Significations du football

Billet de blog
le 12 Juin 2016
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Le stade vélodrome lors de la dernière rénovation.
Le stade vélodrome lors de la dernière rénovation.

Le stade vélodrome lors de la dernière rénovation.

Sans doute n’est-il pas inutile, ces temps-ci, de s’interroger un peu, avec une certaine distance critique sur que signifie le football, pour tenter de mieux comprendre la passion qui semble emporter la France, mais aussi tous les pays européens autour de l’Euro, jusqu’à entrainer des violences graves comme à Marseille.

D’abord, l’Euro est une compétition entre équipes nationales. Il s’agit donc d’une forme de revendication de l’identité nationale et d’une compétition mettant en jeu les sentiments de fierté nationale des supporteurs comme des joueurs. En ce sens, sans doute peut-on aller jusqu’à dire que les compétitions sportives entre nations, en particulier dans les sports collectifs comme le football ou le rugby ont-elles pris la place de la guerre dans la multiplicité des expressions du nationalisme.  Les violences entrainées par les compétitions prennent la place des violences guerrières, mais sans doute les compétitions elles-mêmes, dans la mise en scène des affrontements physiques et des jeux du corps qu’elles impliquent, manifestent-elles à la fois une forme de violence et une forme de nationalisme, les joueurs représentant leurs pays dans la confrontation avec les joueurs des autres équipes.

Par ailleurs, en raison de l’implication de foules entières dans les matches de football, ce sport est devenu une activité économique. La médiatisation du football fait de ce sport une source de profit importante à la fois pour les médias, pour les équipes qui en bénéficient, et, au-delà, pour les pays et les villes qui organisent et accueillent les compétitions. C’est tout l’enjeu que représentent les stades et les équipes, et les pouvoirs locaux et nationaux consacrent une part de plus en plus importante de leurs budgets aux activités liées au football.

Le football, à la fois pour les spectateurs qui assistent aux matches vivants et pour ceux qui les regardent devant leur écran de télévision, est devenu une forme de spectacle vivant. Il s’agit, en ce sens, d’une façon d’impliquer la force sportive dans une esthétique du spectacle, en donnant aux matches, comme dans tout spectacle, la dimension de suspens, d’attente du résultat, qui confère aux compétitions de football comme l’Euro la dimension d’un feuilleton, dont on attend l’issue à travers de multiples péripéties.

Dans ce spectacle, toutefois, et c’est ce qui le distingue des autres spectacles auxquels nous pouvons assister, c’est le déploiement et la mise en valeur de la force physique qui remplace la dimension  esthétique de la mise en scène. L’enjeu de ce spectacle n’est pas de susciter le plaisir ou l’admiration devant une représentation, mais de mettre en scène la compétition entre les corps pour susciter l’admiration devant la force physique, et même, dans beaucoup de cas, devant la virilité.

Reste maintenant, toutefois, à s’interroger sur la spécificité du football parmi les autres sports, car tout ce que nous venons d’écrire pourrait se dire de n’importe quel sport. D’abord, le football se joue autour d’un ballon : il s’agit de le gagner, d’en avoir la maîtrise, ou de le perdre en le laissant s’échapper. En ce sens, le football met en scène la possession ou le vol, un peu comme, au Moyen Âge, le faisait le personnage de Renart dans le roman qui porte son nom. Ensuite, il s’agit d’une sorte d’union entre la course à pied, car il s’agit de parcourir un terrain, et la confrontation à un adversaire ; en ce sens, le football réunit la course et la lutte, un peu comme le rugby. Mais une autre particularité du football, qui lui donne son nom, est de se jouer avec le pied, et non, comme d’autres sports comme le tennis, avec la main. Le football est, ainsi, un sport de force et non un sport de geste : ce n’est pas l’adresse du geste qui est mise en scène dans le football, mais la force du mouvement. On se trouve, ainsi, dans le football, renvoyé à la logique primitive du rapport de forces : il s’agit de conquérir le terrain et le ballon et de le conserver, et non de le faire circuler, et, en cherchant à marquer des points, c’est-à-dire à envoyer le ballon dans les buts de l’adversaire, il s’agit de s’approprier un espace en le confisquant à l’adversaire. Sport de conquête, le football est bien, ainsi, une forme de représentation de la guerre et les matches une forme de représentation des batailles, ce qui nous fait revenir à l’expression du nationalisme incarnée par le football.

Le football est donc une forme de mise en scène sportive d’une représentation de la violence et de la confrontation entre des adversaires. Sans doute est-ce ce qui lui donne l’importance qu’il a acquise dans nos pratiques sociales.

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