D'Averroès à Ô les beaux jours, faire vivre les livres et la pensée
D’Averroès à Ô les beaux jours, faire vivre les livres et la pensée
Très discrètement, une nouvelle association baptisée Des livres comme des idées a pris les rênes des Rencontres d'Averroès et d'un nouvel évènement autour du livre. Sous le doux nom d'Ô les beaux jours, il naîtra au printemps prochain.
Premier évènement des Livres comme des idées, "Beyrouth ya Beyrouth", une rencontre autour du Liban en partenariat avec le Mucem début mai.
Imaginons le match de football idéal : 90 minutes composées à partir d’extraits des plus grandes rencontres que la mémoire collective (et télévisuelle) a conservé dans ses replis. Il y a le coup de boule de Zidane, le but fou de Maradona remontant le terrain balle au pied, Garincha peut-être tanguant sur son pied torse, Basile Boli au sommet de l’Europe, le face-à-face brutal entre Schumacher et Battiston, le but en or de Trézéguet en final de la coupe d’Europe… Le tout ne serait pas commenté par un xénophobe à lunettes mais par des écrivains qui mettraient leurs propres mots dans la trace de ces crampons.
Il ne s’agit pas d’une animation municipale pour la fan zone dans le cadre de la compétition en cours. Il faudra attendre le 23 mai 2017 pour assister à cette première d’un évènement en train de naître. Nommé Ô les beaux jours en hommage à Beckett et à son essor printanier, il a été imaginé par un duo depuis peu inséparable : Nadia Champesme, libraire et fondatrice d’Histoire de l’œil et Fabienne Pavia, éditrice et fondatrice des éditions Le Bec en l’air. Ensemble, elles ont créé une association baptisée “Les livres comme les idées”. Début mai, elle organisait un premier évènement, “Beyrouth ya Beyrouth”, autour du Liban en partenariat avec le Mucem.
Deux femmes, deux évènements
Dès ses premiers pas, cette structure s’est vue confier une mission qui ressemble fort à un jeu de jongle avec des pastèques mûres : créer un évènement autour du livre et de la littérature et reprendre la production des Rencontres d’Averroès. Le nouvel évènement doit se distinguer des éternels salons et foires où des libraires tristes se collent à des chauffages d’appoint en attendant un chaland qui n’est venu que pour toucher de près un écrivain vu à la télé. Cet évènement est inscrit en toutes lettres dans le rapport ABCD, préalable à la la mise en place d’un contrat territoire lecture en partenariat avec l’État et les autres collectivités locales (lire notre article).
“Il est normal et utile que Marseille se positionne avec un évènement autour du livre, détaille l’adjointe à la culture Anne-Marie d’Estienne d’Orves. Il ne s’agit pas d’un énième salon du livre. La philosophie de la démarche est d’aller vers les gens, de travailleurs sur toute la ville.” C’est sur cette nécessité de décloisonner, dépoussiérer et rassembler que les deux jeunes femmes se sont retrouvées. Un détail crucial : elles avaient elles-mêmes planché sur une enquête de terrain sur la vie littéraire marseillaise, ses failles et ses enjeux, avant de se voir confier le pilotage de l’affaire.
De l’autre main, les deux fondatrices ont accepté de reprendre au débotté Les Rencontres d’Averroès après que la Ville a brusquement tiré le rideau de l’Espace culture sur les pieds de l’équipe qui produisait l’évènement. La volonté de faire d’une pierre, deux coups émane là encore de la Ville et de son adjointe à la culture.
Les nouvelles rencontres d’Averroès
Cette dernière y voit une solution “simple et efficace”. Elle s’inscrit également dans une volonté de la Ville comme des autres financeurs de “mutualiser” en appelant à des concentrations pour pallier la pénurie d’argent public. La reprise des Bernardines par Les Théâtres, qui regroupe le Grand Théâtre de Provence, le Gymnase et le théâtre du jeu de paume, ou la fusion du GMEM et du GRIM au sein du pôle musiques de la Friche Belle de Mai, relèvent de cette volonté de concentration. Dans le cas présent, la fusion se fait en amont. “Les publics vont se rencontrer deux fois dans l’année et, dans les deux cas, les deux manifestations seront prolongées par du travail de terrain”, insiste l’élue.
La prochaine édition d’Averroès voit également le retour de Thierry Fabre, créateur de l’évènement qui en reprend “la direction intellectuelle”. La thématique, “Surmonter la faille?”, est pensée en résonance forte avec les attentats de novembre 2015 qui avait amené l’annulation de la précédente édition.
Mais l’arrivée d’une nouvelle structure de production ne sera pas la seule nouveauté. Averroès change de partenaires. Après plus d’une décennie de compagnonnage avec France culture, c’est RFI qui prend le relais. “Nous avons rencontré la patronne de France Médias Monde, Marie-Christine Saragosse, raconte Fabienne Pavia. La discussion s’est bien passée. La participation de France 24 a même été envisagée.”
Trois partenaires médias
Au côté de RFI, Averroès sera accompagné par Mediapart et les Inrocks. “La thématique sera développée à travers quatre tables-rondes qui seront animées par chacun des partenaires, reprend Nadia Champesme. En plus de ces soirées, nous allons mettre en place en avant-première une forme d’université populaire qui sera animée par Julien Loiseau, jeune historien qui initierait ainsi un collège de la Méditerranée avec de jeunes chercheurs de partout. Il propose de plancher cette année sur les croisades en regardant cette thématique de tous les bords de la méditerranée.” Là encore, le dispositif a vocation à s’installer tout au long de l’année, en amont et en aval.
Nadia Champesme et Fabienne Pavia ont construit une pensée en étoile. Elles souhaitent installer leurs actions tout au long de l’année et dans tous les coins de la ville et, plus loin, de la Méditerranée. Un exemple : Averroès accueillera une forme nouvelle et expansée de Radio Live, un format radio participatif inventée par Caroline Gillet (France Inter) et Aurélie Charon (France Culture) avec des jeunes du Liban, de Gaza et de Sarajevo. Un groupe de Marseille s’y trouverait associé, avant et après les évènements d’Averroès.
Même chose pour Ô les beaux jours. L’évènement printanier (22 au 28 mai) s’appuie sur trois grands entretiens – dont un avec l’écrivain Emmanuel Carrère – qui seront émaillés de multiples petites formes sonores ou visuelles et réalisées dans des écoles, des centres sociaux, dans le réseau d’espaces lecture de l’Acelem. Elles imaginent un travail sur le roman-photo. Vont inviter Florence Aubenas pour une résidence en lien avec un photographe. Avec d’autres, le romancier François Beaune se transformera en guide pour enfants pour “aller à la bibliothèque” avec eux. Multiplier, démultiplier, faire se croiser… Pour l’heure, les deux jeunes femmes apprennent à jongler entre leurs métiers de libraires, d’éditrices, d’organisatrices d’évènements. Et de jongleuses de l’extrême.
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