Avis d'entrées maritimes sur le permis d'exploration off-shore

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le 12 Avr 2012
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Avis d'entrées maritimes sur le permis d'exploration off-shore
Avis d'entrées maritimes sur le permis d'exploration off-shore

Avis d'entrées maritimes sur le permis d'exploration off-shore

Le mistral a soufflé très fort le week-end dernier sur les côtes méditerranéennes. Et c'est Nathalie Kosciusko-Morizet – directrice de campagne de Nicolas Sarkozy et son ex-ministre de l'environnement – qui la première a relevé l'avis de grand frais, et en a vite informé son champion. NKM en bonne miss météo du web a également vu la mobilisation se lever sur les réseaux sociaux. Même si "l'environnement ça commence à bien faire", et si Eva Joly ne décolle pas dans les sondages, NKM a compris qu'il fallait surveiller de très près cette affaire de plate-forme pétrolière en Méditerranée, afin d'éviter toute tache de goudron sur le beau costume de son président-candidat.

Du coup, alors que les ONG écologistes et Europe Écologie-les Verts préparaient leur grande armada autour de Brégancon, pour manifester contre le permis "Rhône Maritime" qui autoriserait les sociétés pétrolières Melrose Ressources et Noble Energy à poursuivre leurs recherches, NKM a suggéré à son boss de prendre tout le monde de vitesse en annonçant le premier son non renouvellement. Et c'est lors d'un meeting à Caen vendredi dernier que Sarko a fait son René Dumont :

Je n'accepterai pas de forage pétrolier en Méditerranée au large des calanques, parce que la Méditerranée c'est le coeur de notre identité.

Et sur sa lancée, plutôt que de risquer de voir débarquer les drakars d'Eva au Cap Nègre, où il avait prévu de passer le week-end de Pâques dans le cabanon de Carla, Sarko en a remis une petite couche samedi au meeting de Saint-Raphaël :

 Je ne crois pas qu'il soit très intelligent de décider d'un forage pétrolier en Méditerranée.

Et hop, c'est plié, Green Sarko venait de sauver la Méditerranée. Cette annonce du candidat président a en tout cas pris un peu tout le monde de court au sein des ministères concernés par ce dossier, enfin de ce qu'il en reste. Du côté du ministère du Développement durable, c'est facile, il n'y en a plus : il a été directement absorbé par Matignon depuis que NKM est passée porte-parole de la France forte. Et du côté de l'industrie, Eric Besson serait plutôt en train de songer à sa reconversion – du côté de chez Pinault si l'on en croit la presse – qu'à phosphorer sur  la politique énergétique de la France.

Ça flotte au ministère

En tout cas, son cabinet est toujours aux abonnés présents, et nous l'avons interrogé sur cette demande de renouvellement de permis à plusieurs reprises ces derniers jours. On n'a pas tout compris, mais ce qui est certain, c'est que ça navigue à vue, depuis la déclaration du candidat Sarkozy. Vendredi, quelques heures avant la belle déclaration d'amour présidentielle pour les calanques, la position officielle du ministère était que le dossier "[était] toujours à l'instruction" et qu'"aucun calendrier précis [n'était] arrêté". Contrairement à ce qu'indiquait, et continue d'indiquer Greenpace sur une deadline au 11 avril, au-delà de laquelle le renouvellement de permis serait caduc.

Petit pas de côté samedi matin, au lendemain de l'annonce normande : "nous n'avons pas d'autres informations que celles de Nicolas Sarkozy". Et puis hier, un magnifique triple salto arrière, venant toujours du cabinet du Ministre de l'Industrie :

À ce jour, la prolongation a bien été implicitement rejetée et ce rejet tacite date non pas du 11 avril, mais de janvier dernier, ce qui signifie que le permis n'est pas renouvelé.

Le permis qui était donc toujours "à l'instruction" vendredi dernier, n'avait donc pas à l'être, puisqu'il était rejeté "tacitement" depuis janvier dernier selon nos amis de Bercy. Hum, hum, hum. #WTF comme on dirait sur Twitter.

Feu vert tacite

En réalité les choses ne semblent pas si simples que ça. Car cette demande de permis d'exploration, acceptée une première fois en 2002, puis prolongée une deuxième fois en 2006 jusqu'en novembre 2010 , est encadré par un dispositif réglementaire très précis, le code minier. Et à l'article L 142-6 sur les "prolongations des permis exclusifs de recherches de mines", on peut lire : 

Au cas où, à la date d'expiration de la période de validité en cours, il n'a pas été statué sur la demande de prolongation, le titulaire du permis reste seul autorisé, jusqu'à l'intervention d'une décision explicite de l'autorité administrative, à poursuivre ses travaux dans les limites du ou des périmètres sur lesquels porte la demande de prolongation.

