Fusion métropole-département : le député chargé du dossier annonce une loi “avant l’été”

Interview
le 22 Fév 2018
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Depuis plusieurs semaines, le débat sur la fusion d'Aix-Marseille Provence et du conseil départemental des Bouches-du-Rhône s'amplifie. Député LREM vauclusien voisin du pays d'Arles, ce "bout de département" qui ne veut pas être intégré dans la fusion, Jean-François Cesarini déroule la feuille de route de la majorité présidentielle.

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L'hôtel du département.

L'hôtel du département.

Le président de la métropole Jean-Claude Gaudin, la présidente du conseil départemental Martine Vassal, celui de l’union des maires Georges Cristiani, les élus d’Arles, de Châteaurenard, d’Avignon…  Dans les Bouches-du-Rhône et même autour, tout le monde parle de fusion entre la jeune métropole et l’historique département. En revanche, du côté de la majorité présidentielle, la parole se fait rare autour de ce nouveau mécano des collectivités qui s’annonce. En janvier, le secrétaire d’État aux relations avec le Parlement Christophe Castaner avait livré à Marsactu quelques réponses, surtout axées sur le sujet sensible du mode de scrutin métropolitain (lire notre article). Puis le député François-Michel Lambert, partisan de cette réforme depuis plusieurs années, a allumé la mèche en rapportant la volonté d’Emmanuel Macron de s’y attaquer.

Membre de la majorité, le député vauclusien Jean-François Cesarini fait partie de ceux qui suivent le dossier avec attention. Rapporteur à l’Assemblée de la mission d’information sur la préparation d’une nouvelle étape de la décentralisation en faveur du développement des territoires (ouf !), il est aussi élu dans la 1re circonscription du Vaucluse, voisine du pays d’Arles et forcément touchée par ce chamboulement institutionnel.

La semaine dernière, le président de la métropole Jean-Claude Gaudin a lancé le débat sur la fusion de son institution avec le conseil départemental. Mais pour l’heure, le gouvernement n’a détaillé ni le cadre ni le calendrier. Qu’en est-il ?

Le député LREM Jean-Franois Cesarini. Photo : DR.

Jean-François Cesarini : Il y aura une loi avant l’été sur la fusion des métropoles et des départements. Ce ne sera pas toutes les métropoles françaises, mais les principales, Marseille, Bordeaux, Lille etc. C’est le président de la République qui nous l’a annoncé il y a trois semaines. La question qui reste à trancher est : qu’est-ce qu’il va advenir de ces bouts de départements qui ne sont pas dans les métropoles? En l’occurrence chez nous les 29 communes du pays d’Arles. Est-ce que les compétences du département seront données à une intercommunalité, à un département voisin, le Vaucluse par exemple, ou est-ce qu’elles seront assumées par l’État, pour le RSA par exemple ? Ce sont des réflexions qui sont en cours. J’ai beaucoup œuvré pour que le pays d’Arles se monte en une seule intercommunalité et aujourd’hui tous les élus vont dans la même direction. C’est très important, et à mon avis le nord des Bouches-du-Rhône va être un laboratoire pour ce qui va se passer ailleurs.

Vous y faisiez référence, cette annonce a été faite en petit comité, a été rapportée, puis les présidents de collectivité s’en sont saisis. On a l’impression que le dialogue se passe encore de manière informelle…

Emmanuel Macron reçoit régulièrement chaque commission de l’Assemblée. Là, c’était la commission aménagement du territoire et développement durable. Plusieurs dizaines de députés – de la majorité uniquement – étaient reçus à l’Élysée pour évoquer les différents sujets de la commission, dont celui-là. Mais c’était dans le programme présidentiel, cela ne vient pas de nulle part ! On va rentrer dans une phase de concertation, même si elle a déjà commencé. Jean-Claude Gaudin a rencontré le président de la République pour en parler… Je crois qu’il y a un consensus pour dire que si on veut limiter le mille-feuilles administratif, faire des économies, alors il faut une seule structure qui assume toutes ces compétences.

Certains élus vauclusiens verraient bien une absorption des 29 communes par leur département, une hypothèse qui n’a pas échappé au gouvernement. Vous insistez pour votre part sur la nécessité du regroupement des trois intercommunalités de l’ouest des Bouches-du-Rhône.

Je considère que la métropolisation n’est pas forcément une solution pour ces territoires dits intermédiaires comme Avignon, Nîmes, etc. En se structurant en une seule intercommunalité, Arles peut parler avec ces voisines et ne pas être un simple satellite de la métropole. J’y travaille de manière théorique dans la mission mais aussi avec l’association Grand Delta que l’on a créé avec 16 intercommunalités qui sont sur les trois départements Vaucluse, Bouches-du-Rhône et Gard.

Concrètement, le projet de loi sera porté par le gouvernement. Comment cela va-t-il s’articuler avec votre mission sur la décentralisation ?

Une conférence nationale des territoires [l’instance de discussion avec les collectivités créée par le gouvernement en juillet 2017, ndlr] devrait avoir lieu au mois de juin, nous allons donc essayer de rendre notre rapport en avril ou mai. Ensuite, je postulerai pour être le rapporteur du projet de loi à l’Assemblée. Je pense que ce serait cohérent en tant que rapporteur de la mission et élu sur un territoire qui pourrait être un laboratoire.

À côté de la question de la répartition des compétences, il y a aussi celle du mode de scrutin. Au conseil métropolitain, Jean-Claude Gaudin a martelé que les “députés hors sol de la majorité” ne rêvaient que d’entrer dans les instances locales, “où ils ne siègent pas”. Comment allez-vous répondre au débat qui point sur le tripatouillage des institutions ?

Sur le mode de scrutin, tout n’est pas tranché, on entend beaucoup de choses là-dessus. La seule chose, c’est que nous devons tendre vers le suffrage universel direct. Mais venant de Jean-Claude Gaudin, l’accusation de tripatouillage peut faire sourire. On est un parti qui vient juste d’arriver au pouvoir et pour l’instant les tripatouillages ont plutôt été faits par les autres. Ensuite, je trouve l’expression “député hors sol” un peu étrange car il n’y a jamais eu autant de députés venant de la société civile. Ce ne sont pas des gens qui ont été parachutés ou ont été là où ils pensaient pouvoir gagner, ils sont pour la plupart nés dans leur circonscription. S’il faut être élu local cumulard pour ne pas être hors sol, merci beaucoup…


Le casse-tête du mode de scrutin

Dès 2014, la loi qui créait les métropoles – dont Aix-Marseille Provence – le posait comme un principe : “Le renouvellement général des conseils des métropoles (…) est effectué au suffrage universel direct”. En 2020, à côté des élections municipales, devaient donc émerger des élections métropolitaines… dont à peu près tout restait à inventer. Si ce n’est l’exemple de la métropole de Lyon qui, en plus d’avoir préfiguré la fusion, a mis sur pied un mode de scrutin inédit par circonscriptions.

Prenant les obstacles les uns après les autres, le texte de l’époque renvoyait cela à “des modalités particulières fixées par la loi avant le 1er janvier 2017”. Faut-il s’en étonner ? Sur ce sujet de crispation doublé d’un casse-tête juridique, la date butoir a été reportée au 1er janvier 2019… C’est donc au nouveau gouvernement que revient la tâche de mettre le point final. Il peut pour cela s’appuyer sur un rapport remis au Parlement par le précédent gouvernement en janvier 2017 avec 18 mois de retard.

À lire ce document de 21 pages, les écueils, politiques, démocratiques et constitutionnels sont nombreux. Tout système devra tâcher de ménager la sacro-sainte proximité, permettre l’identification d’une tête de liste, faciliter l’émergence d’une majorité claire, respecter la représentation démographique des territoires, ne pas fermer la porte avec des petites formations avec une méga-élection trop complexe…

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Julien Vinzent
Journaliste.

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Commentaires

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  1. Germanicus33 Germanicus33

    Un tripatouillage dont les Arlésiens seraient victimes…
    Nîmes n’est pas loin d’Arles et ont beaucoup de points communs pour s’allier, autour d’une Camargue déjà administrée par deux départements.

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