Stéphane Ravier, “Monsieur le maire” pour gommer “la bête immonde”
Déjà sénateur et maire d'arrondissements, Stéphane Ravier sera sur les rangs dimanche pour le premier tour de la législative. Le frontiste compte avec ce nouveau scrutin imposer son nom au-delà de celui d'un parti qui ne fait plus vraiment peur aux électeurs mais s'est encore heurté à son plafond de verre.
Stéphane Ravier, “Monsieur le maire” pour gommer “la bête immonde”
Il avait prévenu Marsactu que la journée de campagne législative serait calme, mais qu’il répondrait tout de même présent au rendez-vous fixé par le Groupe bouliste le Clos-la-Rose et son souvenir Antoine-Toracca. Il y retrouvera son frère Claude, amateur de pétanque et bien connu des joueurs. Une cinquantaine de participants, inscrits en doublettes, navigue entre les terrains, les merguez et un bar bien fourni. Le matin, Richard Miron, l’adjoint aux sports, administrateur de l’office HLM 13 habitat qui gère la cité et candidat LR aux législatives, est venu apporter les coupes, pour le tournoi principal mais aussi pour la consolante.
Présent au bord du terrain toute la journée, Stéphane Ravier est aussi lancé dans une compétition de rattrapage. Il tire son sentiment de revanche de l’élection de 2012 : il avait échoué de justesse au deuxième tour contre Sylvie Andrieux et reste persuadé que “son petit système” lui a coûté cette élection. Pour être candidat, il a dû convaincre le siège du Front national de l’opportunité d’y retourner. Il est d’ailleurs le seul maire du parti, sénateur qui plus est, à tenter de gagner l’Assemblée nationale. “Après, vous ne serez plus là”, l’interpelle une électrice, au fait de la loi contre le cumul des mandats qui l’obligera à renoncer à la mairie d’arrondissement. “Je pointe là-haut et je reviens vite fait pour le concours de boules du Clos”, répond Stéphane Ravier dont les très fréquentes absences au Sénat lui ont valu une retenue sur ses indemnités. Son activité y est famélique et le sénateur non inscrit (le Front national n’a que deux représentants, ce qui ne lui permet pas de créer un groupe) n’a déposé aucune proposition de loi, pas plus d’amendements ni de question écrite ou orale.
Dans son cheminement, le discours de Jean-Claude Gaudin, avec qui il échange parfois au palais du Luxembourg, ne l’a pas laissé insensible. Conquérir le pouvoir marche après marche, être député avant d’être maire tout court, un jour peut-être, et pourquoi pas en 2020. En attendant, c’est sa nièce et première adjointe Sandrine D’Angio qui pourrait garder la mairie de secteur.
“Au début, il se faisait parfois jeter. Maintenant, beaucoup moins”
Dans cette partie de la circonscription, Stéphane Ravier et le Front national font d’ordinaire de bons scores. Le Clos la Rose, qui vote dans un seul et même bureau de vote, a choisi Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle contre Marine Le Pen. La circonscription aussi a souri au nouveau président. 56,4 %, treize points d’avance : la victoire y est assez nette. Ravier a encaissé la défaite et la dégringolade de sa candidate après un débat “complètement raté”. “On m’en a beaucoup parlé durant les jours qui ont suivi, mais on m’en parle moins maintenant, explique-t-il. Je dis aux gens que pour deux heures où ça ne s’est pas bien passé, il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain et je rappelle que nous avons pointé les problèmes – avant les autres – sur l’islamisme et l’insécurité.” Reste que l’élan s’est brisé. Le Front a revu ses ambitions électorales à la baisse : un groupe à l’Assemblée serait déjà une bonne nouvelle pour le parti. Ravier, lui, se raccroche à la corde locale.
Autour du boulodrome, c’est bien l’élu de proximité que l’on interpelle. Celui-ci voit venir à lui un à un les habitants, sans avoir besoin de particulièrement se signaler. Les demandes individuelles se succèdent. Ravier écoute les doléances sur le débroussaillage et autres problèmes du quotidien, promet de “voir ce qu’il peut faire” en prenant des notes sur son smartphone pour une demande de logement social. “Les gens le connaissent déjà. Il n’y a pas besoin d’en faire trop, il passe bien”, se réjouit Didier Monti, infirmier libéral installé à deux pas et un de ses adjoints en mairie présent à ses côtés.
“Au début, il se faisait parfois jeter. Maintenant, beaucoup moins”, se réjouit une autre proche. Ainsi, Michel, entré “à la benne” par la grâce de Roland Blum (LR), aujourd’hui agent de maîtrise au service de la propreté à la métropole a lâché la droite : “Pour nous, rien n’a changé que ce soit droite ou gauche. Désormais, je vote pour lui !”, affirme-t-il sans ciller. Quelques tables plus loin, la présence de l’élu délie les langues politiques. “Ils ont tout, les allocations et tout et nous, les ouvriers, rien”, lâche Patrick, qui pour autant ne vote pas, en ciblant “les immigrés”. “Et si on s’en va, qu’est-ce que tu vas faire ? Tu vas jouer aux boules avec degun”, se marre Nasser venu des Flamants. Pour lui, “le Front national, ce sont toujours les crânes rasés, les tatoués. Les gens qui utilisent le FN pour signifier leur mécontentement se trompent, il faut à tout prix l’éviter.”
“Un tract sur les Roms, un tract sur l’immigration”
Assis sur un banc légèrement à l’écart, Stéphane Ravier n’a pas entendu Nasser. “Au bout de trois ans, j’espère avoir convaincu des gens qui étaient à la porte du Front national mais qui n’osaient pas, justifie-t-il. Désormais, ils connaissent Stéphane Ravier et pas seulement le parti. J’ose croire que du coup, au second tour, la bête immonde et tout ce genre de clichés, ça prendra beaucoup moins.” Jusqu’à ses adversaires lui reconnaissent une capacité à parler aux locaux : “C’est effrayant, mais dans le débat de France 3. c’est le seul qui est apparu proche des préoccupations des habitants”, s’étouffe une élue de gauche.
Stéphane Ravier incarne pourtant la ligne dure du Front national. Il revendique le fait de “rééquilibrer” la ligne du Front à l’échelon local. Le Front, centré sur les questions européennes et de l’euro, gaulliste façon Florian Philippot, ne lui convient pas. Lui regrette que les thématiques de sécurité et d’immigration n’aient pas été davantage mises en avant. S’il est venu sans tract ce lundi – “on ne fait pas vraiment campagne dans un club de boules, on vient, c’est tout” – ceux qu’il distribue à la population claironnent cinq priorités dont “insécurité : ras-le-bol”, “immigration : stop !”, “traquer la fraude sociale et fiscale” en insistant bien sur “l’aide médicale d’Etat qui coûte un milliard d’euros par an”.
“Un tract sur les Roms, un tract sur l’immigration, cingle à distance Antoine Maggio. Il n’a que ça à la bouche.” Comme quelques autres élus, le trentenaire, ancien deuxième adjoint, s’est détaché avec sa mère et ex première adjointe Marie Mustacchia de la majorité de la mairie de secteur il y a un an. Candidat dans la même 3e circonscription, il est le caillou dans la chaussure de Stéphane Ravier. “Il voudrait être sénateur-député-maire”, raille-t-il quand nous le rencontrons ce mardi à Saint-Mitre en plein tractage.
“Les gens se tournent vers les partis politiques qu’ils connaissent, vers ceux qu’ils connaissent”
Stéphane Ravier lui promet 0,2 % au premier tour, encore moins à l’autre conseillère d’arrondissement candidate Karine Harouche, qui a obtenu le soutien de Jean-Marie Le Pen. Maggio reconnaît sans peine la difficulté de sa candidature sans étiquette et avec “moins de 10 000 euros” de budget. “J’ai eu beau faire tous les médias pour expliquer mon départ, je suis obligé de raconter en permanence cette histoire, comme si les gens n’en avaient jamais entendu parler. Et quand j’ai fini, ils croient à des chicayas alors que je suis parti sur une question de fond. Il y a un vrai problème d’incompétence de gestion, raconte-t-il. Désormais, je me concentre sur le fond.” Ses tracts ne font pas allusion à son parcours mais déroulent un programme, toujours proche de celui du Front, qui propose une “réforme du système carcéral car les prison sont une fabrique de délinquants”, la “transparence sur l’attribution des logements sociaux”, l’accroissement de la protection animale ou encore “l’opposition à la PMA et la GPA”.
