Aux Aygalades, la promesse d’un parc “haute couture” entre en concertation

Actualité
le 5 Oct 2023
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Ce mardi, Euroméditerranée lançait la concertation publique autour du futur parc des Aygalades, entre le Canet et les Crottes, à Marseille. Mais, au-delà du parc lui-même, les habitants présents étaient préoccupés par les abords et notamment les futures constructions.

La réunion de lancement d
La réunion de lancement d'Euroméditerranée avait lieu à la Joliette, avant des ateliers dans les quartiers concernés par le projet. (Photo : B.G.)

La réunion de lancement d'Euroméditerranée avait lieu à la Joliette, avant des ateliers dans les quartiers concernés par le projet. (Photo : B.G.)

Sur le grand écran, l’ébauche du futur parc des Aygalades s’attarde, en fond d’une discussion animée. La directrice générale d’Euroméditerranée, Aurélie Cousi, écoute avec attention une habitante du Canet. Il est 20 H 30 et des poussières, ce mardi 3 octobre, et la réunion de concertation autour du futur parc des Aygalades vient de se clore. À côté d’un cabas qui déborde sur une chaise, le mari et la petite fille du couple s’impatientent. Visiblement, ils ont profité des courses hebdomadaires pour venir participer à la réunion de concertation pour le parc qui doit s’ouvrir à l’horizon 2030 sous leurs fenêtres. Ou presque.

Et c’est bien ce qui préoccupe la mère de famille. “Moi, ce n’est pas forcément le contenu du parc qui m’intéresse, explique-t-elle à la directrice attentive. Savoir quel type de mobilier sera choisi, les jeux d’enfants ou les jardins partagés. Là-dessus, je vous fais confiance. Ce qui m’inquiète, c’est ce qui sera construit autour du parc. Parce que quand je passe, dans le quartier d’Arenc, la hauteur des bâtiments me donne un peu le vertige“.

La dame habite le septième étage d’un bâtiment moderne du boulevard Casanova, l’une des rues très passantes qui longent le futur parc et qui marque la limite effective du périmètre d’aménagement géré par Euroméditerranée, un établissement public. Aujourd’hui, sa crainte première est de voir disparaître ce bout de mer qu’elle voit encore de chez elle et qui pourrait être remplacé par de nouveaux bâtiments de grande hauteur qui viendraient symboliser la ville dense que les documents d’urbanisme présentent comme une nécessité.

Des trainées d’arbres en vert fluo

Un vue d’architecte du futur parc dessinée par l’équipe de l’urbaniste François Leclerq. Cliquer pour agrandir. (Photo : B.G.)

Sur la vue d’artiste que le cabinet d’urbanisme de François Leclerq a fourni à l’établissement public, le parc apparaît comme une nappe vert fluo qui se répand sur les voies attenantes. Ces plantations font oublier les nouveaux bâtiments qui parsèment sa lisière.

En réponse à une question posée en tout début de réunion, la présidente d’Euroméditerranée, l’élue LR Laure-Agnès Caradec, est très claire sur les intentions constructives à cet endroit. “Il y a le parc et, en bordure, une partie qui n’est pas dans le plan guide de François Leclerq, mais qui est encore dans le périmètre d’Euroméditerranée. Nous savons qu’il y aura des immeubles de grande hauteur qui donneront sur le parc. Cette hauteur ira en diminuant pour venir rattraper le gabarit des constructions du Canet“. Peu probable, donc, que la dame conserve sa vue sur mer.

Pendant la réunion, l’adjointe marseillaise (DVG) Samia Ghali est tout de suite intervenue pour venir contrebalancer les propos de l’élue LR. “C’est la Ville qui instruit les permis de construire, précise l’ancienne maire de secteur, omettant que, sur le périmètre de l’opération d’intérêt national, c’est le préfet qui les signe. En tout cas, il n’y aura pas de barre entre le Canet et le parc“.

Sur Arenc, il y a eu un parti-pris de maximiser la vue sur mer avec des immeubles de grande hauteur. Cela sera certainement différent sur le Canet.

Aurélie Cousi, directrice générale d’Euroméditerranée

Aurélie Cousi se veut rassurante. “C’est une vraie question, les formes urbaines sur ce secteur. Sur Arenc, il y a eu un parti-pris de maximiser la vue sur mer avec des immeubles de grande hauteur. Cela sera certainement différent sur le Canet”. Mais tout ceci fera l’objet d’arbitrages et de concertation future, loin de la bonne nouvelle du jour. À savoir : un parc de 20 hectares, “le plus grand en France en cours d’élaboration“, affirme Mohamed Belhouari, directeur de l’urbanisme et du paysage chez François Leclerq.

Une première réunion loin du parc

En ce lancement de concertation, élus et techniciens tendent cette promesse comme une page blanche offerte aux habitants. Organisée au pied des Docks, la réunion se tient loin du futur parc et des quartiers populaires du Canet, de la Cabucelle ou de Félix-Pyat. Peu de riverains ont fait le déplacement. Mais, après tout, défend-on chez l’aménageur public, le parc est destiné aux habitants de toute la ville. La concertation doit se rapprocher d’eux à travers des ateliers, en octobre et novembre, ainsi que sous la forme d’expositions itinérantes sur les places, parcs et stades du secteur.

Les périmètres de plusieurs projets d’Euroméditerranée. (Cliquer pour agrandir)

Ensuite, les souhaits recueillis permettront de nourrir le cahier des charges à partir duquel les trois équipes devront plancher durant une phase de dialogue compétitif. Au bout de cette période de négociations avec l’aménageur, le lauréat sera désigné et les travaux lancés en 2026. Pour une livraison attendue en 2030.

Ouverture en 2030 “avec des pointillés”

Il aurait convenu de mettre des pointillés, commente Aurélie Cousi, en découvrant la frise projetée par le cabinet chargé de la concertation. Pour l’instant, on table plutôt sur 2031“. Peu importe la date, ce n’est pas tous les jours qu’on livre un deuxième parc Borely à Marseille. Il y a quelques mois, les élus ont opté pour un parc de grande ampleur, permettant aux crues du ruisseau des Aygalades de s’épandre largement, sans inonder les quartiers traversés, comme en 2003. Une décision que salue Nacera Benmarnia, adjointe aux espaces verts, résultat d’une “coconstruction entre Euromediterranée et la Ville“. Elle ajoute :”trop souvent on parle de parc et cela devient les espaces verts de copropriétés privées. Ici ce n’est pas le cas, c’est une coulée verte qui doit apporter du bien être aux habitants, de la porte d’Aix à très haut dans le Nord“.

Ce parc s’inscrit dans la politique de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (Gemapi) de la métropole. Au-delà des crues, il doit permettre de réhabiliter en profondeur le cours d’eau tout au long du “chevelu” du bassin versant. La métaphore capillaire tombe de la bouche de Didier Réault (LR) chargé de ces questions à la métropole : “Nous souhaitons profiter des travaux du parc pour lancer la renaturation de l’ensemble du cours d’eau, en lien avec la mairie de Septèmes-les-Vallons, répond-il aux participants qui s’inquiètent du manque d’eau ou de son état fortement pollué. Mais il ne faut pas se faire d’illusion, on ne parviendra pas à rénover l’intégralité du « chevelu » du bassin versant“. La question des pollutions industrielles en amont du cours d’eau est toujours entière.

Apaiser les boulevards et implanter des équipements

Au-delà du parc lui-même, ce sont ses à-côtés qui nourrissent une bonne part des interventions : qu’adviendra-t-il de l’unique passerelle piétonne qui permet aujourd’hui de passer des Crottes au Canet ? Comment réussir à apaiser les grands boulevards qui le bordent ? “Des études seront lancées pour apaiser l’avenue Fernand-de-Lesseps au sud comme le boulevard Casanova, affirme Aurélie Cousi. À long terme, ces bretelles autoroutières seront sans doute déclassées pour devenir des voies urbaines. Le représentant de la préfecture, nouvellement arrivé à Marseille, ne se risque pas à avancer une date pour cette révolution.

