Toujours prié de réduire ses rejets en mer, Alteo Gardanne doit aussi redresser ses comptes

Actualité
le 13 Déc 2019
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Le tribunal de commerce de Marseille a placé en redressement judiciaire l'industriel gardannais, qui emploie 511 personnes. Habitués des joutes avec les écologistes, les syndicats avouent leur surprise devant ces difficultés économiques d'une usine plus que centenaire.

Toujours prié de réduire ses rejets en mer, Alteo Gardanne doit aussi redresser ses comptes
Toujours prié de réduire ses rejets en mer, Alteo Gardanne doit aussi redresser ses comptes

Toujours prié de réduire ses rejets en mer, Alteo Gardanne doit aussi redresser ses comptes

Et maintenant le risque de faillite. Les dirigeants et salariés de l’usine Alteo de Gardanne avaient rendez-vous ce jeudi matin au tribunal de commerce, appelé à examiner le placement de l’entreprise en redressement judiciaire. Environ 70 employés du site étaient rassemblés à l’appel des syndicats, “dans le calme et la sérénité, à l’image de notre entreprise”, tient à souligner Bruno Arnoux, secrétaire du comité social et économique. Alors qu’Alteo fait débat depuis des années autour du devenir de ses “boues rouges”, en mer puis à terre, le syndicaliste Force ouvrière, technicien de fabrication, martèle sa volonté de faire bloc.

Emmitouflé devant le palais de justice pendant plus de trois heures, le personnel semble cueilli à froid par ce nouveau front, loin des manifestations des écologistes auxquelles il a été habitué. Les options sur la table, le détail de la procédure, les modalités de paiement du salaire de décembre : la première prise de parole après l’audience est consacrée aux bases. “On sort d’un grand groupe, on est une PME, on savait qu’on était fragiles. On s’attendait ces derniers mois à des mesures comme du chômage partiel, mais on n’aurait jamais imaginé cela”, témoigne Bruno Arnoux.

Des salariés “pris de court”

Annoncée en fin d’après-midi, la nouvelle de l’acceptation du redressement judiciaire par le tribunal, plutôt qu’une liquidation brutale – certes peu probable – a fait redescendre la pression. L’administrateur judiciaire a jusqu’au 12 juin pour examiner les voies de redressement, les dettes étant gelées, avec un premier rendez-vous le 23 janvier. “On va pouvoir passer les fêtes un peu plus gaiement, même s’il faut rester vigilants. On a été pris de court par les événements et on espère ne pas avoir de nouvelles surprises”, souffle Martin Garcia, représentant CGT au comité social et économique.

EN 2012, le site de gardanne a été détaché du géant minier rio tinto alcan pour être repris par un fonds d’investissement américain.

L’ancestrale usine, construite en 1893, était englobée dans le groupe Pechiney, nationalisé en 1982 puis privatisé et absorbé par le géant minier Rio Tinto Alcan. Mais en 2012, le site de Gardanne et son centre de recherche et développement, spécialisé dans des produits de pointe, est détaché du groupe pour être repris par le fonds d’investissements américain HIG, sous l’étiquette Alteo. Avec 243 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel, 8,4 millions d’euros de bénéfices en 2017 et encore 2,7 millions en 2018, des antennes dans cinq pays d’Asie, Alteo n’est pas dans le rouge de manière chronique. En début d’année, lors de l’inauguration de nouvelles installations, un parterre d’élus et de représentants du monde économique avait affiché son soutien à cet exemple du “made in Provence”.

Mais il a subi en 2019 “une très forte dégradation de l’environnement de marché en lien avec les industries de la sidérurgie, de l’automobile et de l’électronique, qui se répercutent en amont sur la chaîne”, pointe son président Frédéric Ramé. Nous avons observé un fort ralentissement des ventes depuis l’été, qui s’est encore accéléré en novembre, créant une difficulté de trésorerie.” Parmi les principaux créanciers, on retrouve Rio Tinto Alcan, qui approvisionne Alteo en bauxite via le port de Fos.

Selon les documents consultés par Marsactu, HIG a déjà apporté par le passé un soutien de 25,5 millions d’euros, dont 13,5 de dette annulés. Le dirigeant estime que la question d’un nouvel apport de l’actionnaire “n’est pas d’actualité. Il nous faut d’abord obtenir la poursuite de l’activité, puis définir les conditions dans lesquelles cela peut se faire dans la durée. C’est dans cadre là que cela pourra être fait.” Pour l’heure, aucun élément sur le volet social du redressement n’est avancé.

Le passif environnemental en question

Mais du côté du maire de Bouc-Bel-Air, on craint déjà que la maison mère ne se défile sur le plan environnemental, laissant en l’état le site de stockage de déchets de Mange-Garri. “Selon Alteo, l’une des causes de cette situation est le coût “des investissements environnementaux nécessaires au respect des prescriptions réglementaires”. Cela laisse penser que c’est au final le contribuable qui va régler la note de la dépollution des sites”, a réagi Richard Mallié (LR) dans un communiqué.

Contactée par nos soins, la préfecture considère que “la question de la cessation de l’activité ne se pose pas actuellement”. Le préfet a en revanche rencontré les salariés et “confirme son attachement à la préservation de l’emploi et du tissu industriel sur le territoire de Gardanne”. Sur son calendrier 2020, le 1er janvier marque la fin fixée par la justice de la dérogation dont bénéficiait Alteo pour des rejets en mer non conformes à la réglementation nationale. Or, si des investissements ont permis de passer sous les seuils pour des métaux lourds comme l’arsenic, l’industriel s’est dit dans une “impasse technique” pour certains paramètres polluants.

Dans un contexte de difficultés économiques, le préfet fera-t-il preuve de souplesse dans la répression de cette pollution désormais interdite ? La cour administrative d’appel posait déjà début 2019 le cadre, peu susceptible de faire trembler l’usine sur ses bases : un arrêté de mise en demeure fixant un délai, suivi de sanctions administratives en cas d’absence de réaction. Redressement ou pas Alteo promet de pouvoir régler le problème des rejets en mer avant l’été.

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Commentaires

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  1. Gabriel OLMETA Gabriel OLMETA

    Depuis peychine jusqu’a Alteô l’entreprise a plusieurs fois changé de main sans que l’obligation de dépolluer soit évoquée et sans que les entreprises qui ont été exploitantes aient l’obligation de dépolluer ou de participer au prorata (du temps de possession ou du volume de déchets génère ).Pour arriver ensuite à Altea un entreprise insolvable .
    Il y a des questions à se poser à ce sujet .

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