Aix expose enfin Albert Camus

Aix expose enfin Albert Camus

Pour les cent ans d'Albert Camus ce 7 novembre, l'année capitale de la culture honore le prix Nobel de littérature. Après la polémique survenue suite à l'annulation de l'exposition Camus, l'éviction de l'historien Benjamin Stora puis la démission de son successeur le philosophe Michel Onfray, la capitale européenne de la culture se trouvait amputée d'un hommage à l'écrivain humaniste, à l'heure du centenaire de sa naissance.

Après un premier volet décevant en février, ce dernier volet intitulé "Albert Camus, citoyen du monde", rend finalement hommage à l'écrivain, grâce notamment à la scénographie lumineuse et originale de l'artiste transmédia Yacine Aït Kaci, et au commissariat confié non plus à un seul homme mais à un comité scientifique constitué de Sophie Doudet, Marcelle Mahasela, Pierre-Louis Rey, Agnès Spiquel et Maurice Weyembergh. Une précaution sans doute inspirée des précédents fiascos, et en particulier des attaques lancées contre les premiers commissaires avec un risque d'instrumentalisation de la pensée d'Albert Camus.

A l'envers

L'exposition, ni géographique ni chronologique, est en revanche thématique. Elle s'inscrit dans une "Saison Camus", avec des conférences, des débats, des spectacles, des lectures, mais aussi des projections, des événements proposés jusqu'à la fin du mois par la Cité du livre. Dix thèmes retenus émaillent le parcours constitué de vitrines présentant des documents d'archives, manuscrits, photographies et lettres, tandis que des écrans numériques projettent des citations piochées dans l'ensemble de l'oeuvre de Camus, lues par Francis Huster. Les écrans numériques arrondis sont visibles à l'endroit comme à l'envers, en référence à l'idée du rédacteur en chef de Combat selon laquelle il était nécessaire de s'intéresser à l'envers des choses.

Le chapitre "Lieu" retrace à la fois les endroits où Albert Camus a vécu mais également ceux comme l'Italie, découverts lors de voyages et qui l'ont marqué d'une empreinte durable. L'"Amitié", ensuite, met en exergue l'ambivalence de l'auteur entre sa personnalité solitaire et sa fidélité envers ses amis tel René Char, ainsi que son appel constant à la solidarité, présent à travers l'ensemble de son oeuvre. Le volet "Métier" illustre évidemment celui d'écrivain et de journaliste – même si l'auteur parlait davantage de vocation en ce qui le concernait – mais aussi les métiers du théâtre qu'il a exercé.

Plus loin, le "Jeu" suit, dans le sport ou dans le théâtre, puis le "Langage". En effet, Albert Camus n'a eu de cesse de fustiger le verbiage dans ses risques de propagande et de manipulation, tandis qu'il affichait a contrario un souci de trouver un vrai langage, "qui parlerait à tous pour le bien de tous". La "Guerre", notamment celle d'Espagne et évidemment la guerre d'Algérie dont il dénonce constamment les violences à l'égard des civils fait l'objet d'une autre séquence. Vient ensuite l'"Histoire", puis la "Pensée de Midi" :"Il est midi, le jour lui-même est en balance" écrit-il dans Le Minotaure ou la halte d'Oran, L'Eté, (1954). L'Amour et le Royaume sont les deux chapitres qui achèvent la déambulation, avec cette citation : "Je suis heureux dans ce monde car mon royaume est de ce monde". Carnets, (1936). Indéniablement, l'homme a laissé une trace indélébile ici-bas, salué, enfin, par l'année capitale de la culture.