Après Nice, laisser sa place au silence

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le 18 Juil 2016
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Après Nice, laisser sa place au silence
Après Nice, laisser sa place au silence

Après Nice, laisser sa place au silence

Ce lundi, un peu partout en France, le silence a répondu au bruit et à la fureur. Au bout de trois jours de deuil national, une minute de recueillement était organisée à la demande du chef de l’État. La manière la plus commune de faire corps autour de l’indicible, de l’innommable, de l’absence. Autant de matière qui nous échappe.

À Nice, nos confrères de Nice-Matin sont sur le terrain depuis la nuit même de l’attentat de la Promenade des Anglais. Plus près de nous, La Marseillaise et La Provence relaient comme il se doit cette information qui supplante toutes les autres, les rend quasiment dérisoire par la force de ce souffle de mort qui emporte tout sur son passage.

Ces quotidiens se donnent une mission d’information générale avec les pages du même nom rassemblées dans un cahier, le plus souvent à la fin du journal, et parfois numérotées de façon différente. Ils y reprennent les dépêches d’agences de presse ou tentent de parler de ce sujet en développant des angles différents. Tous les autres titres de la presse nationale et internationale dépêchent sur place des envoyés spéciaux qui tentent de décortiquer le film des événements, de mettre un visage, un nom sur les victimes de cet attentat.

Ce n’est pas le cas de notre journal, qui a toujours concentré sa ligne éditoriale et ses moyens sur une couverture locale de l’actualité. Nous, journalistes de Marsactu, sommes alors démunis face à ce fait d’actualité qui nous touche dans notre humanité. Nous sommes pris dans le même effet de sidération qui pousse certains à suivre minute par minute le fil des faits qui se développe tandis qu’il éloigne d’autres de toute source de rappel du drame et de ses circonstances. Au milieu, il y a donc le silence qui s’impose à nous.

Parmi nos lecteurs, certains nous ont reproché de ne pas réagir assez tôt, assez fort. Nous avons commencé par laisser la place au silence donc pour ne pas ajouter au bruit de fond médiatique sans apporter d’information supplémentaire. Ne pas poster nos articles du moment sur les réseaux sociaux, draper de crêpe notre gabian, le temps de trouver les mots pour dire notre désarroi. Car le seul moyen de résistance que nous avons en mains est justement de continuer à informer, sans céder à la polémique, à l’amalgame, à la course à l’émotion.

En janvier dernier, après l’attentat dans les locaux de Charlie Hebdo – suivi de celui de l’Hyper Casher – nous avions écrit très vite pour dire notre sidération justement. Puis nous avions pris le temps de décrire les moments de rassemblement qui ont uni les Marseillais dans un hommage commun. En novembre, les attentats de Paris ont plongé toute la France dans l’État d’urgence. Nous étions à la conférence de presse du préfet qui déclinait les effets de ce dispositif exceptionnel dont nous ne sommes pas sortis. Nous étions ensuite sur le Vieux-Port pour rendre compte de l’hommage spontané qui s’y déroulait.

À chaque fois, ces événements suscitent des discussions au sein de notre rédaction pour savoir comment et sous quelle forme ils font partie de notre agenda journalistique. De quelle manière s’agit-il de prolonger une actualité qui nous touche tous ou, au contraire, laisser les autres médias assurer cette couverture et continuer pour notre part à creuser notre propre sillon. Chaque jour, nous nous posons ces questions. Par ailleurs, Marsactu a ouvert depuis peu son Agora. Cet espace permet aux lecteurs et abonnés de réagir à l’actualité et d’offrir au débat les questions qui traversent notre société.

Commentaires

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  1. barbapapa barbapapa

    De la (petite) responsabilité des médias et des journalistes dans la multiplication des carnages dits islamistes – ceci ne s’adresse pas spécialement à Marsactu :
    – svp, ne nommez plus ces individus là “combattants” ni “djihadistes” ces termes là sont valorisants et ne correspondent en rien aux actes commis
    – ne les désignez pas non plus comme “radicalisés” – qui est radical n’est pas forcément sanguinaire, ni fou, ni schizo…

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  2. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    A ma modeste place, je me garderai bien de vous “reprocher de ne pas réagir assez tôt, assez fort”. Après l’attentat de Nice plus encore qu’après les précédents, trop d’organes de presse (notamment télévisuels), trop d’hommes politiques ont réagi à chaud, pour des motifs pas toujours avouables, et ont surtout raconté n’importe quoi, les uns pour meubler l’absence de certitudes, les autres pour faire des phrases détestables dans le genre “yakafaukon”.

    La dignité commande en effet le silence et la réflexion. Il y aura d’autres attentats, et ce n’est pas en restreignant encore davantage les libertés publiques qu’on les évitera. Face à la haine et à la bêtise, ne répondons pas par la haine et par la bêtise, nos adversaires auraient gagné ce qu’ils cherchent. Faire preuve d’intelligence, chercher à lutter contre les causes plutôt que contre les effets, c’est un peu plus compliqué, mais nos hommes politiques se grandiraient en s’y essayant plutôt qu’en cherchant des responsables : responsables, ils le sont tous, sans exception.

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