En conseil municipal, Jean-Claude Gaudin charge le directeur du Samu social

Actualité
le 27 Juin 2017
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Pour la première fois, le conseil municipal a débattu ce lundi de "l'affaire du Samu social", selon le propre qualificatif de l'adjoint Xavier Méry. Le maire a déclaré que la haute administration ne savait rien de cet "abus manifeste" et du soupçon de détournement de fonds publics. Il pointe clairement la responsabilité du directeur de service, René Giancarli.

Le bureau vide de René Giancarli au premier étage du Samu social. Photo : D.R.
Le bureau vide de René Giancarli au premier étage du Samu social. Photo : D.R.

Le bureau vide de René Giancarli au premier étage du Samu social. Photo : D.R.

Étrangement, le conseil municipal de ce lundi semblait devoir se dérouler sans question qui fâche. Pas un mot sur la garde à vue de Martine Vassal, présente dans l’hémicycle, ni sur l’audition du maire lui-même par la police judiciaire. “On ne commente pas les affaires en cours”, a-t-on l’habitude d’entendre, et opposition comme exécutif donnaient l’impression de s’en tenir là. Puis la question de l’affaire du Samu social s’est invitée dans le débat au détour d’interventions de Marie-Arlette Carlotti (PS) et de Valérie Diamanti (PCF).

Soulignant le silence de la Ville sur ce bien triste dossier, la conseillère municipale socialiste demande à se voir éclairée, car au-delà “du préjudice de 5 millions d’euros pour la collectivité locale, ce qui nous préoccupe au plus haut point dans cette assemblée, c’est l’intérêt des sans-abris et des salariés”. Même son de cloche pour l’élue communiste.

L’adjoint en charge de la lutte contre l’exclusion, Xavier Méry lit en réponse une longue intervention, inédite depuis la révélation de cette affaire par Marsactu. Si celle-ci reprend pour l’essentiel la doxa municipale sur l’enquête préliminaire ouverte par le parquet, elle en précise toutefois le périmètre. Contacté par la gendarmerie en février, l’adjoint Xavier Méry s’est vu confirmer que l’enquête pour des emplois fictifs recouvrait des faits de “détournement de fonds publics par une personne chargée d’une mission de service public”, de recel de ce délit et de “faux et usage de faux dans un document administratif”.

Xavier Méry invité à porter plainte par les gendarmes

“Les gendarmes m’ont convoqué pour me demander de porter plainte [avec constitution de partie civile] car la réalité et la gravité des faits incriminés leur semblaient incontestables, ajoute l’élu à Marsactu à la sortie de l’hémicycle. Je leur ai dit qu’en tant qu’élu, je n’étais pas mis au courant du détail de l’organisation du service. Et, par ailleurs, seul le maire avait la possibilité de porter plainte au nom de la Ville.”

Cette gravité des faits aurait été soulignée par “une enquête administrative approfondie” menée par Jean-Pierre Chanal, délégué général au sein de la Ville, qui apporterait l’évidence “d’un décalage considérable entre les temps de service déclarés à l’administration et les temps de services réellement effectués”. Si les gendarmes n’ont pas fini leur enquête, les services municipaux semblent avoir bien avancé. Et ils ont un profil qui se détache dans la cible : le chef de service, René Giancarli.

L’adjoint au maire ne cite jamais son nom mais il souligne qu’il a appris la perquisition en cours le 19 janvier après avoir téléphoné au Samu “pour régler un détail sans rapport” : “À cette occasion on m’a appris qu’une perquisition de gendarmerie était en cours mais que je ne devais pas m’en inquiéter !”. Il souligne ensuite que ni la directrice générale adjointe, ni le cabinet du maire n’était au courant du débarquement des pandores. Le même Giancarli est accusé de n’avoir apporté “aucune information sur les motifs de cette enquête. Nos interrogations ne recevaient que des réponses évasives ou dilatoires de la part de ce chef de service.”

Le voilà donc habillé pour les hivers rigoureux. René Giancarli a été suspendu “suite au dépôt de plainte” même si, selon nos sources, cette suspension est intervenue à l’issue de la garde à vue de l’intéressé. L’adjoint a beau louer la qualité du service, le fusible est ainsi désigné.

