trois arrestations d’opposants

Soudain tout s’accélère. Des membres de la brigade anti-criminalité (BAC) en civil surgissent et fondent sur deux hommes. Ils les plaquent au sol dans un nuage jaune de bombes au poivre. Ils seront aussitôt embarqués. Un peu plus tard dans l’après-midi, un jeune homme subira le même sort. Sans que leurs agissements puissent expliquer leur arrestation. Ces équipiers de la BAC vérifient des photos sur leur téléphone avant de fondre ainsi. À un autre point de la place, une femme tombe, bousculée par les CRS. Elle restera de longues minutes à terre, selon plusieurs témoins, avant d’être secourue par les pompiers.

 

Le face-à-face se corse quand l’abattage arrive au square central de La Plaine. Des femmes et des hommes ont grimpé dans les arbres. L’opération est plus délicate qu’une foule à repousser. La radio de trois policiers grésille. “C’est contraventionnel. Pas de coercition”. En clair, les opposants grimpeurs ne commettent pas d’infraction pénale. “Nous devons les inviter à descendre, sans utiliser la force, décode un policier. Mais, en même temps, il faut que nous fassions cesser l’infraction”. Une équipe spécialisée est donc appelée en rescousse. Un négociateur cagoulé passe d’arbre en arbre pour expliquer la marche à suivre : “Nous allons vous faire descendre et nous allons vous menotter pour assurer votre sécurité”.

Opération occupation de futaie

Bientôt une dizaine d’arbres portent des grappes humaines plus ou moins garnies. Un camion des marins-pompiers muni d’une grande échelle est appelé à la rescousse. Il permet de rapprocher les trois hommes cagoulés, façon GIGN, des personnes sur les arbres perchées. Leur première intervention concerne David Escalier, activiste écolo bien connu de la place marseillaise.

Le groupe d’intervention utilise une nacelle pour déloger certains manifestants perchés.

Son arbre est tellement frêle que les policiers doivent descendre en rappel depuis la nacelle pour le récupérer. “Mettez le sur un autre arbre !”, crie un jeune homme. Dans un coin, d’autres jeunes gens tentent de discuter avec l’équipe d’élagueurs pour les dissuader d’agir. “Il y a des arbres qui disparaissent, on en plantent d’autres. C’est le cycle de la nature”, avance l’un d’eux, peu sensible aux “écocide !” qui retentissent.

À chaque fois, le scénario se répète. À la nacelle ou à l’échelle, les zadistes sont descendus, les CRS encerclent et l’arbre est abattu. Pendant ce temps d’autres arbres promis à la disparition car situés sur l’emprise des futures voies se chargent de nouveaux humains. Au milieu de l’après-midi, tout cesse. Les pompiers quittent l’ancien champ de mars sous les brocards. Les CRS rejoignent leurs cars. Certains “plainards” en profitent pour tirer les arbres abattus sur la voie publique “juste pour les faire chier”, glisse l’un d’eux. Un camion attend les autres grumes. La BAC chasse. La bataille de La Plaine se poursuit. L’abattage aussi. À quelques mètres, les restaurants du cours Julien ont fait le plein malgré la pluie. Les commensaux finissent leur café, indifférents à l’aménagement en cours et à la colère qu’il emporte.

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Commentaires

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  1. Lecteur Electeur Lecteur Electeur

    Abattre des arbres pour faire une route en plein milieu de la place pour planterplus loin des arbres en pot, participe-t-il de la lutte contre le réchauffement climatique de de Macron et son copain Gaudin ?

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    • Massilia fai avans Massilia fai avans

      “la lutte contre le réchauffement climatique de de Macron et son copain Gaudin”
      Je ne comprends pas la question: le réchauffement climatique de Macron et Gaudi, vous voulez dire qu’ils en sont à l’origine?

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    • LaPlaine _ LaPlaine _

      C’est quoi cette désinformation d’arbres en pot?

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  2. Massilia fai avans Massilia fai avans

    Un petit complément pour ceux qui n’habitent pas le quartier.
    La “fête” a duré une bonne partie de la nuit, impossible de dornir.
    Et au petit matin, le corolaier habituel: la façade de l’immeuble couverte de tag immonde, et une quantité incalculable de déchets dans la rue.
    Merci de défendre les arbres qui repoussent, et de laisser les autres nettoyer la m….

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    • LaPlaine _ LaPlaine _

      Oui tout ceci est assez parlant sur la réelle mentalité de ceux qui défendent les arbres et la Plaine si conviviale. Conviviale pour certains…

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    • Magnaval Magnaval

      Convivialité de poivrots.

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    • Alain M Alain M

      Êtes-vous sûrs que le projet Soleam va régler le problème des incivilités? A quelle moment de la concertation la question du traitement de ces difficultés réelles a t’elle été posée? Jamais! C’est une occasion ratée qui apporte la preuve qu’une société anonyme comme comme la Soleam ne sait pas remplir des missions de service public. Son objectif est de faire travailler les entreprises de BTP . Point barre. Après cela quel délice pour les politiciens de voir les retraités prendre pour ennemis les chômeurs, les jeunes les vieux et vice versa.

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  3. chabby chic chabby chic

    refaire la plaine, un petit lifting simple et peu couteux c’est très bien; les méthodes employées sont inadmissibles; ce dossier n’est que mensonge depuis le départ; ce n’est pas digne d’une équipe municipale qui se targue d’étre honnete; il y a des écoles à Marseille qui en sont pas rénovées; on met une somme inconsidérée dans le réfection de la plaine, on aurait pu mettre bien moins, faire des travaux bien moins long qui ne portaient pas atteinte aux commerçants ni aux forains; et mettre le reste du budget pour rénover les écoles; réveillez vous marseillais, quoique vous pensiez du quartier de la plaine, ce cas est symbolique; où va l’argent de vos impôts? pensez à l’avenir de vos enfants;

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    • Magnaval Magnaval

      Vous racontez n’importe quoi. La rénovation urbaine ne mobilise pas les mêmes fonds que la rénovation des écoles. Les crédits européens ou régionaux sobt fléchés et ne sont pas modifiables.
      Surtout, c’est la ville seule qui gère les écoles, non la métropole.

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  4. LN LN

    Quelques soient les travaux de construction de rénovation de requalification et tout le c…. de Madon (pardon !) il faut d’abord abattre des arbres et ensuite empiéter sur l’espace public à l’aide de barres de béton (en general trottoirs et rues) pour justifier l’injustifiable. Ici, nous avons la totale.
    Je n’y reviens pas, la teneurs des commentaires et l’agitation sur la la place démontrent tout simplement que la nullicipalité a fait comme d’habitude dans le bon sens, de réflexion, d’anticipation, de concertation pour améliorer comme il se doit la vie du citoyen, en bonne intelligence.

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    • Qlementie Qlementie

      Enfin aujourd’hui il n’y a pas d’espace public, il y a un parking.
      Et des arbres qui poussent dans 3m3 de terre, ça n’a rien de vegetal….
      Traiter les pompiers de collabo, c’est inadmissible!

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    • LaPlaine _ LaPlaine _

      Les pompiers…et les ouvriers que l’on a envoyé au charbon (si je peux me permettre l’expression”, j’ai été plus choqué par cela que par l’abattage des arbres qui était prévu. Je considère aujourd’hui ces manifestants au même niveau que ceux qui les ont fait venir ici.

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  5. Qlementie Qlementie

    Enfin aujourd’hui il n’y a pas d’espace public, il y a un parking.
    Et des arbres qui poussent dans 3m3 de terre, ça n’a rien de vegetal….
    Traiter les pompiers de collabo, c’est inadmissible!

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  6. chabby chic chabby chic

    ne détournons pas le sujet! les pompiers et autres sont victimes d’une municipalité qui monte les gens les uns contre les autres! ils font leur travail sinon ils sont virés…alors ne parlons même pas d’eux…..

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    • LaPlaine _ LaPlaine _

      Vous évacuez bien facilement les choses et les gens entre vérité d’opinion et vérité factuelle. Si vous estimez normal d’invectiver et de traiter de “collabos” des employés qui n’ont d’autre choix que faire ce pour quoi ils sont payés, on devine quel monde vous encouragez. Allez manifester devant la mairie où à la métropole.

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    • chabby chic chabby chic

      je ne dois pas parler correctement, justement je dis de ne pas s’en prendre aux pompiers…..je vis dans un monde cool et respectueux

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    • LaPlaine _ LaPlaine _

      Mes excuses pour cette interprétation, on est un peu sur les nerfs…

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    • Magnaval Magnaval

      Et menacer la vie du paysagiste, vous en pensez quoi ?

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  7. Zumbi Zumbi

    Nous avions entendu exactement le même mensonge lorsque la municipalité avait vendu pour y mettre un immeuble une grande partie du square Henri Levy, à quelques centaines de mètres de là. “On va déplacer ses arbres et les replanter” disaient monsieur Moraine et les élus LR au conseil d’arrondissement : le mensonge était encore plus grossier, s’agissant d’arbres hauts comme des immeubles dont les racines s’enfonçaient profond dans la colline.
    Quand à la capacité de Messieurs Gaudin, Moraine et compagnie Soleam de tirer des leçons du passé, on l’a entendu lors du dernier conseil municipal où notre élégant maire a évoqué “les écolos qui nous emmerdaient au square Levy”. On l’a encore entendu il y a peu de la part de mlnsieur Tian : il ne connaît de la population que les “négociants” de son espèce. Les autres n’existent que comme des nuisances à leur conception de l’urbanisme ; “il faut bien mettre les gens quelque part” m’a dit l’un d’eux — que quelque part ces gens marchent, se parlent, que leurs enfants courent, jouent au ballon, aillent à l’école publique, etc. , que les papés et les mamettes aient des bancs à l’ombre ou au soleil… il n’a rien eu à me répondre.
    Au fait, a-t-on envoyé les remplisseur, les CRS et la bac chez le conseiller municipal (chargé du patrimoine !) qui s’est bâti illégalement un garage ?
    Ce n’est pas forcément approuver les méthodes de certains opposants ( par exemple ceux qui se sont “radicalement substitués aux groupes d’habitants du quartier) que de déplorer tout cela.

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    • Zumbi Zumbi

      Pas les remplisseur, les démolisseurs.

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  8. LaPlaine _ LaPlaine _

    Pour compléter le dossier, la manifestation en ce moment sur la Plaine, des dizaines de défenseurs des arbres sont montés dans les magnolias (légalement protégés) qui ne vont certainement pas s’en remettre, je suis atteré par l’ignorance de certains de ces massacreurs.

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    • Magnaval Magnaval

      Oui, j’ai vu ça aussi. Ces imbéciles heureux sont affolants et dangereux.
      Les arbres ne sont qu’un prétexte pour des manœuvres politiques d’agitation.

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