L’élection à la métropole, le scrutin dont (presque) personne ne parle

Actualité
le 10 Mar 2020
3

Peu d'électeurs sont au courant qu'ils éliront aussi les conseillers métropolitains les 15 et 22 mars, dans un système de "fléchage". Peu de candidats font la publicité de ce scrutin qui a pourtant une importance primordiale sur les transports, l'habitat, les déchets... Chez LREM ou chez EELV, le discours métropolitain commence à émerger tandis que d'autres mettent en avant l'imbrication des compétences.

Le conseil métropolitain, au Pharo. (Photo : DR)
Le conseil métropolitain, au Pharo. (Photo : DR)

Le conseil métropolitain, au Pharo. (Photo : DR)

À lire les affiches des listes des candidats à la mairie centrale de Marseille, l’élection qui vient n’est que municipale. La métropole y est absente. Samia Ghali (DVG) fait exception en écrivant en entête de ses affiches “élections municipales et communautaires”. Le scrutin qui vient en cache un autre qui n’intéresse pas grand monde, y compris chez les candidats qui sont peu nombreux à l’énoncer. Or, les bulletins qui sortiront des urnes de 92 communes d’Aix Marseille Provence Métropole, les 15 et 22 mars, éliront également les conseillers métropolitains dans un système de désignation “par fléchage” (lire notre article “tuto” sur l’élection métropolitaine).

Transport, eau, déchets, habitat, documents d’urbanisme… les compétences acquises par la métropole depuis sa création en 2016 sont immenses (lire notre article “tuto” sur les compétences de la métropole et des mairies). Mais à ce jour il n’y a qu’une seule candidate déclarée à la présidence de la collectivité : Martine Vassal qui brigue pour sa propre succession. Elle est aussi présidente LR du département et veut conquérir la mairie de Marseille en plaidant l’intrication des compétences pour justifier sa double candidature. Dans son programme comme dans ceux de nombre des candidats, les propositions relevant de la commune se mêlent à celles inscrites dans le champ métropolitain.

La mandature finissante a donné la vision d’une assemblée sans grande vivacité démocratique (lire notre compte rendu de la dernière séance). Et ce d’autant plus que le gouvernement laisse planer le doute d’une fusion entre métropole et département dont le calendrier est aujourd’hui inconnu. Passage en revue des positions métropolitaines des candidats, de la gauche unie jusqu’à l’extrême-droite, en passant par les écolos ou la présidente sortante.

D’abord l’intérêt de chaque commune

En dépit de la mention sur ses affiches, qu’elle considère comme réglementaire, Samia Ghali elle-même, ne fait pas campagne pour l’élection métropolitaine. “Je ne sais pas qui sera en capacité d’emporter la métropole. Pour moi le plus important c’est l’intérêt de Marseille. Marseille a vraiment besoin qu’on l’aide”, affirme la sénatrice et maire honoraire des 15/16, ex PS qui sait qu’elle devra trouver des alliés pour exister dans les deux hémicycles.

Stéphane Ravier, le candidat RN à la mairie de Marseille fait partie des anti-métropole assumé. “Elle concentre trop de pouvoirs”, a-t-il affirmé à l’occasion de son interview “Face à Marsactu, “dans l’intérêt des libertés communales et de permettre aux maires de retrouver leurs prérogatives, on va faire en sorte de leur rendre leur pouvoir”. Celui qui se voit déjà “emporter la mairie de Marseille”, prophétise “une grande influence” de son parti à la métropole mais sans avoir de candidat pour le perchoir. Il pourrait élu d’une autre commune. Mais le poids que promet Ravier est à relativiser. Hors Marseille, le RN ne présente qu’une vingtaine de listes, faisant l’impasse sur des villes ayant placé Marine Le Pen au delà des 50% au deuxième tour de la présidentielle, comme Fos et Port-de-Bouc.

Comme Samia Ghali et Stéphane Ravier, Bruno Gilles veut être maire de Marseille “à plein temps”. De ce fait, le dissident de Martine Vassal, qui a quitté LR après que le parti ait désigné la présidente du département et de la métropole comme sa candidate à Marseille, soutient comme candidate à la métropole… Martine Vassal. Une condition : qu’elle renonce à la mairie de Marseille. Il pourrait choisir un autre candidat qui prendrait le même engagement. À moins qu’à droite une autre candidature n’émerge d’une autre commune.

Vassal seul candidate à la présidence

Un scénario peu probable, même si à Aix-en-Provence, la maire (LR) Maryse Joissains et sa fille sénatrice (UDI) Sophie Joissains ne sont pas favorables au cumul des casquettes de Martine Vassal. “Pour le bien de tous, pour que les problèmes que connaît la ville de Marseille puissent être résolus au mieux en partenariat étroit avec l’État et l’Europe, sans faire tache d’huile et que le désastre ne s’étende pas à la Provence toute entière, il est indispensable que ces deux fonctions ne puissent se cumuler”, écrivait Sophie Joissains dans une tribune en novembre, plutôt favorable à la position défendue par Bruno Gilles.

La présidente sortante dispose du soutien de l’association des “Maires de Provence”. Lancée en février 2018 par le maire de Mimet Georges Cristiani (SE) celui de Trets Jean-Claude Féraud (LR), l’association regroupe près de 70 édiles de petites et moyennes communes. “Nous sommes la proximité et nous représentons les citoyens”, défendait en octobre dans La Provence comme objet de ce rassemblement, Christian Burle le maire (LR) de Peynier et vice-président de la métropole à l’agriculture. Pour ces élus, la métropole a été imposée par le gouvernement et ils trouvent en Vassal une alliée leur garantissant le soutien à leur pouvoir local par le mécanisme de redescente des fonds vers les communes. Un jeu d’échange de bons procédés qui a également cours avec François Bernardini, le maire d’Istres, malgré sa mise en cause dans une enquête en cours.

LREM, partisan de la métropole pas encore coordonné

Chez LREM, on se revendique plutôt engagé pour la métropole. En compagnie de députés LREM et d’entrepreneurs, Jean-Michel Serrus, maire de La Roque-d’Anthéron et ancien vice-président aux transports a lancé en novembre 2018 une association “pour une métropole des citoyens”. Début février, à l’occasion d’une lettre ouverte à tous les candidats (lire notre “pêche du jour” des anecdotes de campagne du 11 février), l’association a appelé à construire un territoire en commun en particulier pour le développement des transports, de l’économie et de l’emploi. Serrus est candidat à sa réélection comme maire, et espère reprendre une responsabilité à la métropole. Il avait perdu son poste de vice-président à l’occasion de l’élection de Martine Vassal à la tête de la collectivité en septembre 2018.

Mais du côté des candidats d’En Marche pour les grandes villes le fait métropolitain patine encore. Anne-Laurence Petel à Aix et Yvon Berland à Marseille, portent tous les deux des propositions qui ne dépassent pas leur territoire communal, en particulier en matière de transports. La proposition insolite de l’aixoise de navettes suspendues n’est pas envisagée d’être étendue à l’échelle intercommunale. Et le candidat marseillais, qui veut la mise en place progressive de transports gratuits la finance grâce à “un chèque qui serait réglé à la métropole par la ville”, comme il l’a précisé à l’occasion de son entretien “Face à Marsactu.

Seulement deux meetings métropolitains

De leur côté, les écologistes de la liste Debout Marseille ont été les premiers à organiser un meeting métropolitain, auquel participaient des candidats de plusieurs villes, telles qu’Aubagne, Salon, Vitrolles…, sous le patronage de Damien Carême, ancien maire (EELV) de Grande-Synthe (nord), désormais eurodéputé. “Si la métropole est un outil de plus qui éloigne la démocratie des citoyens alors je ne suis pas favorable aux métropoles, s’exprimait l’invité d’honneur de ce 25 février. Dans l’idée du législateur c’est un outil de compétitivité territorial.”

