“Délinquants en col blanc” : un promoteur attaque l’ex-adjointe Mathilde Chaboche en justice

Mathilde Chaboche en conseil municipal. (Photo : Emilio Guzman)

Les propos ont été pesés. En ce début d’année 2023, forte de deux ans et demi à la tête de l’urbanisme de la Ville de Marseille, Mathilde Chaboche a décidé de muscler son discours face aux atteintes à la probité. Après l’avoir esquissée en conférence de presse, elle accepte d’expliciter sa position dans les colonnes de Marsactu. Une parole forte dirigée notamment contre les “délinquants en col blanc” participant selon elle d’une culture locale des petits arrangements. “C’est par exemple le Sea one, avec une série de quatre procès-verbaux qui ont été dressés, pour des atteintes à des éléments patrimoniaux – un mur qui aurait dû être conservé – et un restaurant en rez-de-chaussée qu’on ne trouve nulle part dans le permis, mais qu’on voit sur les visuels commerciaux”, assume-t-elle alors.

Sur le moment, ces mots n’ont pas suscité de réaction officielle du promoteur Sud réa qui a construit une résidence de luxe en lieu et place de l’ancienne usine Giraudon aux Catalans. Mais, en coulisses, Hubert et Edmond Attali ne souhaitent pas s’en laisser conter. C’est pourquoi, selon nos informations, ils ont décidé d’attaquer l’élue en diffamation. Une audience dite “relais” doit se tenir vendredi 1ᵉʳ mars devant le tribunal judiciaire avant celle qui jugera du fond de l’affaire dans quelques mois. Contacté, l’avocat de Sea one, Olivier Grimaldi, n’a pas souhaité faire de commentaire.

Une élue aujourd’hui à la marge de la majorité

L’affaire se rapproche de la barre alors même que la donne politique a bien changé depuis notre interview. Mathilde Chaboche a été débarquée de l’exécutif municipal. Plusieurs raisons ont été avancées sans qu’aucune ne convainque pleinement. Signe de la défiance désormais installée entre le maire de Marseille Benoît Payan et cette co-fondatrice de Mad mars, la composante citoyenne du Printemps marseillais, Mathilde Chaboche siège désormais dans les rangs “écologistes et pluriel-s”. Régulièrement, ses prises de parole la posent en aiguillon de la majorité municipale.

“J’ai toujours assumé mon action, mes positions et mes prises de parole, indique-t-elle à Marsactu. Concernant mon propos tenu dans vos colonnes en février 2023, j’en expliquerai les raisons devant le tribunal. Respectueuse de la justice, je lui réserve évidemment la primeur de ces explications”.

L’élue, qui demandera à la Ville de payer les frais de sa défense, a toujours revendiqué avoir agi dans la droite ligne du programme municipal qui a permis à la gauche de conquérir la mairie. Quand elle fait cette sortie, elle a déjà transmis au parquet de Marseille deux procès-verbaux d’infraction aux règles de l’urbanisme dont la destruction d’un pan du mur historique du Lazaret. Elle est aussi tout à fait informée que ceux-ci ont débouché sur une enquête préliminaire toujours en cours au tribunal judiciaire de Marseille. Des démarches qu’elle mettra certainement en avant pour justifier de la véracité et de la bonne foi de ses déclarations.

Après Chaboche, la mairie se montre moins inflexible

Pour ces affaires, le promoteur bénéficie toutefois, comme tout mis en cause, de la présomption d’innocence. À l’appui de son action judiciaire contre l’élue, il pourra aussi arguer du réchauffement de ses relations avec la municipalité. Comme Marsactu l’avait révélé, après le remplacement de Mathilde Chaboche par Éric Méry, le ton municipal a changé. Quand Mathilde Chaboche avait refusé un permis de construire modificatif au promoteur, la mairie a finalement accepté la demande de médiation formulée via le tribunal administratif par le promoteur.

Ce dernier cherche notamment à obtenir la construction du futur restaurant dont Mathilde Chaboche dénonçait la présence sur les visuels commerciaux du projet. Dans l’intervalle, face à cette situation administrative compliquée, le chef étoilé Jean-François Piège qui avait projeté son Mimosa sur cet emplacement en rez-de-plage a lâché l’affaire.