Scoop : psychodrame chez les écolos marseillais

Scoop : psychodrame chez les écolos marseillais

Amateur d'oiseaux marins et de métaphore du même tonneau, le conseiller municipal d'Europe Ecologie Les Verts (EE-LV) Sébastien Barles formule sa démarche d'un simple : "Aujourd'hui, on met les voiles". Pourtant la décision qu'il vient de rendre publique à tout du coup de Trafalgar. Ce vendredi, il a convoqué la presse au repaire de l'Ecomotive, avec autour de lui un certain nombre d'élus et de militants du parti plutôt impliqués dans la démarche des Gabians. Ensemble, ils annoncent qu'ils se retirent du processus électoral en cours.

En préparation de l'assemblée générale du 28 septembre prochain, l'ensemble des militants des groupes locaux votent ces jours-ci sur les candidats par secteur. Et, selon eux, de ce processus consultatif, exhale des miasmes délétères. Coprésidente du groupe écolo à la région, Sophie Camard a des mots violents : "Il est facile de faire des dizaines de cartes de complaisance et de faire des putsch. Nous vivons un déchaînement de n'importe quoi, à base de manipulations et de menaces. Les pires pratiques de la vie politique marseillaise nous ont contaminées". Elle désigne un coupable : Karim Zéribi. Le député européen et président de la RTM est candidat à la tête de liste EE-LV sur l'ensemble de la ville. Elle voit en lui le symbole des pratiques clientélistes qui clivent tous les partis de gauche. "Karim Zéribi parle très bien du clientélisme mais il le pratique de A à Z. Et Z est la bonne expression".

A ses côtés, Sébastien Barles se désole de "donner ainsi en pâture [leur] linge sale" mais les irrégularités qu'ils disent avoir constatées lors des scrutins en cours mettront des mois à être examinées par les instances internes. "Il n'y aura pas de consensus possible avec des gens qui sont des aspirants au système. Il ne faut pas nous enliser dans les procédures internes. Nous vivons une tentative d'OPA hostile sur notre mouvement à Marseille". Là encore, la principale silhouette dans son collimateur prend les traits du candidat aux législatives dans les quartiers nord, accusé d'avoir encouragé de nouvelles adhésions sur tous les secteurs de la ville, leur barrant ainsi la route vers une grande liste société civile soutenue par EE-LV. Des tensions qui étaient déjà perceptibles fin août lors des journées d'été.

"Gang des gamellards"

Militant au groupe Marseille Nord, Ferdinand Richard cite en appui de ces accusations le renouvellement de près de 80% des adhérents du groupe local de ce secteur avec 150 nouveaux adhérents depuis les législatives de 2012. "Si on était 2000 militants, ça passerait mais là, nous sommes 400 sur toute la ville…", souffle l'ancien colistier de Zeribi. Il dit avoir saisi la commission de résolution des conflits à ce propos. Une dernière assertion que dément le secrétaire régional Denis Grandjean : "Ce n'est pas à propos des adhésions que ce recours a été formulé".

Au-delà des dérapages qu'ils disent avoir constaté, ils mettent en avant des divergences de fond, contestant même l'engagement écologique de leur adversaire. "Les écolos, c'est nous", rigole Sébastien Barles, balayant le risque de voir deux listes revendiquer la bannière du parti en mars prochain. "S'il le faut, le national tranchera", dit-il prêt à prendre le risque d'un rapport de force avec "le gang des gamellards, les militants par procuration".

Forcé de mettre fin à la réunion en raison d'un repas avec Pape Diouf, qui se tâte toujours pour rejoindre l'aventure, Sébastien Barles prend congé. Et, presque aussitôt comme s'ils attendaient leur tour, des représentants du camp d'en face débarquent sur la terrasse de l'Ecomotive où s'organise une nouvelle conférence de presse. Karim Zeribi peut se draper dans la toge de la légitimité électorale : "Que les choses soient claires. Je comprends un peu le déception des anciens, des Verts. Mais je ne rentrerai pas dans ce jeu-là. Ils ont leur place comme les nouveaux adhérents. Je ne suis pas le candidat à une OPA. Je soumets ma candidature et l'assemblée générale décide". 

Il a beau jeu de dire alors que le processus et le calendrier étaient d'abord souhaités par le camp de Barles. Il y a va même d'une larme de crocodile : "Je suis triste que Sébastien Barles ait perdu les assemblées générales de son secteur mais ce ne sont pas les adhérents des quartiers nord qui ont voté. Ce n'est pas mon problème s'il n'a pas d'ancrage. Quant à moi, si les militants le décident le 28 septembre prochain, je serai le candidat du rassemblement, celui d'une liste écologiste ouverte à la société civile".

"Pas de la chair à canon pour élections internes"

Appelé à jouer les arbitres dans ce conflit, le secrétaire régional, Denis Grandjean, manutentionne des urnes pour l'AG des quartiers nord quand son téléphone sonne. "Je m'attendais à recevoir des coups de fil", sourit-il. En tant que responsable régional, il a supervisé l'ensemble des assemblées générales et ne confirme pas les irrégularités pointées par le camp Barles. "Nous n'avons pas constaté de choses déviantes du point de vue des règles. Concernant l'esprit, nous avons pu constater que certaines pratiques électorales n'étaient pas à la hauteur des enjeux de renouvellement de la démocratie que nous appelons de nos voeux pour la ville". Il va plus loin : "Les militants ne sont pas censés être de la chair à canon pour les élections internes mais des citoyens éclairés sur le sens de leur engagement".

Il en tient pour preuve les nombreuses procurations de vote dans l'assemblée générale des 1/7 et 2/3, "sans assister au débat et avec un avis prédéfini. Je le regrette", insiste-t-il. Pour autant l'oukaze du camp Barles ne remet pas en cause le processus interne en cours. "Il y a d'autres candidats : Michel Fornairon, Aïcha Sif et Pierre Sémériva… Qui plus est, le processus de désignation n'est pas une fin. Il y a encore celui d'ouverture à la société civile pour lequel les militants sont également appelé à se déterminer".

Le secrétaire régional n'apparaît pas trop inquiet du psychodrame en cours : "C'est un grand coup de poing sur la table à la hauteur de leurs ambitions. C'est un signe politique important, pas une scission. Cela indique que le parti vit, qu'il y a du mouvement. Je préfère que cela se passe maintenant, à six mois des élections, qu'en janvier prochain". Avec les écolos, on n'est jamais déçus…