[Ma mosquée va craquer] Une enquête collective pour une série d’été
En partenariat avec la Street School, Marsactu vous présente Ma Mosquée va craquer, une série réalisée par les apprentis journalistes de cette formation intensive. A leurs côtés du choix des sujets jusqu'à la relecture finale, nous avons choisi de les faire plancher sur la difficile installation de ces lieux de culte. Un sujet complexe qu'ils ont réussi à décliner en six histoires.
Une des rares mosquées neuves construites dans une architecture islamique, rue Malaval, relève du mouvement tabligh. Dessin : Malika Moine
Depuis son lancement début 2018, la rédaction de Marsactu est partenaire de la première promotion de la Street School Marseille. Initiée à Paris par le magazine urbain Street Press, la Street School offre une formation intensive aux méthodes du journalisme à une quinzaine d’élèves, sans condition de diplômes. Encadrés par des professionnels, ils ont ainsi pu découvrir le métier de journaliste.
Dans le cadre de cette formation, après avoir accueilli leurs premiers articles sur l’Agora, Marsactu intervenait dans le dernier volet, consacré aux méthodes d’enquête. En accord avec Augustin Scalbert et Philippe Pujol qui les suivaient, nous avons décidé de les faire plancher sur un sujet complexe : les mosquées à Marseille et, plus précisément, un angle resserré : “Ma mosquée va craquer”.
L’idée était de faire travailler ces étudiants sur les tensions qui existent autour de ces lieux de culte. Tensions liées au type d’islam qui est prôné, tensions avec le quartier, avec les règles de la laïcité et, plus prosaïquement, tensions avec les projets de rénovation qui obligent parfois les fidèles à construire ex nihilo un projet de mosquée, l’ancienne ayant disparu avec la barre HLM où elle nichait.
Pendant plus de trois semaines, la quinzaine d’élèves s’est donc lancée, avec le spectre le plus large possible, pour documenter le plus profondément qu’ils l’ont pu le sujet, avant de trouver les angles, les histoires qui accompagnent ces lieux de culte qui ont encore du mal à s’installer dans le paysage français et marseillais. Le serpent de mer de la Grande mosquée, sans cesse repoussée puis enterrée, ou encore la récente fermeture de la mosquée As Sounna, du boulevard National, sont des exemples de ces tensions encore vives.
Difficile recensement
La première difficulté d’un tel sujet est de cerner de qui on parle. En France, les statistiques sur une base religieuse sont interdites. Il n’existe donc aucune estimation fiable sur le nombre de musulmans marseillais. Le rapport rédigé par Vincent Geisser et Françoise Lorcerie en 2011 sur les musulmans marseillais est très clair :
Il est (…) hautement problématique d’en établir une estimation, car on se base généralement sur les statistiques des étrangers des pays à majorité musulmane, combinées avec celles des personnes naturalisées provenant de ces pays. Or certains individus venus d’un pays majoritairement musulman n’ont aucune affiliation musulmane et les personnes des deuxième et troisième générations, de nationalité française, ne sont pas repérées dans les statistiques. Il convient donc de traiter avec beaucoup de réserves les chiffres existants.
Ces difficultés se retrouvent dans une certaine mesure pour les mosquées. Le Conseil régional du culte musulman, qui depuis 2003 est censé fédérer au niveau local les représentants du culte, est en réalité peu opérant et peu reconnu par les pratiquants eux-mêmes. Pas question d’espérer obtenir par là, la moindre statistique sur les mosquées marseillaises. Sur la base de données accessibles sur des sites comme trouvetamosquee.com ou muzulmania, on dénombre jusqu’à 200 lieux de prières à Marseille. Mais ce terme réunit un grand nombre de lieux qui reçoivent effectivement des fidèles musulmans mais n’ont pas été conçus pour cela.
Le nombre réel des mosquées serait en fait plus restreint. Si aucun chiffre officiel n’est accessible publiquement, un mémoire récent cite celui de 83, issu d’un recensement de la préfecture des Bouches-du-Rhône. Car il existe bien des services qui comptent. La gestion des cultes relève du ministère de l’Intérieur et, localement, c’est le préfet de département qui en assure le suivi (le préfet de police gérant les cas problématiques liés aux troubles à l’ordre public ou au risque terroriste).
Six débouchés et des impasses
De ce travail de documentation, les journalistes de la Street School ont défini plusieurs sujets. Certaines voies explorées n’ont pas permis de déboucher sur un article. D’autres se sont révélés des impasses du fait de la difficulté d’accéder à des informations recoupées. Au final, six histoires ont tout de même passé tous les filtres avec succès. Nous vous proposons toute la semaine ces histoires de mosquées en tensions.
La plus vieille mosquée comorienne de la Ville, rue Guichard, est appelée à disparaître du fait d’un vaste programme de résorption d’habitat insalubre à Saint-Mauront. La mosquée El Islah du marché aux puces est souvent présentée comme la plus grande de Marseille. Mais existera-t-elle encore au cœur des Fabriques, un projet porté par Bouygues pour le compte d’Euroméditerranée ? À la Busserine en revanche, les fidèles ont bon espoir d’arriver au bout de leur chantier. Détruite dans le cadre du projet de rénovation urbaine, l’ancienne mosquée du quartier a l’ambition de devenir le principal lieu de culte musulman du 14e arrondissement.
Aux Cèdres, la mosquée en construction dans ce même cadre de rénovation, se rêve en mode start up avec community manager et formation à l’internet. Nous ferons aussi un détour par la Timone où l’AP-HM cherche à recruter un aumônier musulman pour animer la salle de prière qu’elle a bien du mal à maintenir. Enfin, nous interrogerons la figure de l’imam marseillais, à la fois notable et précaire.
Benoît Gilles (Marsactu), avec Marion Breelle (Street School Marseille)
Cet article est issu de la série Ma mosquée va craquer. Vous pouvez lire ici les autres articles qu’elle contient.
Articles liés
Commentaires
L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.
Vous avez un compte ?
Mot de passe oublié ?Ajouter un compte Facebook ?
Nouveau sur Marsactu ?
S'inscrire
bravo pour cette initiative et cette série !
Se connecter pour écrire un commentaire.