Prison ferme pour Génération identitaire : la justice reconnait la “gravité” des violences

Actualité
le 21 Oct 2022
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Ils avaient attaqué le siège de SOS Méditerranée à Marseille en 2018. Deux anciens membres de Génération identitaires ont été condamnés à 1 an et 6 mois de prison ferme. 21 autres écopent de peines de prison avec sursis allant de 5 mois à 1 an.

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L'avocat de SOS Méditerranée François De Cambiaire et le président de SOS Méditerranée François Thomas. Photo : PID

L'avocat de SOS Méditerranée François De Cambiaire et le président de SOS Méditerranée François Thomas. Photo : PID

“Ces faits constituent une scène unique de violences à laquelle tous ont pleinement participé.” Pas de doute pour le tribunal. Ce jeudi 20 octobre, c’est en ces termes qu’il qualifie l’intrusion des 23 militants de Génération identitaire au siège marseillais de SOS Méditerranée, une ONG qui porte secours aux migrants.

À l’issue d’une dizaine de jours de procès, les prévenus sont donc tous condamnés, à des peines plus ou moins lourdes en fonction de leur niveau d’implication et de leurs précédentes condamnations : allant de cinq mois de prison avec sursis à un an de prison ferme. Celles-ci sont proches des réquisitions qu’avait prononcées le procureur.

Aucun des membres de l’équipée d’octobre 2018 n’a fait le déplacement pour entendre sa condamnation, comme ils avaient déserté la plupart des journées d’audience. La mine grave, les sept victimes, salariées de SOS Méditerranée, ont elles accueilli le délibéré sans effusion.

Le 5 octobre 2018, 22 membres de Génération identitaire “ont envahi les bureaux privés de SOS Méditerranée, par la force, en criant et en filmant les faits. Ils ont employé la contrainte physique pour faire sortir une partie du personnel de l’association et occupé de manière forcée les lieux”, précise le tribunal dans son délibéré. Il retient les charges de violences en réunion et de participation à un groupement en vue de la préparation de violences. La 23ème partie prenante se tenait à l’extérieur, rue Paradis, pour filmer le déploiement aux fenêtres d’une banderole proclamant “SOS Méditerranée complice du trafic d’êtres humains”. Elle est condamnée pour complicité.

Deux peines de prison ferme

La peine la plus lourde, un an d’emprisonnement ferme, aménagée sous bracelet électronique, est prononcée contre Romain Espino, 29 ans. Cet ancien cadre de Génération identitaire est reconnu comme “ayant tenu un rôle prépondérant dans la commission des faits”, estime le tribunal. Il a par ailleurs déjà été condamné à trois reprises après d’autres actions du groupe d’extrême droite, dissout en 2021. Sa peine est assortie d’une inéligibilité de cinq ans, tout comme quatre de ses comparses les plus sévèrement condamnés, ainsi que d’une interdiction de séjour à Marseille pendant trois ans. Cette interdiction de territoire est également appliquée à la majorité des responsables de l’attaque.

C’est une décision d’une grande fermeté. On ne tire pas impunément sur l’ambulance

Me De Cambiaire, avocat de SOS Méditerranée

L’Aixois Jérémie Piano est ainsi contraint de ne pas se rendre dans la préfecture des Bouches-du-Rhône. Le militant identitaire, investit aux législatives par le parti d’Éric Zemmour Reconquête est également condamné à huit mois d’emprisonnement avec sursis. L’ancien légionnaire Peter Sterligov reçoit les mêmes peines, le tribunal leur reconnaissant une “persistance de comportement délictuel, (…) conjuguée à leur rôle particulièrement agressif”, au cours de l’attaque du local de SOS Méditerranée.

En récidive pour des “faits de violence aggravée”, Franck Dunas écope de six mois d’emprisonnement ferme aménagé en peine à domicile sous bracelet. Johan Salacroup, “déjà condamné pour des faits de port d’arme prohibé”, se voit prononcer une peine d’un an de prison avec sursis. Tous les autres prévenus reçoivent des peines de cinq à huit mois d’emprisonnement avec sursis.

“Désinvolture” dans les médias

Lors des premiers jours d’audience, 11 des 23 prévenus ont nié les violences à la barre, arguant d’une action “pacifique” censée lancer l’alerte. Le reste du groupe qui a pénétré avec fracas au sein du siège de SOS Méditerranée, n’avait pas fait le déplacement. La Toulousaine Anne-Thaïs Du Tertre, 23 ans, qui préfère se faire appeler Thaïs d’Escufon, a choisi de faire le commentaire de son procès sur Sud Radio, Radio Courtoisie ou encore Valeurs Actuelles. Ce qui n’a pas plu au tribunal qui la condamne à huit mois de prison avec sursis, “eu égard à sa personnalité et à sa désinvolture ressortant de ses propos tenus dans les médias révélant une absence de prise de conscience de la gravité des faits commis”.

Les ex Générations identitaires sont par ailleurs condamnés solidairement à payer 15 000 euros au titre du préjudice moral aux victimes, 20 000 euros à SOS Méditerranée pour le préjudice économique, ainsi que 22 000 euros pour le préjudice moral et l’atteinte à l’image et à la réputation de l’association de sauvetage en mer. Ils doivent également payer les frais de justice à hauteur de 1000 euros pour chacune des victimes et de 18 000 euros pour SOS Méditerranée.

“Les victimes vont pouvoir commencer leur travail de reconstruction”

Le soulagement est modeste du côté de SOS Méditerranée. “C’est une décision d’une grande fermeté. On ne tire pas impunément sur l’ambulance, c’est ce que le tribunal veut dire”, estime François De Cambiaire, avocat de l’association, à la sortie de l’audience. Il écarte les critiques des militants identitaires accusant l’ONG de vouloir museler leur liberté d’expression. “On tolère le débat idées contre idées, mais à partir du moment où il y a une atteinte à l’intégrité des personnes, la justice doit sanctionner”, argumente-t-il. Le président de SOS Méditerranée espère tourner la page. “Maintenant les victimes vont pouvoir commencer leur travail de reconstruction et nous allons poursuivre nos missions. Notre bateau est en mer actuellement”, commente-t-il. Depuis sa création en 2015, SOS Méditerranée revendique le sauvetage de 36 000 vies en Méditerranée centrale.

C’est la deuxième fois que des militants de l’ex-organisation d’extrême droite écopent de peines de prison ferme en première instance. Que ce soit pour l’occupation du toit de la Caisse d’allocations familiales de Bobigny, comme pour leurs actions aux frontières des Alpes et des Pyrénées, ils ont fait systématiquement appel. Jérémy Piano déclare d’ailleurs sur Twitter, “encore une fois, j’irai en appel défendre nos droits.”

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Commentaires

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  1. RML RML

    C’est curieux qu on ne lise aucun commentaire des habituels contradicteurs dans ces colonnes? Vous vous echarpez tous sur les poubelles, les’elus, le budget, et là ? Plus rien à dire?

    Signaler

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