Malika Moine vous présente
Cuisines à croquer

Les potimarrons farcis de Lolita

Chronique
le 8 Déc 2018
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Depuis plus de 20 ans, Malika Moine croque la vie en dépeignant l'actualité plus ou moins brûlante de Marseille et d'ailleurs. Au long cours, elle s'intéresse aussi aux lieux où l'on boit, mange et danse parfois. Pour Marsactu, elle va à la rencontre des gens dans leur cuisine. Elle en fait des histoires de goût tout en couleurs.

Les potimarrons farcis de Lolita
Les potimarrons farcis de Lolita

Les potimarrons farcis de Lolita

Marianne Doullay, plus connue sous le nom de Lolita dans le milieu alternatif marseillais, est dès l’origine dans l’équipe de Taktik, le journal gratuit, qui annonce et relate les évènement culturel de la ville, de 1988 à 2000. Elle rejoint à la fin des années 90 l’association Cours Julien.

Dans le climat favorable aux évènements culturels de l’époque, l’association crée la Fête du Plateau : concerts, fête de quartier, mais aussi concours de soupe au pistou ! Lolita gagne le premier prix, et attention, dans le jury il y a non seulement des grands chefs marseillais, mais aussi un critique gastronomique du New York Times. Elle a gardé la coupe gagnée à cette occasion. L’association du Cours Julien est aussi à l’origine du marché de producteurs du Cours Julien le mercredi matin et de la foire aux plantes, qui hélas n’a pas perdurée.

Mais l’amour de la cuisine de Lolita ne date pas d’hier, et c’est même pour ainsi dire, une affaire de famille.

Bien manger, une affaire de famille

C’est le matin, elle prépare l’apéro gourmand pour la réunion de travail de ce soir. En fond sonore, FIP accompagne les gestes sûrs de la cuisinière, et son récit : “Quand mon papa a rencontré ma maman, il était marin. C’était à Bandol, son village à elle. Ils sont venus s’installer à Marseille et mon père est devenu portefaix : c’est le roady du marché : il porte, pèse, livre. C’était à l’époque où le Cours Julien était le marché de gros de Marseille. Au début des années 70, le marché est remis en cause, il y a plus de demande, trop de nuisances. Mon père milite pour qu’il soit déplacé aux Milles.

Ma maman était prof de dessin et après, quand mon père a pris son affaire de fruits et légumes, elle a travaillé avec lui. On était cinq à la maison et on ne mangeait jamais de plats tout prêts. Elle cuisinait toujours, et des fois, il y avait trois plats différents pour qu’on mange tous ce qu’on aimait. le repas, c’était le moment privilégié de l’échange, du plaisir, du partage. Il faut être heureux à table. De là mon amour du bien-manger. A 14 ans, je faisais à manger pour mes potes. A un moment, c’est devenu secondaire, mais ça a pas duré bien longtemps.

L’amour de la cuisine, ma maman l’a aussi transmis à mes frères. Au départ, Christophe, mon frère du milieu, a commencé à faire la cuisine à la Maison Hantée, mais après, il est parti et il est devenu chef. Ma maman a pris le relais et maintenant, c’est mon frère Yann qui cuisine”. Un bar rock n’roll où on peut manger -et même bien manger, c’est pas banal. Lolita lève la tête de la pâte à tarte destinée aux bouchons brousse figatelli (pour remplacer la soubressade introuvable ce matin dans le quartier de la place Sébastopol), et aux bouchées à la fondue de poireaux. Ses yeux malicieux sourient : “quand on boit, il faut bien manger !”.

Cette passion s’est transmise sur plusieurs générations. “Mes grands neveux aiment aussi faire à manger, y’en a même un qui est devenu chef !”.

La cuisine comme un voyage

“Ma maman m’a transmis plein de trucs. La première recette, c’est la soupe au pistou, mais là, c’est plus la saison, et puis, c’était pas une bonne année pour les haricots blancs et rouges. Ce qui est bien, c’est que les recettes que m’a transmises ma maman, je ne les fais plus de la même façon. La cuisine, c’est vivant, ça se transforme… et ce qui me plaît, c’est qu’au fil du temps, je suis arrivée à écrire mes recettes, et à savoir quantifier, ça c’est le plus important. Je travaille à un livre de cuisine et il est presque fini.”

Lolita se rappelle : “Quand j’étais petite, j’avais une dînette chez mes grands-parents et j’adorais « pastisser » : je mélangeais de la farine et de l’eau et la semaine suivante, je revenais voir la progression de la moisissure. J’aime mettre mes mains dans la pâte, il y a un plaisir charnel, une osmose”.

En poursuivant la confection de la pâte elle commente : “il faut que chaque parcelle de farine soit imbibée par le beurre. Ça me fait voyager, je pense à l’Algérie, aux femmes qui font le couscous”.

“Chaque fois que je pars quelque part, je ramène des choses pour faire des mariages de goût, mélanger le local et l’ailleurs. C’est alors qu’on invente une nouvelle recette. C’est comme la musique, tu rajoutes des notes et ça fait une nouvelle mélodie. C’est aussi un peu comme le bricolage, il faut avoir de bons outils. Et de bons ingrédients”.

“À Marseille, on a la chance d’être dans un climat méditerranéen, on a des légumes toute l’année. Mon rapport à la cuisine s’est transformé avec le marché paysan : se rapprocher des saisons, du temps. Ne pas être avide du temps. Laisser le temps au temps. D’accord l’hiver, c’est plus dur, il y a moins de légumes, c’est moins fun mais ça oblige à inventer. Mon chéri fait un gâteau chocolat-carotteLolita lève les yeux au ciel – “ahhh, la carotte… Et au printemps : il y a le plaisir d’attendre les petits pois”.

