“Je vais te mettre la tête dans le cul” : Yvon Berland dérape et menace un journaliste

“Je vais te mettre la tête dans le cul” : Yvon Berland dérape et menace un journaliste

C’est un fait de campagne, un accrochage comme la politique peut en connaître. Mais la teneur des échanges, leur violence, et la qualité des deux hommes lui donne un relief inédit. Correspondant des Échos à Marseille, Paul Molga a reçu des messages menaçants et insultants de la part du candidat soutenu par La République en marche, Yvon Berland. Cet accrochage fait suite à un article paru ce mardi, sur le site internet des Échos, intitulé “Municipales : à Marseille, la campagne d’En marche n’accroche pas”.

Sans être écrit au vitriol, le ton est mordant, pointant directement “un problème de casting”, dans le choix d’Yvon Berland et de ses colistiers connus. Un article qui prend la suite d’une analyse de la même teneur critique, signée du journaliste politique qui suit le parti présidentiel au sein de la rédaction nationale, Grégoire Poussièlgue. Sauf que pour l’équipe de campagne d’Yvon Berland, le ton et le fond ne passent pas. En particulier pour l’ex président de l’université Aix-Marseille.

“Dans l’après-midi, j’étais au sport, loin de mon téléphone, raconte Paul Molga. À mon arrivée dans le vestiaire, j’ai vu qu’Yvon Berland m’avait appelé douze fois. J’ai eu droit ensuite à un quart d’heure extrêmement violent qui s’est fini par des insultes et des menaces“. L’échange peu courtois s’est conclu par un échange de SMS du même tonneau que Marsactu a pu consulter.

“Je vais te mettre la tête dans le cul”

“Merci de cet article. Tu me donnes une telle énergie que je vais te mettre la tête dans le cul. Rdv le 15 et le 22”, écrit le candidat soutenu par LREM qui souligne ensuite l’absence du journaliste aux différents rendez-vous organisés par son équipe dans le cadre de la campagne.

L’un des SMS envoyés par Yvon Berland à Paul Molga. Document Marsactu.

“Article commandé”, dit-il plus loin, en référence à l’amitié connue du journaliste avec le couple formé par Sabrina Roubache, productrice et Jean-Philippe Agresti, un temps candidat à la candidature LREM, désormais tête de liste LR dans les 4e et 5e arrondissements. Yvon Berland refuse la proposition de Paul Molga d’ajouter un commentaire de sa bouche dans la version papier, publiée plus tard.

“Bien sûr que je ne veux pas par une phrase cautionner un article pourri alimenté à l’évidence (tu ne te rends pas compte que tu signales des gens inconnus ce qui prouve qu’on t’a tenu la main) (…) C’est un article dicté, c’est indigne. On se reverra crois-moi !”

Et il conclut : “Tu as parlé de moi. À moi de parler de toi. Chacun son tour”. Plutôt secoué par un tel niveau de menace, Paul Molga en informe la direction de son journal.

Selon nos informations, le délégué général du parti, Stanislas Guérini prend alors son téléphone pour joindre Paul Molga et préciser que ces SMS qu’il “n'[a] pas apprécié personnellement” ne sont pas très “représentatifs de ce que ce mouvement peut porter”. Le député et proche d’Emmanuel Macron ne cache pas sa “gêne” et insiste : “ce ne sont pas des pratiques que je cautionne”.

La charte éthique écornée

Le directeur de campagne et candidat dans le 2/3, William Elman veut minimiser l’incident : “Les deux hommes sont montés dans les tours. Ils se connaissent de longue date. Yvon n’a pas apprécié que Paul Molga ne l’ait pas appelé, ni même ne soit venu à un de nos points presse. Il s’est excusé auprès de lui. J’espère que tout va rentrer dans l’ordre”. Jusqu’à présent, le mouvement voulait mettre en avant sa démarche éthique dans la campagne, en proposant une charte “que plusieurs candidats veulent signer”, insiste William Elman.

Dans un communiqué postérieur à nos questions à son entourage, Yvon Berland exprime des regrets : “Ma réaction a assurément été à son endroit disproportionnée et je tiens dès lors à m’en excuser sincèrement”, écrit-il mettant celle-ci sur le compte d’un “sentiment d’injustice” face à l’article.

Certains dans l’équipe n’hésitent pas, sous couvert d’anonymat, à critiquer la démarche et d’abonder dans le sens des critiques formulées par le quotidien économique. Certains rappellent aussi la charte éthique que le candidat soutenu par LREM a mis en avant et proposer de signer aux autres candidats pour arrondir les angles de la campagne.

Media training en marche

Effectivement, les deux hommes se connaissent de longue date. En tant que correspondant des Échos, Paul Molga a suivi la fusion des universités, pilotée par Yvon Berland. Aix Marseille université est même devenue partenaire d’Éloquentia, le concours d’éloquence dont Paul Molga est un des animateurs en région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Les deux hommes se tutoient donc de longue date. Dans le cadre de son travail parallèle de communicant, Paul Molga a travaillé parfois pour l’université “pour la semaine de l’innovation”.

Il a également, reconnaît-il, proposé ses services de media trainer au candidat LREM, à l’issue de son premier meeting de campagne. “Je ne me cache pas. Cela fait dix ans que je fais cela auprès d’étudiants, d’entrepreneurs et d’hommes politiques. Oui, je l’ai proposé à Yvon Berland”. Il faudra ajouter un chapitre SMS à la séance “savoir communiquer avec la presse”.