Face à la crise, Aix, l'étang de Berre et Marseille-Aubagne dans le top 15 français

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le 13 Juin 2011
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Face à la crise, Aix, l'étang de Berre et Marseille-Aubagne dans le top 15 français
Face à la crise, Aix, l'étang de Berre et Marseille-Aubagne dans le top 15 français

Face à la crise, Aix, l'étang de Berre et Marseille-Aubagne dans le top 15 français

L’onde de choc de la crise financière américaine devenue économique et mondiale n’a pas fait partout en France les mêmes dégâts sur l’emploi. D’après une étude de la Fédération nationale des agences d’urbanisme, coordonnée par le Marseillais Patrick Tanguy (Agam) avec un homologue lorientais, elle a même accentué en 2008 et 2009 les différences (le résumé ici, l’étude complète ). Globalement, les territoires qui résistent le mieux sont plutôt dans le Sud (10 dans les 15 premiers, sur 161 au total), et ce sont plutôt des bassins de population conséquents.

Même si Patrick Tanguy insiste sur les bémols, notamment pour les zones attractives (résidentiel et tourisme), où l’activité de construction a pu virer à la surchauffe avant de s’effondrer, minée par la raréfaction du crédit, ou pour les bassins industriels, dont certains s’en sortent bien. Il nous détaille les enseignements pour la région et l’aire métropolitaine marseillaise en particulier.

Marsactu : quels ont été les effets de la crise dans la région ?

Patrick Tanguy : Un des déterminants communs est une certaine forme d’attractivité résidentielle, ce qui a quand même atténué la crise. Les territoires les plus impactés (Arles, Châteaurenard, Nice) se trouvent donc dans la moyenne nationale. On ne constate pas de surchauffe résidentielle et on n’est pas vraiment spécialisé dans l’industrie – sauf l’étang de Berre, mais dont on a vu qu’il s’en tirait mieux que la moyenne…

Il est même 11e dans votre top 15, où l’on trouve aussi Aix sur le podium (3e) et Marseille-Aubagne (15e). Mais avec des profils différents…

Avant de mesurer l’impact de la crise, on a en effet essayé de caractériser les territoires. Et dans la catégorie « administratif » (identifié comme plutôt protecteur face à la crise, ndlr), on trouve Marseille-Aubagne. Mais ce n’est pas l’apanage de Marseille, contrairement à une idée reçue. C’est le cas de figure assez courant des capitales régionales qui concentrent les emplois des conseils général, régional, des directions régionales de l’Etat et tout ce qui est parapublic. Je pense que c’est plutôt une analyse en creux qu’il faut mener : si le poids de l’emploi public est relativement élevé, c’est peut-être aussi parce que les emplois technologiques ne sont pas aussi « voyants » qu’ils le sont par exemple à Aix. La spécificité aixoise qui n’en ressort que plus fortement car elle n’a pas les attributs habituels d’une ville conséquente. C’est un territoire placé sur une trajectoire métropolitaine extrêmement rapide, c’est-à-dire avec des emplois de « cadres de fonctions métropolitaines » (recherche, R&D, culture/média…). Marseille connaît aussi cette dynamique, mais pas à la hauteur d’Aix, qui est au niveau de Toulouse.

Pour Berre, le profil est clairement industriel, comment expliquez-vous cette situation pourtant favorable ?

Il me semble que les très grandes entreprises qui y sont implantées ont eu la capacité financière de faire de la « rétention de main d’oeuvre ». Elles ont fait le dos rond, pensant que la crise allait être temporaire, pour ne pas se passer d’un personnel dont elles auraient besoin dans un an ou deux et avoir, comme après la crise de 1993 énormément de mal à retrouver des compétences perdues. Mais le redémarrage attendu en 2010 a été très modeste et il l’est aussi en 2011, et on voit ces temps-ci du côté de l’Etang de Berre une situation moins favorable (car notre analyse s’arrête en 2009). On a aussi constaté, en marge de ce travail, une certaine forme de métropolisation des emplois dans ce bassin. Du moins pour les plus proches d’Aix et Marseille, donc il y a peut-être un effet de halo.

Justement, ces trois territoires aux profils différents ne sont-ils pas reliés ?

Compte tenu du fait qu’il est très difficile de se loger à Aix, il y a de plus en plus d’actifs de la micro-électronique ou autre qui vont habiter du côté de Salon, où l’on trouve aussi des gens qui travaillent par exemple à Eurocopter et viennent chercher un cadre de vie peut-être plus agréable. Il y a donc petit à petit la mise en place d’une forme de spécialisation des territoires avec des destins liés aux trajectoires des voisins. L’apport de ces gens qui résident et vont travailler à l’extérieur mais font vivre leur territoire d’accueil via les activités tournées vers les ménages peut atteindre de 10 à 20% des revenus d’un territoire. Deux pôles – Marseille et Aix – en terme net, distribuent plus de revenus qu’il n’en reçoivent, par le biais de ce phénomène de navettes domicile-travail. Il existe bel et bien un système métropolitain, par l’intensité des interdépendances.

Ce qui n’est pas sans renvoyer au débat, politique celui-là, sur la métropole…

A partir du moment où ce système, en bonne partie constitué par les individus, se met en place, il faut que les pouvoirs publics prennent le relais. Cet espace qui se polarise, qui se construit doit être servi par des colonnes vertébrales et notamment les transports en commun. Et là on arrive à un problème crucial et éminemment politique. On doit organiser le fonctionnement interne de la métropole pour assurer son efficacité, sa fluidité. C’est avant tout faire en sorte qu’il y ait un seul et même marché du travail et c’est grâce à la mobilité qu’on arrivera à le faire. Sinon, vous avez d’un côté une offre d’emploi qui reste insatisfaite et une entreprise frustrée dans son développement, et de l’autre côté vous gardez un chômeur. Voilà les caractéristiques nettes d’un dysfonctionnement. Et ici on n’est pas loin de ça. Si quelqu’un qui habite dans les quartiers Nord peut trouver un boulot à Luminy, il n’ira pas.

Une « alliance » qui paraît d’autant plus intéressante que la diversité d’un territoire est identifiée comme une résistance…

C’est pour cela qu’on retrouve les métropoles parmi les territoires qui résistent souvent mieux à une crise : parce qu’il y a plusieurs plusieurs moteurs. Un quadriréacteur peut atterrir s’il en a un en feu. Et on l’a observé avec beaucoup de territoires où la baisse de l’emploi industriel est compensée par le tertiaire supérieur. Ici, Marseille a plusieurs moteurs actifs, Aix aussi, mais les autres territoires sont peut être davantage démunis. D’où la nécessité d’une solidarité, pour peu qu’il y ait cette fluidité, que les habitants perdant un emploi ici peuvent en trouver un ailleurs. Maintenant il s’agit de passer aux actes, même s’il y a eu des avancées comme la création d’un syndicat mixte des transports, le doublement de la ligne ferroviaire Aix-Marseille et les navettes routières… C’est vrai que ce sont des investissements lourds, mais en même temps, regardons ce qui se fait dans les autres métropoles et c’est aussi un problème économique : notre marché de l’emploi est fractionné, c’es
t une mosaïque.

Un lien Sur le même thème : La crise et nos territoires : premiers impacts, étude pour l’assemblée des communautés de France

Un lien L’effet retard de la crise semble aussi jouer à Marseille, attention donc à 2010 et 2011…

Un lien Marseille, Aix et Aubagne : trois présidents pour un pôle métropolitain, sur Marsactu

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Commentaires

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  1. Ladika Ladika

    C’est quoi l’Agam ? gam gam gam…

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  2. M34 M34

    “on retrouve les métropoles parmi les territoires qui résistent souvent mieux à une crise : parce qu’il y a plusieurs plusieurs moteurs”

    Encore une fois c’est la démonstration qu’il faut “jouer collectif”, mutualiser les ressources et réfléchir ensemble. Les querelles de clochers sont totalement dépassées

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