Terre-mer
À Mourepiane, ce terminal à conteneurs dont personne ne veut
L'enquête publique sur le futur terminal combiné de Mourepiane dure jusqu'au 6 novembre. Le projet a fait l'objet d'un vif débat au conseil municipal. Les inquiétudes des riverains sur les nuisances des flux de conteneurs ont fini par être partagées par les élus.
À Mourepiane, ce terminal à conteneurs dont personne ne veut
“Bien sûr, dès qu’on nous parle de fret ferroviaire, on a le cœur qui vibre”, lance Lucienne Lebrun, présidente de l’association de Cap au Nord, face à un public conquis. Du multimodal oui, mais pas en bas du quartier. En ce soir d’automne, les riverains se sont réunis au centre social du bassin de Séon pour débattre du projet de terminal de transport combiné de Mourepiane, destiné à recevoir dans l’enceinte du port des trains et des camions de conteneurs.
Craignant les nuisances sonores et la pollution engendrée par le futur équipement, ce 12 octobre, la plupart des présents ont suivi de près la concertation qui a eu lieu de février à mai. Même si les premiers coups de pelle ont été donnés sur le site, l’enquête publique court jusqu’au 6 novembre. La mise en service est annoncée pour 2018. Au cœur de la charte Ville-Port, signée par plusieurs collectivités en 2012, Mourepiane est aussi révélateur des difficultés d’articulation entre l’activité logistique et les habitants du secteur. Tandis qu’une partie des élus locaux défendaient ce projet dans les cartons depuis des années, ces derniers émettent désormais des réserves. Ils mettent en doute l’intérêt de ce chantier à 60 millions d’euros (dont 75% publics) et dénoncent surtout les nuisances qu’il pourrait impliquer.
Rail, fer, mer
Ce sont surtout les flux que l’équipement va générer qui soulèvent les craintes des riverains. Construit dans l’enceinte du grand port maritime, le terminal a vocation a faire du transbordement de conteneurs de marchandises. C’est-à-dire du transfert entre bateau d’un côté, train ou camion de l’autre. Il sera composé d’un faisceau de rails, d’un portique pour la manutention, de grues mobiles, d’un parking pour les camions et d’un espace de stockage pour les conteneurs. Son but ? Augmenter le trafic ferroviaire de conteneurs et faire reculer le camion encore tout puissant. Pour se faire une idée de l’enjeu pour le grand port, la part modale du ferroviaire ne dépassait pas les 9% en 2014, talonnée par le fluvial à 8,4% – présent uniquement à Fos-sur-Mer. Mais l’opération a aussi une visée foncière : elle permettra le déménagement des opérateurs logistiques présents à la gare du Canet, où Euromediterranée projette un parc de 14 hectares jouxté d’habitations.
Le terminal combiné prendra place entre le terminal maritime existant, MedEurop Terminal, et la limite du port bordé par l’autoroute. Mourepiane recevra les trafics déjà présents sur les bassins Est, soit 23 000 “unités”, qu’il s’agisse de conteneurs ou semi-remorques. S’y ajouteront 43 000 unités actuellement traitées par la gare du Canet. À son ouverture, sa capacité sera de 80 000 unités – contre 66 000 cumulées sur MedEurope Terminal et le Canet – puis du double quand le second portique prévu sera installé.
500 poids lourds/jour
Mais la marchandise doit bien être acheminée jusqu’au terminal, ou en repartir. L’histoire se corse. L’exploitant estime les flux à 250 poids-lourds par jour au début et 500 en pleine exploitation, soit 1100 allers-retours. “Les camions, c’est tout à la fois : le bruit et la pollution”, assène Lucienne Lebrun. Les poids-lourds entreront dans l’enceinte portuaire par la porte 4, située en face de la Calade, depuis l’A55, puis remonteront jusqu’au terminal.
Parmi les inquiétudes des riverains, on trouve l’ouverture d’une entrée dédiée au terminal, en bordure de Saint-Henri, boulevard André-Roussin. Selon le futur exploitant, celle-ci n’est pas prévue. “Les poids-lourds qui viennent dans un terminal comme celui-là n’ont aucune vocation à traverser vos noyaux villageois”, leur a répondu en réunion publique Pierre Figueras, directeur général délégué de Projénor, filiale du Crédit Agricole, actionnaire de la société dédiée Mourepiane Terminal Transport Combiné (MTTC). Les nombreux camions qui traversent Saint-Antoine ? “Ils transportent des conteneurs vides en direction des dépôts”. Une analyse que ne partage pas le président de la fédération des CIQ du 16e, Denis Pellicio : “Actuellement les camionsqui viennent de Lyon devraient normalement passer par l’A55. Mais le circuit le plus rapide indiqué par le GPS les fait passer par Saint-Antoine”.