Si Lolita monte souvent au Cours Julien, même si en ce moment c’est un crève-cœur de traverser la Plaine, elle va aussi dans son quartier. “Place Sébastopol, il y a un petit producteur d’Aubagne, il est pas en bio mais en raisonné et c’est un circuit court. En ce moment, il n’est pas là car il fait son huile d’olive.” Mais ce matin, elle a trouvé des petits potimarrons. Elle confie : “au début, je me suis trouvée déconcertée par le potimarron : c’est pas de la courge, c’est comme si il y avait de la châtaigne. Farci, ça doit être bon ! je veux y mettre que des choses qui me font penser à la forêt”.

C’est la recette qu’elle a choisi de nous livrer et de faire déguster ce soir-là à la réunion de préparation de Toile de Mars. L’émission aura lieu en direct à l’Équitable Café le 14 décembre avec pour thème : “Histoire du quartier vue par les médias alternatifs”.


Potimarrons farcis (végétarien)

Recette pour 4 personnes.

Prenez un couteau à lame pointue et découper un «chapeau» sur le haut du potimarron. Enlever les graines à l’intérieur à l’aide d’une cuillère ainsi que celles restées sur le “chapeau”.

– 1 potimarron

– 15 baies de genièvre

– 4 feuilles de laurier

– 1 bel oignon

– 80 gr de tofu fumé

– 100 gr de champignons de paris

– 10 marrons

– 2 steaks végétariens «quinoa/potimarron»

– 2 ou 3 cuillères à soupe de noisettes concassées

– 250 gr de crème fraîche épaisse

– 2 cuillères à soupe de miel de châtaignes

– vinaigre balsamique

– huile d’olive

– muscade moulue

– sel, poivre

Mettez votre four à chauffer thermostat 8.

 

Réservez (le potimarron, pas les graines !).

Prenez une cocotte, versez de l’huile d’olive et jetez dedans votre genièvre et vos feuilles de laurier. Émincez l’oignon, tout en gardant un œil sur votre cuisinière, faut pas que ça brûle, et quand vous entendez crépiter vous déposez votre oignon. Toujours à feu vif.

Découpez en petit carré le tofu, ajoutez le dans la cocotte.

Lavez les champignons et coupez leur le bout des pieds. Découpez en lamelles, toujours un œil sur la gazinière, remuez avec dextérité ce qui est sur le feu. Ajoutez les champignons.

Émiettez les marrons et rajoutez-les.

Baissez le feu et couvrez.

Découpez vos steaks végétariens en petits bouts. Découvrez en laissant l’humidité du couvercle tomber dans votre cocotte, et ajoutez-y les steaks. Remuer et remontez le feu. Ajoutez la poudre de noisettes. Remuez fort. Déglacez au vinaigre balsamique. Baissez à nouveau le feu. Parsemez alors de muscade moulue, de sel et de poivre. Ajoutez la crème fraîche en prenant soin de bien mélanger les sucs «collés» aux parois de la cocotte.

Arrêtez le feu.

Dans un bol, mettez 2 cuillères à soupe de miel et 1 à 2 cuillères à soupe(s) d’huile d’olive. Mélangez, ce doit être homogène.

Prenez un plat en terre qui va au four avec de préférence des bords un peu haut.

Placez en son centre un ramequin sur lequel vous viendrez déposer le potimarron, en ayant pris soin de verser de l’eau tout autour. Ainsi le potimarron n’aura pas les «fesses» dans l’eau et gardera son «humidité». A l’aide d’un pinceau, badigeonnez de votre mélange huile/miel, votre potimarron. Dedans et dehors, sans oublier le couvercle.

Déposez le potimarron sur le ramequin.

Avant de fourrer le potimarron, prenez soin d’enlever les baies de genièvre ainsi que les feuilles de laurier.

Remplissez le potimarron de la farce. Remettez le couvercle (ou chapeau !).

Baissez votre four au thermostat 4.

Mettez votre plat au four.

Il faut surveiller qu’il y ai toujours de l’eau pendant son temps de cuisson (attention, si vous rajoutez de l’eau cette dernière devra être très chaude afin de ne pas créer un choc thermique).

Il faut compter à peu près deux heures trente de cuisson.

Quand votre couteau s’enfonce sans retenue dans le potimarron et que ce dernier a obtenu une couleur “orange caramélisée”, servez…

Commentaires

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  1. LN LN

    A croquer !
    Cette pastille d’automne distille une belle tranche sucrée-salée, nous invitant au voyage, les yeux fermés pour mieux savourer. Cela ravit au plus haut point les papilles par la couleur et la rondeur du potimarron. Les souvenirs en guise de madeleine de Proust, la chaleur familiale, les fous rires des potes, le couscous, la soupe au Pistou, les doigts remplis de beurre et Fip en fond sonore pour ponctuer le paroxysme…
    Malika, Lolita, les affaires de famille nous offrent tout ce qui chante à l’oreille ou cristallise comme le sucre roux pour le caramel. Il en manquerait presque le goût de la vanille, mais on le devine pas loin, coincé entre le vin cuit et la brioche dorée.
    Ces bons moments chauds se dégustent aujourd’hui sans modération tant ces ambiances tendues nous glacent comme le mistral d’hiver mordant notre couenne.

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  2. corsaire vert corsaire vert

    Et quand on n’est pas végétarien? il est vrai que c’est démodé ….
    Tofu et steaks végétariens qui sont fabriqués avec on ne sait quoi …peut être du recyclage comme le surimi …mais ça fait plus chic !
    Je ne reproche pas l’exploitation du snobisme , au contraire je l’encourage à continuer ! !!

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