Parc des Calanques : une majorité Gaudin, combien de divisions ?

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le 17 Oct 2011
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« Si les primaires sont terminées chez certains, je vois qu’elle commence chez d’autres ». La remarque est signé Didier Reault, conseiller municipal UMP délégué à la Mer, et s’adresse à Renaud Muselier, député du même parti dans le 4/5, qui vient de clore une intervention de près de 20 minutes (voir en bonus au bas de l’article) sur le parc national des Calanques (PNC). Alors que l’enquête publique sur la version 3 de la charte du PNC s’ouvre ce lundi, le conseil municipal de Marseille était lui aussi invité à donner son avis sur le document.

Muselier refuse un « chèque en blanc » et s’abstient

Aux « nombreuses zones d’ombre [qui] subsistent », Muso a ajouté l’opposition de nombreuses associations de pêcheurs, plaisanciers, plongeurs etc. Et les « réserves substantielles » émises par les communes de La Ciotat, Cassis, Ceyreste et Roquefort-la-Bédoule, « toutes de la même majorité politique que la ville de Marseille ». Une situation qui a selon lui « attisé les craintes » de « ceux qui se sont sentis floués en découvrant l’étendue de l’aire protégée en craignant de ne plus avoir voix au chapitre dans un parc dirigé par l’Etat, en voyant leur territoire, jusqu’alors entretenu bénévolement, gelé par les interdictions ».

Le reste est à l’avenant, ponctué de la ritournelle « est-ce vrai, est-ce une rumeur ? En tout cas la crainte est présente », l’ancien premier adjoint du maire Jean-Claude Gaudin affirmant même « partager l’inquiétude de ceux qui craignent d’être broyés par une machine bureaucratique ». Conclusion : si voter contre serait « une faute majeure » vu l’importance, assure-t-il, de l’enjeu, voter pour « serait signer un chèque en blanc à l’administration », et donc abstention.

Duel de prétendants aux municipales 2014

On l’a vu, cette prise de position et le discours qui allait avec est très moyennement passé du côté de Didier Reault, l’une des chevilles ouvrières du parc, qui y a vu un coup politicien. « C’est le droit de chacun d’être dans un débat légitime, mais c’est un événement politique à Marseille qu’il y ait ce type de rupture dans la majorité municipale », a commenté Patrick Mennucci, chef de file du groupe d’opposition Faire Gagner Marseille, regrettant cependant que « nous nous éloignons du parc pour entrer dans d’autres perspectives où la préservation de l’environnement n’est pas la préoccupation principale… »

L’« événement » s’était en fait déjà produit, en avril, lors du débat sur le budget primitif, avec un canardage en règle d’une autre pointure de la majorité, le député-maire du 9/10 Guy Teissier, qualifié à l’époque de « Fillon de Marseille » par Mennucci. Teissier qui est président du GIP, chargé de préfigurer le parc et mener la concertation, mais aussi auteur de la loi de 2006 sur les parcs nationaux. Aussi limpide que l’eau de la calanque de Sugiton… Lui aussi dénonce un « dérapage politique » :

Gaudin affaibli

Et Gaudin, qui voit une nouvelle fissure apparaître dans ses troupes ? « Dans la majorité que j’ai l’honneur de présider la liberté d’expression est totale », a-t-il d’abord réagi placidement. Et ce malgré le message que semblait chercher à faire passer Renaud Muselier, qui avait déclaré fin août que le maire n’avait « pas de majorité au conseil ». Les Verts et le PS ayant de toute façon, malgré des réserves, annoncé leur vote favorable, c’était l’occasion rêvée de faire d’une pierre deux coups : faire la preuve par l’exemple d’une interprétation possible de cette déclaration en entraînant dans le sillage de son abstention pas moins d’une demi-douzaine d’élus UMP, tout en critiquant le « bébé » de Guy Teissier, principal autre postulant à la mairie en 2014 si le maire ne briguait pas un quatrième mandat.

Lorsque Patrick Mennucci a insisté pour que soient égrenés les votes de chacun (alors que les conseillers votent déjà par tradition à main levée), le maire a toutefois haussé le ton, laissant voir qu’il n’était pas dupe de la manoeuvre de l’un comme de l’autre : « ce n’est pas à vous de trier le bon grain de l’ivraie dans la majorité ! », a-t-il pesté. Et lorsque plus tard, menant la charge sur un autre sujet, le maire du 1/7 souligne que Jean Roatta, compagnon de toujours de Gaudin, faisait partie des abstentionnistes, le vieux lion rugit, faisant même une rare allusion à l’affaire Guérini :

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Voilà pour les enjeux politiciens. Mais du côté de la politique, nombreux sont ceux qui dénonçaient l’instrumentalisation par Muso d’un sujet aussi important que le PNC. Le principal intéressé s’en défendant, se posant en porte-voix des Marseillais :

Plaidoyers pour le parc

Mais de petits rappels s’imposaient cependant. Celui de Didier Reault pour qui ce patrimoine est menacé par « la surfréquentation et certaines pratiques, comme celles qu’on a vues la semaine dernière et que l’on peut qualifier de criminelles (allusion aux trois dauphins retrouvés morts lesté de béton, ndlr) ». Et que le parc est la « seule chance de disposer d’un outil efficace pour prévenir, gérer mais aussi contrôler et sanctionner des pratiques indignes de notre société ».

Celui de Guy Teissier ensuite. A la liste des adversaires du PNC dressée par son – peut-on dire désormais – rival, il a opposé celle de ses défenseurs : chambre de commerce, universités, confédération des CIQ, conseil de développement de MPM, syndicat des bateliers, Club Provence Nautisme… Ce parc, « on en aurait bien besoin en terme d’image », a-t-il poursuivi, « ce projet incarne à lui seul la dimension métropolitaine que l’on veut donner à Marseille, et toi d’ailleurs mon cher Renaud ».

Un bon tacle au chantre du Grand Marseille ponctué d’une remise en contexte : « c’est bien parce que la charte va s’imposer au Scot, au PLU, au plan de déplacement urbain, que de nombreuses pressions s’exercent (…) cela va nous obliger à penser différemment les politiques de transport, stationnement, urbanisme, d’élaborer une politique pensée d’interface ville-nature ».

Outre le vote favorable déjà cité du PS et d’Europe Ecologie-Les Verts, l’abstention du groupe communiste était d’ailleurs loin d’avoir la même signification que celle du député UMP :

Contradictions

Dans un autre style, rejoignant le thème de la schizophrénie lancé par Guy Teissier, Patrick Mennucci a dit, « compte tenu de l’influence de monsieur Muselier à Paris, de son amitié renouvelée avec le président de la République, de ses liens avec madame Kosciusko-Morizet », ne pas comprendre la position de l’opposant du jour : « soit les élus sont uns et indivisibles sur ces bancs et à l’Assemblée nationale et alors ils usent de leur pouvoir d’influence pour à Paris faire triompher leur position à Marseille. Ou alors à Paris ils se taisent et utilisent la tribune du conseil municipal uniquement pour prendre une posture ».

Mais revenons au fond de la délibération pour constater qu’à défaut de schizophrène, le texte proposé relevait d’une certaine acrobatie : « on nous demande d’approuver le projet de charte, tout en posant cinq exigences », s’est étonnée Flora Boulay pour EELV y voyant une « contradiction ». Et parmi ces exigences, outre le volet dépollution évoqué par Christian Pellicani, figure tout simplement de revenir au cœur de parc marin de la V2 ! Un « yoyo » qui dans l’entourage de Guy Teissier commence à lasser…

Et comment ne pas voir finalement une nouvelle ligne de fracture, cette fois ci entre les chevilles ouvrières du parc et leur maire, quand Didier Reault clame que « « l’heure est désormais au soutien inconditionnel plutôt qu’au « peut mieux faire » (…) désormais il n’est plus temps d’émettre des réserves (…) les arbitrages ont été faits, comme dans tout compromis, il faut les accepter et concrétiser le projet ». Espérons que cela ne s’applique toutefois pas au public consulté pendant un mois via l’enquête qui démarre ce lundi…

Disclaimer : Pour la transparence que nous devons à nos lecteurs, nous vous informons que Raj Médias la société actionnaire de Marsactu réalise des missions de conseil internet pour le GIP des Calanques