En attendant, les élus mettent en avant un parc “haute couture, réalisée sur mesure avec les habitants”, comme le promet Nadia Boulainseur, la maire de secteur (DVG). Avec comme accessoires, une kyrielle de nouveaux équipements. “Il y aura une piscine au pied de Félix-Pyat. Une grande médiathèque à Cap-Pinède”, pose Samia Ghali.

Et même un “équipement ludo-sportif” à deux pas de la station Gèze, formule la directrice d’Euroméditerranée. Elle confirme ainsi l’implantation possible d’une arena en bout de parc, ébauchée dans une étude révélée par Marsactu“C’est aux élus de décider quel nom, ils souhaiteront lui donner”, pirouette Aurélie Cousi en réponse à nos questions. Concertation ou pas, le parc et ses abords sont d’abord le fruit d’une co-construction entre élus et techniciens.

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Commentaires

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  1. Forza Forza

    Arbitrer avec un Préfet qui a fait virer notre adjointe à l’urbanisme parce qu’elle ne signait pas suffisamment de permis de construire de logements sociaux (et de logements tout court). Bonne chance !

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    • polipola polipola

      Bien dit !

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  2. Kitty Kitty

    Dans cet ancien quartier industriel, je n’ai pas lu une ligne son rôle dans la nécessaire réindustrialisation de Marseille. Un nouveau quartier pour les artistes, les consultants et les livreurs Uber ?

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    • polipola polipola

      “nécessaire réindustrialisation de Marseille” ? Pouvez-vous préciser ?

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    • RML RML

      Industrialisation? En pleine ville???

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    • Bertrand B. Bertrand B.

      Dans ce quartier ce sont surtout les sièges sociaux des entreprises « industrielles » qui s’implantent

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    • Kitty Kitty

      @polipola
      C’est très simple, soit Marseille décide de redevenir une ville fabricante (et la révolution de l’écoindustrie en-cours offre de gigantesque opportunités pour ce faire) et elle pourra stopper la montée de la misère, de l’endettement et de la fiscalité ; soit elle continue à cibler le tourisme de masse, l’économie uberisée et Rbnbisée et “l’industrie du social”, alors il ne faudra pas se plaindre de la relégation de notre ville. Et c’est dans les quartiers anciennement industriels où il reste encore beaucoup de friches que c’est possible. Maintenant, si on considère les Aygalades, les Crottes, etc. comme des quartiers résidentiels et de centre-ville, alors en effet je crois que définitivement Marseille continuera à importer 96% de ce qu’elle consomme (source AGAM et record de France !).

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  3. Richard Mouren Richard Mouren

    Ne pas bâtir sur l’immense emprise de la gare de triage du Canet et la transformer en un très grand parc agrandi par le futur parc Bougainville et relié au parc Billoux est une très très bonne idée qui fera respirer cette partie du nord de la ville. Il me semble qu’il existe encore un bon nombre de friches industrielles qui pourraient être réindustrialisées. Merci au Gabian pour cet article d’autant plus clair qu’illustré par des inserts cliquables et agrandissables.

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  4. Alceste. Alceste.

    Et les points de “deal” sont-ils situés ?

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    • Patafanari Patafanari

      Juste à côté des points de racolage.

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    • julijo julijo

      et de préférence sur des voies faciles d’accès, car les consommateurs achètent, mais n’habitent pas le secteur !