De 3 à 15 trains par jour
Aux camions s’ajouteront les trains de fret qui traverseront forcément le quartier. La modernité de l’équipement lui permettra d’accueillir des trains de 1 000 mètres de long. De 3 à 4 trains par jour, trafic actuel du Canet, on devrait atteindre à plein régime 10 trains/jour. Certains documents mentionnent cependant 15 trains par jour dont 5 de nuit. Pour pouvoir relier le futur terminal, SNCF Réseau a remis en service un raccordement traversant les habitations, entre Consolat et Les Sources (voir schéma ci-contre). Les trains effectuant un aller/retour, cela représente entre 20 et 30 passages par jour. Si ce raccordement a fait l’objet d’une enquête publique en 2012, il soulève toujours autant de questions.
Un autre point de passage cristallise les craintes des habitants : le passage à niveau de Saint-André. Son avenir a monopolisé une partie des débats lors de la réunion de concertation au J1 en mai. “La fermeture du passage à niveau, c’est la mort du quartier”, explique Denis Pellicio. Alors que la barrière est très peu souvent fermée actuellement, il craint que Saint-André ne soit coupé en deux à l’avenir. Le CIQ organisait le 16 octobre un rassemblement devant l’école primaire rue Condorcet, située à deux pas de l’endroit en question. Les deux parlementaires socialistes du secteur, la sénatrice-maire Samia Ghali et le député Henri Jibrayel y ont manifesté leur opposition au projet.
Est-il possible de créer un pont ou un passage souterrain ? “La seule chose qui a été évoquée, c’est une suppression de ce passage à niveau, sans préjuger de la solution technique, a répondu Jacques Frossard, directeur régional de SNCF Réseau, dans le cadre de la concertation. C’est envisagé dans le cadre d’un projet qui est dans le contrat de plan État-Région (CPER) 2015-2020.” En attendant, le temps d’attente pour les véhicules inquiètent les riverains passant par cette voie inévitable. Ils évoquent 3 minutes aujourd’hui et 12 à l’avenir. “Ce chiffre de 12 minutes ne repose sur aucune étude objective”, répond la SNCF, sans qu’aucune autre estimation des temps de fermeture du passage ne soit donnée.
Nuisances sonores
Quelles seront les nuisances environnementales qu’engendrera cette gare à conteneurs ? Comme tout projet de cette ampleur, le terminal combiné a fait l’objet d’une étude d’impact, financée par son porteur. Selon le document, les nuisances pré-existantes – sonores et qualité de l’air – sont déjà concentrées sur ce secteur du fait de la proximité de l’autoroute. “L’aire d’étude se caractérise par une ambiance sonore élevée, avec des valeurs comprises entre 60 et 70 dB(A), tempère le cabinet Egis qui l’a réalisé. Les principales sources de bruit dans l’aire d’étude sont les infrastructures routières existantes (autoroute A55, chemin du Littoral RD 568/RD 5) et les activités industrialo-portuaires (fonctionnement d’engins mécaniques, moteurs des bateaux, trafic routier et ferroviaire interne…).” La question sonore et la proximité des habitations y est définie comme “le principal enjeu”, les sources de bruits y sont énumérées noir sur blanc et les limites de l’exercice de modélisation apparaissent avec les bruits non pris en compte :
D’autres bruits ponctuels, non modélisés dans le cadre de cette étude, pourront être détectés : le passage des trains au niveau des appareils de voies, le bruit de freinage des trains, les chocs lors de la pose des conteneurs, les signaux sonores de recul sur les différents engins présents sur le site, le bruit de ventilation des trains à l’arrêt,…
La législation en la matière se base sur un écart entre le niveau sonore pré-existant et celui projeté avec le futur équipement. Les projections de l’étude d’impact sont confuses, au point que l’autorité environnementale, qui a donné son avis en juillet, “recommande de présenter de façon plus didactique l’état initial et l’évaluation des nuisances sonores maximales susceptibles d’être générées par le projet”.