Un lien Pratique : les dates, les adresses, le dossier de concertation, sur le site du GIP des Calanques

Un lien Le parc des Calanques pour avril 2012. Le plus dur restera à faire, sur Marsactu

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Commentaires

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  1. CANI CANI

    Monsieur Muselier fustige les électeurs qui ne se rendent pas dans les bureaux de vote (pour certains c’est l’expression d’une abstention puisque le vote blanc
    est pratiquement comparable à cette démarche)

    et LUI …… ose s’abstenir !!! dans le dossier du Parc des Calanques le 17 Octobre 2011

    un élu doit être engagé,
    un élu doit connaître ses dossiers,
    un élu doit trancher,
    un élu doit voter,

    Honte à vous Monsieur Muselier !!

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  2. reveur reveur

    et pourtant il le faut, malgré cette attitude particulière de Muso

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  3. etranger etranger

    Roatta aussi …. je crois réver

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  4. SAUTERELLE SAUTERELLE

    Des heures et des heures de consultations, des ateliers ouverts à tous, hommes politiques qui se rencontrent tous les jours par leur appartenance , et vlan

    belle mentalité.

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  5. Silvano Silvano

    J’ai lu son intervention (en ligne sur son site). Elle est argumentée et réfléchie mais pas convaincante. S’appuyer sur des craintes et remarques formulées par des associations professionnels ou d’usagers qui ont été associées aux débats et réunions de création du Parc. Non ! Par contre faire état des remarques et recommandations de l’autorité environnementale, oui ! Surtout que les demandes de l’AE si elles sont suivies va renforcer les craintes des autres. Il aurait été plus pertinent dans son avis de pointer cet élément. Pour le reste, Muso peut de rendre comme tout un chacun à l’enquête publique pour en remettre une couche .

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  6. fanaco fanaco

    Plus qu’une erreur , c’est une faute Mr Muselier! d’autant que ce parc est plébiscité par la majorité des marseiilais qui a compris ,elle , que nous devions protéger et préserver ce magnifique environnement.
    Cette abstention , totalement démagogique est d’autant plus navrante qu’une dizaine d’élus , véritables moutons de panurge vous ont suivi , sans être , j’en suis certain , convaincus de votre argumentation , mais” ceci est une auttre histoire”
    Par cette décision , vous semblez être aux ordres de certaines associations , féderations et autres clubs qui font passer passer leurs privilèges avant le bien public , celà s’appelle du clientélisme et j’avais cru comprendre que vous condamniez ce genre de pratique chère au coeur de certains élus marseillais.

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  7. charlessxx charlessxx

    Vraiment pas jolie l’attitude de Muselier sur ce coup, un politicard de la pire espèce, à encore surfer sur la beaufitude de quelques concitoyens (c’est lui qui fait coller des affichettes “parisien” sur les affiches électorales de candidats concurrents, oui oui le bonhomme est un peu sale des idées), à sacrifier le patrimoine naturel pour un petit espace médiatique ! lamentable !

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  8. RORO RORO

    A force les “non initiés” ne comprenent plus rien au barouf politique créer par ce parc. On ne comprends pas non plus pourquoi il faille céder autant de territoire, d’ailleurs la réponse des acteurs de la mer est claire, c’est non au parc car il n’y a pas de vrais utilisateurs au sein du GIP, il n’y a personne de suffisamment proche de nous qui sait réellement ce qu’il raconte. Fabriquer des décrets entre copain c’est très facile, mais coment allez vous empêcher les filets posés à cinquante mètres du bord tout le long de Marseilleveyre sans vous prendre une correction électorale? Comment allez vous empêcher les enfants de piétiner ces plantes qui ornent les chemins ? Au lieu de rester enfermés dans vos bureaux de la mairie à trouver des solutions, mellez vous à la population qui marche dans les calanques le dimanche, sortez vos cannes à pêche et faites vous un bon repas familial avec vos prises, sortez avec des professionnels de la mer et quand vous aurez fait le tour de ce patrimoine humain vous saurez mieux que quiconque comment faire un parc dans ” nos ” calanques…

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