Déontologie, transports, pétanque… les dossiers chauds du conseil municipal à Marseille

Décryptage
le 17 Déc 2021
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Ce 17 décembre, les 101 conseillers municipaux marseillais sont invités à se pencher sur 95 délibérations. Au menu de ce dernier conseil municipal de l'année, quelques sujets - pour certains récurrents - devraient faire débat dans l'hémicycle.

 (Photo : Emilio Guzman)
(Photo : Emilio Guzman)

(Photo : Emilio Guzman)

Et c’est reparti : masques FFP2, prise de température à l’entrée, quorum abaissé, possibilité pour les élus de détenir deux mandats… Pour ce dernier conseil municipal de l’année, la pandémie en sa cinquième vague fera de nouveau sentir sa présence sur l’hémicycle. Entre le retour en force du Covid-19 et le début des vacances de Noël, les débats ne devraient donc pas s’éterniser autour des 95 délibérations soumises à la discussion. D’autant que “ce conseil ne comporte pas d’énorme dossier”, constate Pierre Robin. L’élu LR du groupe d’opposition Une volonté pour Marseille note ainsi l’absence – malgré les annonces faites par Joël Canicave avant le conseil municipal de novembre – du débat d’orientations budgétaires parmi les rapports inscrits à l’ordre du jour ce 17 décembre. Pas de gros morceau au menu, il faudra se contenter de mets plus légers, mais pas moins intéressants, que Marsactu décortique ci-dessous.

Déontologie et lutte anti-corruption

L’agence française anti-corruption (AFA) a ausculté à partir d’octobre 2020 le fonctionnement de la Ville de Marseille et a épluché quatre ans de documents, la grande majorité datant de la mandature précédente. Cette enquête en profondeur a donné lieu à un rapport d’une centaine de pages en juillet 2021.  D’où ressortent, mauvaises pratiques dans certains services ou mairies de secteur et préconisations que la municipalité a choisi de porter devant l’hémicycle municipal. “Bien sûr qu’on a noté des dysfonctionnements. On ne cherche pas à les nier, on cherche à s’outiller pour changer les choses. Ce rapport, on travaille dessus depuis des mois, c’est d’abord un outil de travail “, précisait Olivia Fortin, adjointe chargée de la modernisation de lʼaction publique lors de la conférence de presse préparatoire au conseil mardi.

Comme préconisé par l’AFA, il est donc proposé aux élus de doter l’appareil municipal de deux chartes de déontologie, l’une pour les agents, l’autre pour les élus. Cette démarche “d’exemplarité et de probité” entre “dans notre process de remise en conformité de la Ville”, argue l’élue. La charte des agents a été écrite en concertation avec les personnels et présentée aux organisations syndicales. En revanche, regrette Pierre Robin de l’opposition, celle cadrant l’action des conseillers municipaux n’a été élaborée qu’entre élus de la majorité : “C’est dommage, car cela fait de ce texte une démarche politique, alors que sur ce sujet on aurait tout à fait pu chercher un consensus.”

Des vœux… de transports vers le Nord

C’est de saison. La Ville fait sa liste au Père Noël. En haut de celle-ci, elle inscrit dans le rapport 47, son désir du “développement d’un tramway dans les quartiers Nord couplé à la création de parkings-relais en amont du centre-ville [qui] offrirait une opportunité de repenser le lien vers ces quartiers.” Sujet de tensions chroniques avec Martine Vassal, présidente LR de la métropole Aix-Marseille Provence – autorité organisatrice des transports – qui préfère que le tram en direction des Catalans, dont le projet est plus avancé, lui grille la priorité. Dans cette délibération en forme de vœu, l’équipe municipale du Printemps marseillais cherche dons à s’appuyer sur la récente visite de Jean Castex. Elle argue que “l’État a ainsi fait inscrire dans les amendements votés lors du projet de loi de finances pour 2022 de “[privilégier] le développement des transports vers le nord de la Ville””, dans l’espoir que la métropole se rangera à ses arguments. Même si le calendrier reste flou, elle pourrait bien être, en partie, entendue.

Pas d’école à la Friche

Alors que le projet avait été lancé il y a quatre ans, l’école primaire dans l’enceinte de la Friche la Belle de Mai ne se fera pas. Le conseil d’administration du lieu artistique a voté l’abandon du projet le 5 octobre dernier. Le montage financier du projet faisait, en outre, l’objet d’une procédure au tribunal administratif et ne convenait pas non plus à l’actuel adjoint aux écoles de la Ville de Marseille. “Ce projet était un mini PPP (partenariat public-privé) et la Ville allait payer un loyer pour des bâtis qui lui appartiennent. Nous ne souhaitons plus déléguer des maîtrises d’ouvrage”, indique à ce sujet l’adjoint aux écoles, Pierre-Marie-Ganozzi.

Un contingent unique de logements sociaux

Jusqu’à présent, mairie centrale et mairie de secteur se partageaient la répartition du contingent des 8783 logements sociaux municipaux – la moitié appartenant à la mairie centrale, l’autre à celles de secteur. Le conseil municipal de ce jour doit voter une délibération censée rassembler en un même endroit cette compétence. En effet, plusieurs lois successives votées ces dernières années ont rendu cette gestion caduque. Pour y remédier, une commission rassemblant représentants de la mairie centrale et des mairies de secteur doit être créée.

De plus, une cotation devra être attribuée pour l’attribution des logements en fonction des dossiers qui devront eux, être anonymisés. De son côté, l’opposition municipale ne semble pas voir d’un bon œil cette délibération, et notamment, ce dernier point. “L’anonymisation a ses limites, car elle ne permet pas de maîtriser les politiques de peuplement et les équilibres sociaux”, estime ainsi Lionel Royer-Perreaut (LR) qui préside le bailleur social du département, 13 Habitat. Il relativise aussi la portée de cette mesure : “on parle du seul contingent municipal qui concerne 9000 logements sur les 86 000 logements sociaux que comptent Marseille. Et sur ces 9000 logements, vu le faible taux de rotation, cela concerne au final entre 350 et 400 logements par an”.

Une convention pour lutter contre la pauvreté

Le combat contre la pauvreté ne fait pas partie des compétences directes de la Ville. Mais face à la précarité profonde que connaissent certains quartiers marseillais – 26 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté contre 14,8% à l’échelle du pays – la municipalité a signé avec l’État une convention d’appui à la lutte contre la grande pauvreté. Cette contractualisation annuelle s’inscrit dans “une stratégie nationale déclinée par territoires. Marseille est la première commune à signer”, souligne Audrey Garino, adjointe chargée des affaires sociales. Le plan d’action est doté d’un financement d’1,4 million d’euros (700 000 de l’État, autant de la Ville) et devrait en priorité cibler l’accès aux droits des personnes les plus précaires.

Meilleure information sur les risques majeurs

“Le code de l’Environnement précise que tout citoyen a droit à une information sur les risques majeurs naturels et technologiques auxquels il est exposé, ainsi que sur les
mesures de sauvegarde qui le concernent”, explicite la délibération 53. Dans chaque commune, il revient au maire d’informer ses administrés des problématiques encourues. “Nous allons approuver une mise à jour du document d’information communal sur les risques majeurs (Dicrim), dont la dernière mise à jour remonte à 2003″, cadre Jean-Pierre Cochet, adjoint chargé de la sécurité civile et de la gestion des risques, qui annonce que quelque 100 000 exemplaires du document seront “distribués à partir de début 2022 aux foyers les plus exposés aux aléas”. Quant au plan de prévention des risques majeurs, en lui-même, “il sera affiné dans les semaines à venir, il n’est pas bouclé”, indique l’élu. C’est sur la base de ces documents que se sont organisés les services municipaux lors des grandes crues du 4 octobre 2021.

La fin du “pétanque gate”

Ah ! Ils vous nous manquer ces échanges, forcément subtils, sur la Boule gombertoise. Au cœur des discussions, récurrentes depuis l’été dernier, et désormais connues sous le nom de “pétanque gate” ? Le boulodrome municipal Jean-Masse, occupé depuis plus de 100 ans par la même association. La mairie de secteur emmenée par Marion Bareille (LR) souhaitait voir une autre équipe associative y prendre place. “Cette association avait tendance à faire de cet équipement municipal un lieu privé, regrette-t-on dans l’entourage de la maire. Raison pour laquelle la mairie des 13/14 avait décidé en novembre de lancer un appel à projet pour que ce site puisse s’ouvrir au plus grand nombre et notamment les enfants du secteur.” Sur le sujet la mairie centrale n’est pas restée les pieds tanqués et réalise un beau carreau en prenant la décision de récupérer dans son giron ces espaces dont la gestion était jusqu’alors transférée à la mairie des 13/14. La mairie de secteur s’en irrite et y voit “une manœuvre clientéliste.” L’adjoint aux sports, Sébastien Jibrayel, assure à l’inverse dans sa délibération que 650 mètres carrés du site pourront être réaménagés pour proposer sur ce secteur sous-doté “des activités sportives aujourd’hui inexistantes”, comme “du minifoot, du basket 3*3 ou du street workout.”

94 + 1

La visite du Premier ministre, Jean Castex, lundi et mardi a eu un effet direct sur l’ordre du jour final du conseil. Aux 94 délibérations décidées, une dernière est donc venue s’ajouter in extremis, expliquait Joël Canicave en conférence de presse mardi. Ce 95e rapport a trait à la création de la SPLA-IN – société publique locale d’aménagement d’intérêt national – qui viendra piloter le chantier de rénovation des écoles pour lequel le Premier ministre a annoncé, mardi, une rallonge de 150 millions d’euros. “C’est un rapport très technique sur la mise en place de la structure, précise le président du groupe Printemps marseillais au conseil municipal. Notre volonté est de faire en sorte que la ville soit prête en janvier.”  

(avec Lisa Castelly, Suzanne Leenhardt et Violette Artaud)

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Commentaires

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  1. Tanina OUADI Tanina OUADI

    17 décembre j’imagine et non septembre 😁, la fin d’année est dur pour tout le monde. Ils faut se reposer chers journalistes!

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    • Coralie Bonnefoy Coralie Bonnefoy

      Ouh là là… Vous avez raison. Je crois bien que la fatigue de la fin de l’année se fait sentir. 😉 Merci de votre oeil vigilant. Passez de bonnes fêtes et continuez à nous lire!

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  2. Andre Andre

    En ce qui concerne les transports, il est consternant de constater que les quartiers Nord passent encore après tous les autres. Sans l’intervention de l’État, qui représente une humiliation (méritée) pour la Metropole et sa présidente, jamais ce projet de TC vers le Nord, pourtant réclamé par la municipalité actuelle, n’aurait été remis sur les rails. Mais que de temps perdu.
    Pour Gaudin, les quartiers N n’étaient pas Marseille, sa population devait y rester enclavée et on se demande même si le centre ville avec le quartier Noailles figurait encore dans sa géographie municipale.. Certes, la ville est pauvre mais un homme politique aussi renommé que Gaudin, longtemps membre éminent de l’ancienne majorité de droite, avec tout le réseau qu’on imagine, avait la capacité et le devoir, d’aller chercher les financements et obtenir des mesures d’exception (ce qui se passe aujourd’hui). Il n’a rien fait, il s’en foutait, “M’en gàrci!” devait il penser s’il ne le disait pas publiquement.
    La gestion Vassal n’est que le prolongement de celle de son mentor, qui a laissé s’effondrer cette ville.
    Il est regrettable que nous la subissions encore à travers cette Métropole.

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  3. Andre Andre

    Au fait, au bout du futur tramway des Catalans, que personne ne réclame dans la quartier, il y aura bien un hôtel de luxe?!…

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    • LN LN

      Oh ! on se réveille ! Il est déjà en construction 🙄

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    • Julien Vinzent Julien Vinzent

      Bonjour, s’il s’agit de la résidence Sea One, il ne s’agit pas d’un hôtel mais de logements.

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    • Assedix Assedix

      Il y a bien l’hôtel des Bords de Mer, qui a l’air vraiment haut-de-gamme,mais il compte seulement 19 chambres…donc j’espère que ce n’est pas uniquement pour sa clientèle que M.Vassal s’entête.

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      Pour Madame Vassal, l’intérêt du tram des Catalans n’a rien à voir avec la mobilité ou le désenclavement : il ne s’agit que d’un projet de rénovation urbaine, comme l’ont d’ailleurs été, de façon tout à fait ouverte, les lignes précédentes qui circulent au-dessus du métro. Elle a elle-même résumé cette curieuse conception de l’utilité des investissements dans les transports publics par cette phrase : “regardez comme c’est joli” ! (https://marsactu.fr/malgre-lopposition-de-la-ville-martine-vassal-maintient-le-projet-de-tramway-des-catalans/)

      Ici, le désintérêt des élu•e•s de droite pour la mobilité non-bagnolarde est une véritable culture.

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    • Andre Andre

      A LN. Bien sûr gros malin, il est en construction. Mais je ne sais pas si vous avez remarqué, il n’est pas encore ouvert…

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    • Andre Andre

      Électeur du 8me, entièrement d’accord. J’avais déjà pu écrire dans ces colonnes que Martine avait perdu la boussole, car Les Catalans sont à l’Ouest, mais pas le Nord !
      Nous avons à Marseille, entre autres curiosités locales, la spécificité de faire rouler un “tramway électoral “. Il n’y a effectivement qu’à voir ces deux lignes qui convergent vers le 12me au-dessus du métro. Il fallait bien remercier et consolider l’électorat de ces quartiers qui avait fait la bascule aux municipales de 95.
      Pour LN qui n’a pas tout compris, on peut se demander, connaissant le style Gaudin et ayant cause, si la construction de cette résidence et hôtel de luxe n’était pas pour quelque chose dans la priorisation de la ligne sur Corse et Corderie, pour “faire joli”.

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