SIGNIFICATION MARSEILLAISE DU COUVRE-FEU

Billet de blog
le 25 Oct 2020
0

Si la politique du couvre-feu a été imposée par le pouvoir dans l’ensemble de notre pays, sans doute n’est-il pas inutile de questionner sa signification particulière dans l’espace de la ville de Marseille.

 

La difficulté de la vie nocturne à Marseille

Déjà, la vie nocturne, et même, la vie du soir, sont difficiles à mener à Marseille. Je me rappelle tout de même qu’il n’y a pas très longtemps que le métro circule après 21 heures tous les jours. Marseille a tendance à être une belle endormie, à ne pas vivre pleinement la nuit comme d’autres villes d’une importance comparable. Cela est lié, bien sûr, avant tout, à la difficulté, pour l’économie marseillaise, de connaître un véritable développement. Si Marseille ne vit pas la nuit, c’est, en grande partie, parce que la ville a fini par devenir trop pauvre pour pouvoir connaître des pratiques de consommation et de vie sociale étendues la nuit comme le jour. C’est d’autant plus étonnant que Marseille a la culture d’un port et que, dans la culture des villes, les ports ont toujours vécu la nuit plus que d’autres villes, plus ordinaires. Mais la difficulté pour une véritable vie nocturne de s’imposer à Marseille tient aussi à une culture urbaine dominée par des figures historiques d’insécurité comme la peste. Le coronavirus a, en quelque sorte, succédé à la peste, à Marseille, dans l’histoire des figures d’insécurité liées à la maladie et à la propagation des épidémies. Dans l’inconscient urbain de Marseille, la figure du coronavirus a pris le relais de celle de la peste pour imposer aux habitants de la ville d’observer des mesures de protection et de sécurité comme le confinement ou le couvre-feu.

 

Les réponses attendues de la municipalité

C’est la première question que l’on peut se poser en termes politiques. Comment peut-on comprendre que la municipalité marseillaise élue en 2020, de gauche, dirigée, de surcroît, par un médecin, accepte, ainsi, dans une forme de résignation, de se plier aux impératifs fixés par l’État, sans qu’un conflit ou une confrontation vienne opposer la municipalité et le préfet ou la municipalité et la métropole. On attendrait de la municipalité dirigée par M. Rubirola une véritable opposition, l’expression d’une véritable critique, devant les mesures véritablement liberticides imposées par l’État comme celle du couvre-feu, qui risque, au demeurant, d’affaiblir encore une économie marseillaise déjà peu vaillante. On attend de la municipalité qu’elle mette en œuvre une politique municipale différente de celle qui est imposée par le gouvernement et par la métropole, afin de permettre à la ville de vivre pleinement au-delà du couvre-feu et des restrictions des libertés. C’est là, sans doute, la signification la plus importante du couvre-feu pour Marseille : il s’agit d’une forme de mise à l’épreuve des pouvoirs de la municipalité et de l’occasion d’une véritable confrontation avec les autres pouvoirs qui se manifestent dans la ville.

 

Faire revivre Marseille au-delà de la pandémie

C’est qu’au fond, cette expérience du couvre-feu peut être l’occasion, pour la ville, d’imaginer une nouvelle politique municipale lui permettant de revivre pleinement au-delà de la pandémie. Il s’agit d’imaginer l’avenir de la ville au-delà du coronavirus. D’abord, l’expérience du coronavirus peut constituer, pour Marseille, l’occasion de réfléchir à de nouvelles orientations pour son économie, d’imaginer de nouvelles façons de s’inscrire dans l’espace économique, notamment dans l’espace économique méditerranéen. La pandémie peut être l’occasion d’un bilan. Par ailleurs, il importe d’analyser, aussi sereinement que possible, les activités économiques qui auront survécu au coronavirus, qui l’aurone, en quelque sorte, maîtrisé, et, par ailleurs, celles qui n’auront pas pu résister à cette sorte d’agression. C’est de cette manière que la ville peut choisir dans quels domaines agir désormais. D’autre part, sans doute importe-t-il de faire un autre bilan : celui de la manière dont les formations et les qualifications auront permis à l’emploi de se maintenir à Marseille, au-delà du coronavirus. C’est toute une politique municipale et métropolitaine de l’emploi, de la formation et de la qualification qu’il faut élaborer et mettre en œuvre. Il y a, pour cela, une véritable urgence, à Marseille. L’urgence n’est pas seulement sanitaire. Enfin, c’est toute la vie sociale urbaine que Marseille doit renouveler. En effet, elle a été considérablement meurtrie par l’expérience du coronavirus et la ville doit trouver de nouvelles façons de vivre en société, elle doit donner à ceux qui y vivent de nouvelles façons de l’habiter. Saisissons l’expérience du coronavirus pour faire naître une nouvelle ville de Marseille.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire