Marseille, le droit à la ville insoumise

Billet de blog
le 15 Juin 2017
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Marseille, le droit à la ville insoumise
Marseille, le droit à la ville insoumise

Marseille, le droit à la ville insoumise

L’opposition entre « Paris » et Marseille a été utilisée pendant cette séquence électorale qui s’achève pour mieux enfermer notre ville dans des particularismes clientélaires, communautaires et une position victimaire bien loin de sa capacité historique d’insoumission. L’arrivée d’un candidat national et la construction d’un mouvement « d’insoumis » donne un coup de semonce à la caste politique locale pour refonder une démocratie par toutes et tous. Le coup infligé par les électeurs aux députés socialistes sortants et à certaines personnalités de droite tel Yves Moraine a témoigné de cette force et de cette volonté de tourner la page. La candidature de Jean-Luc Mélenchon à Marseille porte l’ambition d’une perspective nationale pour une ville insoumise, belle et rebelle, dont les maux requièrent des solutions d’urgence sociale, écologique et démocratique. Nous, acteurs et observateurs du centre ville, apportons notre soutien à cette campagne qui pourrait constituer un virage pour Marseille.

L’urgence sociale est une réalité que nul ne peut nier, à l’exception des édiles marseillais qui ne se déplacent qu’en voiture aux vitres teintées entre Mazargues et le Pharo. À la crise sociale, les édiles locaux répondent par une politique de gentrification soutenue par l’État. Cette politique fait du Vieux-Port et de ses alentours une vitrine réservée aux croisiéristes avec hôtels de luxe et centres commerciaux. La Joliette se veut un « Wall Street marseillais », réserve de travailleurs en col blanc dans les banques et les bureaux du projet d’Euromed alors que la misère se tapit dans les rue parallèles. L’État et les édiles locaux ont choisi la finance en lieu et place d’une véritable politique de la mer qui prendrait appui le plus grand port de France, comme en témoigne la privatisation de la SNCM.

Euromed en est à sa troisième phase d’extension et a surtout permis – des Crottes à Belsunce – de mener une chasse aux pauvres, voulue depuis les années 80 par les pouvoirs locaux – alors que ses retombées en termes d’emplois pour les habitants sont minimes. Le 3e arrondissement, quartier le plus pauvre d’Europe, dont la plus grosse partie jouxte la zone d’Euromed reste enclavé, sans solutions de transports massifiés pour les habitants, les pauvres restent entre eux. Les habitants des quartiers autour de la porte d’Aix, promise aux promoteurs immobiliers, ont dû se battre pour obtenir la création d’un parc. Respirer ne fait pas partie des options. Les espaces verts sont pourtant le meilleur moyen de lutter contre les poches de chaleurs qui accroissent les épisodes caniculaires dans les villes.

Dans la ville la plus inégalitaire d’Europe, aucune politique n’est mise en place pour atténuer la violence sociale quotidienne. La casse des services publics au profit du privé est une réalité dure en confrontation avec la pauvreté des gens qui y habitent. Les postes du 2e arrondissement ont fermé, dans le 3e arrondissement, les écoles n’ont pas les moyens d’accueillir tous les élèves, il n’y a pas de bibliothèque publique ou de piscine pour apprendre à nager… L’inégalité d’accès à la ville, à ses usages, ne cesse de s’accroître. À cela s’ajoute une pollution due aux déchets, trop peu ramassés, notamment dans les quartiers populaires.

La ségrégation sociale est un modus operandi de la gestion de la ville. La Mairie ne cesse de désigner les habitants comme les responsables des dégâts. Pourtant, une ville de cette importance avec une seule tournée de ramassage des poubelles, c’est inédit. La morale paternaliste devient ainsi le voile de politiques publiques qui vont à l’encontre de nos intérêts. Le peu de services publics permet d’octroyer des passe-droits et de garder ainsi sous la main des « clients » qui sont redevables et pourront rendre des « services » (attribution de logement en HLM, emploi municipal, place en crèche). Nous constatons tous une ville à double vitesse quand l’accès aux droits élémentaires se retrouve contraint à une relation individuelle, de « patronnage », avec les élus locaux. Habitués de la tambouille et des magouilles, nous en avons assez. Nous voulons en finir avec le système « ici c’est comme ça ».

Lorsque le droit commun se retrouve placé en « politique de la ville », dont les budgets sont en chute libre, l’intervention publique devient exceptionnelle et concurrentielle. Au contraire, nous voulons développer massivement les services publics pour les rendre accessibles à toutes et à tous, développer l’emploi public et transparent au service de l’intérêt général.

L’autre réponse des pouvoirs publics aujourd’hui est le contrôle des quartiers populaires, à travers les expérimentations sécuritaires menées par le gouvernement Hollande soumettant les populations à l’encerclement policier. Nous disons que ces solutions amènent à une confrontation toujours plus violente entre les quartiers populaires et les forces de l’ordre. Nous n’oublions pas le meurtre par un policier du jeune Yassin en 2013 à Félix-Pyat. Nous assumons au contraire notre volonté de renouer avec le vivre-ensemble, de mettre en avant la prévention et la protection de la jeunesse plutôt que la répression. Nous voulons entendre une voix qui se positionne pour l’égalité des droits.

L’esprit de quartier, la volonté d’agir sur son quotidien sont devenus nos espaces de liberté, où la solidarité est encore possible. Ce sont les enseignants qui logent une famille rom sans toit aux Accoules. La Ville ne s’occupe pas des espaces publics : les habitants végétalisent la rue, construisent des tables pour pouvoir se retrouver. La vie associative prend le relais des pouvoirs publics aussi bien pour les déchets, le périscolaire ou la culture… Aujourd’hui à Marseille, les citoyens « se mêlent de la vie de la cité » en dehors de toute discussion avec les représentants institutionnels. Avec La France insoumise, le peuple sera au cœur de la cité et les citoyens pourront faire irruption dans le débat public. Nous, acteurs de terrains méprisés et ignorés, nous pourrons prendre toute notre place pour co-construire la ville.

Les électeurs marseillais ont d’ores et déjà décidé d’en finir avec ceux qui laissent Marseille vivoter et qui ont soutenu les gouvernements de F. Hollande et leur bilan désastreux. Emmanuel Macron et ses candidats – C. Versini, candidate du Medef en tête – ont fait, eux, le choix d’une politique de destruction minutieuse de nos droits sociaux. Se présentant comme symbole du renouvellement du personnel politique, ils préparent pourtant une politique antisociale dont nous connaissons à Marseille les effets dramatiques sur le vivre-ensemble, le droit à la ville, la vie démocratique locale.

L’égalité des droits, une 6e République et la défense des services publics et de l’emploi sont autant d’urgence pour une ville comme la nôtre. Marseille est le cratère d’un volcan qui doit être une expérience de renouveau démocratique là où la crise sociale et écologique se fait sentir si durement. Nous en avons assez d’être l’exception, nous voulons être l’exemple. En élisant Jean-Luc Mélenchon, ce centre-ville dans lequel nous sommes actifs peut-être l’épicentre de cette expérience démocratique et sociale à venir. Nous lui apportons notre soutien, ainsi qu’à Hendrik Davi, candidat insoumis de la 5e circonscription, pour refonder demain une ville belle et rebelle.

Une première initiative suite à cette tribune aura lieu vendredi 16 juin à 18 h 30 autour du thème dui logement et du droit à la ville, au bar Le Funiculaire, 17 rue Poggioli (1er arrondissement).

Signataires : Albane Barbaud, ingénieur environnement – Marie Batoux, élue des 2ème et 3ème arrondissements – Marie Beschon, anthropologue et militante pour le droit à la ville – Nicolas Burlaud, documentariste – Assaf Dahdah, géographe – David Emain, enseignant- agrégé – Fanny Fontan, documentariste – Vincent Jacomond, coordonnateur de bénévoles – André Jollivet, architecte – Patrick Lacoste, militant associatif – Cesare Mattina, politiste – René Mazari, militant associatif – Paul Picirillo, membre de « Ensemble, mieux vivre notre ville » – Kevin Vacher, sociologue et militant associatif.

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