L’étude d’impact s’appuie sur le relevé sonore de dix lieux. La campagne a été réalisée en deux fois, le nombre de points ayant été doublé dans le cadre de la concertation. “Pour les zones d’habitations des quartiers Saint-Henri et Saint-André, situés en retrait des infrastructures routières, l’impact sonore des activités sur le terminal est proche des valeurs maximales admissibles. La source de bruit qui a le plus d’impact sur les habitations proches du terminal est le bruit lié au passage des trains de fret”, explique l’étude, qui affirme pourtant un peu plus loin :
L’impact de la mise en exploitation du terminal de transport combiné, combinée avec la mise en service du raccordement ferroviaire de Mourepiane, est donc quasi-nul sur les habitations des quartiers d’habitation environnants.
Mais tout cela reste très confus. Sans parler de la pollution de l’air, très peu abordée alors que “les convois montants du port les plus lourds nécessiteront l’utilisation d’une pousse supplémentaire, qui pourra être une locomotive diesel”. Et même si cela ne devrait être le cas que pour “cinq passages quotidiens” selon l’étude d’impact, cela reste une nuisance considérable pour les habitations environnantes.
Le conseil municipal devait examiner l’avis de la Ville dans le cadre de l’enquête publique lors de de la séance de ce lundi 26 octobre. Au final, cet avis favorable ne l’était plus trop après débat. Si l’opposition de Samia Ghali était publique et annoncée, d’autres voix se sont associées à la sienne pour dire leur scepticisme sur le terminal combiné. Il y a celle, plutôt surprenante, de Jean-Marc Coppola (Front de Gauche), mais aussi celle de Roland Blum ou d’Arlette Fructus de la majorité Gaudin. Finalement, c’est un avis favorable avec réserves qui a été voté. Le maire décidant d’associer à la délibération l’intégralité du procès-verbal des débats.
Si le précédent préfet avait été locomotive pour sortir le projet de terminal combiné des cartons et lui trouver un financement, son successeur a la lourde tâche de le mettre en œuvre. Et cela s’annonce encore plus compliqué.
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Article assez équilibré, mais les chiffres qu’on entend, sont soit du délire de trains de marchandises (vos chiffres), alors que 2 à 3 par jour semblent annoncés, mais un peu plus longs (passage à niveau fermé quelques dizaines de secondes de plus), soit du délire de TER, qui passeraient de 2 à 6 par heure (aller puis retour). RFF qui sait cela exactement donnerait-il ses chiffres aux journalistes ? Il semble que c’est la Région avec ses TER qui bouchera le passage à niveau. Alors qui financera un pont ou un passage souterrain ?
Article assez équilibré donc par la prise en compte d’un ensemble vaste de tenants et d’aboutissants, mais il en faudrait un second pour les approfondissements d’arrière plan où sont les bonnes informations et où ce projet se joue.
Ces nuisances, y compris le passage des camions peuvent être traités. On est près d’un port quand même, une nébuleuse de 42 000 emplois avec la part liée au port des entreprises qui travaillent avec le port, avec les transporteurs routiers évidemment. Mais il y en a davantage qui viennent de plus loin prendre le fret que ceux installés ici, qui perdent la remonte qu’ils avaient un temps gardée.
On parlait de cette affaire de Mourepiane il y a 30 ans déjà (la durée d’amortissement d’un investissement comme celui-là), alors s’il faut différer encore, il faut s’interroger sur l’évolution des bassins de Marseille à moyen terme. Il y a des quais et des outils, même si on voulait aussi des marinas. La décision sera politique et foin des études indépendantes où l’on prendrait de la hauteur en instruisant à charge et à décharge. Il faudrait faire travailler un bureau d’études choisi ailleurs que dans la région.
Pour moi, des activités portuaires resteront à Marseille, toutes sortes de petits bateaux sillonnent les rivages de la Méditerranée. Et Canavèse lui-même veut ses bananes à Marseille alors que CMA-CGM les déchargera à Fos. Elles prendront donc la navette, on verra que c’est possible. Et puis la grande forme de radoub sera bientôt opérationnelle. Au fait personne ne parle plus de la porte fissurée ?
Sinon, je n’ai plus d’informations à jour sur ce dossier. Mais je vais commenter quand même, quitte à me faire tirer dessus.
Il y aurait quand même un circuit court entre Projénor et le gouvernement, qui a été choisi pour l’aménagement et les études d’aménagement, selon un schéma largement pratiqué. Pierre Figueras est le chef d’entreprise le plus compétent ici en région sur les questions logistiques. Ses détracteurs diront qu’il est habile et en phase avec le gouvernement de gauche. C’est comme avec les multinationales que l’OCDE essaie de mettre au pas : leurs interlocuteurs dans les Etats ne font pas le poids.