Néanmoins, les écolos croient en un “new green deal”, à “l’échelle de la métropole pour mener les changement indispensables face à la crise climatique”, affirmait Guy Benarroche le co-secrétaire régional EELV. Il ne sera pas question d’alliance, ni de candidat à la présidence, au cours de cette réunion qui a rassemblée une centaine de personnes, essentiellement des candidats et soutiens. Pour “imposer [leurs] projets à la métropole”, Denis Grandjean le candidat d’Aubagne défend une “stratégie de coopération pour le troisième tour”. “Nos alliés naturels sont plutôt à gauche, complète-t-il, sans exclure d’autres futurs partenaires. Dans le paysage politique actuel en recomposition, notre garde fou c’est le projet et la stratégie de coopération”.

À gauche, à l’initiative de la la liste Fuveau verte et solidaire, une réunion métropolitaine s’est tenue le 28 février. À l’image de l’union pour l’instant impossible à Marseille et Aix, des membres d’EELV ont participé à cette initiative plutôt qu’à celle de Marseille, comme la tête de liste du rassemblement de la gauche aux Pennes-Mirabeau et conseillère départementale Rosy Inaudi, ou les colistiers fuvelains. En plus de ces deux là, Aix en Partage, le Printemps marseillais, et les rassemblements de Trets, Salon et Miramas à la discussion en vue d’une convergence au sein de l’hémicycle métropolitain. Sur ce coup-là, c’est la liste du village qui lançait le débat avec celles qui pèseront le plus, à gauche, dans le futur hémicycle.

Cet article vous est offert par Marsactu

À vous de nous aider !

Vous seul garantissez notre indépendance

JE FAIS UN DON

Si vous avez déjà un compte, identifiez-vous.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

  1. Dominique Zussy Dominique Zussy

    Bonjour,
    Il y a une troisième instance que l’on oublie, celle là, totalement, c’est le Conseil de Territoire, ce “machin” hybride qui ne subsiste qu’à la force des délégations qu’il obtient de la Métropole pour justifier de son maintien et celui de ses élus. Quel intérêt pour le Bien Public ?

    Signaler
  2. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    A l’origine, lors de la discussion du projet de loi Maptam qui a entraîné la création de la métropole d’Aix-Marseille, il a été question de faire élire directement les membres du conseil métropolitain à partir de 2020. Mais j’ai l’impression que cette bonne idée s’est perdue dans les sables du conservatisme municipal. Elle n’a en tout cas pas été encouragée ici par ces maires qui ne voient dans la métropole qu’un distributeur de fric aux communes, et non un outil au service de projets communs.

    C’est dommage, car en effet il n’y a par conséquent aucun lieu de débat démocratique sur ce que devraient être les orientations de ces projets. Celles-ci vont être décidées par une assemblée pléthorique dont les membres raisonnent principalement en fonction de leur propre intérêt.

    En attendant, ça permet aux candidats aux municipales de s’aventurer sur le terrain des compétences métropolitaines en promettant n’importe quoi sans trop s’engager : ils pourront toujours dire que c’est à cause de la métropole que tel projet n’a pas été réalisé…

    Signaler
  3. Pitxitxi Pitxitxi

    “Le scrutin dont presque personne ne parle”. Et pour cause, nous citoyens nous n’avons pas directement la main dessus. Et je ne parle même pas de la majorité des communes qui composent la métropole, et qui y envoient 1 ou 2 représentants…

    Il faudrait faire comme à Lyon, une élection uniquement réservée à la métropole. Plus de démocratie directe pour une meilleure représentativité, plus de chance d’éviter une mainmise totale des “gagnants marseillais”, plus de chance d’y voir des programmes concrets et qui concernent l’ensemble du territoire.

    Signaler

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire