Le département fait payer la crise à la culture, aux sports et aux associations

Actualité
le 9 Déc 2022
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À l'abri des tensions budgétaires jusqu'ici, la collectivité cheffe de file du social et de la solidarité n'échappe plus au contexte inflationniste. Culture, sports ou encore politique de la ville en feront les frais en 2023.

Le département fait payer la crise à la culture, aux sports et aux associations
Le département fait payer la crise à la culture, aux sports et aux associations

Le département fait payer la crise à la culture, aux sports et aux associations

Sur la culture, “des propos rassurants qui ne suffisent pas à masquer la réalité des baisses de budget”, pour Gérard Frau (PCF). “Les violences faites aux femmes et les discriminations ont-elles baissé ? Je ne crois pas”, renchérit sa camarade Magali Giorgetti quand vient le budget correspondant. Sans parler du financement des centres sociaux, qui fait actuellement l’objet d’intenses tractations entre partenaires, soulignées sur les bancs de l’opposition. Au conseil départemental des Bouches-du-Rhône, l’ambiance est aux coupes budgétaires. Et la méthode habituelle de vote de la collectivité, qui fait exception localement, ne le rend que plus visible. Chaque politique est adoptée séparément, soit une quarantaine d’étapes, avec, pour chacune, une présentation du conseiller titulaire de la délégation.

Entre eux, le mot est bien passé. Prière de ne pas parler de “baisses”, mais d’un budget “contraint”. Pour l’enveloppe “vie associative”, en baisse de 11,5 %, Lionel De Cala (LR) réussit même à saluer “le maintien d’un budget important, le portant à 7,3 millions” sur cet “axe majeur” de l’action départementale…

Champs sacrifiés

Il faut attendre les critiques qui piquent au vif la vice-présidente déléguée à la culture, Nicolas Joulia, pour sortir l’élue de sa présentation lénifiante et la pousser à assumer des “choix”. Oui, on ne retrouvera par exemple en 2023 “les tournées théâtrales qu’on a jugées en doublon avec Provence en scènes, qui continue. Mais pour la lecture publique et les archives, nous avons maintenu un budget équivalent, ce sont nos compétences légales. Nous avons aussi maintenu notre engagement pour la filière musicale. Nous sommes signataires du contrat de filière depuis 2022, on se voyait mal revenir dessus dès la première année…”

L’élue istréenne (divers-gauche) défend ainsi tout haut ce que s’échinent à masquer, voire à contester d’autres collègues : un rabot quasi général sur les politiques facultatives, afin  d’encaisser le choc inflationniste sur les compétences obligatoires, des prestations sociales aux sapeurs-pompiers. “Vous ne pouvez pas faire semblant d’ignorer toutes les contraintes auxquelles sont confrontées nos collectivités, sermonne-t-elle à destination des bancs de l’opposition, peu garnis pour cette séance budgétaire. Face à cela, il y a deux attitudes : se braquer parce qu’on veut à tout prix défendre un budget comme s’il ne devait pas avoir une cohérence départementale, ou bien essayer de préserver des actions et être solidaire. Vous l’avez souligné, le département a des compétences sociales obligatoires.

Du plus connu, le RSA, aux prestations pour les personnes handicapées ou en perte d’autonomie, auxquelles s’ajoutent les prises en charge des salaires des personnels soignants, travailleurs sociaux, assistants familiaux : un vaste milliard et demi du budget départemental est dicté par des montants d’allocations, des tarifs à la journée, des barèmes de convention collective… “Nous finissons avec 96 millions d’euros de dépenses de fonctionnement supplémentaires, soit +4,1 %. Mais il faut savoir qu’en ne prenant que les dépenses supplémentaires imposées par l’État, et la conjoncture économique, avant même d’avoir pris en compte l’inflation, nous étions déjà à 115 millions d’euros”, chiffre Yves Moraine, le rapporteur général du budget.

“Éviter de toucher au cœur”

En face, le département dispose de recettes supplémentaires, qu’elles soient versées en compensation de dépenses ou qu’elles proviennent du dynamisme du marché de l’immobilier. Mais après de longues heures de débats, l’élu au budget reprend à son compte la netteté de propos jusqu’ici réservée à Nicolas Joulia. “Tout le monde a dû faire des efforts, des arbitrages et je remercie mes collègues. Car pour moi, le faire dans mon bureau avec vous, c’est facile. Pour vous, le faire sur le terrain, faire face à vos interlocuteurs concernés, c’est beaucoup plus difficile”, reconnaît-il. Pour lui, il s’agit “d’éviter de toucher au cœur”, ces politiques de solidarité qui concentrent l’attention de l’opposition. Ce faisant, il “partage le constat sur l’aggravation de la misère sociale. C’est même une menace pour l’équilibre de notre société qui ne supportera pas longtemps ce type de fracture.”

Sans convaincre. “Votre budget ne prend pas la mesure des besoins. Il manque des places d’accueils, la gestion des mineurs non accompagnés est défaillante, les agents de l’aide sociale à l’enfance sont en surcharge. Tous les voyants sont au rouge”, s’alarme Azad Kazandjian (PS). En face, les titulaires de délégations défendent pied à pied leur politique, jusqu’à Sabine Bernasconi qui réfute la “caricature” faite sur la baisse du budget de l’insertion professionnelle. “Vous savez très bien que cela s’inscrit dans le contexte de baisse du chômage et de bénéficiaires du RSA, qui a atteint 8 % pour l’année 2022, que les politiques d’insertion sont indexées sur les besoins.”

L’aide aux communes encore intouchable

À côté de ces politiques sociales, le bateau bleu amorce aussi un virage net sur l’investissement. Celui-ci est plus complexe à lire, car les dépenses de 2023 sont souvent la concrétisation de coups partis une ou plusieurs années auparavant. Les volumes peuvent aussi connaître des cahots liés à la maturité ou non de gros projets, tels qu’un nouveau collège ou une subvention pour la création d’une ligne de tramway. Toujours est-il que la réduction de la voilure est nette dans la plupart des domaines. Il s’agit, après avoir franchi le milliard d’euros de dettes en 2020, de ralentir l’envolée et de reporter la date de dépassement du second milliard.

Hors normes par rapport aux autres départements français, comme l’a montré récemment la chambre régionale des comptes, la politique d’aide aux communes fait encore office d’intouchable, avec 192 millions d’euros budgétés en 2023. Mais, même là, les premiers signes de ralentissement se font sentir. Les crédits nouveaux ouverts pour les années suivantes sont ainsi limités à 86 millions, une centaine de millions de moins que les années précédentes. À moins qu’un nouveau plan d’aides à Marseille, attendu par la majorité municipale depuis son élection en 2020, vienne compléter cette enveloppe en cours d’année ?

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Commentaires

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  1. Karo Karo

    Tiens pas de remarque sur le fait que seul le budget aide aux communes progresse et que par la la tsarine de Provence poursuit sa politique d arrosage !

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  2. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Ouf, l’essentiel est sauf : “l’aide aux communes”, alias le clientélisme, et le budget du “bel âge”, alias le clientélisme, progressent.

    D’ailleurs, je note que Marsactu reprend dans un graphique ce terme typiquement vassaloïde de “bel âge”, qui ne veut strictement rien dire.

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    • Richard Mouren Richard Mouren

      J’ai soixante-quatorze ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. Tout menace de ruine un vieil homme: l’amour, les idées, la perte de sa famille, l’entrée dans les Maisons du Bel-Age.
      (libre parodie de Paul Nizan, que le bon maître me le pardonne).

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