Daniel Berrebi : "Notre plan pour la SNCM intègre un peu moins de 1000 personnes"

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le 2 Sep 2014
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Daniel Berrebi : "Notre plan pour la SNCM intègre un peu moins de 1000 personnes"
Daniel Berrebi : "Notre plan pour la SNCM intègre un peu moins de 1000 personnes"

Daniel Berrebi : "Notre plan pour la SNCM intègre un peu moins de 1000 personnes"

Daniel Berrebi a le sens du timing. Le jour où la SNCM réunit son conseil de surveillance et deux jours avant la décision de la cour européenne de justice sur l'un des deux contentieux qui mettent en péril l'avenir de la compagnie maritime, il a convié quelques journalistes pour parler en tête à tête de son offre de reprise. En mai dernier, la révélation de son intérêt pour la compagnie maritime avait suscité des réactions contrastées. Beaucoup ne prenant pas au sérieux les ambitions de cet homme d'affaires français vivant aux Etats-Unis. De lui et de ses affaires, on sait au final peu de choses : des études à Sup de Co puis un bref passage dans un groupe suisse avant de monter son propre business Unishipping dès 1986 puis Baja Ferries en 1994. Cette dernière exploite quatre navires au Mexique et dans les Caraïbes. Jusqu'ici, son projet pour redresser la compagnie n'avait été que brièvement présenté. Suppression de postes, réaffectation des navires, non renouvellement de la flotte, il ne manque pas d'idées. Mais avant toute chose, à ses yeux, la compagnie doit passer par le tribunal de commerce.

Où en est votre projet de reprise, évoqué en mai ?

D'un point de vue formel, il n'y a rien du tout. Tant que la société n'est pas mise en redressement judiciaire, on ne peut pas mettre fin aux demandes de remboursement de Bruxelles et donc aucune procédure de rachat ne peut être mise en place. À moins d'accepter de prendre le risque des 440 millions d'euros…

Comme l'actionnaire majoritaire Transdev, vous vous inscrivez donc dans le scénario de "discontinuité" qui mettrait fin à la SNCM telle qu'elle existe ?

C'est la seule solution, elle a déjà fait ses preuves, il y a un peu de jurisprudence dessus. Manuel Valls l'a dit au journal de TF1, Frédéric Cuvillier l'a répété, l'actionnaire aussi. Il n'y a pas d'autres solutions, il faut passer par le redressement judiciaire.

Mais pourrez-vous conserver la délégation de service public de desserte de la Corse ?

Il y a trois paramètres vis-à-vis de l'Europe [pour éviter que celle-ci ne réclame les 440 millions d'euros, ndlr]. Le nombre de personnels d'abord : notre plan intègre un peu moins de 1000 personnes [contre 1600 aujourd'hui, ndlr]. Deuxièmement le nom commercial, SNCM, on ne le reprend pas. Et enfin l'activité. On abandonne les lignes non rentables et c'était la volonté principale de Corsica Ferries qui disait « la SNCM récupère des fonds via la DSP pour nous attaquer sur Nice et Toulon ». On rentre dans le cadre demandé par Bruxelles.

Une idée de nouveau nom pour la SNCM ?

Pourquoi pas France Ferries ? Non, on n'a rien défini, c'est une boutade.

Économiquement, comment ça tient ?

On estime pouvoir ramener la compagnie à l'équilibre au bout de deux ans. En éliminant les lignes non rentables, en augmentant les parts de marché sur le Maghreb, en faisant des économies sur les frais d'entretien courants, que je trouve très élevés. Je dis bien l'entretien pas la sécurité et la qualité de service.

Vous avez aussi parlé d'"efforts" que devrait faire le personnel. C'est-à-dire ?

On va mettre le personnel de la SNCM au même niveau que le reste des Français. Tout le monde fait des efforts aujourd'hui. Si on veut redresser cette boîte et devenir compétitif, il le faudra.

Vous comptez fonctionner avec six navires, excluant toute commande de neuf. Comment ?

Deux navires, le Casanova et le Méditerranée, seraient affectés sur le Maghreb et quatre sur la DSP avec la Corse, sous pavillon français de premier registre. Le Corse doit sortir de la flotte, c'est certain, car il est trop vieux. Il faut restituer à Grimaldi l'Excelsior [qui remplace le Napoléon-Bonaparte, ndlr] car il coûte très cher et n'a pas d'utilité. Le Monte d'Oro il faut le garder tant qu'il a l'âge. La délégation de service public autorise jusqu'à 30 ans. La question du remplacement du Jean-Nicoli, trop gros pour certains ports corses, va se poser. L'idée c'est peut-être de lui substituer un navire d'occasion, de bonne qualité, pas vieux. J'ai toujours dit que j'étais contre la commande de bateaux neufs parce qu'aucune banque ne les financerait. D'ici quelques années quand on aura redressé la boîte, oui on commandera du neuf.