Alors il semble qu’il y ait un axe entre le gouvernement, une partie des partenaires locaux, y compris ceux qui pourraient être discordants, jusqu’à Gaudin. Le projet est passé à la Région, en dépit de l’opposition de Coppola qui peut gagner quelques centaines de voix dans le quartier en fustigeant les nuisances à l’unisson des riverains directement concernés. L’utilité publique les dépasse tous. Samia Ghali ne peut évidemment être en reste, alors elle criera plus fort que Coppola s’il persiste. Gaudin a su faire passer le projet aussi au dernier conseil municipal.
Le réseau Franc-maçon que fait-il, Marsactu le sait-il ? C’est un réseau de pouvoir dont on estime qu’il a un avis supérieur, formé par des hommes avisés, jusqu’à suggérer des solutions trans-partis. Mais ceux allés dans cette église souterraine, sont-ils bien les meilleurs, ou ne sont-ils que des cadres cherchant une bonne gestion de leur plan de carrière ?
Alors les études de faisabilité d’une telle opération, les décideurs en rigolent et s’en servent en choisissant la bonne ou en en finançant une de plus. Et puis il y a du tout cuit de gauche pour le cadrage général. La mission de préfiguration de la métropole était venue avec ses gros sabots au début de son activité pour dire que les projets étaient mis en forme et que les élus n’avaient plus qu’à les exécuter. Premier tollé justifié des élus. Alors il y a aussi un schéma logistique régional, dont je ne dirais rien puisque je ne le connais pas, élaboré par le cluster PACA logistique, l’université et le bureau d’études qu’elle loge.
Un constat est actuellement souvent cité, dont par le député François-Michel Lambert, « Philippe Duong, du cabinet Samarcande, avait estimé la sous-performance de la logistique française à un montant compris entre 20 et 60 milliards d’euros. » L’affirmation constitue le point de départ de beaucoup de colloques, dont elle cautionne les préconisations. L’auteur me répond : « le chiffre de 20 milliards n’est pas le résultat d’une étude, mais d’un calcul de coin de table approximatif, mais à mon sens tout à fait réaliste, qui stipule que les coûts logistiques en France (selon le consensus des spécialistes) représentent environ 10 % du PIB, soit 200 milliards d’euros et qu’une baisse de 10 % des coûts logistiques des entreprises, qui est généralement un minimum de ce qui est exigé de toute démarche d’optimisation, est un objectif tout à fait réaliste et atteignable » Lorsqu’on impose les résultats d’une démarche sans qu’une étude contradictoire valide les chiffres, on ne peut que douter.
Alors c’est un projet gouvernemental adopté un jour, sans qu’on soit sûr de l’opportunité. Il s’est planté avec les contrats de génération, parce qu’il a été conseillé par des vieilles barbes de l’énarchie socialistes qui ont une conception enjolivée des entreprises du siècle dernier. Les savoir-faire des anciens sont maintenant de plus en plus souvent caducs, dans un contexte où la formation permanente ne permet pas d’évolution sur place. Alors c’est la ronde des créations / disparitions qui coûtent 15 milliards/an sur un patrimoine industriel de 860 milliards (les anti Piketty, mais là aussi ces chiffres seraient à établir de façon contradictoire).
Investir toujours plus au lieu de le faire intelligemment. Y a-t-il des élus pour défendre l’intérêt général ? Ce n’est même plus un alibi : il y a des voix à glaner là dans sa circonscription, alors on y va.
On peut comprendre le mécontentement des riverains, mais sont-ils correctement informés. Le GPMM avait placé un conteneur où le public pouvait venir s’informer avant l’enquête publique. Presque personne n’est venu paraît-il. Le port est venu répondre aux questions des associations, mais évidemment, pourquoi chercher à comprendre et à prendre en compte l’intérêt général, lorsque les élus ne savent que surenchérir pour accroître leur portefeuille de voix. Seuls Vauzelle et Gaudin ont fait preuve de responsabilité. Mais ne sont-ils pas dans le filet du gouvernement en arrière plan de ce théâtre ?
L’enquête publique, je ne suis pas allé voir. Le commissaire enquêteur choisi par le Tribunal administratif dira oui avec réserves, tout comme n’importe quel autre qui aurait été choisi. Très peu d’avis avaient été formulés lors de l’enquête publique pour la transformation du Vieux-Port. On sait trop que ces enquêtes sont essentiellement des exercices de validation confiés à des fonctionnaires à la retraite.
Le GPMM et Euroméditerranée qui ont leurs dotations respectives pour leurs projets à Mourepiane et au Canet, ont l’air de se faire inaudibles. Quelles sont leurs hypothèses de travail ?
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Encore une fois, la ville et ses habitants refusent l’installation d’activités économiques et se plaignent ensuite que les entreprises s’installent hors de la ville, abandonnée au chômage.
Ahurissant.
I y a aussi un claire volonté de spéculation foncière pour des terrains achetés à vil prix en raison du cotexte ferroviaire et portuaire, qui connaitraient tune explosion de leur valeur si ces activités disparaissaient.
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L’arrière-plan de la prise de décision tire dans plusieurs directions. On y compte les points en évaluant la capacité de résistance au changement des entreprises actuellement implantées au Canet. On se dit que seul le préfet avec la baguette magique de l’autorité de l’Etat, va pouvoir tirer cet aménagement vers l’intérêt général. Mais cet arrière plan reste insuffisamment éclairé par les articles qu’on peut lire.
Il nous manque aussi de savoir de la part de RFF quel est le trafic actuel à ce passage à niveau, et de Projénor ou des exploitants actuels du terminal, où sont localisés à Marseille et/ou autour, les utilisateurs terrestres actuels de cet équipement. On sait aussi que la poursuite des travaux sur la L2 prévoyait deux parcours dont l’un, plus direct avec le port, comportait moins de nuisances induites par le passage des camions. Lequel de ces deux parcours a été mis en œuvre.
On notera que la navette ferroviaire interbassins, entre Fos et Marseille, une opération vertueuse puisqu’elle décharge la route d’autant, fait déjà partie du trafic au passage à niveau.
Petit tour dans le secteur ce samedi matin. On passe d’abord du côté d’Arenc et le passage des voies de chemin-de-fer sous l’autoroute du Littoral. C’est très resserré et on devine le grincement des convois dans les courbes. La situation a-t-elle changé depuis la dernière guerre ? Toujours est-il que les transferts proprement maritimes se font sur un réseau à redessiner pour que l’ensemble soit fonctionnel.
Le tissu urbain s’aère à mesure que l’on s’approche de Mourepiane. On longe l’immense terre-plein et son faisceau de voies au niveau de la mer qui, moyennant certaines modifications, deviendra le chantier de transfert de fret mer-terre-ferroviaire.
Sur les hauts, avec des reliefs et une végétation faisant écran, on découvre le « village » de Mourepiane, une étendue homogène de jolies maisons d’une certaine époque du peuplement de Marseille, habitées peut-être par une population ouvrière au départ. On devine aisément que les CIQ vont relayer la protestation d’une population qui de toute évidence jouit d’un cadre de vie de qualité économiquement abordable.
Passage dans la rue principale de Saint-André (rue Condorcet), ce qui n’a pas été évident, tant les véhicules étaient nombreux, garés ici ou là, avec des 4×4 royalement stationnés au milieu de la chaussée, qui pour acheter des cigarettes, du pain ou se retrouver au bistrot entre copains.
Une fois cet épisode d’une vraie vie de village franchi, on tombe brutalement sur un passage à niveau en épingle à cheveux, oui, c’est lui, qui va bloquer la circulation automobile locale, avec de l’autre côté un réseau viaire plus industriel et un foutoir urbanistique digne de figurer dans un manuel de ce qu’il ne faut pas faire. On ne discerne aucun dessein urbain. On se demande aussi ce que cette antiquité de franchissement route/fer, oubliée des CPER, fout là. Il y a des quartiers de Marseille où l’on pense à « Cent ans de solitude » de Gabriel Garcia Marquez.
Retour vers le futur. La rationalisation de son réseau ferré à Marseille turlupine depuis longtemps le port. Tandis qu’à « l’extérieur », les coups de boutoir sont incessants pour réaffecter l’espace portuaire à d’autres usages. Et au Canet, on sait qu’Euroméditerranée attend le départ de ses occupants actuels. Tout ne peut évidemment pas aller à Fos, et ce qu’on ne sait pas assez, c’est que le port a su avec ses partenaires, croiser dans des opérations à usage mixte comme le Silo et les Terrasses du port, et sans doute un jour le J1, ses nécessités d’exploitation et une assez généreuse interpénétration urbaine. L’intérêt général a chaque fois prévalu.
La CCI avait fait réaliser il y a une vingtaine d’années une étude pour localiser un nouvel équipement de transfert de fret rail-route à l’ouest de Marseille. La ville de Marseille, qui avait bien du mal d’imaginer une conception spatiale et métropolitaine de son économie s’en est émue. Alors que les transferts d’entreprises étaient massifs vers l’est de l’Etang-de-Berre, Aix (qui doit beaucoup à Marseille) et Aubagne. Il est ressorti de cette étude que le dédoublement du chantier du Canet à Vitrolles (l’extension de l’Anjoly n’était alors qu’un projet) se traduirait en moins de 5 ans par un doublement global du trafic de ferroutage. L’intérêt général se heurtait aux réticences de la ville de Marseille et à l’opposition de Novatrans (actionnaires : plusieurs grands transporteurs routiers) qui opérait au Canet et qui avait depuis longtemps amorti son investissement. C’était une époque où les camions venus de Nice traversaient Marseille pour aller au Canet, sans toujours y parvenir à temps. Ils sont ensuite allés à Avignon Courtine où ils bénéficiaient d’une heure de départ plus tardive… mais pas loin d’un parcours urbain aussi nuisant et chaotique.
Le réseau ferré de la zone de Vitrolles était trop miteux pour y greffer un chantier mixte. Berre où se trouve maintenant une petite zone logistique avait été envisagé. Puis Salon-de-Provence. Les rivalités politiques locales en ont finalement décidé, ce sera Grans-Miramas, via le déclassement par le maire de Grans, de terres réservées jusque là à la culture des pommiers. Mais Grans-Miramas, ce n’est plus tout la périphérie marseillaise densément routière. Il s’agit d’une zone logistique continentale embranchée fer, on y fait peu de rail-route. Le site du Canet tout comme celui de Mourepiane, permettent quand à eux d’organiser également l’approvisionnement urbain de Marseille. Une bonne hypothèse est de faire de toutes ces composantes un équipement moderne au seul endroit où c’est encore possible. Lorsqu’un opérateur allemand ou chinois pointera son nez à Mourepiane, ça bougera au Canet.
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J’apprends que l’enquête publique se termine le 5 novembre, pour cause de campagne électorale des régionales.
Les CIQ ont montré leur utilité et fait entendre leur point de vue.
J’avais oublié d’évoquer l’arrière-plan des propriétaires fonciers, qui pourraient souhaiter un dépérissement des activités portuaires. Leurs terrains prendraient de la valeur dans le cadre de projets à finalité plus urbaine.
Quant aux entreprises du secteur, ont-elles défendu leur bout de gras ? Le commissaire enquêteur a-t-il recueilli leur avis ? Localement insérées, elles ont peut-être préféré rester discrètes ? Le relais a-t-il été pris par leurs organisations représentatives, comme l’Union Maritime et Fluviale (UMF), Cap au Nord Entreprendre (à ne pas confondre avec l’association citoyenne Cap au Nord), l’Union Patronale des Bouches-du-Rhône (UPE 13), la CCIMP ?
On le sait, Vauzelle à la Région et Gaudin à la Ville, ont validé le projet, avec réserves.
Agrandissez l’image de l’article avec les pinces à linge, le mél du commissaire enquêteur apparaît : reynaud.jean13@gmail.com
Et sur le site du port les derniers rendez-vous du commissaire enquêteur avec le public (cliquer sur le pdf en bas de page) : http://www.marseille-port.fr/fr/Actualit%C3%A9/ENQUETE_PUBLIQUE_TERMINAL_COMBINE_MOUREPIANE/1639
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« Le développement des ports, c’est à terre qu’il se gagne ».
Et pendant ce temps là à Nantes et soutenu par la région Pays de la Loire : « le groupe de travail en faveur du développement du fret ferroviaire a présenté le jeudi 19 novembre ses six axes opérationnels en faveur du report modal. « Le développement des ports, c’est à terre qu’il se gagne », estime Gilles Bontemps, vice-président de la région Pays de la Loire chargé des infrastructures du transport. Ce dernier dirige ce groupe de travail destiné à « définir un nouveau modèle d’offres de service ferroviaire multifilière ». « Chaque année, 1,2 million de tonnes de marchandises transitent par le port via 1 200 à 1 400 trains. Soit 25 % du fret régional » : http://www.lemarin.fr/secteurs-activites/shipping/23636-nantes-saint-nazaire-le-developpement-du-fret-ferroviaire-en
A Marseille Fos c’est 9 % seulement du trafic portuaire qui passe par le rail.
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