Un code minier bien connu d'ailleurs par la Polytechnicienne NKM, qui l'avait déjà utilisé quand elle était toujours ministre de l'Environnement, pour répondre en octobre dernier à une question posée par le député de Corse du Sud Simon Rennucci qui s'inquiétait déjà du statut de ce permis, comme cela figure au Journal Officiel. Une réponse du gouvernement qui à l'époque avait déjà alarmé quelques écologistes bon connaisseurs de ces sujets complexes, comme Achim Gertz. En gros c'est "qui ne dit mot consent", et que tant qu'une décision officielle n'a pas été prise, même après la date d'expiration du permis, le titulaire peut continuer ses recherches, notamment sismiques, sous couvert d'une simple autorisation préfectorale.

C'est ce qu' a d'ailleurs continué à faire Melrose Mediterraneen Limited, la société écossaise titulaire du permis, qui aurait procédé à des sondes sismiques jusqu'en février dernier. Pas la même chose, et même exactement le contraire de ce que nous a indiqué hier le Ministère de l'industrie.

Interprétations divergentes

Si  l'avocat spécialisé  dans le droit de l'environnement Arnaud Gossement, interrogé par Marsactu, considère lui que la déclaration de Nicolas Sarkozy à Caen peut être prise comme "une décision explicite". Corinne Lepage, autre avocat et présidente de Cap 21 est elle beaucoup plus prudente , comme elle l'explique sur une tribune publiée sur le Huff Post.

Compte tenu des enjeux financiers et stratégiques énormes de ce type de projets, on a du mal à croire que les jeux soient faits et que la partie se termine sur une simple promesse de campagne de Sarkozy. D'ailleurs, plusieurs professionnels de la prospection d'hydrocarbures, notamment Jacques Sallibartant, président de l'Amicale des foreurs et des métiers du pétrole, gros lobby de la profession, n'y croient pas vraiment : 

Les non renouvellements sont rarissimes et doivent être motivés. Les sociétés qui détiennent ce permis, qui ont déjà dû investir beaucoup d'argent, ne resteront certainement pas sans réagir

Les sociétés, l'écossaise Melrose Ressources et la  texanne Nobles Energy, détentrices de ce permis d'exploration Rhône Maritime ne semblent pas  très stressées non plus par les effets de manche de Sarko comme le souligne Alasdair Robinson, le porte-parole de Melrose ressources.

Nous ne commentons pas le statut de notre permis avant que le processus réglementaire ne soit achevé, soit après les élections. (we are not going to comment further on the status of our permit until after the regulatory process is complete, which will be after the election)

Pas de quoi en tout cas dissiper les entrées maritimes qui entourent cette histoire de permis. La suite au prochain épisode.

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Commentaires

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  1. joliette13 joliette13

    Une fois de plus Sarkozy se fout de nous, et cela confirme bien qu’il gouverne sur des coups de tête et sans en informer les ministères compétents

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  2. Johnny Johnny

    Le règne de l’arbitraire comme d’habitude

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  3. Anonyme Anonyme

    sarko surf sur l’opportunisme des actualités, on verra après les élections si “l’écologie ca finit par bien faire”!
    Ah c’est beau la politique!

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  4. Nadia Nadia

    Je suis furieuse car si en effet, le Chef d’Etat actuel qui a soit disant refusé de donner suite à l’exploration d’hydrocarbure dans les Calanques ne va pas jusqu’au bout de son engament, nous nous retrouvons alors confrontés à un sacré dilemme. J’ai peur que le prochain gouvernement (tous partis confondus) porte peu d’intérêt à cette catastrophe, vu les graves problèmes économiques que traverse notre pays. Alors, ce dossier brûlant se retrouvera sur une pile tandis que les sociétés de forages continueront leur travaux jusqu’à qu’une décision administrative veuille bien se pencher sur cette affaire. Connaissant les lenteurs administratives. Je ne vous cacherai pas mon inquiètude.

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  5. druide67 druide67

    Ne pourrait on pas donner ce permis a une entreprise française?
    Sommes nous stupide à ce point?

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