LA RENAISSANCE DE LA VILLA VALMER

Billet de blog
le 11 Oct 2020
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Maintenant, c’est fait. Une délibération du conseil d’arrondissements des 1er et 7ème a engagé la réflexion et le débat sur la nouvelle destination de la Villa Valmer, dans le 7ème, sur la Corniche. Cela nous amène à réfléchir sur le rôle et la signification de l’espace public à Marseille.

 

Bref rappel historique

La Villa Valmer fut construite en 1865, par l’architecte Condamin. Surtout, elle fut, à notre époque, jusqu’à son départ pour la Canebière, le siège de l’Agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaise et, avec des extensions construites après, elle fut aussi le siège marseillais de plusieurs organisations internationales méditerranéennes. Depuis que l’A.G.A.M. l’a quittée en 2002, son avenir n’était pas pleinement précisé, jusqu’à ce que l’on apprenne, que la municipalité Gaudin l’avait cédée à des acteurs économiques privés qui en auraient fait un hôtel de luxe. Une parcelle de plus de l’espace public marseillais aurait ainsi été cédée au privé, après bien d’autres, ce qui aurait eu deux significations : d’une part, il se serait agi d’une emprise de plus du libéralisme sur l’espace marseillais consentie par la municipalité Gaudin, d’autre part, il ne s’agissait pas de n’importe quel édifice public : en cédant ainsi au privé le siège de l’Agence d’urbanisme, la municipalité signifiait, en quelque sorte, l’abandon au privé de la prospective du développement urbain de la métropole marseillaise. Ce retour de la Villa à l’espace public contribue, en quelque sorte, au renforcement de l’espace public métropolitain.

L’espace de la ville : une articulation de l’espace public et de l’espace privé

Profitons de cette occasion pour réfléchir un peu au sens de ces deux mots simples : espace public. C’est en 1962 que le philosophe allemand J. Habermas a, en quelque sorte, élaboré ce concept d’espace public en montrant comment, dans l’histoire, c’est dans l’espace public, en particulier grâce à la diffusion des journaux et à la popularisation des espaces de débat et de réflexion critique, qu’a germé, peu à peu, ce qui allait devenir la Révolution française de 1789. C’est notamment parce que l’espace public a été nourri par les contributions de la presse écrite, devenues quotidiennes en France depuis la moitié du dix-huitième siècle, que l’espace public est devenu un espace politique, en particulier parce que c’est là, dans cet espace qui n’appartient à personne, mais qui est commun à tous, que la réflexion critique sur l’État et sur les pouvoirs peut s’élaborer et que la pluralité des opinions et des engagements peut se manifester pleinement. Cela signifie que l’espace public, ainsi, n’est pas seulement un espace de parole, d’écriture et d’information, mais qu’il est surtout un espace de sens. En effet, alors que l’espace privé est un espace dévolu à des fonctions et à des logiques de marché, c’est dans l’espace public, grâce à nos échanges avec ceux qui le partagent avec nous en habitant, comme nous, dans la ville, que nous donnons une signification au fait urbain, à la citoyenneté, à la vie dans la ville.

La Villa Valmer : une destination culturelle

J.-M. Coppola, adjoint à la culture dans la municipalité Rubirola, dans Zibeline du 9 octobre dernier, nous explique qu’en se maintenant dans l’espace public, la Villa Valmer y aura le rôle d’un espace de culture, tandis que Sophie Camard, dans la Lettre d’information du Printemps marseillais du 10 octobre, nous fait part du lancement d’un « appel à projets » destiné à imaginer les futurs usages de la Villa, tandis qu’un budget de 600 000 euros a été envisagé pour la restauration du parc. Nous nous trouvons, ainsi, en face du retour de la Villa Valmer dans l’espace public, après qu’elle eut risqué de se perdre dans l’espace privé. Il s’agit, de plus, de cette manière, de réduire l’emprise du marché touristique sur la ville de Marseille, afin de contribuer, de cette manière à ce que la ville redevienne pleinement une métropole et à ce que l’espace dévolu au marché y tienne moins de place.

Un emblème de la nouvelle municipalité

Mais, bien sûr, sans doute importe-t-il de réfléchir à la signification pleinement politique de ce nouvel usage de la Villa Valmer. D’abord, en lui donnant un lieu nouveau, la municipalité contribue à étendre l’espace culturel de la ville dans l’espace public. De cette manière, la municipalité manifeste son engagement dans une véritable politique culturelle. Par ailleurs, en préférant les activités culturelles aux activités hôtelières, la municipalité nous rappelle que Marseille est une grande ville qui n’a pas à se livrer au tourisme – j’allais écrire : à se prostituer en consacrant des espaces publics au tourisme et à l’hôtellerie. Enfin, en se servant de la Villa Valmer comme d’un espace dévolu à la culture, la municipalité choisit d’étendre la culture et de réduire l’espace marseillais livré au commerce. Il s’agit bien, ainsi, de l’expression d’un engagement politique de la municipalité dans la perspective d’une réelle politique de la ville.

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