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  5. Andre Andre

    Si je ne me trompe, la partie habilement coloriée en vert clair, à droite du lit du ruisseau des Aygalades qui est en vert foncé, est vouée à l’urbanisation, ces immeubles de grande hauteur à construire sur l’emplacement du faisceau de voies de la gare du Canet.
    Le parc est donc réduit grosso modo au lit du cours d’eau, à la partie inconstructible du site, sans doute sujette aux inondations. On a là toute la logique de l’aménageur Euromed : “si on ne peut pas construire, mais alors vraiment pas, faisons un espace vert”.
    On pourra rétorquer que c’est mieux que rien et qu’on préserve et renature le cours d’eau, Parfait!
    Mais de fait, on constitue là un lieu public très contraint de par sa configuration linéaire. Ce qui amène à poser la question de sa gestion, qui sera difficile. Qui s’en chargera, avec quel budget, quel personnel, quels moyens gardiennage? Sera -t- il fermé la nuit (a priori difficile)? L’appropriation par les habitants sera-t-elle encouragée, soutenue?
    Quand on sait qu’à Marseille les espaces verts restent, avec Payan comme c’était le cas avec Gaudin, les parents pauvres de la gestion municipale, on a le droit de s’inquiéter. Une direction aussi indigente et mal dirigée que celle des espaces verts, qui a déjà beaucoup de mal a entretenir les espaces existants, pourra-t-elle prendre en charge ce gros projet de configuration difficile? Aménager n’est pas le problème, il y a des gens compétents qui savent le faire, mais une mauvaise gestion ultérieure peut vite tourner au catastrophique et à une vraie nuisance pour le quartier. Tout l’inverse de l’objectif affiché.
    Il est dommage que la question n’ait pas été abordée.

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    • Marc13016 Marc13016

      Effectivement, projeter, aménager, construire, payer des travaux … c’est assez motivant, pour des politiques comme pour des architectes/urbanistes.
      Mais faire vivre un espace, ce n’est pas tout à fait pareil. Souvent les budgets manquent (on nous explique, c’est des euros de fonctionnement, c’est plus de l’investissement, on en a moins). Puis le tout dépérit. Au mieux, ça ferme, au pire, ça devient la jungle (urbaine, pas avec les tigres, avec les dealers et autres commerces “sanglants”). Espérons que nos collègues Paysagistes vont aussi plancher sur ces futurs usages. Du genre : là, il y aura une buvette. Là, un manège. Là un resto (solidaire, allez). Bref: il y aura du monde, de la vie.

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  6. MarsKaa MarsKaa

    Je ne sais si ce parc aura ou pas la même destinée que le parc du XXVIe centenaire, en tout cas le risque existe : parc prétexte pour des opérations immobilières, joli parc inauguré en grandes pompes puis vite oublié (pas d’entretien, encrassement puis coupure du circuit d’eau, dégradation des espaces vegetalisés…), parc urbain sous-équipé vite sur-fréquenté, puis occupation d’une partie du parc par des algeco pour les chantiers voisins, pendant des mois puis des années, parc traversé par des engins de chantier pour… les chantiers voisins, et aujourd’hui chantier du tram qui entame une partie du parc etc…

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  7. Oreo Oreo

    Oui très déçu par l’abandon par cette nouvelle municipalité des parcs existants. En particulier en effet par celui du XXVIème centenaire qui est une désolation. Tous les spécialistes sérieux vous le diront : pas de jardin sans jardinier. Car un jardin ou un parc ne se gèrent pas seulement, ils sont avant tout l’expression sensible de ceux qui en ont la charge (et les moyens qui vont avec). Il y n’y a qu’à voir la merveille qu’est le Jardin des Migrations du MUCEM qui, je crois, bénéficie de jardiniers professionnels dédiés, que je remercie au passage pour leur travail remarquable dans un endroit bien difficile.

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  8. julijo julijo

    je m’interroge bêtement : pourquoi l’appeler “parc des aygalades” alors que ce quartier est situé nettement plus haut ? au dessus des arnavaux et de st joseph me semble-t-il ?

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    • Oreo Oreo

      Il sera traversé par le ruisseau des Aygalades, qui a aussi donné son nom au quartier en amont.

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    • julijo julijo

      merci ! ok le ruisseau – bien maltraité ce ruisseau –

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