Votre plan mise beaucoup sur le Maghreb. Pour vous, l'avenir de la SNCM se trouve de l'autre côté de la Méditerranée ?

Il faut développer cette activité. En sortie de Marseille, la part de la SNCM est autour de 25%. Mais le point le plus important c'est que le flux de passagers vers le Maghreb se dévie fortement vers les compagnies italiennes. Si on prend l'exemple de la Tunisie, sur 720 000 passagers ferries par an, un peu moins de 150 000 viennent de France, le reste d'Italie, alors que la population tunisienne en France est six fois supérieure. Si on prend le Maroc, je ne comprends pas comment aucune compagnie française ne dessert ce pays et on a un armateur italien qui vient s'installer à Sète et prend dès la première année 170 000 passagers.

Comment comptez-vous lutter contre cette concurrence italienne, qui profite d'un pavillon international qualifié de "dumping social" par les syndicats ?

Nous avons offert d'opérer au RIF pour les lignes vers le Maghreb [registre international français, pavillon moins exigeant que celui de premier registre pour lutter contre la concurrence des pavillons dits de complaisance, ndlr]. Par décret, il a été exclu pour ses lignes passagers lors de sa création [en 2005], justement pour protéger la SNCM. Il faudra faire passer un décret, c'est assez facile à faire. Notre engagement auprès des parties prenantes est de garder certains emplois, notamment tout le personnel d'encadrement pont et machines, français.

Je n'ai pas trouvé d'avancées dans ce décret, rien qui peut aider les marins français. Toutes ces discussions d'équipages, de pavillon sont d'un ancien temps. On oublie des statistiques très importantes. Comment expliquez-vous qu'il y a 98 ferries sous pavillon italien et 31 sous pavillon français ? Il y a bien un problème. Il faut laisser les gens développer leurs affaires. N'est-il pas mieux d'avoir plus de bateaux sous pavillon français avec des marins français qualifiés aux ponts et machines et d'autres nationalités de la communauté européenne dans les métiers subalternes ? Et avec 98 ferries on emploie autant de salariés français mais avec des salaires de commandant, de chef électricien, de chef mécanicien etc. Il faut repenser la filière maritime.

Qu'en pensent les représentants du personnel ?

J'ai lu partout qu'ils n'étaient pas intéressés par nos propositions et qu'ils ne les jugeaient pas sérieuses. Nous n'avons aucun rapport avec eux pour l'instant, mais je pense que nous en aurons très bientôt.

C'est-à-dire peut-être avant la fin du moratoire, fixée fin octobre ?

Si la SNCM ne récupère pas très vite les 60 millions d'euros du Napoléon-Bonaparte, si l'État ne verse pas les 10 millions qu'il doit encore et si jeudi l'Europe confirme la demande de remboursement de 220 millions, je ne crois pas que le commissaire aux comptes va laisser continuer. Ça peut aller plus vite que prévu. On peut être au tribunal de commerce fin septembre.

Vous êtes confiants sur vos chances face à d'autres offres ?

Ça fait 11 ans que je vis aux États-Unis, la concurrence je connais. Soit notre plan est bon et le président du tribunal accepte, soit on tente de l'améliorer. Honnêtement s'il y a des mieux-disant, qu'ils se fassent connaître. Je suis certain que la Méridionale va faire une offre. Mais je ne suis pas sûr qu'elle va vouloir s'intéresser au Maghreb et développer les passagers… Cela donne une nouvelle SNCM réduite qui n'aura pas un potentiel énorme de croissance, avec 500 personnes maximum. Et cela laisse le champ libre à la Corsica Ferries voire à un armateur italien qui viendrait s'installer ici. Avoir une seule entreprise française qui se concentre sur la Corse et le fret, c'est suicidaire pour Marseille.

Après la vente du siège historique de la SNCM, la compagnie est désormais installée rue de Ruffi. La vôtre aurait-elle son siège à Marseille ?

J'étais aux Etats-Unis, je vais m'installer à Marseille et toute l'équipe va y rester. Dans notre plan, 300 personnes à terre vont garder leur emploi ici à Marseille. Quant au siège, nous ne resterions pas dans l'immeuble actuel, qui paraît démesuré. Mais il y a pas mal de constructions sur les quais de la Joliette, on peut trouver de beaux bureaux.

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Commentaires

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  1. Anonyme Anonyme

    Pour l’anecdote j’ai voyagé sur le Monte d’Oro cet été pour mon retour depuis la Corse sur le continent. On voit vraiment que ce bateau n’est plus dans le coup ( aménagements compartiments d’un autre âge, vibrations, accès au garage par des escaliers aciers très raides, très peu d’espaces de convivialité…). Nous étions un peu dégoutés de la vétusté du rafiot en comparaison du Danielle Casanova pris à l’aller. Et c’était exactement le contraire pour nos voisins de compartiment qui n’avaient jusque là connu que la Corsica Ferries et qui trouvaient ce navire plutôt agréable. C’est dire l’ambition de ce monsieur s’il veut conserver cette épave pour les rotations avec la Corse.
    De plus cet homme d’affaires se place d’emblée sous la volonté de son principal concurrent la Corsica. Bizarre.
    Mais bon comme il le dit, si Manuel Valls, son ministre ont dit que la seule solution était la procédure collective, ils doivent avoir raison… Ou pas…

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  2. Anonyme Anonyme

    Ce monsieur fait de l enfumage. Son but est seulement de récupérer les cargos mixtes pour pouvoir les affecter sur des lignes entre les USA et Cuba, dans le cadre d un allégement de l embargo américain.

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  3. Gepetto Gepetto

    Enfin quelqu’un de lucide.
    Cela aurait dû être fait il y a 10 ans

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  4. Anonyme Anonyme

    La Cour de justice de l’Union européenne a confirmé jeudi que la Société nationale Corse Méditerranée (SNCM) devait rembourser des aides d’Etat perçues par la compagnie maritime en difficulté, rejetant les recours de la France.

    La SNCM, qui assure notamment la liaison entre la Corse et le continent, est détenue à 66% par Transdev – coentreprise détenue à parité par Veolia et la Caisse des dépôts -, à 25% par l’Etat et à 9% par ses salariés. Veolia estime que le redressement judiciaire est la seule issue pour sortir la compagnie du marasme.

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  5. Tresorier Tresorier

    Tout projet est bon a prendre. Est il serieux ????

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  6. Anonyme Anonyme

    LA VÉRITÉ SI JE MENS
    Comment peut ont croire à de telles blagues? Il s’agit, ni plus ni moins, de récupérer les cargos pour les revendre. Cela c’est pour la partie “affaire”. Pour le reste, il n’est pas étonnant l’alignement sur les positions de Corsica Ferries est la preuve de la forfaiture. Pour comprendre la manœuvre, une précision s’impose. Le plan prévu par une partie de l’État et par la Collectivité Territoriale de Corse (CTC) est le suivant: conserver un service public subventionné sur les lignes entre Marseille et la Corse avec des cargos mixte (Fret-passagers). Dans ce cas une partie du service sera effectué par La Méridionale (CMN) et l’autre par une future “compagnie régionale” qui aurait un statut de SEM (Société d’Économie Mixte). L’opérateur de cette SEM serait… La Méridionale. Dans ce scénario, la CMN gère la totalité du service public, directement et indirectement. Quel est le rôle de “Baja Ferries” dans cette affaire. Gagner des sous sur la revente des cargos, bien sur, mais surtout empêcher La Méridionale de se retrouver à la tête d’une grosse compagnie de cargos qui transporte des passagers et qui touche une subvention. La Corsica Ferries craint ce scénario d’un grand groupe coté en bourse* face à elle qui accumule pertes et faibles taux de remplissage, avec de lourds investissements qu’il faut amortir.
    D’où l’arrivée d’une “franco-américain” comme on attend l’oncle d’Amérique. C’est bien de l’enfumage.
    Une chose est sure, rien n’aura été épargné à la SNCM. Ni le sabotage de l’État, ni les manœuvres des vautours. Dire que tout cela était écrit depuis de nombreuses années. Pour vous en convaincre, vous pouvez lire le dossier suivant:
    http://www.amnistia.net/wp-content/uploads/2013/10/dosmaritime-1.pdf
    *La Méridionale appartient au premier groupe frigoriste européen, STEF. Coté en bourse, le groupe se porte bien et mieux que Corsica.
    Le PDG de STEF a tout fait pour empêcher un véritable armateur de reprendre la SNCM, lors de sa privatisation en 2006.Pour comprendre la méthode, vous pouvez lire:
    http://alainverdi.tumblr.com/post/70088839244/sncm-privatisation-corse-marseille-paris-bruxelles

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  7. savon de marseille savon de marseille

    C’est pas tout çà .. mais il faut fermer le magasin , c’est déjà tard.
    LA VERITE SI JE MENS, demain c’est un peu le début des soldes, faut se lever de bonne heure, car y a des affaires : gros – demi-Gros – et détail !

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