D’autant plus que Xavier Méry souligne que les investigations n’ont pas débuté en janvier mais en “en avril 2016” avec les premières auditions du chef de service et de deux de ses cadres. Selon nos informations émanant de plusieurs sources, c’est à la suite d’une plainte déposée par un agent détaché du service que ces premières auditions ont démarré. Elles ont très vite cerné le caractère atypique des rythmes de travail des agents publics.

“Un abus manifeste” selon Gaudin

Là encore, Xavier Méry estime que ce système de cycle de travail était “alambiqué et occulte”. Il assure à Marsactu que ni la directrice générale adjointe, ni la supérieure hiérarchique immédiate de René Giancarli n’en étaient informées. Une affirmation reprise par le maire lui-même qui a martelé “nous ne savions rien” et réitéré le fait que René Giancarli avait caché ce fait à la direction des ressources humaines comme aux adjoints successifs. “Nous avons totalement fait confiance à cet homme là, déclare le maire. J’ai été appelé à suspendre René Giancalri qui, dans quelques mois fera valoir ses droits à la retraite.”

Plus loin, le maire relie clairement “cet abus manifeste” à la réforme générale des cycles de travail dans les services municipaux entamée il y a quelques mois et ce malgré les dénégations du directeur général Jean-Claude Gondard, qui affirmait récemment “tout ne tourne pas autour du Samu social”. “Ce n’est pas acceptable pour les autres services et nous allons mettre une pointeuse à l’entrée des grands services“, insiste pourtant le maire depuis le perchoir où il préside aux côtés de son DGS.

Une affirmation courroucée d’un homme qui se dit abusé “par la confiance aveugle” placée en la personnalité de l’ancien policier. Mais ces dénégations successives vont dans le sens inverse de ce qu’avancent les agents. Ces derniers affirment depuis le début que ce système était connu de tous et, en particulier, de la “haute hiérarchie municipale”. La question est de savoir désormais quelle preuve existe de cette connaissance partagée et jusqu’à quel échelon de la hiérarchie.

Poursuite des investigations

Quant à René Giancarli, il reste muré dans le silence que lui impose sa situation de principal mis en cause. Son avocat Éric Bagnoli n’a pas souhaité commenter plus avant les déclarations du maire. “Il y avait 80 personnes dans ce service, il est connu de tous que tout le monde était au courant de son mode d’organisation”, affirme-t-il.

Rappelant les limites de l’accès au dossier dans le cadre d’une enquête préliminaire, l’avocat tient à rappeler la déclaration de fin de garde à vue des gendarmes : “Ils nous ont clairement dit que les investigations et les auditions n’allaient pas en rester là.” Quant à son client, bien qu’amoindri par des ennuis de santé, il n’entend pas porter seul la coiffe du déshonneur, ni assumer seul devant un tribunal le montant de 5 millions d’euros des fonds publics que le système du Samu social aurait contribué à détourner.

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Commentaires

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  1. barbapapa barbapapa

    Pendant plusieurs années, 80 employés, fonctionnaires, mutés d’autres services de la mairie, ont un emploi du temps hallucinant, et personne n’aurait couvert ça ? ahahahahahaha ! au cabinet du maire, on est aveugle ciego, sourdingue tympans crevés et ignare des affaires municipales ?

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    • LaPlaine _ LaPlaine _

      On flingue le lampiste sans état d’âme, et on nous prend pour des gogos. Il doit exister un “contrat de délégation de service public” entre Grogodin et FO, c’est donc FO qui gère le personnel de la ville en quasi liberté. Pas de contrôles, hiérarchie inexistante ou mise au pas par le personnel et vous dupliquez çà à tous les services, vous avez alors le résultat dans le quotidien des marseillais et dans leurs impôts. Impensable et inacceptable (deux i) à l’heure où tout évolue si vite, partout.

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      De deux choses l’une : soit la mairie savait, et c’est de l’incompétence doublée de mensonge, soit la mairie ne savait pas, et c’est de l’incompétence doublée de laxisme.

