La Ville veut garder pour elle l’audit des écoles censé la blanchir

Actualité
le 24 Jan 2020
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Ce lundi, Jean-Claude Gaudin présentera en ouverture du conseil municipal une synthèse de son audit des écoles. Un échantillon très peu détaillé de centaines de milliers de pages que la Ville garde pour elle dans l'immédiat. Mais dont elle assure qu'elles offrent un bilan "convenable" du patrimoine scolaire.

Photo DR.
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Cela devait être l’opération transparence sur les écoles. Promis, juré, la Ville allait faire mieux que le gouvernement qui a diligenté une inspection globale des écoles marseillaises, en février 2019. Sans attendre que cette initiative aboutisse, la majorité LR lançait donc en juin les consultations pour choisir les cabinets censés mener pour leur compte un audit indépendant. Lequel est censé établir la vérité sur l’état des établissements scolaires, objet de polémique depuis plusieurs années.

Les deux sociétés de contrôle Qualiconsult et l’Apave étaient censés rendre leur audit pour le dernier conseil de l’ère Gaudin et de sa fidèle adjointe à l’enseignement, Danièle Casanova. Lors de ses vœux, puis lors de la réunion des présidents de groupe politiques, le maire s’est montré rassurant sur les premières conclusions de l’audit que les élus d’opposition n’ont pas eu l’heur de consulter. “Le maire a expliqué que l’audit faisait plus de 500 000 pages, ce qui rendait impossible une transmission en une fois mais que nous aurions un débat sur la synthèse qui nous est communiquée”, raconte un participant à cette réunion.

De 500 000 à 30 pages

Présenté comme seul rapport du dernier additif de l’ordre du jour du conseil municipal, la synthèse communiquée à la presse est une infime partie du travail sisyphéen annoncé. Pas un chiffre, pas un tableau. Les 470 écoles de Marseille y sont classées par époque de construction : modèle Jules-Ferry, Egger du nom de l’architecte de la Ville ou GEEP pour le modèle des années 1970. Ô surprise ! Ce sont ces dernières qui cumulent les problèmes les plus flagrants.

“La bonne nouvelle, c’est qu’aucun bâtiment n’est menaçant”, avance Danièle Casanova. Selon les auditeurs, “l’état général des écoles se situe entre moyen et satisfaisant”. À lire la synthèse remise à la presse, le code couleur va du jaune clair au vert tendre, rien dans le rouge “dégradations critiques”, ni dans le vert pétant “parfait ou très satisfaisant”. Sans surprise, l’élue pointe des problèmes d’isolation des menuiseries extérieures, de résistance au feu, d’évacuation d’eau “notamment dans les écoles dont les cours comprennent des arbres”. Elle note également que les deux synthèses ne permettent pas de conclure à “des disparités selon les arrondissements”.

Ni un avis ni un classement définitif

À regarder de près, les cabinets d’audit prennent soin de préciser que les synthèses communiquées qui concluent à un état “convenable” ne font pas partie du marché initial mais ont été réalisées “à titre commercial et déontologique, avec le recul de l’homme de l’art sur la mission qu’il vient d’exécuter“. Les notations de 1 à 5 ne sont qu’indicatives, “cette caractérisation ne sachant constituer un avis ou un classement définitif”.

Cette mise en garde est partagée par les deux cabinets. D’ailleurs, Qualiconsult qui avait en charge le lot 2, des écoles plutôt situées au centre, au sud et à l’est de la Ville est plus sévère dans ses appréciations. Les écoles GEEP obtiennent un 1 “critique” en terme de sécurité incendie, de confort thermique et acoustique, et un 2 “médiocre” sur les questions liées à l’accessibilité, la qualité de “l’enveloppe” et d’autres points… Mais, là encore, ces données restent très générales et difficilement vérifiables sans accès à l’audit proprement dit.

“Une aide à la vérité”

“Cela représente plusieurs milliers de pages par établissement en format papier, justifie Jean-Claude Gondard, le directeur général des services. Elles seront rendues publiques, une fois transférées sur support informatique. Mais les synthèses sont certifiées par l’Apave et Qualiconsult. C’est une manière de démentir les caricatures. C’est une aide à la vérité, une aide à la décision pour ceux qui prendront la suite“.

Pas un mot de plus sur les écoles les plus à risques, la présence d’amiante, voire même la confirmation ou l’invalidation des chiffres avancés par le rectorat d’un quart des écoles en difficulté. “Le recteur se base sur la vox populi, tacle Danièle Casanova. Qu’il s’occupe de trouver les enseignants nécessaires à Marseille au lieu de dire que nous mettons la poussière sous le tapis”. Il faut donc se contenter de “faire confiance” en attendant que les données complètes soient consultables. Circulez, il n’y a rien à voir. Ou plutôt si.

Les camionnettes de SOS Fantômes

Car pour son dernier tour de piste, l’équipe Gaudin sort de son sac à malices une dernière ficelle communicationnelle. “On pourrait appeler ça allô camionnettes, sourit Danièle Casanova. Ou SOS Fantômes parce que ce véhicule rappelle un peu le film”. Qu’es aquò ?

“Nous avons mis en place un système de cinq navettes qui jalonnent en permanence la ville et qui peuvent intervenir à tout moment, explique l’élue. Elles sont pilotées par des agents qui sont capables d’intervenir en urgence sur des problèmes de chauffage, une vitre cassée, un toilette bouché”. Bref, une version “mobile” de la régie des travaux, dont Marsactu vous racontait inefficacité dans cet article. Nouveauté supplémentaire, lesdites navettes sont accessibles par internet ! Elles le sont déjà depuis trois mois, date de la mise en service de ce dispositif.

“Les directeurs peuvent directement cocher la réparation dont ils ont besoin sur une liste et ils peuvent avoir une trace de leur intervention ce qui n’était pas possible avec l’ancien système de signalement par téléphone”, complète Jean-Claude Gondard. Le rapport avec l’audit ? Aucun. Si ce n’est que la question de l’entretien ordinaire des écoles fait partie de la problématique générale de la gestion du patrimoine municipal. Et la nécessité d’offrir un dernier écran de fumée, pailleté d’un soupçon de modernité.

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Commentaires

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  1. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Donc, là où il y a des problèmes d’évacuation d’eau, c’est dû à la présence d’arbres… On comprend mieux pourquoi la nullicipalité les fait abattre un peu partout.

    Jusqu’au bout, Mme Casanova aura tenu son rôle de comique. A partir d’un certain âge, on ne se refait pas. Elle doit être l’une des dernières à penser qu’il faut bétonner et bitumer pour faciliter l’écoulement de l’eau. Alors que c’est le contraire qu’il faut faire : végétaliser. Y compris les cours d’école.

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    • Laurent Malfettes_ Laurent Malfettes_

      Cela me rappelle l’audit des cantines en 2014, par un cabinet privé (Silliker) qui réalisa son etude en toute independance puisque c’est Sodexo qui réglait la facture. Et cet audit, qui concluait soi disant que tout etait en règle, personne n’a jamais pu le consulter. La farce continue, avec la mise en accusation des arbres (décidément c’est une obsession). Et que penser du “geste commercial” qui consiste à condenser (sinon à édulcorer) les conclusions ? Geste commercial ou pression exercée par la municipalité sur les auteurs ? La question se pose…

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  2. Regard Neutre Regard Neutre

    La première conclusion essentielle des Bureaux de Contrôle est d’attester que les
    structures et les fondations du patrimoine scolaire ne présentent aucune pathologie menaçant la solidité du bâtiment – tous les enfants et les personnes qui le fréquentent sont en sécurité à cet égard.Quelle gifle donne cette conclusion aux personnels de la ville des ingénieurs, techniciens et agents techniques qui surveillent et entretiennent les écoles depuis plus de trente ans pour certains… En seulement trois mois les experts dresse un audit qui enfoncent les portes grandes ouvertes d’écoles construites pour le plus grand nombre, le siècle dernier…Diplomates,ils se gardent bien de ne pas froisser la commission de sécurité et mettent des gants sur la sécurité incendie qui relève de nos précieux Marins-Pompiers…Entre les 500 000 pages annoncées par la Maire, la multiplicité des données (plusieurs milliers par équipement) recueilles par les deux Bureaux d’études et les plusieurs milliers de pages par établissement en format papier que justifie le directeur général des services,on se perd en conjectures. Quel est le véritable nombre de feuilles du rapport d’audit et quel est son coût?

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    • Jacques89 Jacques89

      D’ailleurs, on se demande bien pourquoi la Métropole a eu besoin de mandater des bureaux de contrôle. Les armoires des services doivent être pleines de projets non retenus faute de financements décidés par les élus. Vous me direz, encore faut-il que ces choix arrivent sur la table du conseil… C’est bien le Maire qui fixe l’ordre du jour il me semble…?

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    • Regard Neutre Regard Neutre

      @Jacques89
      Sauf erreur de ma part,la ville a toujours la compétence des écoles…

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  3. toto toto

    500000 pages… Quelle blague !
    Dans l’école de mon fils, dans le 5e, les “inspecteurs” sont restés 45 minutes dans l’école. De quoi écrire 1000 pages ?
    Inspection visuelle. Comment une inspection visuelle peut déterminer s’il pleut dans une classe ? A moins que la visite ait lieu un jour de pluie…
    Quel est le sens d’une moyenne sans écart type ?
    Ils ont bien réussi leur coup. J’espère que personne ne sera dupe. 2000000 d’euros à la poubelle.

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    • Jacques89 Jacques89

      “2000000 d’euros à la poubelle”? Non, dans la poche des bureaux de contrôle pour établir des rapports qui ne seront lus par personne et que l’on renouvellera dans quelques années (avec la nouvelle équipe) sous prétexte qu’ils ne sont plus à jour… votez braves gens votez!

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  4. Alceste. Alceste.

    Comme disait Chirac. Plus c’est gros plus ça passe

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  5. Zumbi Zumbi

    Qu’est-ce qu’un toilette bouché ? Qui faut-il envoyer à l’école pour étudier notre langue ? Conseillère municipale ? Journaliste ?

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  6. PromeneurIndigné PromeneurIndigné

    Nous ne sommes plus à l’époque où l’instruction publique, et notamment les écoles communales étaient une priorité. La décentralisation est passée par là depuis le début des années 1980. Charles Maurras dirigeant de l’action française, un mouvement royaliste et antisémite, qui appuya Vichy ,avait rêvé de restaurer les provinces C’étaient des structures administratives jouissant d’une importante autonomie, juridique notamment, qui existaient sous l’ancien régime.
    Mitterrand le franciscain, a exaucé le rêve de Maurras. Depuis « l’État jacobin » n’a plus les moyens de mettre un terme aux dérives de la libre administration des collectivités territoriale. La municipalité Gaudin n’a pas voulu inscrire en priorité dans le budget communal, la rénovation des écoles communales, . En revanche elle subventionne, sans état d’âme, l’enseignement privé.Elle a aussi trouvé des ressources pour paver le Vieux-Port, le cours Lieutaud, la rénovation (deux fois en 20 ans) du Stade-Vélodrome etc. Ces travaux ont été préféré à la sécurité et au confort de certaines écoles situées dans les quartiers populaires

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