Mes châteaux d’If: EDIKA ON FIRE

Billet de blog
le 6 Oct 2022
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Mes châteaux d’If: EDIKA ON FIRE
Mes châteaux d’If: EDIKA ON FIRE

Mes châteaux d’If: EDIKA ON FIRE

 

Un gamin tire du poil à gratter de la fenêtre mais celui-ci n’atteint pas sa cible : Il rentre incongrûment dans un panier à salades. Le commandant de police annonce : «Des rebuts de la société qui font du chahut avenue du Moulin.» A l’image, entre bulles et textes à rallonges, un ensemble résidentiel paisible de la classe moyenne. Tout cela est improbable. Sauf si…le dessinateur le plus fou de Fluide Glacial s’y met. Sur sa planche, il gratte pour gagner sa vie. Edika c’est l’esbroufe magnifique, le subterfuge total, c’est l’arnaque tellement bien faite qu’on en redemande.

Un gosse, Paganini, fait son problème de math mais dérangé par le bruit, envoie un mini missile sur un ULM qui porte un trapéziste. Impossible mais Edika l’a fait.

Edika recrée un monde entre Monty Python, la revue Mad et la 7éme compagnie. Mais ce n’est pas tout, il y a aussi du vaudeville avec des maris trompés revenant de Tahiti ou de l’ Île Seguin et qui découvrent des girafes ou des corbeaux dans le lit de leur femme. Tout est sans dessus dessous.

Au large, du côté de Grande barque, il y a un détournement situationniste de l’image dessinée. Plus prés de nous, un texte qui digresse sans cesse, qui ne se lasse pas de jouer au marabout de ficelle dans le seul but de dire une connerie de plus.

«Les chiens aboient, le camping-car passe .Proverbe arabe» déclare un corbeau à chapeau coincé entre deux prostituées.

Pour une exégèse d’ Edika, reportons-nous mes frères, à ces saintes paroles prononcés dans un colloque linguistique et retranscrites dans cette antho, «Je ne m’abaisserais pas à expliquer la sémantique d’un gag et à faire des efforts pour faire comprendre les subtilités qui vont du signifiant au signifié surtout à un belge portant des chemises hawaïennes.» Parfaitement, aurait dit Roland Barthes percuté dans les clous par une maudite automobile.

Edika c’est d’abord une famille, les Proko avec Bronsky, Olga, George, Nini ou le chien Clark Gaybeul, sorte de souffre douleur des délires de l’auteur. On le sait par des indiscrétions des rédac-chefs, des balances, qui ont remarqué que son propre téléphone émettait un « zrataka zrataka » semblable à celui de Bronsky Proko. Damned, il s’était trahi. Entre les cases de cette anthologie, quelques anecdotes racontent la gentillesse ou la douceur du grand maître. On voit la trace d’une flagornerie qui ne trompe personne. Léandri, ex rédac-chef racontant la venue dans le pavillon d’ Edika d’une équipe pour réaliser un canular du 1er avril ne peut s’empêcher de nous en mettre plein la vue avec sa résipiscence.

Edika est un inverseur de normes. Pas seulement du haut vers le bas, ou du vulgaire vers le sublime. Non, il inverse tout et en tous sens. Il est un contorsionniste contrebassiste contre tout ordre établi et toute hiérarchie (sans jeu de mot final). Remplacer un mot par un autre, synecdoquer à la porte ; une commune change de nom et Savigny-sur-orge devient sur Savigny-sur-Mandarine tandis que Carcassonne se retrouve sur le Rhône. La géographie sentimentale et géographique de la France est mise en déroute par un Égyptien passé par le divin bilan du liban où l’on devine quel chaos peut se dessiner. Il y a toujours un second plan révélé au lecteur, et qui va percuter le premier plan innocent. Un client de restaurant se plaint d’être un fer et fier valoir pour remplir des cases. Le décor se révolte. Il entre en scène.

Un capitaine des pompiers chante Edith Piaf sur le toit du pavillon des Proko et on va voir le déluge de mots déferler avec une vague immense. Les bulles submergent le dessin par moment comme si un imaginaire ne pouvait plus se taire, comme si les mots coulaient sans fin pour dire encore de l’humour…Il y a bien quelques histoires mais elles ne sont qu’un support à une plaisanterie sur la vie.

Edika n’est pas correct. Suspect de glottophobie avec bouée, il présenterait même les aspects du parfait raciste à la Michel Loeb faisant le chinois. Là où il décrit la société et ses préjugés, l’ingénu verra un français lourdaud. Blagues de potache qui ne passent plus ou blagues de cour d’école qu’on ne résiste pas à répéter entre «grands» Il se moque de l’accent supposé des noirs, de celui des cadors italiens, des bodybulders espagnols, des branchés parisiens, des gay bretons, de Gérard Miller, des paysans avec de l’herbe dans les sabots, des vétérinaires diplômés de l’université du Sud Yemen et prix d’harmonica! Il se fout de tous et toutes. Surtout les scouts. Femmes aux poitrines exagérées et ménagères, femmes de ménages, lycéenne révoltées, comédiennes…tout y passe. Du second degré? Si seulement cela s’arrêtait là…Une véritable ménagerie sorte d’Arche de Noé peuple ces pages pour distraire. «Si je dis couilles, je vendrais moins d’albums» Gare à l’ordre moral. Edika vient d’une époque ou le sexe était caché. On s’en rappelle. Le moindre nichon mettait alors en émoi une classe de collégiens forcément puceaux alors Edika, c’était la boite à fantasmes, ouverte et sang dessus deux sous.

 

On dit d’Edika qu’il est imbriéfaibele (à prononcer en cairote-inglish please). Demandez-lui un sujet pour le prochain Fluide Glacial sur le crime. Il comprend escrime mais surtout il ne parle pas d’escrime dans la page rendue. C’est un sous réel comme il y a eu des surréalistes. Un sous réel inventé dans un pavillon de banlieue avec une famille ordinairement dingue. Un jour on étudiera Edika à la fac mais on ne sait toujours pas dans quelle section.

EDIKA. ANTHOLOGY FIVE.( 2003 2009) FLUIDE GLACIAL.2022. PAS CHER: UN FALAFEL CORNICHON RILLETTES.

Commentaires

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  1. Christophe Goby Christophe Goby

    Comme Obelix, je suis tombé dans Edika tout petit…

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