Replié au Dôme, Guetta paraît moins sourd que Gaudin

Replié au Dôme, Guetta paraît moins sourd que Gaudin

On le dit sourd, il ne l'est de toute évidence pas tant que ça. En annulant le concert du 23 juin au Parc Borély, David Guetta a répondu aux revendications des 70 000 pétitionnaires. Ou du moins a-t-il joué la sécurité. Etre accueilli à Marseille par des banderoles hostiles aurait été un peu embarrassant, quand on se présente comme une star consensuelle. Jusque-là, le principal intéressé était resté silencieux, comme s'il refusait de se mêler d'une polémique à la fois politique et locale. Pourtant c'est lui qui sort du bois via un communiqué de sa boîte de production Auguri repris par l'Agence France Presse.

Guetta l'humaniste

En effet, efficacement relayée sur internet, la polémique a atteint l'artiste au fin fond de l'Amérique Latine où il est en tournée, apprend-on dans ce communiqué. Compte tenu de "l'agitation politique et médiatique entourant son concert au parc Borély", le DJ a préféré revoir la forme de son concert. Les 400 000 euros ont totalement disparus. Et les billets achetés pour le parc Borély restent donc valables pour l'entrée au Dôme de Marseille. Les personnes préférant se faire rembourser pourront se présenter auprès de leur revendeur à compter du 16 mars. La société de production de Guetta écrit :

Refusant d'être mêlé à un débat politique, et avant tout préoccupé que certains Marseillais se sentent lésés par une subvention qui ne le concernait pas, David Guetta nous demande d'annuler ce concert sans délai.

Mais "par respect pour tous ses fans qui ont néanmoins déjà acheté leurs billets, David Guetta a souhaité jouer le même soir au Dôme de Marseille, à guichets fermés et dans le cadre d'une production ne bénéficiant d'aucune subvention", reprend le même communiqué. En tout cas, les responsables du Dôme se frottent les mains, les voilà avec un concert à guichets fermés sans une once de communication. On espère juste que cet équipement municipal n'est pas mis à disposition gratuitement à titre de dommages et intérêts pour Adam Concert, qui s'assoit sur une très belle opération commerciale.

Bye bye subvention

Bien sûr, les 400 000 euros d'aide de la Mairie n'ont jamais été destiné à payer directement la star. "Pas un centime de la subvention ne concernait les artistes dont David Guetta", martèle Auguri Productions. La boite de prod' "tient à rappeler qu'il n'a jamais été question d'une subvention publique dans son contrat". En fait, selon la société, c'est :

l'organisateur local qui a proposé à la ville de mettre le parc Borély en configuration grands concerts et demandé dans cette perspective une subvention d'équipement.

En l'occurrence c'est donc sur Adam Productions que le couperet tombe. Son directeur Stéphane Métayer n'avait eu de cesse de se défendre en expliquant que la subvention servirait à équiper le lieu pour les concerts. Rappelons également que la mairie avait fait une pirouette en prétendant que la subvention – composée de deux versements dans le contrat signé – ne serait en fait que de 200 000 euros. Un mystérieux mécène privé ayant miraculeusement surgi. Il a également été question du Fonds Marseille 2013-2020, destiné à l'origine à l'art contemporain. En vain

"Avoir privé les Marseillais de 3, voire 4 grands concerts"

S'ils n'ont pas encore réagi officiellement, les pétitionnaires et le Commando anti 23 ont déjà commencé à exprimer leur satisfaction sur Twitter et facebook. Leur revendication principale était – bien que certains l'aient déformée par la suite – l'annulation de la subvention et non du concert. Si Gaudin est resté sourd un bon moment, puis a daigné tendre une oreille à leurs revendications, il s'était résigné à entendre le mécontentement des opposants. Rien n'était gagné pour autant, surtout que même si la subvention avait été réexaminée en conseil municipal, tout poussait à penser que la majorité UMP l'aurait revotée sans barguigner.

L'honneur est sauf et tous (ou presque) satisfaits : les fans de Guetta pourront le voir "en live", la subvention a été abandonnée. Seule, la ville cache mal son amertume également par voie de communiqué : "les opposants de David Guetta dans notre ville seront sans doute particulièrement heureux d'avoir privé les Marseillais de 3, voire 4 grands concerts populaires". Lionel Corsini, initiateur du Commando anti 23 juin, n'a pas manqué de relever cette accusation. Le mouvement citoyen qu'il a fédéré ne compte pas s'arrêter là. Le "guettagate" se referme, mais à un an des municipales, une brèche semble avoir été ouverte.

Marsactu se propose donc de lancer un nouvel appel à projets: puisque la Ville se trouve avec 400 000 euros d'argent public inemployé, quels sont les concerts, les initiatives et autres belles idées que vous aimeriez financer avec cet argent?