Neptune favorise ceux qui voyagent

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le 12 Sep 2012
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Neptune favorise ceux qui voyagent
Neptune favorise ceux qui voyagent

Neptune favorise ceux qui voyagent

Tout démarre par un pétard mouillé. Et c'est Samia Ghali qui en allume la mèche en donnant une interview au Parisien Dimanche le 26 août où elle réclame l'envoi de l'armée dans les cités, le rétablissement du service militaire et autres sorties iconoclastes. À part deux, trois twittos désoeuvrés, rien ne bouge. C'est dimanche, c'est pas encore la rentrée, tout le monde bulle à la plage. Quatre jours plus tard, La Provence publie la même interview en couleur de la sénatrice – maire du 15/16. Mêmes questions, mêmes réponses. Et là bingo, la fusée part.

Coup de bol pour nos amis  de l'avenue Salengro, si l'on ose l'écrire, au moment où les premiers exemplaires du quotidien étaient distribués, on apprenait que l'AK 47 avait encore joué son requiem dans la nuit, du côté du boulevard Casanova. Et là, c'est parti pour le show. Radio, télé, presse. Ghali est partout, même chez nous. Valls lui répond, et même Hollande depuis Madrid. Double page dans le Nouvel Obs "treillis et escarpins", et invitation au Grand Journal de Canal Plus. Ghali superstar.

Même si on explique gentiment à madame la sénatrice que la légion ne sautera pas sur Saint-Henri, elle a su mettre le talon aiguille là ou ça fait mal. Gaudin a bien essayé depuis des années de cacher la misère de sa ville sous le tapis, personne n'y croit plus. La saison de Miami Beach est terminée, place à Miami Vice. Tous les éditorialistes des 8e arrondissement parisiens et marseillais, y vont de leur petite théorie sur "la nouvelle Bogota". Sur BFM, I-Télé et LCI, tournent en boucle Ghali, Mennucci- qui a réussit à prendre le TGV en marche, et Zéribi – qui connaît aussi la musique du tout info, avec en fond des images de couverture avec des Nike qui dépassent, illuminés par des gyrophares et où s'agitent des ombres en brassard orange. NYPD.

Caselli rame un peu mais arrive quand même à aussi occuper l'espace médiatique local grâce à sa nouvelle spin-doctoresse, discrètement ex-filtrée du service politique de La Provence cet été. Valls et Gaudin se livrent à une petite partie de tennis via des échanges par média interposés sur les zones de sécurité prioritaires. "Monsieur Valls ne veut classer en ZSP que les quartiers tenus par ses amis députés socialistes, c'est toute la ville qu'il faut y mettre" , "Monsieur Gaudin fait de la démagogie". Chauffe Marcel, chauffe. Et avant d'éviter que tout ce chahut ne dégénère l'ex prof d'allemand tape un grand coup de règle sur le bureau et annonce la tenue d'un comité interministériel spécial Marseille pour le jeudi 6 septembre, et comme le PM avait prévu d'aller le lundi suivant inaugurer le camp des Milles, il en profite pour passer 24 heures de plus à Marseille en immersion. Des années de tour de France en combi WW, ça apprend à optimiser ses déplacements.

Le général  Marshall peut aller se rhabiller 

Pendant quelques jours, les téléphones et les mails fonctionnent à plein régime entre Matignon, la préfecture de région à Marseille, les cabinets des 15 ministres concernés et leurs interlocuteurs locaux, la Marseillaise du gouvernement Marie-Arlette Carlotti, Eugène Caselli et le nouveau parlementaire Patrick Mennucci. Chacun y va de sa petite idée pour sauver Marseille. Et l'ex maire de Nantes et ex président de groupe au parlement demande à ce que le maire de Marseille et président du groupe UMP au Sénat soit mis dans la boucle. Brainstorming à tous les étages.

Premier bon coup pour Ayrault, son pourtant pas très sexy "relevé de conclusion à l'issue du comité interministériel" est très bien accueilli par la presse. Quelques confrères en ont presque crié au génie. Ayrault a tout compris. Il va sauver Marseille. George Marshall peut aller se rhabiller. Bon, bon, bon. Nous on veut bien. Puisque tout le monde est content, même Gaudin, on va pas faire nos rabats-joie. Un peu quand même. Car si Valls avait pendant la campagne pris l'engagement "au nom du candidat Hollande" de faire venir 300 policiers et gendarmes à Marseille, et qu'il n'y en aura au final que 205, c'est pas grave, quand on aime on ne compte pas.

La justice de son côté va récupérer un juge d'instruction, et quelques magistrats et assistants au parquet. Ils n'y croyaient plus. Bien mais peut mieux faire aussi pour le volet éducation du plan Marshalayrault, où l'effort fait sur la scolarisation de 30% des enfants avant 3 ans en maternelle dans les 5 ans, contre 15 % aujourd'hui va vraisemblablement être compliqué à tenir et nécessiter la mise à disposition de locaux par Jean-Claude Gaudin. Bon courage.

Ayrault croit en revanche beaucoup au développement des écoles de la deuxième chance, créées par son amie Edith Cresson, et comme Gaudin raconte aussi partout que c'est lui qui les a inventées, c'est un autre bon point de son plan. Le projet de lycée international anglo-saxon est en revanche un Ovni dont personne n'a vraiment su nous dire d'où il sortait (Vincent P, si tu nous lis), comme la création d'une cité de la jeunesse à la caserne du Muy. Pour le reste, rien de bien neuf, notamment dans le domaine économique où les projets dans les transports (L2, tramway, BHNS) et dans le domaine portuaire ne sont que la confirmation que l'État tiendra ses engagements.

Pas un euro de plus, mais pas un de moins non plus. L'État respectera les promesses de l'État. "Ça va nous permettre de faire avancer les choses. Quand on appellera Paris, ils ne pourrons plus traîner les pieds comme aujourd'hui", nous confiait un dirigeant local  d'un grand service de l'État. Mais la silver bullet de Marshalayrault , c'est la métropole

Casse toi pauvre pôle 

Les patrons marseillais, pas vraiment des gauchistes, ont trouvé leur héros. À l' UPE 13, à la chambre de commerce, au Top 20, dès l'annonce du premier ministre de créer une métropole européenne et méditerranéenne, les bouchons de Roederer ont sauté. "Vive les kalas", rigolaient les PDG, eux qui avaient fait depuis des mois de la transformation de Marseille en métropole la mère des batailles. Le Grand Marseille sera leur Fatima et Jean-Marc leur prophète. Les spin-doctors du Premier Ministre leur ont même piqué l'idée dudésormais célèbre Marseillais-qui-a-trouvé-un-boulot-à-1500euros-à-Fos-mais-ne-peut-pas-y-aller-car-il-va-dépenser-le-tiers-de-son-salaire-pour-l'essence-de-sa-voiture , un élément de langage décliné en boucle pendant ces 2 jours : 

 

 

 

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Eugène Caselli s'est vite rangé lui à la métropole dans une tribune enflammée dans Libération, publiée le jour même des annonces d'Ayrault, eh, eh, plantant là ses petits camarades des 8 autres agglos des Bouches-du-Rhône avec qui il travaillait pourtant depuis des mois à la constitution d'un pôle métropolitain. Casse toi pauvre pôle.

Le Jean-Marc, la métropole, il connaît. Juste avant de quitter les bords de la Loire pour l'avenue de Varenne, il a mis le premier coup de Bic à une super-métropole Loire Bretagne composée de Nantes, Saint-Nazaire, Brest, Rennes et Angers. OK c'est un pôle métropolitain, mais imaginez Marseille, Aix, Toulon, Avignon, Arles dans le même film. Non, on plaisante. C'est donc sous les applaudissements que Jean-Marc est descendu lundi dernier de son Falcon – le TGV, comme la présidence normale c'est terminé – en VRP métropolitain.

Après une petite réunion avec Jean-Claude Gaudin qui est forcément pour la métropole car il sait qu'elle ne se fera jamais, lui qui en a fait une au rabais avec Marseille Provence métropole, Jean-Marc Ayrault a avalé son chapeau breton et passé "50 minutes" avec Jean-Noël Guérini. Le président du très riche conseil général des Bouches-du-Rhône a toujours dans le coffre de son bureau, entre sa collection de petites voitures, un carnet de chèque de 2 milliards. Et l'homme de Matignon sait bien qu'avec ses poches percées, tous ses beaux rêves métropolitains resteront dans son attaché-case s'il ne baise pas la babouche de l'homme du paquebot bleu, même du bout des lèvres. "Je reçois le président du conseil général comme je reçois tous les présidents de collectivité locale", a grimacé Jean-Marc, comme s'il avait avalé un mauvais muscadet. Après avoir lâché quelques biffetons pour les oeuvres, ce qui faisait dire à Marie-Arlette Carlotti :

Guérini ne donne pas 100 millions d'euros à Marseille, mais 100 millions à Gaudin, histoire de nous faire perdre en 2014. 

JNG est donc revenu s'asseoir à la table d'honneur. Et c'est même offert mardi matin une belle interview sur Europe 1, quelques minutes avant le Premier Ministre. Comme à la grande époque, mais les questions n'étaient plus les mêmes.

