Renaud Muselier soigne ses valeurs sociales au Planning familial

Reportage
le 24 Juin 2021
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Le président sortant Les Républicains, candidat à sa propre succession à la tête de l'exécutif régional était en visite au Planning familial 13, ce mercredi 23 juin. Une façon de se démarquer de son rival d'extrême-droite, Thierry Mariani, et de flatter un électorat de gauche réticent à voter pour lui.

Claire Ricciardi (à gauche), co-présidente du Planning familial 13 au côté de Sabrina Roubache et Renaud Muselier. (Photo C.By.)
Claire Ricciardi (à gauche), co-présidente du Planning familial 13 au côté de Sabrina Roubache et Renaud Muselier. (Photo C.By.)

Claire Ricciardi (à gauche), co-présidente du Planning familial 13 au côté de Sabrina Roubache et Renaud Muselier. (Photo C.By.)

Ça démarre par un petit raté. Sous le panneau qui indique l’entrée du Planning familial 13, Renaud Muselier est présenté aux femmes qui œuvrent dans la structure. Pour saluer l’une, il tente un check, puis tend la main et finit par mimer un baisemain. “Euh… on est une association féministe quand même !”, lâche une voix pour signifier que ce geste, d’une galanterie hors d’âge, n’a pas sa place céans.

Ce mercredi 23 juin, c’est dans son costume gris de candidat à sa propre succession à la tête de l’exécutif régional que Renaud Muselier visite les locaux du siège départemental du planning, installé sur le boulevard National (3e). Depuis les années 1950, l’association milite activement pour l’éducation sexuelle, la lutte pour le droit à la contraception et à l’avortement, contre les discriminations. Pas forcément les chevaux de bataille qu’enfourche spontanément un élu de droite en campagne. Qu’à cela ne tienne, le sortant Les Républicains est là pour défendre son nouveau mantra : “additionner”, quand d’autres – comprendre son adversaire du Rassemblement national, Thierry Mariani – “ne sont que tentation de l’exclusion et du repli sur soi.”

La visite a donc une double vocation : distiller les propositions du candidat sur les questions liées aux droits des femmes et montrer qu’il est, comme il se plaît à le répéter depuis le retrait de la liste d’union des écologistes et de la gauche de Jean-Laurent Félizia, “capable de travailler avec tous”.

Le spectre d’une suppression de la subvention par le RN

Le baisemain est vite oublié. Piloté par Claire Ricciardi, ancienne salariée devenue co-présidente de l’association, Renaud Muselier parcourt les locaux vastes, clairs et colorés du planning familial des Bouches-du-Rhône (PF13) avec l’attention du médecin qu’il est. La région qu’il préside encore pèse pour 15 % dans le budget du PF13 avec une subvention annuelle de 160 000 euros. “C’est un partenaire essentiel avec qui on travaille en bonne intelligence”, pose Muriel Geoffroy la directrice des lieux. Deux mesures écloses sous l’ère Vauzelle – un numéro vert qui répond et oriente sur les questions de contraception et d’interruption volontaire de grossesse (IVG) et un site “Parlons sexualités” à destination des jeunes – ont été reconduites sous son mandat. “Il aurait très bien pu tout fermer, tout enlever, il ne l’a pas fait”, note une des représentantes associatives.

En creux, la visite de Renaud Muselier dit aussi la crainte d’une structure comme le PF13 de voir le Rassemblement national arriver aux affaires. “Ce serait un drame pour nous”, souffle une intervenante. Tous ici ont en mémoire l’engagement de campagne de Marion Maréchal-Le Pen en 2015 de ne plus subventionner le planning familial, parce qu’étant  “une association politisée” défendant “le mariage homosexuel, la PMA pour les couples homosexuels, la théorie du genre ou encore l’accueil des réfugiés”.

Cette rencontre, c’est aussi une façon de dire que nous ne sommes pas la vieille droite qui pue.

Sabrina roubache

Au pupitre, Renaud Muselier enfonce ce clou : “La candidate de Thierry Mariani dans le Vaucluse est contre l’avortement et veut la fermeture du planning familial. Ce sont les mêmes qui se présentent qu’en 2015, ils ont le même discours.” Lui, à l’inverse, dit être venu “en soutien”. Il promet par exemple d’équiper, d’ici à 2022, tous les lycées de la région en distributeurs de protections périodiques gratuites pour lutter contre la précarité menstruelle des jeunes filles. Comme il dit vouloir faire des violences faites aux femmes et aux familles une grande cause régionale, avec notamment l’ouverture “de lieux susceptibles d’accueillir les femmes et les enfants [victimes] dans chaque département”.

Tailleur ajusté et lourdes boucles brunes, Sabrina Roubache, 4e sur la liste des Bouches-du-Rhône, prolonge : “Cette rencontre, c’est aussi une façon de dire que nous ne sommes pas la vieille droite qui pue. De toute façon elle a déjà fait comprendre à Renaud qu’il n’était pas l’un des leurs”. Toute en sourire, fougue et tutoiement, la quadra est le poisson pilote de Renaud Muselier dans cette visite. Celle qui ne manque jamais de rappeler qu’elle a grandi tout près à la cité Félix-Pyat, symbolise à merveille ce “dépassement des clivages” que le candidat appelait de ses vœux dès dimanche soir. “Moi, je ne suis dans aucun parti, mais je suis plutôt de gauche. Et alors ? Est-ce que ça empêche de bosser avec des gens de droite ? Quand tu entres dans une entreprise on ne te demande pas si tu es de droite ou de gauche, non ? On veut juste que tu sois bon”, cadre cette productrice audiovisuelle à la ville.

“C’est pas des militantes LR, là autour de moi, hein?”

Dans la courette baignée d’un soleil cru, Sabrina Roubache a réuni cinq femmes du territoire aux parcours inspirants. Il y a là la médaillée olympique de taekwondo Myriam Baverel, Nouria Nehari, cheffe d’entreprise primée d’une médaille d’argent au concours Lépine, la comédienne Julie Lucazeau, Mathilde Dauphin, toute jeune colistière vauclusienne de Renaud Muselier très engagée dans la lutte contre la précarité menstruelle ou la psychologue varoise de l’association AFL Transition, Nathalie Rocailleux. Cette dernière est à l’initiative de la maison régionale Françoise Giroud qui accueille des victimes de violences conjugales à La Seyne-sur-Mer. À la tribune, elle sourit : elle est une femme “très à gauche” et dans ce projet que la région soutient, “Renaud Muselier a tout de suite répondu présent”. Puis, l’air de rien, elle ajoute que, par les temps qui courent “on a besoin de concorde républicaine”. Assis à quelques mètres, Renaud Muselier boit du petit lait.

À la fin des discours, le candidat offre son sourire éclatant à la cantonade et balaye du bras l’assistance : “C’est pas des militantes LR, là autour de moi, hein ?” Calée lundi soir, après le capitulation de Félizia, cette séquence ne dupe personne. Opportuniste, la visite ? Électoraliste, même, pour flatter une gauche orpheline qui renâcle à aller voter pour lui ? “Opportuniste, je ne sais pas mais éminemment politique, oui !, convient-il. Vous voulez voir la différence entre les deux candidats qui restent ? Eh ben, voilà ! Y’a pas photo.”

Renaud Muselier repart dans une grosse berline grise. Des salariées débriefent. La venue au PF13 du prétendant de droite cherche évidemment à ratisser plus loin que son électorat traditionnel. C’est de bonne guerre, disent-elles, sa visite a aussi permis de donner des garanties sur les engagements régionaux futurs, s’il est réélu. Dans la cour soudain désertée, l’une d’elle jauge finalement : “C’est du gagnant-gagnant.” 

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Commentaires

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  1. vékiya vékiya

    sur 3 jours ça mange pas d’pain. Ps/pc/eelv se sont bien faits rouler dans la farine. ABSTENTION

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    • RML RML

      Avec le score du premier tour,ils ont pas roulé dans grand chose, en fait!
      Si abstention pour vous, moi j’irai voter!

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  2. Jean Peuplus Jean Peuplus

    Les déclarations de Mme Roubache sur “la vieille droite qui pue” s’appliquent elles aussi à Madame Simone Veil?

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    • Maurice Maurice

      Simone Veil est candidate ?

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  3. R13 R13

    Les déclarations de madame robineau chailan sur YouTube sur le comportement du président de la région sont parlantes sur le personnage.
    Et cela se recoupe avec d’autres témoignages.
    Une honte.
    J’irai à la pêche dimanche.

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    • Peuchere Peuchere

      La fausse conférence de presse de Madame Robineau? Celle qui a fait campagne aux municipales sous l’étiquette centre droit, qui s’est rallié entre les deux tours à la famille du PS Povinelli et qui maintenant soutien le facho Mariani ?
      MDR
      C’est sur qu’écouter des personnes pareils, c’est crédible !!!!

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  4. Latécoère Latécoère

    Sabrina Roubache serait donc “plutôt de gauche”. Eh bien ça alors !
    Qui a dit qu’il n’y avait jamais de scoop dans Marsactu ?

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    • julijo julijo

      le mot essentiel, très important, c’est “plutôt”….
      on ne peut pas vraiment lui en vouloir, les appartenances sont en vrac. tout dépend de ce qu’il y a à gratter…
      muselier et elle ne sont pas de la “vieille droite qui pue”, ça doit être mariani. par contre les gens de la “vieille” gauche par “honneteté intellectuelle” vont voter à droite…. et valls de gauche il y a quelques années (quoique ?) appelle à voter à droite et s’invente un front républicain pour lui tout seul !!
      va y comprendre quelque chose
      les journalistes et les experts ils disent que le paysage politique est “brouillé”…(va pas trop tarder à virer brouillon).

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  5. Pussaloreille Pussaloreille

    Je m’étonne qu’aucun de vous ne commente la conclusion de ces dames du planning familial, pourtant peu soupçonnables d’appartenir à la vieille droite qui pue, ou même à celle « qui sent bon » (!) : c’est du gagnant-gagnant. Il faut se souvenir en effet de l’ambiance qui a régné dans les communes de la région lors de la vague FN de 1995 : les menaces de Marion Maréchal Le Pen rappelées dans l’article ne sont pas formulées en l’air et on peut s’attendre, si Thierry Mariani l’emporte, à des conséquences qu’un électeur de gauche ne peut voir venir sans chercher à les éviter. Exprimer sa rancœur face a la trahison des appareils ne vaut pas de laisser le Rassemblement national se saisir des manettes de la Région. Tenir une institution, c’est avoir à sa disposition tout l’argent qui va avec, pour déployer des politiques qu’on voit à l’œuvre déjà dans plusieurs pays d’Europe et que je ne souhaite pas à mes enfants. Je n’ai aucune sympathie pour cette droite locale qui fait honte à Marseille depuis longtemps mais ne soyons pas naïfs : la retape agressive de Mariani a toutes les chances de rassembler. Et pour une fois, disons que la peste et le choléra ne sont pas aussi virulents et qu’on peut choisir sa maladie. On peut bien sûr prévoir de descendre dans la rue après, pour protester, mais ça me paraît bien aléatoire au vu du peu d’engagement politique de la plupart des citoyens. Et puis c’est un peu remettre à demain ce qu’on peut faire dès dimanche.

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  6. Manipulite Manipulite

    Le nom complet est Sabrina Agresti Roubache, amie du couple présidentiel Macron qui l’a imposée sur la liste Muselier. Après ça il n’y a pas d’alliance avec LREM.
    Lui, Agresti est doyen de la faculté de droit de Marseille et a déjà été imposé aux municipales sur la liste Vassal par l’Élysée; on se souvient de la huée des militants LR qui l’avait accueilli lors d’un meeting.
    Tout cela est nauséeux.

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