Kallisté, vivre en étrangère dans la galère administrative

À la une
le 21 Fév 2014
8
Kallisté, vivre en étrangère dans la galère administrative
Kallisté, vivre en étrangère dans la galère administrative

Kallisté, vivre en étrangère dans la galère administrative

Tout semble plus loin, plus long, plus éreintant lorsque l'on habite à 18 kilomètres du centre-ville. Pour Salha, cette Marseillaise habitante de la cité de Kallisté qui nous a ouvert les portes de son quotidien, courir après les administrations fait partie d'un marathon sisyphéen dont elle se serait bien passé. Et puisque tout est affaire de transports, Salha peste lorsque le bus 97 arrive en retard ce matin, alors qu'elle doit se rendre à la Caisse d'allocations familiales (CAF).

 

 

Mieux vaut prévoir suffisamment de temps si l'on veut venir à bout de la tournée des administrations : CAF, Sécurité sociale, préfecture, Marseille habitat… La liste n'est pas exhaustive.

En général, quelle que soit la nature de ton rendez-vous, qu'il s'agisse d'une visite chez le médecin ou d'un rendez-vous administratif, ça te gâche toute la journée: le temps de prendre le bus, puis d'arriver, puis de faire la queue… Mais on n'a pas le choix. Pour le renouvellement de la Sécurité sociale, il faut se déplacer une fois par an. S'il manque un papier, il faut tout recommencer.

Comme 10,3% des habitants de Kallisté, Salha et sa famille ne possèdent pas la nationalité française, ce qui complique largement les démarches. La tournée des administrations fait donc partie du quotidien de nombre de personnes de ces quartiers, contraints de renouveler leurs papiers chaque année. Pour les 14e et 15e arrondissement réunis, 12,4% de la population est étrangère.

Après un trajet à être chahutées dans le bus bondé, Salha se glisse dans la file d'attente de la CAF près de Camille-Pelletan où une dizaine de personnes attend devant elle. "On a de la chance, souvent, il faut faire la queue à l'extérieur". Il faudra tout de même supporter une heure d'attente pour obtenir cinq minutes d'attention. Une heure pendant laquelle les numéros défilent lentement sur un panneau électronique, où les regards convergent. Quand vient enfin son tour, un guichetier derrière sa caisse répond aux questions de manière laconique, affichant un léger air désabusé. Salha l'excuse : "parfois des gens dans le public s'énervent pour un rien, ça dégénère, cela crée un climat de tension".

 

 

 

Il n'y a pas si longtemps, une CAF existait à Saint-Louis, pas très loin de Kallisté. Elle a fermé, faute de budget. "Normalement, on devrait aller à la CAF située chemin de Gibbes [dans le 14e arrondissement – ndlr] mais c'est à l'autre bout du monde ! Plusieurs fois quand j'ai voulu m'y rendre, je suis arrivée à la fermeture. C'est pour cela que je viens ici même si je ne suis pas rattachée à ce secteur." Quelques années plutôt, lorsque la famille de Salha vivait à Bougainville. Au pied du métro, tout était plus accessible.

Les services publics ferment

La Sécurité sociale a elle aussi subi la rigueur budgétaire. L'antenne de Saint-Louis a définitivement baissé le rideau, "ainsi que celle de la Gavotte, plus proche de nous. On pouvait y aller à pied." Du coup, Salha comme beaucoup d'autres habitants de Kallisté est contrainte de se rendre en centre-ville pour ses papiers. "La Poste Notre-Dame-limite (15e), la plus proche de chez nous, a été fermée pendant plusieurs mois à cause d'actes de vandalisme sur un distributeur de billets. Les habitants ont cru que c'était définitif. On était vraiment embêté car on devait aller jusqu'à Saint-Antoine ou jusqu'à Septèmes-les-Vallons." Finalement, le bureau a rouvert au soulagement de tous.

Mais l'épreuve la plus redoutée reste pour Salha la préfecture qu'elle fréquente chaque année pour faire renouveler ses papiers et ceux de sa famille. "C'est une horreur, on se croirait des citoyens de seconde zone. C'est comme s'ils nous donnaient l'aumône alors que l'on paie chaque année pour obtenir ces titres de séjour. Il y a tout le temps du monde, jamais de répit, des files d'attente jusque dehors, qu'il vente ou qu'il pleuve. Je redoute le jour où je dois aller déposer un dossier de demande de renouvellement de titre de séjour."

 

 

Outre les problèmes de transports, le fait d'habiter Kallisté complique chaque démarche. Kallisté, ce quartier synonyme de manque de sérieux, voire de délinquance.

Pour les papiers et notamment le CV, on nous a appris à écrire "Kallisté" suivi du numéro de bâtiment. En ôtant le "Parc" qui effraie et rappelle qu'il s'agit d'une cité, avec seulement "Kallisté", cela peut donner l'illusion qu'il s'agit d'une résidence. Il faut tricher un peu si tu ne veux pas être systématiquement classée et mise de côté.

Après cette longue matinée, direction la bibliothèque de l'Alcazar où Salha souhaite rendre des livres et en profiter pour s'accorder un moment de distraction avec la visite de l'exposition les manuscrits de Tombouctou. Tandis qu'elle déchiffre pour un petit groupe de curieux quelques lignes des vieux extraits du Coran. Salha a déjà oublié ses tracas… jusqu'à la prochaine fois.

Cet article vous est offert par Marsactu

À vous de nous aider !

Vous seul garantissez notre indépendance

JE FAIS UN DON

Si vous avez déjà un compte, identifiez-vous.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

  1. tulipe13 tulipe13

    Je suis vraiment étonnée de ces propos : j habite notre dame limite la station après kaliste il il a tous les jour de la semaine a partir de 4 h juste 7h 4 bus un toute les 20mn puis de 7h à 10h 1 bus chaque 10mn en plus les 3 quarts des personnes qui prennent cette ligne monte et ne valide aucun ticket peut être quelle voudrait un taxi a sa disposition pour avoir droit aux prestations que lui verse la FRANCE DÉPLORABLE VOTRE ARTICLE 3IL N Y A QU A TAPER RTM NUMÉRO DE LIGNE ENSUITE PRENEZ LE 97

    Signaler
  2. fabrice fabrice

    je plains les gens qui habitent dans cette cité. on dirait une ville dans la ville, coupé du reste

    Signaler
  3. Electeur du 5 Electeur du 5

    Article un tantinet Maladroit ….

    Signaler
  4. Momo Momo

    A Marseille les transports RTM sont gratuits pour ceux qui vivent du RSA, les chômeurs indemnisés non imposables, les personnes âgées de plus de 65 ans non imposables également (pour ceux qui sont imposables ils ont demi tarif), les enfants de moins de 6 ans. Ca fait donc beaucoup de monde qui voyage gratuit. Sans parler des resquilleurs bien sûr qui sont nombreux sur certaines lignes (je prends souvent le 49 : personne composte on dirait la navette du tiers monde). Ceci dit les problèmes de bus ils sont idem pour tout le monde : aller au chemin de Gibbes quand on habite Belsunce, c’est le bout du monde aussi, et la queue à la sécu à la CAF ou la Carsat ou pour des papiers en Préfecture elle est pas plus courte pour les Français que pour les Patagons! Et pour ceux qui sont âgés ou handicapés, je peux vous dire qu’elle est parfois intenable.Beaucoup de centres sociaux ont fermé dans le centre ville obligeant les gens à des parcours du combattant pour obtenir un papier ou un renseignement. Et pour les RSA, chômeurs etc.. la bibliothèque municipale aussi est gratuite. Donc prétendre que la Ville ne fait rien au niveau de la gratuité des services me parait injustifié.

    Signaler
  5. Ali Ali

    Bon, un point positif : Salha à le temps d’aller à la bibliothèque et de surfer sur le net entre deux passages à la CAF ou à la sécu. Pour le reste, ce débat questions réponses est stérile :chacun à le droit d’avoir son opinion mais apparemment Salha supporte mal la critique. Dans ces conditions il aurait mieux valu ne pas participer à cet article qui me semble surtout très maladroit, tendancieux et propre à alimenter une xénophobie déjà bien trop présente dans notre ville.

    Signaler
  6. Fatima Fatima

    Bravo Marsactu : arriver à pondre un article aussi long avec l’histoire d’une bonne femme qui UNE FOIS PAR AN doit aller à la Préfecture régulariser sa situation pour toucher ses allocs ET EN PRENANT LE BUS par dessus le marché! quelle saga à enfoncer Games of Throne. Nous attendons la suite avec impatience. C’est quoi le prochain épisode? Salha à la plage et elle a oublié sa serviette? Salha a acheté des tomates au supermarché et elle s’est aperçue qu’il y avait des vers dedans? Je propose : Salha et ses copines se sont réunies pour prendre le thé à la menthe (sans prendre le bus, la RTM était en grève). Vite la suite, ne nous laissez pas sur notre faim et ne vous inquiétez pas : le ridicule ne tue plus.

    Signaler
  7. Anonyme Anonyme

    beaucoup de gens ignorent que la ligne sncf marseille – aix – pertuis passe par saint antoine et s’y arrête (cela pour environ 15mn du centre ville avec un ticket RTM) . prenons le temps d’étudier les ressources qui sont à notre disposition.

    Signaler
  8. salha salha

    je souhaite m’excuser auprès de tulipe13, fathia et d’autres pour ma réaction maladroite; la remarque d’un des lecteurs m’a interpellée et je reconnais qu’il est difficile d’accepter les critiques, surtout les négatives…que voulez-vous, on est méditerranéen ou on ne l’est pas, lol! j’avoue que j’ai manqué de maturité pour le coup! si dans l’article, les plaintes vous ont interpellés, il y a plein de positif dans ma vie et dans mon quartier… je n’ai pas su les mettre en valeur… mea culpa…

    Signaler

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire