Les Bernardines orphelines, qui reprendra le flambeau ?

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le 26 Juin 2013
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Les Bernardines orphelines, qui reprendra le flambeau ?
Les Bernardines orphelines, qui reprendra le flambeau ?

Les Bernardines orphelines, qui reprendra le flambeau ?

Sous le dôme majestueux et entre les colonnes de l'ancienne chapelle des Bernardines, des colonies d'artistes ont répété et joué des créations en chantier, foulant les planches de la petite scène du théâtre d'essai. Après un quart de siècle à la tête de ce lieu de fabrique artistique, axé sur la création contemporaine, les directeurs Alain Fourneau et Mireille Guerre ainsi que la secrétaire générale et auteur associée Suzanne Joubert envisagent de lâcher le gouvernail, pour cause de départ imminent vers un repos bien mérité.

Pourtant Alain Fourneau ne souhaite pas se précipiter, lui qui voit les choses en grand pour son théâtre. La priorité affichée est de parvenir à transformer l'édifice en "une force d'impact capable d'entraîner d'autres lieux et collaborations. L'aura des Bernardines est réelle, mais nous n'avons pas la force financière suffisante, nous n'avons pas les moyens d'être au niveau de notre réputation. Tout le monde veut venir là ! Mais les Bernardines ne doivent pas devenir le parent pauvre de la Criée et la qualité de nos propositions ne doit pas être conditionnée par la jauge des spectateurs."

Et pour continuer à porter le flambeau, l'équipe des Bernardines lâche un nom : celui d'Hubert Colas, fondateur de Montévidéo (centre de création contemporaine), d'Actoral, (festival international des arts et des écritures contemporaines) et directeur de la compagnie Diphtong. "On ne pensait pas forcément à lui et ce sont les tutelles qui décideront. Mais sur le plan local, cela serait logique : Hubert Colas s'inscrit dans certaines filiations, c'est avec lui que l'on a fait les premières résidences d'artistes. Nous avons accueilli son premier spectacle Temporairement épuisé. La seule petite réserve que je pourrais émettre, c'est qu'il ne faudrait pas que les Bernardines deviennent uniquement le lieu d'Actoral, au champ relativement restreint. Et Hubert Colas pourrait avoir l'impression de rentrer dans une chaussure trop petite à son pied. Pour nous c'est différent, nous avons inventé ce lieu."

Un foyer de théâtre contemporain

Caroline Marsilhac qui codirige Actoral avec Hubert Colas, confirme l'information avec enthousiasme : "En 2011, L'Etat, la Région et la Ville nous ont demandé de réfléchir ensemble [Alain Fourneau, Mireille Guerre, Hubert Colas et Caroline Marsilhac -ndlr] à une reprise possible des Bernardines. Nous trouvons que l'articulation Bernardines, Montévidéo et Actoral pourrait être l'opportunité unique de faire exister un foyer du théâtre contemporain et des nouvelles écritures en agrégeant les moyens de ces trois entités. Cela serait une mutualisation, une façon d'augmenter notre visibilité et celles des artistes que nous pourrions faire travailler toute l'année, tout en contrant la restriction des subventions des collectivités. Après, ce désir doit être partagé par les collectivités et en particulier par la Ville, propriétaire du bâtiment des Bernardines."

En attendant, l'heure est au bilan et Alain Fourneau observe avec fierté le chemin parcouru : "Avant le lieu était attribué au théâtre du Gymnase qui n'en faisait rien. Il y avait seulement quelques barres pour accrocher les projecteurs." La direction établit une politique artistique, qui forge très tôt l'identité du théâtre : "ouvrir des créneaux, favoriser les chemins de traverse. Dans les années 80, le travail de l'artiste au quotidien se perdait. On s'est dit que l'on allait effectuer des trajets avec les gens et nous avons ouvert les premières résidences." Dans cette logique, des soirées "pièces courtes" sont initiées notamment avec Marseille Objectif Danse. Le festival Les Informelles est créé ensuite, favorisant la rencontre et la recherche commune entre artistes de plusieurs pays.

Si des artistes marseillais sont invités, l'association les Bernardines – qui dirige le théâtre – cherche également à faire venir des troupes de l'extérieur, non sans se heurter à des critiques : "au départ nous avons été confrontés à un réflexe de frilosité, on nous a accusés de faire du parisianisme. Mais on voulait montrer des maîtres qu'on ne voyait pas à Marseille." Ainsi, Tadeusz Kantor, Claude Regy et Didier Georges Gabily, maîtres iconoclastes du spectacle vivant contemporain s'emparent du théâtre. Le lieu révèle aussi des grands noms de la scène locale, comme François-Michel Pesanti, Hubert Colas, Xavier Marchand, Alain Béhar, ou, pour des artistes plus jeunes Eva Doumbia ou encore Franck Dimech.

@Vincent Lucas

Des collaborations avec d'autres structures et notamment le Théâtre de Lenche, le Merlan, la Minoterie, Montévidéo, la Gare Franche, la Friche, le Théâtre du Gymnase et autrefois la Criée permettent aussi d'étendre le rayonnement des Bernardines. "Nous avons toujours considéré que ce n'était pas parce qu'on était un petit théâtre qu'on ne pouvait pas faire de grandes choses. Mais aujourd'hui, en dehors de la Minoterie et de la gare Franche il devient difficile de collaborer".

"Un peu schizophrène"

Au-delà de ces partenariats, les Bernardines sert aussi de lieu de création et de mise en scène avec le travail de Suzanne Joubert, auteur associée. "C'est un peu schizophrène de passer du travail de direction à un temps de création" explique Alain Fourneau. "Notre souhait est de rester dans l'histoire, d'assurer une continuité dans la création contemporaine mais aussi d'apporter un regard neuf dans l'ouverture." Vaste programme pour cet homme de théâtre au caractère bien trempé "qui travaille énormément, d'après Suzanne Joubert, et qui n'a pas fait passer la création des Bernardines après le travail des autres". "Le temps passé à la création ne peut pas se calculer, on n'y passe le temps qu'on peut", enchérit Alain Fourneau.

Mais après 26 ans passés à la barre de "cette chapelle qui n'a jamais été une chapelle", les directeurs envisagent de raccrocher leurs costumes au vestiaire après la dernière saison "qui se fait toute seule"  – tant elle se situe dans la continuité – et notamment après un dernier projet européen, Try angle, en novembre prochain, une collaboration entre le Portugal, l'Allemagne et la France où les artistes se rencontrent, gênèrent des laboratoires de création, autour cette année de la question du temps.

Une telle décision, outre l'aspect éminemment positif pour les Bernardines, se révélerait particulièrement bénéfique à Montévidéo. La structure qui présente une toute petite jauge pour l'accueil des spectateurs détient un bail prolongé jusqu'au 31 décembre 2016. La question de l'après flotte dans un brouillard d'incertitude. Il faudra encore patienter mais pour l'instant, les maîtres des clés des Bernardines ne semblent pas pressés de tirer leur révérence. Un quart de siècle dans une chapelle, ça sacralise une carrière.

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Commentaires

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  1. José 2013 José 2013

    Seraient-ce les 1ers signes annonciateurs des restrictions budgétaires drastiques post MP 2013 dont il se dit de manière grandissante qu’elles seront appliquées à coups de massue contre le secteur culturel ? D’où ces “mutualisations” (que ce terme est joli…) que l’on voit poindre ici et là, préconisées par les tutelles politico-budgétaires ? Un des 1er cas concrets qui n’a l’air de choquer personne : le Musée de la Faïcence (campagne Pastré) et le Musée de la Mode (Canebière) disparus de la circulation d’un trait de plume et “mutualisés” (cachez ces économies budgétaires que je ne saurais voir…) en un seul musée : Borély ! Cherchez l’erreur !

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  2. stoplanguedebois stoplanguedebois

    ça fait peut être un peu beaucoup de théatres au mêtre carré, la criée, le gymnase, Lenche, montévidéo, toursky, (et j’en oublie) bientot un nouveau théatre, à la friche, le nouveau théatre de la minoterie, tout ça à moins d’un kilometre à la ronde, et tous ces théatres subventionnés mais sans suffisamment d’argent pour fonctionner normalement, on pourrait aussi réduire la voilure dans une ville aussi pauvre non? (proportionnellement à la population il y a a plus de places de théatre à Marseille qu’à Paris, et je ne vois pas à Marseille un public plus “culturel” qu’à Paris)

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  3. Pétrone Pétrone

    Tout ça pour le refiler à Bluzet, le Tapie de la culture !

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