La suite du voyage marseillais de Jean-Marc Ayrault en page 2

Le Camp des Milles une histoire française

Après une rapide conférence de presse, Jean-Marc Ayrault a filé déjeuner au siège de la région Paca à l'invitation de Michel Vauzelle.  Gaudin et Guérini se déplacent en préfecture, le Premier Ministre traverse la Canebière pour aller rencontrer le président de région. L'ancien garde des sceaux de François Mitterrand sait tenir son rang. Et puis direction Aix, pour une séquence émotion avec l'inauguration du Camp des Milles. Ciel bleu, chaleur étouffante, drapeaux, Chant des partisans, Marseillaise, ministres – Filipetti, Carlotti, Fioraso, Peillon, Arif – et élus locaux au garde à vous, dignes rescapés. "L'histoire du Camp des Milles est une histoire française", a rappelé le Premier Ministre, après qu'une jeune fille ait récité à la tribune d'honneur la longue et effroyable liste des dizaines d'enfants qui partirent de ce camp pour ne plus jamais revenir, avec leur prénom, leur nom, leur âge. D'un an à 17 ans. Les larmes coulaient sous les ray-ban ministérielles. Mais plus envie de rire.

Comment parler après ces noms d’enfants qui disent  la souffrance, et la souffrance de leurs parents ? Effroyable…Mais aussi comment ne pas écouter l’appel de leurs voix étouffées, comment se taire en pensant aux enfants d’aujourd’hui et de demain, dont nous ne voulons pas qu’ils soient un jour victimes, ou bourreaux, ou complices

Telle a été alors la réponse d'Alain Chouraqui, le président de la fondation du Camp des Milles qui s'est battu, souvent dans l'indifférence de l'État pour que ce site-mémorial existe. Ami, entends-tu…

Vous reprendriez bien une petite part de métropole ? 

Malgré ses motards, le Premier Ministre en rentrant a pu apprécier la qualité et la fluidité du réseau routier entre Aix et Marseille. Il n'a même pas eu besoin de prendre les voies de bus et, ça tombe bien, il n'y en a pas. 

Retour à la préfecture de région pour un petit cocktail avec les parlementaires locaux. Pour la droite, seuls la sénatrice aixoise Sophie Joissains, le député marseillais Dominique Tian et l'ex député Roland Blum qui représentait, en tant que premier adjoint, le maire de Marseille ont fait le déplacement. Mais l'ensemble des parlementaires de gauche, PS, communistes, verts, se pressaient sous les lambris fissurés de la préfecture, le doigt sur la couture du Façonable, ou de la robe Paule Ka. Le nouveau député Jean-David Ciot, patron du PS local et candidat à sa propre succession au nom de la rénovation, qui raconte partout qu 'il "a coupé les liens " avec son ex mentor Guérini, a fait une entrée remarquée en arrivant dans la limou du président du conseil général. Magnéto Guillaume :

 

 

Malgré les verres fumés, et une jolie tentative de s'enfoncer dans les sièges moelleux de la C6, clic clac Kodak, Jean-David était sur la photo. Un brin gêné. On se demande bien pourquoi. "Ils testent le covoiturage", ajoutaient quelques fins plaisantins dans la cour de la préfecture. Après cette sympathique mise en bouche, Jean-Marc Ayrault a reçu à dîner "la société civile" La limou de JNG avec, toujours, le pas-très-à-l'aise Jean-David à l'arrière, croisant la Mercedes de Jacques Saadé, le président fondateur de la CMA CGM, qui venait fêter ses bons résultats du second trimestre, bénéficiaires, après un début d'année plus compliqué.

Chefs d'entreprise (CMA, Onet, Caisse d'épargne, ST micro, Sartorius Biotech,  Daher) universitaires, dirigeants de Marseille 2013, représentants du monde associatif ont pu casser la croûte avec Jean-Marc Ayrault, le préfet de région et quelques collaborateurs du PM, dont Jean-Paul de Gaudemar, ex recteur de l'académie Aix-Marseille, et aujourd'hui conseiller à Matignon, un des discrets artisans de la visite de son patron dans une ville qu'il connaît parfaitement.

Une fois de plus, Ayrault a fait carton plein. Avec la métropole en entrée, la métropole en plat, la métropole au dessert, et vous reprendriez bien un peu de métropole ? Forcément ça aide. "Il nous a écouté, tous fait parler, il a l'air très décidé et motivé pour bouger", se réjouissait Jacques Pfister le président de la CCI à la fin du dîner. Ben, dis donc. Après un petit off improvisé avec les quelques journalistes parisiens qui avaient su résister à Marseille by night, le Nantais est allé rêver à la métropole. Ça tombe bien car le lendemain il recevait avec Marylise  Lebranchu, la ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation les 6 présidents de communautés d'agglo (Aubagne, Aix, Fos, Martigues, Salon, Marseille) histoire de leur vendre sa métropole.

Pas une métropole "à la Sarko"

Eugène Caselli, considéré comme un traître par certains de ses petits camarades, s'est un peu fait allumer par ses ex associés. Et comme souvent dans ce type de réunion, chacun a entendu ce qu'il voulait. Caselli est persuadé que la métropole se fera, Gaby Charroux le maire et président de la communauté d'agglo du pays de Martigues croyait lui qu'il pouvait sauver son pôle métropolitain : "Le Premier Ministre nous a indiqué que rien ne nous serait imposé par la loi."

Marylise Lebranchu et Jean-Marc Ayrault leur ont promis que la future métropole ne serait pas une métropole "à la Sarko" et plus respectueuse d'une certaine indépendance des communes qui la composeraient mais ils ont annoncé également qu'une loi serait bien votée en début d'année prochaine (la dead line étant mars 2013 car on ne peut pas changer une loi sur les collectivités territoriales moins d'un an avant des élections locales).

Reste à savoir ou sera placé le curseur entre le pôle métropolitain et la super-métropole. Rendez-vous l'année prochaine si tout va bien. Ayrault a enchaîné ensuite par une rencontre avec les partenaires sociaux. Là-aussi tout le monde a dit du bien de lui à la sortie, même la CGT semblait presque satisfaite par le plan Marschalayrault pour Marseille. Ca devient lassant. Heureusement on en a trouvé un, le secrétaire départemental de la FSU qui n'était pas content , histoire de casser – un peu -l'ambiance. Magnéto Guillaume :

 

 

Voilà, voilà, et avant de rejoindre les ennuis, le Hollande bashing à  l'Assemblée nationale pour une séance de questions au gouvernement, dans son beau Falcon bleu-blanc-rouge, Jean-Marc Ayrault  s'est rendu à l'école de la deuxième chance.  "Favet Neptunis eunti" ( Neptune favorise ceux qui voyagent ) comme on dit à Nantes.

 

 

 

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Commentaires

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  1. Liseron duveteux Liseron duveteux

    Pierre, il ne faut plus faire de journalisme, il faut écrire un livre.

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  2. vérité 13 vérité 13

    la métropole peut avoir des effets positifs si chacun prend les bonnes idées des autres. Par exemple, puisque Caselli est favorable à la Métropole, qu’il prenne exemple sur la Communauté d’Aubagne: qu’il nous mette les bus de la RTM gratuits. Ca serait une belle avancée et un plus que la Métropole peut amener à Marseille.

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  3. druide67 druide67

    Le chéquier de guérini, c’est l’argent des contribuables pas le sien, si le PS avait régler cette affaire avant, il n’aurait pas besoin de lui lécher les bottes
    Ca leur va bien!
    Mais je ne suis pas sur qu’ils aient compris la leçon, hélas,

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  4. Vieux-Port Vieux-Port

    Faute, c’est George Marshall et non Marschall.

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  5. antipropagande antipropagande

    Guérini, c’est fini, plus personne n’en veut : le fric du CG n’y fera rien. Il va devoir bientôt rendre les clefs du coffre .

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  6. vérité 13 vérité 13

    Vincent, c’est peut-être fastoche mais ce serait un bonne façon d’utiliser nos impôts locaux. Est-ce moins raisonnable que de consacrer 70 millions au tram rue de Rome, 5o millions à refaire le vieux-port, 50 millions pour la patinoire…

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  7. guyc13 guyc13

    pour la RTM, avec ses 50% de fraudeurs, les recettes pourraient être nettement plus élevées.

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  8. La Vigie La Vigie

    Que pense notre maire JC GAUDIN de tout ce charivari autour de notr ville ? N’est-ce pas finalement une forme de tutelle de l’état qui s’installe ?

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  9. Lagachon Lagachon

    Rudement bien écrit ! Bravo

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  10. asto asto

    Toujours au top PB, merci. C’est aussi délectant que les 10′ de Canteloup le matin sur E1…

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  11. militant du 1er jour. militant du 1er jour.

    Avec 15.000 € par mois, vous pensé pas qu’ils prennent les bus ….n’y leurs femmes, n’y leurs enfants….le bus c pour les pauvre con qui votent..et collent les Affiches.

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