Incendie mortel aux Rosiers : les politiques pointent un nouveau drame du mal-logement

Actualité
le 6 Jan 2022
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Le feu a pris mercredi 5 janvier dans un appartement où vivaient 9 personnes faisant un mort et plusieurs blessés graves, cité des Rosiers (14e). Au-delà de l'émotion, les autorités voient dans ce drame la conséquence d'un habitat indigne, qu'elles ont du mal à juguler.

La cité des Rosiers en 2020. (Photo : BG)
La cité des Rosiers en 2020. (Photo : BG)

La cité des Rosiers en 2020. (Photo : BG)

Un enfant de 5 ans a perdu la vie, ce mercredi 5 janvier, dans l’incendie d’un appartement de la cité des Rosiers (14e arrondissement). Deux autres enfants et trois adultes, victimes de brûlures ou intoxiqués par les fumées, ont été pris en charge par les marins-pompiers et hospitalisés. Pour l’heure, les causes du feu ne sont pas connues. Une enquête est en cours pour les déterminer.

Le maire “profondément attristé” s’est rendu sur place ce mercredi. Martine Vassal, présidente de la métropole, a présenté, sur Twitter, ses condoléances à la famille endeuillée. Mais déjà, au-delà du drame humain, les élus locaux ont rapidement pointé un nouveau drame du logement indigne. “Les mécanismes profonds à l’origine de l’enfer de béton qu’est devenue la copropriété des Rosiers ne sont ignorés de personne, souligne dans un communiqué la députée LREM Alexandra Louis, très impliquée depuis plusieurs années sur ce dossier. La responsabilité des marchands de sommeil et des profiteurs de misère est, à n’en pas douter, centrale dans ce drame.

“Neuf personnes qui vivent dans des conditions de suroccupation pas forcément faciles se trouvent déjà en situation de mal-logement. Et cela peut évidemment conduire à des drames comme on le voit encore ici”, appuie Patrick Amico, adjoint au maire de Marseille chargé de la politique du logement et de la lutte contre l’habitat indigne.

Une trop longue série

Cette tragédie dans une copropriété marseillaise vient s’ajouter à la liste, forcément trop longue, de plusieurs sinistres récents qui ont causé la mort de trois résidents des Flamants (14e) en juillet dernier ou d’un homme au Petit-Séminaire (13e), il y a une dizaine de jours. En mai puis en juillet 2021, c’est la copropriété Gyptis (3e) qui était touchée par deux fois par des incendies, avec deux blessés graves lors du premier sinistre. On peut aussi rappeler l’important incendie de Maison-Blanche (13e), en août 2019, qui n’avait pas fait de victime. Dans toutes ces situations, l’état de délabrement de ces grands immeubles amplifie les risques pour les habitants lors d’un départ de feu, quand il n’en est pas la cause première.

Depuis octobre 2018, six résidences marseillaises sont inscrites dans le plan Initiatives copropriétés voulu par l’État pour résorber les grands ensembles délabrés sur tout le territoire. Les Rosiers qui ne faisaient pas partie, à l’origine, des sites retenus, sont désormais inscrits parmi les priorités identifiées à Marseille.

“Le problème des copropriétés dégradées est ici particulièrement aigu et vaste, poursuit Patrick Amico. C’est un sujet que l’on ne peut pas traiter comme dans un immeuble classique“, avec la nécessité d’un appui technique pour les syndics, mais aussi de procédures judiciaires. L’élu pointe en outre des copropriétés que “l’on a laissé dériver pendant des années” : “Certaines ont accumulé des dettes tellement massives qu’elles ne sont même plus en capacité de réaliser les travaux de sécurité. Elles mettront sans doute une décennie pour s’en sortir.” À Corot, l’avis d’expropriations massives lancé il y a quelques semaines dans cette copropriété squattée et délabré, est l’illustration des lourdes et lentes procédures nécessaires.

Reste que, de son propre aveu, le plan national – fruit de la coopération entre l’État et les collectivités locales, la métropole en tête – peine à accoucher d’effets concrets sur le terrain. S’il assure que les différentes parties prenantes sont à pied d’œuvre sur le sujet, Patrick Amico identifie trois freins : “D’abord, le manque d’une vraie stratégie globale copropriété par copropriété. Que voulons-nous faire de chacune ? Ensuite, ces stratégies ne peuvent se concevoir que dans la cohérence avec ce qui entoure la résidence, comme les autres programmes ANRU [l’agence nationale de la rénovation urbaine, ndlr] à proximité. Enfin, le pilotage de ces actions-là, par l’État, la métropole et la Ville demande notamment le déploiement de moyens humains et financiers au sein des copropriétés dégradées et là, on n’y est pas encore.” Dernier obstacle, là comme dans d’autres résidences, l’adjoint au logement pointe une intervention rendue difficile par la présence de points de deal “qui tiennent tout.”

“Nous ne pouvons plus attendre que le temps long de l’action publique s’impose au temps court d’une urgence depuis trop longtemps vitale”, argue Alexandra Louis qui plaide pour la création immédiate d’une “task force” mêlant des institutions concernées, des bailleurs sociaux et privés, des associations et des représentants des habitants. La députée demande que celle-ci soit “dotée des pouvoirs et des moyens les plus étendus pour mettre en sécurité dans l’urgence les populations à risque et permette sur la durée d’apporter des solutions pérennes”. Mais le temps presse. “Cela peut se reproduire ailleurs”, s’inquiète Patrick Amico. À plusieurs reprises, comme aux Flamants quelques mois avant l’incendie mortel, Marsactu a réalisé des reportages relevant l’état de dégradation extrême des Rosiers. Le drame les met une fois de plus en lumière.

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Commentaires

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  1. jasmin jasmin

    Est ce que vous pouvez expliquer en quoi les points deal ont un rapport avec l’état délabré des residences? Le syndic ne veut pas y mettre les pieds par peur des dealers? ou les dealers tiennent à un aspect délabré pour oeuvrer plus discrètement? Le revenu du deal étant distribué pour partie aux habitants des tours, cet argent ne pourrait il pas servir en partie à la réhabilitation des résidences? Il me semble qu’il faut parler de ce sujet cash dans les discussions à venir des task force habitants-bailleurs-municipalité. Mais c’est au bailleur, en premier lieu de faire son entretien régulier comme ailleurs. Une partie de l’entretien revient aussi aux habitants qui ne dégradent pas l’existant. Ca me désole que la premiere réaction de n’importe qui dans l’article à cet accident tragique est de pointer le doigt vers un responsable. Personne ne résout le probleme.

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  2. petitvelo petitvelo

    Le lien me semble un peu ténu entre un incendie accidentel en sur-occupation, et un incendie criminel entre squatteurs. Même si le théatre est similaire, et l’un peut être vu comme pré-figurant ce que deviendra l’autre, tout n’est pas la faute de l’état d’une copro.

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