Parc national des Calanques : les élus face à l'enquête publique

Parc national des Calanques : les élus face à l'enquête publique

Accusé de réception politique du pavé dans les Calanques. Après l’analyse du rapport des commissaires enquêteurs sur le parc national, qui pour résumer reprend de nombreuses critiques déjà formulées à la fois sur le périmètre et son contenu, place aux réactions des élus, avant un premier débat en commission demain. « J’ai au moins deux motifs de satisfaction : le parc est largement admis et le rapport avalise la concertation telle qu’elle a été faite », glisse Didier Reault, adjoint UMP à la mairie chargé du dossier et proche du président du groupement d’intérêt public (GIP) des Calanques (qui préfigure le futur établissement public) Guy Teissier. Même version très positive attitude chez Robert Assante, maire Nouveau Centre des 11 et 12e arrondissements : « il faut surtout retenir l’avis favorable en général plutôt qu’une remise en cause du travail effectué ».

« Un parc marseillais des Calanques »

Difficile pourtant de cacher sous le tapis les critiques. Qui « ressemblent énormément à nos revendications », note chez Europe Ecologie-Les Verts (EELV) Pierre Semeriva. Ou constituent « beaucoup de points positifs » même si les commissaires enquêteurs n’ont « pas vraiment intégré l’humain », nuance côté PCF Marie-François Palloix, opposée aux réserves concernant les usages au nom du « respect pour ces pratiques ancestrales ».

« Il existe une loi nationale qui détermine les caractéristiques des parcs nationaux. A Marseille, on a voulu faire le parc marseillais des Calanques et s’affranchir des règles qui ont cours ailleurs sous prétexte qu’il s’agit d’un parc périurbain. La commission n’était pas là pour dire si le parc est joli ou pas mais simplement s’il correspond à la loi. Sur la chasse, la pêche, l’aire optimale d’adhésion, il ne correspond pas », tranche Eric Scotto, conseiller du 1/7 délégué au Frioul, Littoral et Mer (sans étiquette).

Qu’est-ce qui peut bouger ? Marie-Françoise Palloix craint que dans un mouvement de « deux poids deux mesures », les conclusions des commissaires ne soient suivies que sur les usages, pas le périmètre. Et ce alors que « sur la chasse, même si je suis fondamentalement contre, il y a eu une concertation et accord. Alors que pour le périmètre cela a été arbitraire », reconnaît Pierre Semeriva. Arbitraire, ou plutôt négociation directe avec les maires.

Le périmètre au coeur de la bataille

Dans un communiqué publié lundi, Jean-Claude Gaudin a expliqué qu’il comptait bien s’asseoir sur ce rapport alimenté par 4500 contributions (ou qu’il « ne se laissera rien dicter » dans la terminologie de La Provence). Confirmant ainsi les craintes émises un peu plus tôt par Marie-Françoise Palloix, qui en tant qu’élue du 6/8 a déjà vu le maire de Marseille « passer au-dessus des observations des commissaires enquêteurs sur le tunnel Prado Sud ou le stade Vélodrome ».

Reste qu’elle comme Eric Scotto est décidée à batailler pour que des recommandations comme l’intégration des Goudes ou du Frioul dans le cœur de parc soient suivies. « Ce qui à mon avis va être compliqué car cela a déjà été négocié », prévient Didier Reault. Autre sujet : l’aire optimale d’adhésion, sorte de « zone tampon » entre le cœur et le droit commun, importante pour contrer d’éventuelles vélléités d’urbanisation opportuniste estiment les commissaires enquêteurs, qui s’inquiètent de trous.

Robert Assante, qui est le seul à afficher une zone continue approuve l’esprit, ne « voulant pas voir les zones naturelles grignotées » et réclame un caractère « inaliénable de cette frontière pour que personne ne puisse la remettre en cause à l’avenir ». Didier Reault (premier adjoint au maire du 9/10) aussi, mais concernant le cas cité par le rapport, La Cayolle, « cela paraît difficile à cause du projet Anru, on ne va pas geler les terrains et tirer une balle dans le pied de la rénovation urbaine ».

Réaction de Pierre Semeriva : « ce n’est pas parce qu’on est en AOA qu’on ne peut pas construire, mais il y aura des contraintes. On y a quand même mis Luminy (où l’on prévoit d’importants aménagements dans le cadre du plan Campus, ndlr) ! Au contraire que l’Anru prenne en compte le parc, ce serait génial ». Le maire du 6/8 Dominique Tian (UMP), n’a lui pas retourné notre appel pour les cas du Roy d’Espagne, Pastré, Marseilleveyre et Montredon.

Dilemme stratégique

Et maintenant, on fait quoi ? « Prenons le temps, plaide Eric Scotto. Puisqu’on est dans une période électorale qui risque de donner lieu à des manœuvres électoralistes, ne décidons pas dans l’urgence ». Avant de lancer : « je ne vois pas pourquoi on serait à 6 mois près à partir du moment où l’on voit qu’il y a débat et que le parc est mal ficelé. La bonne question, c’est pourquoi est-on à 6 mois près ? » La réponse pour Marie-Françoise Palloix : parce que « Nicolas Sarkozy en a fait une affaire électorale », voulant marquer la fin de son mandat par l’inauguration du parc en avril.

Ce qui n’enchante guère Pierre Semeriva. Mais, semblant avoir fait le deuil d’un parc ambitieux, il considère comme trop risqué tout report : « les faiblesses ont été relevées depuis le début, et elles restent là. On ne va pas faire comme si nous ne les connaissions pas et que cela justifie de ne pas faire le parc ». Attention alors à un autre risque, pointe Eric Scotto : « si on accepte un parc a minima on n’aura pas l’accord des autorités nationales et il ne se fera pas ». Une chose est sûre : « ceux qui feraient éclater le projet, en porteraient la responsabilité, notamment aux prochaines échéances électorales », lance Marie-Françoise Palloix, qui pense elle à la droite (marseillaise mais aussi cassidaine et ciotadienne, elle aussi vent debout contre toute augmentation du périmètre).

La voix des défenseurs de l’environnement

Membre du collectif La Ciotat Coeur de Parc, Alain Matesi est fatigué de cette lutte : « les élus savent que 80% de la population est favorable donc ils le sont forcément aussi. Mais on est toujours dans le rapport de forces, la pression pour obtenir ceci et cela. Il faut qu’on arrête ça », souffle-t-il, appelant à entendre davantage les voix de ceux qui œuvrent pour la défense de l’environnement. Rappelons donc les positions prises par exemple par le conseil scientifique et pédagogique du GIP, composé de 20 chercheurs : pour le Frioul et Port-Miou en coeur de parc, contre les lâchers de tir, pour une zone de non pêche à En Vau et Port-Pin. Idem chez le Conservatoire du littoral qui n’a « pas compris le retrait » du Frioul, trouve « cohérent d’intégrer en coeur de parc la partie Ouest de la calanque » de Port-Miou et s’élève contre la chasse à la glue et les lâcher de tir.

Citons mêmes les services de l’Etat : pour la DREAL (qui représente le ministère du Développement durable), le périmètre des zones de non pêche « mériterait d’être mieux justifié (…) par rapport aux enjeux écologiques de préservation du patrimoine naturel marin » et l’aire optimale d’adhésion a un « périmètre discontinu et découpé qui se distingue fortement de ceux des autres parcs nationaux« . Poliment mais fermement, le conseil d’administration des Parcs nationaux de France « insiste sur la nécessité pour le parc national des Calanques de converger de façon déterminée et progressive vers les canons internationaux et les principes fondamentaux des parcs nationaux français ».

Disclaimer : Pour la transparence que nous devons à nos lecteurs, nous vous informons que Raj Médias la société actionnaire de Marsactu réalise des missions de conseil internet pour le GIP des Calanques

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Actualisation : en bonus ce communiqué collector dans le style cryptique du président de Marseille Provence Métropole. On vous le déchiffre : l’enquête publique c’est très bien mais il faut en rester à l’accord trouvé avec « les acteurs ». Surtout les maires des communes concernées, toutes situées dans MPM et dont dépend l’équilibre fragile de la gouvernance de la communauté urbaine ?