"Je ne ferai aucun recours pour ne pas bloquer le projet pour 2013" : Corinne Vezonni s'explique

Demain lundi sera dévoilé le projet gagnant du réaménagement du Vieux-Port de l’architecte Norman Foster. La star mondiale de l’architecture ne fera pas le déplacement, mais c’est Michel Desvigne son associé dans ce projet qui viendra le présenter à la presse. Desvigne est aussi un très grand paysagiste qui a notamment travaillé avec succès sur les projets d’aménagements urbains de Lyon Confluence et des quais de Bordeaux. Il a également déjà travaillé avec Norman Foster sur le Viaduc de Milau. Mais d’ici lundi c’est embargo sur ce projet. En attendant d’en savoir plus et après avoir montré les images du projet concurrent de Corinne Vezzoni, nous nous sommes entretenus avec l’architecte marseillaise pour qu’elle puisse commenter son projet.

Marsactu : Vous étiez en finale contre le projet de Norman Foster, vous avez perdu quel est votre état d’esprit ?

Corinne Vezzoni : Je suis évidemment très déçue, je suis Marseillaise, j’y ai mis tout mon cœur, toute mon énergie, toute ma force et fait travailler autour de moi de nombreux grands professionnels, comme par exemple l’agence de paysagistes « West 8 ». On a même fait travailler des historiens, spécialistes de Marseille, et des artistes pour pleinement inscrire le projet dans 2013.

Le jury vous a placé devant Norman Foster, à 8 voix contre 7, mais pourtant, le président de la communauté urbaine Eugène Caselli a fait un choix inverse, comment l’expliquez-vous ?

CV : Juridiquement le jury n’est que consultatif, mais généralement dans 99% des cas les décideurs suivent les choix du jury.  D’où ma très forte déception.

Allez- vous attaquer cette décision en justice, comme vous l’aviez fait à Cannes, et où vous aviez finalement obtenu gain de cause ?

CV : Non, car une procédure juridique risquerait de bloquer le projet pour 2013, et plus que tout je souhaite que 2013 soit une réussite. Je ne ferai donc aucun recours.

Un des reproches que l’on a entendu sur votre projet, c’est qu’il était 100% piéton et donc irréaliste compte tenu des délais pour 2013…

Ce n’est pas exact. En réalité pour 2013, nous proposions de nous concentrer sur le quai des Belges, qu’on aurait transformé en une place, appelée place de la Fraternité, qui était d’ailleurs son nom historique, une place de la taille de la place Saint-Marc à Venise. Jusqu’en 2013 seule cette place serait restée piétonne. Pour que la population s’adapte. Puis après 2013, on aurait  basculé vers la semi-pietonisation des autres quais, en laissant l’accès de toute façon aux véhicules de secours, aux transports en commun, aux vélos, et aux véhicules utilitaires (pêcheurs, navettes…). De toute façon la plupart des véhicules qui passent à ces endroits n’ont rien à y faire. Ils sont en transit. Ils doivent passer ailleurs. Et on laisse la place aux autres.

Apparemment un des points forts du projet de votre concurrent est l’apport d’arbres, de végétaux autour du Vieux-Port ?

Oui la Communauté Urbaine nous a demandé de travailler sur ce sujet, réclamant des points d’ombrages notamment. Nous avons décidé de ne rien faire sur la Place de la Fraternité,  pour éviter que des plantations où du mobilier urbain puissent empêcher les marseillais de s’approprier pleinement la place. En revanche, nous voulions planter des platanes taillés à plat, sur le quai de l’Hotel de Ville, le plus agréable, car abrité du mistral. Cela aurait également permis aux restaurants d’écarter un peu plus leurs terrasses des immeubles Pouillon, et de redonner vie aux arcades. Nous avions également décidé de faire un gros effort en terme de paysage végétal à l’anse du Pharo. Comme je crois notre concurrent l’a prévu.

Et le bassin du Vieux- Port lui même ?

Notre idée était là aussi d’agrandir le bassin, de le mettre en valeur. Nous déplacions la station service du bout du quai de l’hotel de ville à l’anse du Pharo, avec un ponton fermé , qui protége du mistral. Les pilotines partaient à l’Estaque, avec leur accord, et nous déplacions les navettes du frioul , en face de la Samaritaine. La gare sur le ponton flottant, les cabanes de vente de billets étaient réintégrées dans les bureaux dans l’immeuble de l’Espace Pernod. Bien entendu les barrières des panes étaient supprimées et nous installions 2 grands pontons flottants, ouverts au public, pour que tout le monde puisse profiter du bassin. Ces 2 grands pontons, un en prolongement de la place aux huiles, l’autre de la place de Lenche, auraient également pu être utilisés pour des manifestations artistiques. Et enfin nous mettions en place un important dispositif de mise en lumière du Vieux –Port, bien trop sombre aujourd’hui.

Mais encore une fois, tout ça était réellement réaliste en terme de budget et de calendrier ?

Nous pensons que la transformation d’une ville, pour qu’elle soit notamment acceptée par la population, qui va devoir supporter de lourds travaux et modifier ses habitudes, ne peut se faire qu’à l’occasion d’un grand événement. C’est ce qui s’est passé par exemple avec Barcelone et les JO ou Valence et l’America’s Cup… Et 2013 et un rendez-vous à ne pas rater. Il fallait vraiment que des transformations visibles et fortes soient réalisées à cette date. C’est la raison pour laquelle nous souhaitions nous concentrer dans un premier temps sur cette place de la Fraternité. Il n’y a pas de grande place à Marseille, toutes les grandes villes en ont une. Et puis pour le budget, nous restions dans l’enveloppe de 27 millions pour 2013, puis 40 millions supplémentaires pour 2020.

>> Pour voir les images du projet Vezzoni c’est ici