Le rapport d’Éric Woerth appelle à sortir la métropole Aix Marseille de “l’impasse”

Le rapport d’Éric Woerth appelle à sortir la métropole Aix Marseille de “l’impasse”

Son passage devant les conseillers métropolitains, il y a quelques semaines, n’avait été assorti d’aucun commentaire d’Éric Woerth, sur le cas particulier de Marseille et de sa métropole dans “le jardin à la française” des territoires. Le rapport remis au président de la République début mai par le député Renaissance et publié par Le Figaro appelle clairement à une nouvelle réforme en profondeur de la métropole Aix Marseille Provence.

Le titre du chapitre qui lui est consacré est sans appel puisqu’il enjoint à sortir “la métropole de Marseille de l’impasse”. Le député Renaissance de l’Oise écarte clairement la possibilité d’un “éclatement” de la métropole actuelle à 92 communes vers deux entités, centrées sur Marseille et Aix, et opposant la métropole de la mer à celle de la terre. Ce scénario, défendu de longue date par les maires d’Aix, Maryse puis Sophie Joissains est balayé d’emblée : “Cet éclatement serait en décalage avec la réalité socio-économique de ce territoire et préjudiciable à son potentiel“.

Recentrer la métropole

Mais, pour que la métropole de Marseille fonctionne, le député Woerth propose de recentrer la métropole sur les compétences stratégiques du développement du territoire, en faisant redescendre à l’échelon communal, les compétences de proximité. Cette fois-ci, Éric Woerth propose un fonctionnement en deux étapes : d’abord une étape de délégation de compétences qui rappelle furieusement les critiques formulées jadis par la chambre régionale des comptes à l’égard de la première mouture de la métropole Aix Marseille Provence.

Pour Woerth, cette nouvelle étape de délégation doit désormais concerner “la rénovation urbaine, à la politique de la ville, à la propreté urbaine et à la voirie”. La dernière loi de décentralisation de février 2022, dite 3DS, avait déjà engagé une telle disposition dans un scénario “à la carte” sur la propreté urbaine et la voirie qui n’avait pas convaincu le maire de Marseille. Désormais le panier s’élargit à des compétences déjà partagées et portées politiquement par Audrey Gatian et Samia Ghali.

“Rebattre les cartes” financières

La deuxième étape de ce nouveau train de réforme, en cas de blocage persistant, serait une nouvelle réforme de la métropole Aix Marseille Provence, destinée “à rebattre les cartes” en encadrant les compétences de cette “métropole à statut particulier”. Cela passe notamment par une remise à plat des attributions de compensation. Le sujet était déjà au cœur du discours du Pharo d’Emmanuel Macron du 2 septembre 2021, au cours duquel le chef de l’État avait critiqué les trop importants versements de la métropole vers les communes, baptisées “attributions de compensation” (AC). Éric Woerth reprend ces critiques à son compte :

“Le niveau de l’attribution de compensation obère la capacité d’investissement de la métropole Aix-Marseille-Provence et fragilise ses équilibres. Son montant demeure très important et pour partie infondé au regard des charges associées à ces compétences”.

Pour autant, il ne méconnaît pas que ces versements sont désormais intégrés aux budgets des différentes communes qui auraient donc du mal à s’en passer. Le rapport préconise de changer le mode de réforme des AC, par un vote des deux-tiers de l’assemblée communautaire, sans passer par un accord de chaque commune. Il propose également de faire présider la commission chargée de la répartition des compétences et des moyens par un magistrat de la chambre régionale des comptes.

En cas de blocage persistant, le rapport préconise deux scénarios de sortie par le haut. Une loi spécifique permettant la réouverture “du chantier des compensations” notamment sous l’égide du préfet. Ou un fonds spécifique sur “le modèle du fonds de solidarité de la région Île-de-France pour contraindre les communes les plus aisées à partager davantage leurs ressources“.

Plus de place aux maires

Plus largement, le rapport d’Éric Woerth exhorte la métropole présidée par Martine Vassal à laisser plus de place aux deux communes centres, Aix et Marseille. Un point sur lequel, Benoît Payan et Sophie Joissains se retrouvent régulièrement. Il appelle donc à renforcer le rôle de la conférence des maires en les dotant d’un droit d’alerte sur le projet métropolitain. Le député évoque également la création d’instances de concertation sous la forme de “conférences territoriales”. Celles-ci sonnent comme un retour en arrière, après la disparition des conseils de territoire, vestige des six précédentes intercommunalités fusionnées pour créer la métropole en 2016, entérinée par la loi 3DS.

Sur les transports, le rapport revient sur les modalités du plan Marseille en grand, appelant à la création d’un syndicat départemental associant l’ensemble des institutions du territoire, département, région et l’État. Ce syndicat aurait pour rôle d’exploiter l’ensemble des réseaux de transport actuels : bus, cars et trains. Côté investissements, cette méga RTM pourrait bénéficier de l’expertise de la société des grands projets qui a piloté les travaux du Grand Paris.

Plus de cumul entre métropole et département

Côté électoral, le rapport Woerth écarte la possibilité d’une élection directe des élus métropolitains pour éviter une concurrence entre les deux strates. En revanche, il recommande de renforcer le rôle des maires en leur sein. Le rapport propose donc que dans les neuf mois suivant l’élection des représentants de la métropole, celle-ci accouche d’un projet de territoire, d’un pacte de gouvernance et d’un pacte fiscal et financier.

Si le rapport réintroduit la possibilité de cumul entre les responsabilités nationales et locales, en permettant à un parlementaire de rester maire, adjoint au maire ou président de métropole, il préconise l’interdiction du cumul entre la présidence d’une métropole et d’un département, comme le fait Martine Vassal depuis son arrivée à la tête de ces deux institutions.

Deux urnes pour Marseille

Comme le chef de l’État avant lui, Éric Woerth recommande de remettre à plat le mode d’élection des maires de Paris, Lyon et Marseille, en abrogeant la loi PLM. Cela signifie que, comme dans toutes les villes de France, la liste arrivée en tête bénéficiera d’une prime majoritaire et donc de davantage d’élus que dans la configuration actuelle. En revanche, il ne retient pas le scrutin de liste comprenant autant de sections qu’il y a de secteurs sur le modèle des élections régionales. Il préconise donc une élection double où les électeurs marseillais éliraient en même temps des élus de proximité dans chaque secteur et les élus du conseil municipal. Pour ce qui est des compétences des mairies de secteur, le rapport propose de garder le système actuel : c’est au conseil municipal de choisir ce qu’il délègue à l’échelon de proximité. En arrivant aux affaires, le Printemps marseillais n’avait rien changé aux choix de son prédécesseur.