      Dans une administration normalement gérée, il existe une inspection générale des services qui inspecte les services. Et à la Ville de Marseille ?

      Incompétence, incurie, incontinence, incapacité, le concours continue.

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      Marsactu, en dehors de la rubrique mondaine déjà réclamée, il faudrait que vous ouvriez une rubrique simplement intitulée “i”, consacrée aux éléments les plus pittoresques de la “gestion” à la Gaudin…

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    • reuze reuze

      Il me semble d’autant plus pertinent, s’agissant du SAMU social, de citer l’Abbé Pierre: “La responsabilité de chacun implique deux actes : vouloir savoir et oser dire”.
      La défense de la ville revient à dire qu’elle n’a pas voulu savoir: “i” comme irresponsabilité.

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  2. corsaire vert corsaire vert

    Maire, président d’honneur du syndicat FO ..et il feint d’ ignorer ce qui se passe dans sa municipalité ? à quoi sert-il ?
    C’est un aveu d’incompétence et de lâcheté .

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  3. julijo julijo

    On est toujours en balance entre le fou rire nerveux et l’indignation colérique…

    Ah ce gaudin, finalement on paie des impôts lourds, la ville s’enfonce, la gabegie est un peu partout…. pas ébranlé d’un poil !

    Je vote pour incompétence doublée de mensonges.
    En général, Gaudin, gondard et FO peu de choses leur échappe, incohérent leur cinéma.

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      Comme Gaudin l’a dit hier, « on peut pas tout céder dans cette ville, il faut de la discipline et un peu d’autorité. »

      Bon, OK, cette remarque ne portait pas sur le fonctionnement des services de la Ville, mais sur une question autrement plus grave : les horaires d’ouverture de la plage des Catalans…

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  4. LaPlaine _ LaPlaine _

    Pour la rubrique des “i” j’en revendique la paternité, j’ai déposé la marque à l’INPI… sous le nom “Marseillélézi”…
    J’ai noté “incontinence”, on a des témoignages…?
    Plus sérieusement, l’inspection des services à mon sens dépend de Gondard… Je ne sais pas s’ils inspectent vraiment grand chose…

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      Au minimum, c’est de l’incontinence verbale destinée à masquer la vacuité de l’action.

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      … ou plutôt, l’inaction (pour avoir un “i” de plus).

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  5. Regard Neutre Regard Neutre

    Le DGS de la ville est le premier responsable de cette organisation du Samu social .Sachant que ses agents opèrent en dehors des horaires ouvrables dits normaux, l’organisation du travail, pour respecter le temps de travail légal, a due recevoir un accord préalable pour déroger aux textes réglementaires. Seuls, le DGS et le Maire ont le pouvoir de validation de cette organisation.Jean-Claude Gondart , qui ne badge pas,semble transférer s

    à la loi

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  6. Regard Neutre Regard Neutre

    Jean Claude Gondart semble vouloir transférer ses responsabilités sur ses subalternes. Le fait qu’il n’y est pas de badgeuse dans les services administratifs de la 2 ème ville de France montre le mode de gestion du services public…

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  7. Hde mars Hde mars

    Et personne ne parle du syndicat qui gere cette ville et qui a toujours interdit les pointeuses et prefere le copinage au diplome .

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    • LaPlaine _ LaPlaine _

      Certes.

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  8. Jean Peuplus Jean Peuplus

    Les arguments de défense avancés par les élus lors de la révélation d’affaires portant sur l’utilisation de l’argent public laissent pantois le commun des contribuables. Qu’un maire ne connaisse pas dans le détail le fonctionnement d’un service est un fait tout à fait compréhensible, mais il dispose d’une administration qu’il a lui même nommée qui se compose d’un DGS, de directeurs généraux adjoints, DRH, directeurs, chefs de services et tout comme lui parmi toute cette chaine pas un seul cadre de la “haute administration”ne s’est aperçu de rien et n’a lancé aucune alerte. En conclusion, il y a vraiment un problème de compétence et de professionnalisme de l’encadrement.

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    • LaPlaine _ LaPlaine _

      On a surtout demandé à tous de fermer les yeux ou de regarder vers le sol.

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