“Ce sont des gens à qui j’ai tout donné et qui sont partis quand ils n’ont pas eu ce qu’ils voulaient, riposte Stéphane Ravier visant aussi Marie Mustacchia. Quand je vois que Henri Guaino est crédité de 3 % dans sa propre circo (la 2e circonscription de Paris, ndlr), je me dis que ça va être compliqué pour lui. De toute façon, les gens se tournent vers les partis politiques qu’ils connaissent, vers ceux qu’ils connaissent. Il va vite s’apercevoir que son seul nom ne suffit pas à faire se lever les foules.” Lui espère en revanche être désormais capable de gagner sur le sien.
Commentaires
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Ce “monsieur” aurait-il entendu parler du non-cumul des mandats ?
Le site web de sa mairie n’est plus à jour depuis plus d’un an, personne ne répond quand on appelle, etc…
Il est déjà Maire de Secteur et Sénateur, ça ne lui suffit pas ?
Il devrait se concentrer sur son poste et le faire correctement plutôt que de briguer encore un mandat supplémentaire, pour gagner plus d’argent et de notoriété et encore moins bien faire son travail, le temps n’étant pas extensible…
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D’abord, je dois dire que ce M Ravier, qui nous joue la proximité chaleureuse, connait mal son secteur. Il se dit victime, en 2012, du “petit système ” de S Andrieux ( On est souvent victime de quelqu’un ou de quelque chose certes, mais le FN l’est toujours, plus souvent qu’à son tour). Bon, c’était pas un “petit” système, mais un système assez complet, de clientélisme et de noyautage de tout ce qui bougeait, assos clubs… Un système bien rôdé, très contrôlé, tenant la route sur le long terme, en prise avec le système global marseillais, légué par papa et grand papa, disposant de moyens financiers consistants (on a même parlé de budgets à hauteur de 700 000 euros…). Du sérieux quoi! Et d’ailleurs, c’est tous les candidats qui s’y frottaient qui en était victime hein!
Bon après, et de ce que j’en comprends, M Ravier me semble subir sévère l’influence de Macron, jusqu’à le copier dans son principe de base : Quand le vieux monde se meurt, que vous en êtes, et que résister au nouveau qui nait semble peu tenable, faire du neuf avec du vieux (ça permet, à défaut d’autre chose, de reculer les échéances). Et donc là, il veut nous refaire un “”petit” système” du même tonneau : Lui, il pointe (là haut) et revient rapido, son frère, sur le terrain, il tire (à vue?), et sa nièce de première adjointe Mm D’Angio, garde la maison…. Bon, ça peut paraitre bien petit, mais il faut un début à tout, et m’est avis qu’il nous la joue modeste là. Les électrices teurs feraient bien d’y prendre garde.
Après, si comme vous le dites, il s’inspire surtout de Gaudin et de sa prise de pouvoir par palliers, là c’est autre chose. Il faut reconnaitre que faire la synthèse Macron/Gaudin c’est vraiment ambitieux, mais assez craignos et plutôt casse gueule!
Bon, je m’égare un peu là… En fait j’étais venu là, attiré par le titre phare de Marsactu “La boxeuse contre le FN”, et ne voulant pas rater le match. Mais de “boxeuse” y en a toujours pas; Me voila bien déçu! Je pense que j’ai du me gourer dans ces découpages de circo; ce doit être une “arlésienne” cette combattante!
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Vous voilà satisfait aujourd’hui ! https://marsactu.fr/sarah-soilihi-ni-potiche-ni-novice/
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