Mes châteaux d’If: Fin de partie en résidence autonomie.

Billet de blog
le 27 Juil 2023
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Mes châteaux d’If: Fin de partie en résidence autonomie.
Mes châteaux d’If: Fin de partie en résidence autonomie.

Mes châteaux d’If: Fin de partie en résidence autonomie.

Fin de partie.

« Rien n’est plus drôle que le malheur. » C’est aussi vrai pour Résidence Autonomie, l’ album de Salch, que pour la pièce de Beckett joué à Avignon cet été. Fin de partie ou game over. Tant qu’on a pu jouer dans sa vie. Tant qu’on a pas mené une vie d’esclave. Une vie sans désir, une vie enfermée dans un joyau de sécurité. Tant qu’on est pas resté prostré. Parce que pour beaucoup la fin de la partie a commencé au début. Comme l’écrivait Sénèque : «  Entraîne toi chaque jour à pouvoir, d’une âme égale, abandonner la vie que bien des gens tiennent serrée dans leurs bras comme on s’accroche aux ronces et aux rochers quand on est emporté par un torrent. »

La fin est un commencement et un commencement de la fin. A-t-on vraiment le temps de jouer une partie. On ne nous donne même pas trois balles. On joue sa vie comme on joue au flipper, ou on attend la paye chaque fin de mois en poussant son caddie dans les rayons de la mort.

La bande dessinée de Salch dont le dessin oscille entre Reiser et Willem, certains diront Vuillemin, propose l’histoire de Marc. H, agent social embauché la nuit dans une résidence autonomie, un avant-gout de la maison de retraite ou anti-chambre de l’Ehpad, comme vous voulez. Les personnages sont attachants, furieux, dégoûtants. Tout à la fois. Pour Marc, il ne faut pas rentrer dans l’affect. Alors il use de son humour pour se dé patauger de son travail harassant. La sonnette résonne la nuit, pour un oubli, un besoin de tendresse, un appel de détresse. Et Marc doit répondre à tous les appels des vieillards. Il y a Monsieur Armand, habillé comme un dandy et qui tripote ce qui passe, il y a l’histoire de Mme Gendron née en Allemagne en 1929. Pas la bonne date. Surtout dans une famille juive. Il y a aussi Mme Gonzalez qui a fuit la guerre d’Espagne, pas le bon endroit, et qui a mal au dos depuis que son mari est mort d’une crise cardiaque. On trouve aussi Monsieur Auriol, traumatisé par la rafle de Figeac en 1944 et qui devint prêtre. Le texte est percutant. Pas un mot de trop. Les dessins sont violents et monstrueusement drôles. Vrais, tordus et tordants. Surtout, il n‘y a pas de morale.

Chez Beckett en Avignon, le dispositif scénique est simple. Un fauteuil roulant occupé par un vieil homme éructant contre et son fils adoptif et handicapé. Deux âmes qui vivent ensemble mais ne savent pas s’aimer. Glove propose un chien à Hamm. Un chien en construction. C’est peut être lui le chien? Les parents de Hamm, eux survivent dans deux poubelles et font des apparitions comiques et désespérés. Beckett et la mise en scène de Laurent Fréchuret du Théâtre de l’Incendie respecte le théâtre lugubre de Beckett, cette forme des corps qui surgissent de la terre et qui disent que nous y retournerons. Ce théâtre nous attrape pour nous dire que nous ne sommes qu’ erreur, accident mais que nous attendons en résistant et en criant, notre dernière heure. Vive les râleurs.

Beckett ne triche pas. Il joue pour vivre et nous ne trompe pas avec ce quatrième mur. C’est encore plus terrifiant que de laisser passer certaines phrases, de nous les envoyer en nous disant : le jeu est fini ou une autre fois : Jouons quand même. Il nous ensevelit de sa clairvoyance, de la noirceur du monde. Aucun espoir. Des relations entre humains faites de la nécessité. On touche le fond mais c’est pour mieux rebondir dans le soleil qui nous attendait en dehors de la Scierie.

Commentaires

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  1. Christophe Goby Christophe Goby

    Fin de partie en Avignon.

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