Le fast-food solidaire Après-M, emblème de la lutte qui paie, a été inauguré

Reportage
le 12 Déc 2022
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L'ancien McDonald's reconverti en restaurant d'insertion a fêté son lancement ce samedi sous le signe du rêve d'ex-salariés en lutte devenu réalité. Le maire de Marseille Benoît Payan est venu saluer "le symbole" que constitue ce projet militant.

Le maire Benoît Payan inaugure l
Le maire Benoît Payan inaugure l'Après-M le 10 décembre 2022. (Photo : JML)

Le maire Benoît Payan inaugure l'Après-M le 10 décembre 2022. (Photo : JML)

“La lutte a été longue mais à cœur vaillant rien d’impossible”, lance d’une voix calme Kamel Guemari. De la tribune, l’ancien leader syndical du Mc Donald’s de Saint-Barthélémy contemple le chemin parcouru. Ce samedi, on inaugure un projet fou devenu réalité : sur une idée des salariés en lutte, le fast-food promis à la fermeture devient un restaurant d’insertion.

Après la phase de recrutement, vingt contrats ont pu être signés avec le concours de l’État. Des personnes en situation de grande précarité, d’autres qui sortent à peine de prison, des décrocheurs scolaires vont évoluer à l’Après-M avec d’anciens salariés de la chaîne américaine. Côté cuisine, ils mettront en musique des produits annoncés de qualité avec les conseils de Gérald Passédat. Le chef triplement étoilé est venu de son restaurant du bord de mer, en soutien, pour montrer qu’“il n’y a pas de Nord sans le Sud, qu’il n’y a qu’une seule Marseille”. Il a offert deux recettes de hamburgers au fast-food social.

La troisième vie du McDo

Le restaurant est entré officiellement le 5 décembre dans sa troisième vie. Longtemps lieu de rencontres pour les habitants de Sainte-Marthe et alentours, il était promis à la fermeture, au motif d’une baisse de la fréquentation liée au chantier de la rocade L2. La vocation de carrefour a été préservée par des mois de lutte où tous les soutiens étaient les bienvenus, avant ce nouveau départ.

Dans le froid du début décembre, plus d’une centaine de personnes se sont précipitées pour saluer le miracle avec enthousiasme. Derrière un ruban ciel et blanc, qu’il coupe en petits morceaux pour laisser un souvenir au plus d’artisans du projet possibles, le maire de Marseille est de ceux-là. “Pour nous militants, c’est un symbole. On nous dit toujours, quand on veut changer les choses, que c’est impossible. Eh bien, ils nous prouvent le contraire”, assure Benoît Payan à Marsactu. Précédemment au micro, il avait fait l’éloge de ce “combat d’un quartier qui s’est levé pour revendiquer sa force et sa dignité dans une ville qui trop longtemps ne l’avait pas regardé”.

Un symbole politique pour Benoît Payan

Le maire insiste sur le “rêve impossible” devenu réalité. La Ville y a contribué en acquérant le terrain. Il sait aussi qu’il tient là un important marqueur de gauche de son mandat. Dans un secteur, le 13/14, où son camp n’est plus représenté au conseil d’arrondissements et dans des quartiers Nord que son alliée et adjointe Samia Ghalia domine politiquement, le voilà acclamé par les personnes présentes.

“C’est assez rare qu’une municipalité rachète un restaurant pour le mettre au service d’un projet porté par des habitants”, salue Fathi Bouaroua, un des animateurs du projet. Dans la bouche de cet ancien délégué régional de la Fondation Abbé-Pierre, le compliment – comme les applaudissements qu’il demande pour l’élu – est fort. Pendant les municipales 2020, Fathi Bouaroua, avec d’autres militants associatifs décidés à changer la donne politique, avait pris position contre une candidature Payan à la mairie de Marseille avant que celui-ci ne laisse la tête de liste à Michèle Rubirola. “On peut ne pas avoir les mêmes options [politiques] mais il faut dire quand c’est bien. La Ville de Marseille n’a posé aucune condition”, insiste Fathi Bouaroua.

Si la soirée est à la joie, il pose l’enjeu pour la suite : “Le restaurant d’insertion, c’est un début. Maintenant, il va falloir dégager des bénéfices pour pouvoir mettre en place la plateforme solidaire.”  Un conseil que lui répète bien volontiers Olivier Leberquier. Ancien leader syndical, comme Kamel Guémari, il est désormais à la tête de Scop-TI, l’entreprise fondée en coopérative par les salariés licenciés de l’usine Fralib, qui fabriquait les thés L’Éléphant à Gémenos. Après 1336 jours de lutte, ils reprenaient l’activité et créaient la marque d’infusion 13-36. Malgré des difficultés, leur société montée sans le concours d’un seul cadre est aujourd’hui toujours sur le pont. “Je ne veux pas dire qu’on est un symbole car chaque histoire est différente, mais j’espère qu’on a pu être une inspiration. Ils nous appellent “les grands frères”, sourit Olivier Leberquier. Ça montre qu’aucune lutte n’est perdue d’avance.” Et pour que le message porte loin, c’est par un feu d’artifice que la soirée s’est poursuivie.

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Commentaires

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  1. MarsKaa MarsKaa

    Bravo à tout ceux qui ont cru à ce projet, l’ont construit, l’ont soutenu.

    (L’article ne rappelle pas le rôle de ce lieu et de ces militants durant le confinement. Pourtant ce rôle a été essentiel, et cela a contribué à les faire connaître.)

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    • Jean-Marie Leforestier Jean-Marie Leforestier

      Vous avez raison, j’aurais dû. Heureusement que vous êtes là pour le complément !

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  2. Alceste. Alceste.

    Benoît Payan dans le symbole qui paye , il se fait applaudir, mais une question qui va sans doute faire hurler, combien cela coûte à la mairie et de quel niveau sont les aides de l’Etat car après tout c’est nous qui payons le symbolisme payanesque avec nos impôts

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    • ruedelapaixmarcelpaul ruedelapaixmarcelpaul

      N’exagérez pas, ce n’est pas un établissement « de luxe » que nos anciens zélus Gaudiniens aidaient joyeusement par les impôts des marseillais.

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    • polipola polipola

      Ce commentaire-là restera sans doute dans les annales de marsactu. Donc selon vous, permettre la pérennisation d’un lieu solidaire au coeur de quartiers prioritaires c’est du symbolisme ? Et permettre la pérennisation d’un lieu solidaire au coeur des quartiers prioritaires n’est pas ce à quoi nos impôts doivent contribuer ?

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  3. Jeanne 13 Jeanne 13

    Si l argent public sert à soutenir un restaurant d insertion dans un quartier populaire qui va aussi ouvrir une plateforme solidaire moi je dis bravo !
    Pendant le confinement ils ont organisé la solidarité juste par conviction et sans aide financière
    C est normal que la municipalité investisse
    A Gémenos aussi les scopti ont bénéficié d aides publiques sinon c est impossible
    Le CICE est aussi de l aide aux entreprises avec de l argent public qui aurait dû servir à soutenir les emplois pas pour augmenter le chiffre d affaire et les salaires des dirigeants et ça représente des millions …
    Alors en tant que citoyenne je dis merci à la mairie de Marseille de soutenir ce projet
    Et longue vie à l aprés M

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  4. mrmiolito mrmiolito

    C’est une très belle histoire et un très beau projet solidaire. Cette inauguration a été un moment très inspirant et chaleureux, et j’ajoute qu’on y mange fort bien et pour pas cher (ma seule chance de goûter du Passédat probablement).
    Pour moi c’est un vrai investissement d’avenir qu’a réalisé la mairie à Ste Marthe, et bien au delà du symbole.

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  5. Dark Vador Dark Vador

    Totalement d’accord avec les opinions ci-dessus, à l’exception (exceptionnellement) de @Brallaisse : des années que l’on se rend compte de l’argent jeté par la fenêtre (et aux amis) de nos édiles… Pour une fois, je suis raccord avec les aides apportées à ce resto, là était leurs places, justifiées, c’est loin d’avoir toujours été le cas. 😃😋

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  6. Alceste. Alceste.

    Vox Populi ,vox Dei;

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  7. kukulkan kukulkan

    génial et magnifique !

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  8. Alceste. Alceste.

    Polipola en tant que contribuale, j’aime bien savoir ce que finance nos impôts et à quel niveau.
    Quand je vois mon niveau d’imposition entre le foncier et l’ habitation et les résultats obtenus ,ne pas se poser de questions est débile.
    Quand Vassal s’amuse avec nos sous [ La Barben],je ne voys pas pourquoi je ne poserais pas la question au sujet de Payan ,après M ou oasis.

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  9. Alceste. Alceste.

    Après,M ou pas.

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  10. Alceste. Alceste.

    Polipola, celle qui suit, vous pouvez l’encadrer:
    “Art. 14. Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée.”
    Un des articles du texte fondateur de notre démocratie.
    Nos zélus ont tendance à considérer nos impôts comme leur cassette personnelle.
    Ce n’est pas le cas il convient de leur rappeler de temps en temps ..Lieu solidaire dans un quartier défavorisé où pas.

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  11. GENIA GENIA

    C’est la création d’une entreprise d’insertion, comme il y en a eu beaucoup et dont peu ont survécus.
    Car après les investissements publiques considérables, il faut à minima une vraie rentabilité. La générosité publique n’a qu’un temps.
    En tous les cas, un bon coup de pub pour les généreux donateurs…
    A voir, dans le temps….
    Il y a tant de volontaires, refusés sur le marché de l’emploi, qui aimeraient pouvoir accéder à ce statut privilégié de salarié….
    Tout cela ne fait qu’alimenter une frustration collective, comme si un petit projet aidé par les fond publics pouvait résoudre in problème de fonds !

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  12. mrmiolito mrmiolito

    Petit point d’étape 3 mois après certains commentaires dubitatifs : l’équipe de l’Après M tient manifestement bien la baraque, on vous y demande si c’était bon à chaque visite (et on ajuste, paraît-il, les recettes)…
    Un burger vegan avec une galette de falafel faite maison a été lancé la semaine dernière… L’aventure semble tenir la route ! Une suggestion simple : allez y manger ! Et faites aussi le tour du bâtiment, pour voir la banque alimentaire qu’il soutient…
    Votre jugement en sera assurément éclairé d’une lumière nouvelle 😉

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