Transports à Marseille, à jamais les derniers ?

Décryptage
le 2 Sep 2021
13

L'enjeu des transports fait partie des thèmes phares du plan que doit détailler Emmanuel Macron ce jeudi. Un chantier de taille, puisque Marseille accuse un retard important avec un réseau de métros et tramways bien moins important que ceux des autres grandes villes françaises.

 (Photo : Emilio Guzman)
(Photo : Emilio Guzman)

(Photo : Emilio Guzman)

Les gouvernements se suivent mais les galères de transports à Marseille demeurent. Cette fois, c’est donc au tour d’Emmanuel Macron de se poser en accélérateur de la “mobilité”. Ce jeudi, le président doit annoncer un nouvel engagement de l’État pour accompagner le développement des transports en commun.

En amont des annonces, un échange est prévu sur ce sujet lors d’un déjeuner dans les murs de la métropole, avec les élus et représentants des principales sociétés de transports ainsi que certains membres de la chambre de commerce. L’occasion d’évoquer des carences bien connues par tous les acteurs locaux.

Trois fois moins de métro et de tram qu’à Lyon

La première réalité qui saute aux yeux est la présence de seulement deux lignes de métro. Pratique pour connaître rapidement toutes les stations, beaucoup moins lorsqu’il s’agit de traverser la ville sans voiture. Si l’on rajoute les trois lignes tramway, Marseille plafonne à 35 kilomètres de rails urbains. Un chiffre qui n’a bougé que de 4,1 km depuis dix ans. La principale évolution de cette dernière décennie est l’apparition de trois lignes de bus dites à “haut niveau de service” (BHNS), même si elles ne peuvent compter sur la garantie des couloirs réservés que sur une portion de leur trajet.

35 km, c’est quasiment dix fois moins que Paris. Bien sûr, la capitale est à part, en terme d’ancienneté du réseau et de densité urbaine. Mais le réseau marseillais reste moins étendu que presque toutes les grandes agglomérations comme Lyon, Bordeaux, Lille ou Toulouse.

Le manque est d'autant plus frappant que Marseille est beaucoup plus étendue que ces villes. Sa superficie est plus de deux fois supérieure à celle de Paris et cinq fois à celle de Lyon. Alors certes, il faudrait d'un côté retrancher le parc national des Calanques qui occupe une place importante de sa superficie et de l'autre prendre en compte le fait que les métros et trams des autres métropoles s'étendent jusque dans leur proche banlieue. Mais ces spécificités ne suffisent pas à justifier un tel écart. À titre de comparaison et d'illustration, voici ce que donnerait le maillage lyonnais (cinq lignes de métro et huit lignes de tram) à Marseille.

Le réseau de transports lyonnais appliqué à Marseille, avec en jaune le métro et en rouge le tramway. Nous avons opéré une rotation sur l'un et l'autre pour tenter de coller à la configuration de la ville. (Infographie : Nicolas Georges)

Quels projets dans les cartons ?

Malgré un retard évident, le sujet transports n'est pas tout à fait au point mort. Il vivote à travers le plan de déplacement urbain (PDU). La métropole, qui a la compétence en la matière, doit le voter en octobre. Cette feuille de route de la politique à mener sur la prochaine décennie liste de nombreux projets. Pour Marseille, on trouve par exemple les extensions du tramway du Nord au Sud ainsi qu'entre la Blancarde et Dromel ou encore vers la place du Quatre-Septembre, ainsi que l'extension de la ligne 2 du métro jusqu'à Saint-Loup. Autant de projets qui figuraient déjà dans le PDU de 2006, avec pour échéance... 2015.

Aux divergences politiques avec la nouvelle municipalité, viennent s'ajouter les crispations financières. En décembre dernier, l'adjoint à la mobilité de la métropole Henri Pons, qui ne souhaite pas répondre à nos sollicitations, demandait de la patience lors du vote du budget. "Je suis très favorable à la mobilité, mais au moins pendant deux ou trois ans, baissons la voilure. Ralentissons", réclamait-il. C'est lui aussi qui stoppait net les envies d'un tramway entre la Blancarde et Dromel… pourtant inscrit dans le fameux PDU.

"Nous savons ce qu'il faut faire, cela fait consensus depuis 2016 et la création de la métropole", juge Jean-Pierre Serrus, vice-président en charge des transports à la Région, après avoir occupé ce poste à la métropole de 2016 à 2018. "C'est bien sûr le financement qui manque, il faudrait multiplier par trois les dépenses actuelles", souligne-t-il. Sur les dernières années, c'est le soutien financier du conseil départemental des Bouches-du-Rhône qui a tenu à flots certains projets. À part l'extension Nord-Sud du tramway, ceux-ci sont principalement situés hors de la ville centre, dans des villes comme Aix, Istres, Martigues ou Marignane qui ne comptaient pas non plus de lignes performantes.

Passage de relais

Dès 2019, Martine Vassal avait posé que cette perfusion locale aurait ses limites et que le relais de l'État serait vital à partir de... 2022. En ce début d'année 2021, la présidente de la collectivité, espérait que le plan de relance pourrait contribuer à ce financement. Sauf qu'il ne vise pas des projets d'une telle envergure et que la liste présentée comprend des chantiers sur le point d'aboutir. Si l'annonce s'arrêtait là, elle ne ferait donc figure que de coup de pouce.

La primeur de l'annonce du montant des investissements est laissée à Emmanuel Macron, mais dans son entourage on met d'ores et déjà la pression sur la métropole : "La gouvernance complique sa capacité à dégager des marges de manœuvre financière, il s'agit aujourd'hui et ça le président sera très clair là-dessus, de créer des conditions d'un retour à un mode de fonctionnement plus vertueux".

La manière d'articuler ces soutiens financiers reste aussi à discuter. Depuis plusieurs années, la création d'une société publique dédiée, abondée par l'État, voire des taxes exceptionnelles, est esquissée. Pour les transports, un groupement d'intérêt public "à l'avantage de pouvoir aller vite", plaide Jean-Pierre Serrus. Ou peut-être de tout simplement démarrer.

Cet article vous est offert par Marsactu
Marsactu est un journal local d'investigation indépendant. Nous n'avons pas de propriétaire milliardaire, pas de publicité ni subvention des collectivités locales. Ce sont nos abonné.e.s qui nous financent.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

  1. Charlène Fleury Charlène Fleury

    Bonjour Marsactu, excellent décryptage ! Est il normal qu’on ne puisse pas télécharger le pdf ? Seule la première page sort correctement.. merci beaucoup !

    Signaler
  2. jemamo13 jemamo13

    Transports à Istres , gare multimodale avec uniquement des Bus , station de taxi à 1km et la gare SNCF à 1km5 …

    Signaler
  3. LOU GABIAN LOU GABIAN

    Quand je pense a mon amie Zora 53 ans qui habite a la Castellane et qui travaille comme femme de menage pardon agent d’entretien, et qui tous les jours prends son service à 6h du matin chez Auchan a ST loup pour 800 € par mois a temps partiel, sans véhicule .
    Avant de parler transport je vous conseille de tester le deplacement

    Signaler
  4. Lucien LAURENT Lucien LAURENT

    A Marseille on avait choisi la bagnole. Tunnels, ponts, passerelles, construits puis démolis et on continue. D’autres métropoles ont fait le choix des transports en commun.

    Signaler
  5. Malleus Maleficarum Malleus Maleficarum

    Thème : transports. Mots-clés : trams, métros, RER. Réponse de Martine et LRP : “BOULEVARD URBAIN SUD. VOITURES. VROUM-VROUM”. On en est encore là.

    Signaler
  6. Oreo Oreo

    L’État a participé à la gabegie en construisant la L2, un équipement aspirateur à voitures et massacreur des quartiers traversés, conception du 20ème siècle complétement obsolète avant même sa mise en service . Un tramway circulaire qui relie les terminus les lignes de métros et tramway devrait prendre sa place ainsi que celle du BUS (boulevard Urbain sud) autre folie aménageuse rétrograde.

    Signaler
  7. julijo julijo

    comment peut on justifier une cohérence des transports en commun existants, alors que pendant des années, ces lignes, rames et/ou métro on été construites en fonction des électeurs à chouchouter habitants les zones concernées……et pour le reste : la bagnole !!
    les responsables de cette situation, n’ont même pas été fichus, aux terminus de ces bus, tram, métro, de prévoir et construire des parkings suffisants, donc pas de “délestage” possible. on peut prendre l’exemple de la fourragère(et ce n’est pas le seul terminus), où arrivent les gens venant de l’est, 11e, 12e et aussi Aubagne…après 6h30, 6h45 le matin…la voiture : on la mange ! et donc on va travailler avec !
    alors pour “rectifier” et offrir une mobilité plus large il faut des sous, certes, investir d’importance, mais surtout il faut aussi se débarrasser de ces “techniciens-décideurs” -certains sortant de Xpont- qui ne ce sont jamais déplacés qu’avec des chauffeurs, n’ont rien expérimenté aux heures de pointe…bref sont carrément hors sol et privilégier le bon sens des usagers donc leur participation.

    Signaler
  8. didier L didier L

    En vous lisant, j’ai une pensée pour le “visionnaire” Defferre et le non moins visionnaire Gaudin qui ont toujours favorisé la voiture-con ! Marseille paie au XXiem siècle le manque d’anticipation et le très-très faible intérêt pour les questions d’urbanisme, de développement et d’alternatives au ” tout voiture” de ces maires du XXeme, qui ont géré avec une certaine habileté leur longue carrière politique, merci pour eux, mais ont mal géré leur ville.
    Dans les villes citées Lilles, Lyon, nous pourrions ajouter Bordeaux, Montpellier etc …des maires ont eu de vrais projets pour leurs villes et les ” machines municipales” ont travaillé dans ce sens.
    A Marseille une forme d’indigence et de clientélisme mélangés ont toujours primés d’où le résultat. Bref, les milliards de Macron c’est bien mais faut changer la méthode et notamment les relations avec le syndicat dominant à Marseille. Fo pour ne pas le citer.

    Signaler
  9. MarsKaa MarsKaa

    Et au fait, elle est où la présidente du département Provence et de la métropole de la gastronomie ? Elle est pourtant très concernée par l’habitat, les hlm, la voirie, les transports, la sécurité…
    Muselier aurait le covid, et elle, qu’a-t-elle ? L’absence de ces représentants des collectivités locales interroge.

    Signaler
  10. PromeneurIndigné PromeneurIndigné

    Certains disent que la première concession de France de BMW se trouve à Marseille ! Allez savoir pourquoi !

    Signaler
  11. PromeneurIndigné PromeneurIndigné

    Il fut un temps où l’État ne voyait pas son action limitée par la décentralisation; À cette époque la Durance fut canalisée, l’autoroute arriva jusqu’à Marseille, le port de Fos fut créé; Quant aux établissements scolaires on édifiait un Collège secondaire par jour; Marseille avait obtenu la construction de 10 piscines dans le cadre du plan piscine voulu par le général De Gaulle;

    Signaler
    • Alceste. Alceste.

      Vous sentez bien là différence entre un homme d’État et les guignols qui sont en place.Le fond du problème est là et pas ailleurs

      Signaler

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire