Mes châteaux d’If: Combattantes: Une histoire de la violence féminine en Occident.

Billet de blog
le 22 Juil 2022
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Mes châteaux d’If: Combattantes: Une histoire de la violence féminine en Occident.
Mes châteaux d’If: Combattantes: Une histoire de la violence féminine en Occident.

Mes châteaux d’If: Combattantes: Une histoire de la violence féminine en Occident.

Sur les sommets des montagnes de livres qui traitent des femmes ou du féminisme, qui sont publiées seulement depuis quelques années, celui-ci se distingue par l’originalité des thèmes associés.

Un constat: l’invisibilité des femmes dans l’Histoire.L’entrée en matière de Martial Poirson se fait par la marche des femmes sur Versailles en octobre 1789. Un événement qui envoie du pâté et qui fait peur aux puissants, aux méchants, aux filous… Mais moins peur à l’époque que la figure actuelle de Miss Gilet jaune 2018, sujet non présenté dans ce travail. Si Arlette Farge, l’historienne immensément connue, interroge la figure de la poissarde, c’est pour mieux raconter les femmes populaires, comme les dames de la Halle ou les Tricoteuses. Sans la marche des femmes pour ramener la famille royale et l’assemblée aux Tuileries, la Révolution n’aurait pas changé de base. Les femmes alors sont souvent abandonnées une fois enceintes ou mères de famille dans la misère. Elles subissent de plein fouet et avec leurs enfants, les famines. C’est ce qu’elles ont voulu dire à la Commune  rendue responsable de la famine. La poissarde est une personnalité essentielle de l’imaginaire culturel durant deux siècles. La figure de la fruitière Louise Reine Audu, la reine de la halle est connue pour avoir tué plusieurs gardes suisses, eux qui servaient le bon Roi.

Karine Salomé signe un article passionnant sur les Vitrioleuses qui, entre 1870 et 1930 défigurent les visages masculins. L’époque est elle aussi à l’émancipation féminine. Vengeance féminine radicale, ces affaires jugées dans les tribunaux ont aussi parti lier avec des dépits amoureux, de la jalousie et une précarité aggravée par l’abandon du père des enfants. Le vitriol marque la victime. Conjointement aux Pétroleuses, les Vitrioleuses apparaissent en 1871, comme si la fin de la Commune de Paris, mouvement collectif, laissait la place à des vengeances personnelles. Cela dit la défiguration et l’incendie étaient utilisés comme arme par les peaux rouges de la Commune. Dans le roman Germinie Lacerteux des « versaillais» et écrivains les frères Goncourt (1865) l’ héroïne rêve de vitrioler sa rivale. Si le divorce est autorisé en 1884, les vitriolages ne cessent pas. La cause en est que la Loi favorise encore les hommes qui peuvent se permettre d’être volages sans condamnation.

Une chanson de Léon Xanrof en 1888 ne passe toujours pas sur Rire et Chansons et s’appelle «La Ballade du vitriolé.» La chanson se finit bien pour la vitrioleuse et ce sont les hommes qui finissent embarqués tandis qu’elle, est acquittée. Sur le ton de l’humour, cette balade précise que c’est l’abandon par l’homme de sa femme qui est la cause de la vengeance. L’image de le vengeresse est colportée par la presse et a plutôt bonne presse. Les colleuses féministes de nos jours sont bien pacifiques en comparaison de leurs ascendantes.

Martial Poirson signe un papier sur l’action directe des suffragettes anglaises et montre comment ces femmes n’étaient pas vraiment des touristes. Armées de frondes et de marteaux, elles attaquent les bâtiments officiels et fracassent les vitrines à la manière des manifestants des dernières années. Mais elles sabotent aussi les réseaux téléphoniques, utilisent des colis piégés dans les boîtes à lettres, incendient des champs de course ( C’est pas bien!) ou des salles de bowling ( ça c’est pas bien du tout!) Enfin elles posent des bombes pour obtenir des droits civiques et politiques. «Des actes, pas des mots» affirme le Woman Suffrage Association qui prend une tournure militaire, non pas pour convaincre mais pour choquer, comme l’affirme Emmeline Pankhurst1. Au paroxysme du mouvement, l’année 1913 compte 232 incendies et attaques à la bombe causées par les suffragettes. Suite au Black Friday du 18 novembre 1910 où elles se font massacrer par la police commandée par Winston Churchill, elles se forment aux techniques d’autodéfense…

Pour contre-carrer ces figures positives de la violence, le papier d’ Elissa Mailander s’intéresse aux gardiennes SS des camps de la mort, «un travail facile et bien payé, offrant un logement réjouissant» Ces salariées du Reich, payées 185,68 marks par mois établis selon la grille de la Fonction publique et recrutées par les agences de l’emploi étaient des célibataires de 21 à 45 ans, sans études poussées et d’origines ouvrières. Banalité du travail et du mal. L’article précise cet aspect mais évoque aussi la fascination du cinéma de série B des années 50. Encore plus étonnant des magazines romancés appelés Stalagim surgissent en Israël et racontent des frasques sexuelles dans les camps de prisonnières. Mieux ou pire, nait un genre cinématographique appelé naziploitation ou sadicanazista qui puise dans l’imaginaire érotisé des camps. Le rôle le plus connu sera celui de Isla la louve des SS (1975), celle d’un médecin et commandante du camp médical 9. (Image de couverture)

D’autres chapitres sont consacrées aux femmes combattantes de la RAF, d’Action directe ou aux femmes terroristes engagées du côté de Daech ainsi qu’ aux femmes kurdes armées. Un ouvrage aux multiples facettes de la violence des femmes comme à celles qu’on leur fait.

1Jujisuffragettes BD chez Delcourt. Lise Lugrin. Clément Xavier.

Combattantes: Une histoire de la violence féminine en Occident, sous la direction de Martial Poirson, Seuil, 2020, 29 euros.

Commentaires

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  1. Christophe Goby Christophe Goby

    Un livre qui refroidit les machos au cœur de la canicule.

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  2. mrmiolito mrmiolito

    Ça a l’air intéressant et équilibré, merci !

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