Passer de l’autre côté

Billet de blog
par Lagachon
le 24 Déc 2012
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Il n’y a pas longtemps, j’accompagnais un copain qui se faisait interviewer et au moment d’expliquer pourquoi il était venu à Marseille il a dit “inconsciemment, j’aurais aimé aller de l’autre côté”. L’autre côté…

“Je ne vous ai jamais parlé de mes origines pied-noir ?” parfois je dis ça quand j’ai bu, bien que ce soit complètement faux. Encore que… si je le pense au point de le dire. On ne conçoit que ce qui existe d’après Descartes, non ? Du coup si je conçois mes prétendues origines pied-noir, c’est qu’elles ne sont pas complètement absurdes (en tous cas, pas plus que l’existence de Dieu si on suit le philosophe).

Le point commun de ces deux réflexions c’est la fascination que l’orient exerce chez de nombreux marseillais, et peut-être même plus chez les plus néo d’entre eux.Passer de l’autre côté, traverser la mer, c’est une aventure à laquelle tout le monde n’est pas préparé. Et à qui Marseille offre un compromis idéal : la mer est là, l’orient aussi, mais dans un contexte français, un peu comme s’arrêter à Papeete en voulant découvrir le Pacifique.

Je me rappelle des premiers mots du film “Le coup de Sirocco”, la voix off dit un truc comme “je viens du Sud, du vrai Sud, du Nord de l’Afrique”. J’ai toujours été fasciné par les représentations d’Alger, Beyrouth, Istanbul, Le Caire des années 20 ou 30. Bien sûr, on ne peut pas ignorer les horreurs commises et je ne veux pas idéaliser la colonisation, je veux juste dire l’attraction qu’opère sur moi l’ambiance de ces villes, la chaleur et le bon vivre qui s’en dégage (bon vivre pour les colons et dans les représentations qu’on en donne aujourd’hui qui n’ont peut-être rien à voir avec la réalité de ces années-là). Pour bien montrer que ce n’est pas la colonisation en tant que telle qui me fascine mais bien l’Orient, je dirais que je ressens la même chose quand je me promène dans l’Alambra de Grenade, l’Alcazar de Séville ou la Cathédrale de Palerme.

Malgré mon jeune âge, j’ai eu la chance de passer par plusieurs endroits autour de “notre” mer (Barcelone, Rome, Palerme, Beyrouth, Nice, Istanbul, Heraklion, Valence, Malaga, Naples, Nador… et bien sûr, Marseille) et malgré les différences évidentes entre les villes du nord et du sud, entre celles fuyant leur “méditerranéité” (Nice, Valence) et d’autres l’embrassant, il y a toujours quelque chose qui me rassure : les pins, le bleu de la mer, les odeurs, la douceur, un vestige romain ou grec qui traine quelque part ; ou qui me fascine : le parler, la violence, les gestes, la chaleur…

Lluis Llach chante “Maremar“, mère (mare) mer (mar) en catalan, notre deuxième mère à tous ? Celle que l’on a en commun et qui ne nous empêche pas de nous taper sur la gueule?

Et Marseille là-dedans ? C’est un bout de méditerranée en France, le bout qui les dérange (les français) quand on parle intégration, social, corruption et insécurité, et le bout qui les arrange quand on parle commerce, tourisme et bonne conscience. Et le bout du voyage pour tous ceux qui rêvent d’un ailleurs pas trop loin, du dépaysement de proximité, qui sont attirés par l’autre côté mais n’osent pas faire le pas.

Mais aussi par tous ceux qui ont osé, et qui de retour, ne pourraient plus supporter la France trop française et trouvent ici une antichambre. On entend souvent ses détracteurs dire blasés, “Marseille c’est pas la France”, ben ouai, et heureusement, sinon on serait un bon paquet à devoir se barrer encore plus loin.

Sur ce, joyeux noël !

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